Lexbase Public n°287 du 1 mai 2013

Lexbase Public - Édition n°287

Collectivités territoriales

[Brèves] Constitutionnalité des dispositions législatives relatives à l'intégration d'une commune dans un EPCI à fiscalité propre

Réf. : Cons. const., trois décisions du 26 avril 2013, n° 2013-304 QPC (N° Lexbase : A6249KCG), n° 2013-303 QPC (N° Lexbase : A6248KCE) et n° 2013-315 QPC (N° Lexbase : A6252KCK)

Lecture: 2 min

N6922BTK

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Le 03 Mai 2013

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 30 janvier et le 8 mars 2013, par le Conseil d'Etat, de trois questions prioritaires de constitutionnalité relatives à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des paragraphes II et III de l'article 60 de la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010, de réforme des collectivités territoriales (N° Lexbase : L9056INQ), et de l'article L. 5211-19 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L0872IPY). L'article L. 5211-19 est relatif aux conditions de retrait d'une commune d'un établissement public de coopération intercommunale (EPCI). Les paragraphes II et III de la loi du 16 décembre 2010 traitent respectivement de la modification du périmètre des EPCI et de la fusion d'EPCI. Ils prévoient, notamment, un mécanisme transitoire et dérogatoire jusqu'au 1er juin 2013. Dans sa décision n° 2013-304 QPC (Cons. const., décision n° 2013-304 QPC du 26 avril 2013 N° Lexbase : A6249KCG), le Conseil constitutionnel a jugé conforme à la Constitution l'article L. 5211-19. Cet article subordonne le retrait d'une commune d'un EPCI à l'accord de l'organe délibérant de l'établissement public et des conseils municipaux des communes intéressées, ce qui affecte la libre administration de la commune qui souhaite se retirer. Cependant, le législateur a entendu éviter que le retrait d'une commune ne compromette le fonctionnement et la stabilité d'un tel établissement, ainsi que la cohérence des coopérations intercommunales. Le Conseil constitutionnel a jugé que le législateur a pu, dans ces buts d'intérêt général, apporter ces limitations à la libre administration des communes. Dans ses décisions n° 2013-303 QPC (Cons. const., décision n° 2013-303 QPC du 26 avril 2013 N° Lexbase : A6248KCE) et n° 2013-315 QPC (Cons. const., décision n° 2013-315 QPC du 26 avril 2013 N° Lexbase : A6252KCK), le Conseil constitutionnel a examiné respectivement les paragraphes II et III de l'article 60 de la loi du 16 décembre 2010, de réforme des collectivités territoriales. Ces dispositions prévoient une procédure relative à la modification du périmètre d'un EPCI à fiscalité propre ou à la fusion d'EPCI dont l'un au moins est à fiscalité propre. Il a relevé que le législateur a entendu favoriser l'achèvement et la rationalisation de la carte de l'intercommunalité, ainsi que le renforcement de l'intercommunalité à fiscalité propre. Le Conseil a jugé que, dans ces buts d'intérêt général, le législateur avait pu apporter des limitations à la libre administration des collectivités territoriales.

newsid:436922

Délégation de service public

[Brèves] La rémunération du cocontractant substantiellement liée aux résultats de l'exploitation identifie la délégation de service public

Réf. : CAA Lyon, 4ème ch., 18 avril 2013, n° 12LY01547, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A8594KCB)

Lecture: 2 min

N6924BTM

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Le 15 Mai 2013

La rémunération du cocontractant substantiellement liée aux résultats de l'exploitation identifie la délégation de service public, énonce la cour administrative d'appel de Lyon dans un arrêt rendu le 18 avril 2013 (CAA Lyon, 4ème ch., 18 avril 2013, n° 12LY01547, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A8594KCB). Le jugement attaqué a annulé les délibérations par lesquelles un conseil municipal a, d'une part, confié la gestion de la piscine à une association et, d'autre part, décidé d'accorder une subvention d'un montant de 110 000 euros à cette association. Après avoir rappelé les termes de l'article L. 1411-1 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L0551IGI), la cour indique que, lorsque des collectivités publiques sont responsables d'un service public, elles peuvent, dès lors que la nature de ce service n'y fait pas, par elle-même, obstacle, décider de confier sa gestion à un tiers. A cette fin, elles doivent, en principe, conclure avec un opérateur, quel que soit son statut juridique et alors même qu'elles l'auraient créé ou auraient contribué à sa création, ou encore qu'elles en seraient membres, associés ou actionnaires, un contrat de délégation de service public ou, si la rémunération de leur cocontractant n'est pas substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service, un marché public de services. Elles peuvent, toutefois, ne pas passer un tel contrat lorsque, eu égard à la nature de l'activité en cause et aux conditions particulières dans lesquelles il l'exerce, le tiers auquel elles s'adressent ne saurait être regardé comme un opérateur sur un marché concurrentiel. Or, il ressort du budget prévisionnel de la gestion de la piscine pour l'exercice 2009/2010, que l'association comptait tirer de cette activité un produit hors subvention de 130 000 euros. Ainsi, et quand bien même la convention de subventionnement et d'objectifs prévoyait que les recettes n'avaient pas pour objet de rémunérer l'association, mais de permettre un équilibre comptable de sa situation, elle devait percevoir une rémunération pour son activité. Si les produits escomptés incluaient, également, une subvention annuelle de 110 000 euros, qui a finalement été étalée sur deux années, la rémunération de l'association n'en était pas moins substantiellement liée aux résultats de son exploitation. Dès lors, la délibération en litige qui a autorisé le maire à signer la convention de subventionnement et d'objectifs a décidé de confier une délégation de service public à l'association. Faute de mise en oeuvre d'une procédure préalable de publicité et de mise en concurrence, cette délibération a méconnu les dispositions de l'article L. 1411-1 précité. Le jugement attaqué a donc pu, à bon droit, annuler la délibération autorisant l'association à ouvrir la piscine dans le but de l'exploiter et décidant de conclure, à cet effet, une convention d'objectif.

newsid:436924

Domaine public

[Questions à...] Le Conseil d'Etat précise l'appartenance de biens au domaine public sur le fondement de la théorie du domaine public virtuel - Questions à Christophe Fardet, Professeur de droit public à la Faculté de droit de Nancy

Réf. : CE 3° et 8° s-s-r., 8 avril 2013, n° 363738, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A7216KBU)

Lecture: 6 min

N6881BTZ

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par Yann Le Foll, Rédacteur en chef de Lexbase Hebdo - édition publique

Le 01 Mai 2013

Dans une décision rendue le 8 avril 2013, le Conseil d'Etat est venu préciser les conditions de soumission au régime de la domanialité publique d'un bien dont l'aménagement spécial est projeté de manière certaine, mais non encore réalisé. La Haute juridiction estime ici que les effets produits par la théorie de la domanialité publique virtuelle, selon laquelle un bien pouvait désormais se voir appliquer les règles de la domanialité publique, dès lors qu'il était prévu de manière certaine qu'il allait être affecté à l'usage direct du public ou à un service public moyennant des aménagements spéciaux, avant l'entrée en vigueur du Code général de la propriété des personnes publiques en 2006, perdurent après son entrée en vigueur. Cette dernière n'a donc pu, en elle-même, entraîner déclassement d'un bien qui, par application de la domanialité publique virtuelle, appartenait au domaine public, illustrant, ainsi, qu'il ne saurait y avoir déclassement d'une dépendance du domaine publique sans décision expresse d'y procéder. Ce faisant, il apporte d'utiles précisions quant à l'appartenance de biens au domaine public sur le fondement de la théorie du domaine public virtuel. Pour faire le point sur cette décision, Lexbase Hebdo - édition publique a rencontré Christophe Fardet, Professeur de droit public à l'Université de Nancy. Lexbase : Quelles modifications de la définition du domaine public sont intervenues depuis 2006 et de quelle manière la jurisprudence a-t-elle opéré la délimitation du domaine public, au regard, notamment, du critère de l'aménagement spécial ?

Christophe Fardet : La caractéristique, peut-être la plus remarquable, du Code général de la propriété des personnes publiques, est de codifier le droit des propriétés publiques non pas à droit constant, mais à droit nouveau. C'est ainsi que ce code, en son article L. 2111-1 (N° Lexbase : L4505IQW), a modifié les conditions générales d'incorporation des biens publics, pour autant qu'ils appartiennent à une personne publique qui lui est soumise, dans le domaine public.

Sur deux points, le changement est notable.

D'une part, le Code général de la propriété des personnes publiques a changé le critère de l'aménagement spécial par celui, plus restrictif, de l'aménagement indispensable. En effet, dès 1956 avec l'arrêt "Le Béton" (1), le juge administratif avait souhaité limiter l'incorporation au domaine public des biens publics affectés à un service public par le critère de l'aménagement spécial. Toutefois, la jurisprudence ultérieure l'a toujours conçu d'une manière extensive (2). Constatant que ce critère ne jouait pas son rôle de facteur réducteur du domaine public, le Code général de la propriété des personnes publiques l'a limité à son seul caractère indispensable, partant du principe que tout ce qui est spécial n'est par, pour autant, indispensable à l'affectation du bien. Désormais, les biens publics affectés à un service public devraient être plus difficilement incorporés au domaine public.

D'autre part, le Code général de la propriété des personnes publiques a souhaité revenir sur la théorie du domaine public virtuel. Consacrée en 1985 avec l'arrêt "Eurolat" (3), celle-ci permettait de soumettre aux règles de la domanialité publique un bien avant que les conditions de son incorporation au domaine public ne fussent effectivement réalisées : il était ainsi protégé, par anticipation, de toute aliénation ou prescription. Ce code a voulu rompre avec cela, ainsi que le rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2006-460 du 21 avril 2006, créant le Code général de la propriété des personnes publiques (N° Lexbase : L3736HI9), l'expose nettement : "c'est désormais la réalisation certaine et effective d'un aménagement indispensable pour concrétiser l'affectation d'un immeuble au service public, qui déterminera de façon objective l'application à ce bien du régime de la domanialité publique. De la sorte, cette définition prive d'effet la théorie de la domanialité publique virtuelle".

En considérant que l'article L. 2111-1 du Code général de la propriété des personnes publiques "exige, pour qu'un bien affecté au service public constitue une dépendance du domaine public, que ce bien fasse déjà l'objet d'un aménagement indispensable à l'exécution des missions de ce service public", le Conseil d'Etat affirme clairement que, sous l'empire du code, il n'est plus possible de constituer le domaine public en application de la théorie du domaine public virtuel et que, pour qu'il puisse relever du domaine public, le bien doit déjà faire l'objet d'un aménagement indispensable.

Désormais, quand bien même une personne publique aurait "prévu de manière certaine de réaliser les aménagements nécessaires", le bien dont l'affectation est ainsi conditionnée ne peut plus relever du domaine public depuis l'entrée en vigueur du Code général de la propriété des personnes publiques. Le Conseil d'Etat retient là une conception matérielle de l'effectivité de l'aménagement, et non plus une conception exclusivement juridique. Il ne suffit plus qu'il soit juridiquement prévu, il faut que le bien en fasse effectivement l'objet.

Cela ne lève pas, pour autant, toutes les interrogations : l'aménagement doit-il être matériellement commencé ou terminé pour que la condition d'incorporation au domaine public joue ? Dans l'hypothèse d'un travail exécuté dans le cadre d'un marché public, faut-il attendre la réception des travaux pour que la condition soit réalisée ? Si la condition de l'aménagement indispensable n'a pas à attendre sa réalisation effective complète pour permettre l'incorporation du bien au domaine public, quel est le stade d'exécution matérielle à partir duquel le bien est considéré comme "faisant déjà l'objet" de l'aménagement ?

En réalité, cette dernière option doit être écartée tant elle ne répond à aucun critère prévisible. Seule demeure l'alternative suivante : soit le commencement d'exécution matérielle de l'aménagement permet de considérer que le bien fait "déjà l'objet" de l'aménagement, soit l'on considère que l'aménagement indispensable n'existe qu'au seuil de sa réalisation complète. C'est au juge qu'il reviendra de préciser cela. Toutefois, si l'on considère que le statut domanial public a pour objet premier de protéger l'affectation, il n'est pas déraisonnable de militer pour la première branche de l'alternative qui, seule, concilie l'effectivité de l'aménagement et la protection de l'affectation.

Lexbase : Comment situer cet arrêt par rapport à la décision "Commune de Port-Vendres" du 3 octobre 2012 (4) ?

Christophe Fardet : Si le Code général de la propriété des personnes publiques s'impose après son entrée en vigueur le 1er juillet 2006, qu'en est-il des situations constituées avant cette date et que l'on constate à cette date ? C'est en répondant à cette question que l'arrêt du 8 avril 2013 s'inscrit dans la jurisprudence "Commune de Port-Vendres" du 3 octobre 2012 et la prolonge.

Rappelons que, par son arrêt "Commune de Port-Vendres", le Conseil d'Etat a généralement considéré que, si ce code posait des conditions nouvelles pour l'incorporation d'un bien au domaine public, ce régime n'était pas rétroactif. Autrement dit, le domaine public constitué avant le 1er juillet 2006 demeure, sauf à procéder au déclassement du bien selon les dispositions prévues par le Code général de la propriété des personnes publiques. Il n'y a donc pas, "en l'absence de toute disposition en ce sens", d'abrogation implicite générale du statut domanial public des biens antérieurs au Code général de la propriété des personnes publiques, quand bien même les conditions pour intégrer le domaine public ne seraient plus les mêmes. Seul un déclassement exprès permet la sortie du bien du domaine public.

Si cette jurisprudence vaut généralement, qu'en est-il spécialement des biens intégrés au domaine public sur le fondement de la théorie du domaine public virtuel ? C'est à cette question spécifique que répond l'arrêt du 8 avril 2013, lequel s'inscrit totalement dans la jurisprudence "Commune de Port-Vendres" en l'appliquant au domaine public virtuel. Au regard du statut domanial d'un bien au 1er juillet 2006, le fondement de son incorporation dans le domaine public est sans conséquence. Peu importe qu'à cette date, le bien soit dans le domaine public au titre de l'ancienne définition jurisprudentielle, au titre d'une ancienne définition spéciale (par exemple, l'ordonnance de Colbert d'août 1681) ou encore au titre de la théorie du domaine public virtuel. Seule compte, au 1er juillet 2006, l'appartenance, ou non, d'un bien au domaine public.

Cela signifie que, dans le cadre de la définition générale du domaine public, le Conseil d'Etat estime que le Code général de la propriété des personnes publiques n'a modifié que les critères d'incorporation au domaine public, et non la consistance même du domaine public : en conséquence, au 1er juillet 2006, si les anciens critères meurent, la consistance demeure. Pour tous les biens relevant du domaine public constatés au 1er juillet 2006 (c'est-à-dire constitués antérieurement), seuls les anciens critères -jurisprudentiels ou non- sont opérants. C'est donc le droit en vigueur au moment de l'appartenance au domaine public qui régit les critères de l'incorporation.

Ainsi donc, s'il n'est plus possible, depuis l'entrée en vigueur du Code général de la propriété des personnes publiques, de constituer le domaine public sur le fondement de la théorie du domaine public virtuel, il est encore possible de le constater sur le fondement de cette théorie.

Lexbase : Au final, cet arrêt ne pose-t-il pas un principe trop favorable à la puissance publique vis-à-vis des particuliers ?

Christophe Fardet : Le principe posé par le Conseil d'Etat dans l'arrêt "Commune de Port-Vendres", et dont l'arrêt du 8 avril 2013 n'est que le prolongement logique, n'est pas, en soi, favorable à la puissance publique ou au contraire aux particuliers. A la réflexion, la critique, de ce point de vue, devrait se situer sur un autre terrain.

D'une part, et l'arrêt "Eurolat" de 1985 en est l'exemple topique, la théorie du domaine public virtuel a d'abord été défavorable aux personnes publiques en leur interdisant de valoriser bon nombre de parcelles domaniales : c'est pourquoi le législateur est intervenu dès 1988 pour permettre la constitution de droits réels sur certains biens publics.

D'autre part, c'est la théorie du domaine public virtuel qui pose problème à raison de l'incertitude qu'elle fait peser sur le statut domanial du bien, avant comme après l'entrée en vigueur du Code général de la propriété des personnes publiques. Aussi bien, mais le Conseil d'Etat n'a pas choisi cette voie, aurait-il été souhaitable de revenir sur la jurisprudence "Eurolat", seule solution à même d'exclure définitivement des conditions d'incorporation au domaine public la théorie du domaine public virtuel.


(1) CE Sect., 19 oct. 1956, n° 20180, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A3283B84), Rec. p. 375.
(2) CE Ass., 11 mai 1959, Dauphin, Rec. p. 294 : une simple chaîne constitue l'aménagement spécial d'une promenade publique.
(3) CE 2° et 6° s-s-r., 6 mai 1985, n° 41589, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A3186AMX), Rec. p. 141.
(4) CE 2° et 7° s-s-r., 3 octobre 2012, n° 353915, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A8164ITK).

newsid:436881

Environnement

[Brèves] Transmission d'une QPC au Conseil d'Etat dans les dossiers relatifs au gaz de schiste

Réf. : TA Cergy-Pontoise, 19 mars 2013, n° 1202504 (N° Lexbase : A5606KCM)

Lecture: 1 min

N6927BTQ

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Le 16 Mai 2013

Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, par une ordonnance du 19 mars 2013, a adressé au Conseil d'Etat une question prioritaire de constitutionnalité posée dans le cadre de requêtes relatives à l'abrogation de permis exclusifs de recherche de mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux (TA Cergy-Pontoise, 19 mars 2013, n° 1202504 N° Lexbase : A5606KCM). Le Conseil d'Etat a, ainsi, été saisi de la question de la conformité à la Constitution des articles 1 et 3 de la loi n° 2011-835 du 13 juillet 2011, visant à interdire l'exploration et l'exploitation des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique et à abroger les permis exclusifs de recherches comportant des projets ayant recours à cette technique (N° Lexbase : L7619IQA). Le tribunal administratif a, en effet, considéré, après une procédure contradictoire, d'une part, que cette loi était applicable aux litiges intentés devant lui, d'autre part, que les articles 1 et 3 de cette loi n'avaient pas déjà été déclarés conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel et, enfin, que la question de la constitutionnalité de ces articles au regard de la charte de l'environnement et des articles 16 (N° Lexbase : L1363A9D) et 17 (N° Lexbase : L1364A9E) de la Déclaration des droits de l'Homme n'était pas dépourvue de caractère sérieux. Le tribunal a sursis à statuer sur les deux requêtes dans lesquelles cette question était soulevée, dans l'attente de la réponse du Conseil d'Etat. Si ce dernier estime que la question est sérieuse, elle sera transmise au Conseil Constitutionnel dont il conviendra d'attendre la réponse avant de trancher les litiges.

newsid:436927

Fonction publique

[Brèves] Modification de la procédure d'élaboration du projet professionnel des militaires de carrière souhaitant bénéficier d'une indemnité d'accompagnement de reconversion

Réf. : Décret n° 2013-352 du 24 avril 2013 (N° Lexbase : L6880IWQ)

Lecture: 1 min

N6929BTS

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Le 08 Mai 2013

Le décret n° 2013-352 du 24 avril 2013 (N° Lexbase : L6880IWQ), modifiant le décret n° 2005-764 du 8 juillet 2005, portant attribution d'une indemnité d'accompagnement de la reconversion (N° Lexbase : L7796G9M), a été publié au Journal officiel du 26 avril 2013. Il modifie la procédure d'élaboration du projet professionnel des militaires de carrière, promus en application du IV de l'article 89 de la loi n° 2005-270 du 24 mars 2005, portant statut général des militaires (N° Lexbase : L1292G8D), dont la date de départ à la retraite a été fixée et qui souhaitent bénéficier, avant leur radiation des cadres, d'une indemnité d'accompagnement de reconversion. Le projet professionnel, qui doit être agréé par le ministère de la Défense, sera élaboré par l'intéressé en collaboration avec ses services chargés de la reconversion des militaires, et non plus avec un organisme lui-même agréé par ce ministère.

newsid:436929

Fonction publique

[Brèves] Règles applicables au sein des ministères chargés des Affaires sociales et du ministère chargé de la Jeunesse et des Sports pour l'organisation des recrutements réservés

Réf. : Décret n° 2013-351 du 24 avril 2013 (N° Lexbase : L6881IWR)

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N6932BTW

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Le 09 Mai 2013

Le décret n° 2013-351 du 24 avril 2013 (N° Lexbase : L6881IWR), relatif à l'ouverture des recrutements réservés pour l'accès à certains corps de fonctionnaires de l'Etat des catégories A, B et C relevant des ministres chargés des Affaires sociales et du ministre chargé de la Jeunesse et des Sports, en application de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012, relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique (N° Lexbase : L3774ISL), a été publié au Journal officiel du 26 avril 2013. Il détermine les conditions dans lesquelles les agents remplissant les conditions fixées par la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 pour se présenter aux recrutements réservés prévus à l'article 1er de cette loi pourront accéder à un corps de fonctionnaires relevant des ministres chargés des Affaires sociales ou du ministre chargé de la Jeunesse et des Sports. Il fixe la liste des corps et grades ouverts aux recrutements réservés, le mode d'accès à chacun de ces grades, ainsi que les lieux d'affectation des personnels pouvant être candidats à ces recrutements. Il précise, également, que les candidats aux concours réservés pour l'accès aux grades de médecin inspecteur de santé publique et de pharmacien inspecteur de santé publique doivent être titulaires des diplômes exigés par les statuts particuliers de ces corps pour exercer ces professions. Enfin, le texte prévoit que les candidats aux concours réservés pour l'accès au grade d'infirmier de classe normale de l'Etat doivent être titulaires d'un titre ou diplôme ou détenir une autorisation leur permettant d'exercer la profession d'infirmier.

newsid:436932

Fonction publique

[Brèves] L'employeur auprès duquel le fonctionnaire est détaché a la charge des cotisations

Réf. : Cass. soc., 23 avril 2013, n° 12-12.411, FS-P+B (N° Lexbase : A6876KCN)

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N6936BT3

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Le 04 Mai 2013

L'employeur auprès duquel le fonctionnaire est détaché a la charge des cotisations, énonce la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 23 avril 2013 (Cass. soc., 23 avril 2013, n° 12-12.411, FS-P+B N° Lexbase : A6876KCN). M. X, sous-préfet hors classe, a été engagé le 18 octobre 2006 par la société X, et détaché à cette fin le 25 octobre 2006, pour remplir une mission d'intérêt public à l'étranger, dans le cadre d'un appel d'offre financé par la Commission européenne. Il a été licencié par lettre du 6 septembre 2007, l'employeur lui reprochant d'avoir continué à utiliser le titre de sous-préfet hors classe. Pour condamner le salarié à rembourser à l'employeur les cotisations liées à son statut de fonctionnaire acquittées pour son compte et en ses lieu et place, l'arrêt attaqué retient que le salarié était personnellement redevable desdites cotisations et que son contrat individuel de travail prévoyait expressément qu'il ferait son affaire personnelle de toute cotisation, de quelque nature que ce soit, susceptible d'être due pendant la durée de son détachement à raison de sa situation de fonctionnaire détaché. La Cour suprême rappelle, cependant, que la contribution de l'employeur pour la constitution des droits à pension reste exclusivement à sa charge, toute convention contraire étant nulle de plein droit. En statuant comme elle l'a fait, alors que la clause contractuelle était nulle en ce qu'elle prévoyait la prise en charge par le salarié de la contribution dont était redevable l'employeur envers le Trésor, la cour d'appel a donc violé les articles 31 du décret n° 85-986 du 16 septembre 1985, relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'Etat, à la mise à disposition, à l'intégration et à la cessation définitive de fonctions (N° Lexbase : L1022G8D), L. 61 du Code des pensions civiles et militaires de l'Etat (N° Lexbase : L3095INX), ensemble l'article L. 241-8 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L4944ADH) (cf. l’Ouvrage "Fonction publique" N° Lexbase : E9523EPE).

newsid:436936

Fonction publique

[Brèves] Modifications des modalités d'attribution des concessions de logement pour nécessité absolue de service pour certains fonctionnaires de la fonction publique hospitalière

Réf. : Décret n° 2013-347 du 23 avril 2013 (N° Lexbase : L6799IWQ)

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N6882BT3

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Le 01 Mai 2013

Le décret n° 2013-347 du 23 avril 2013 (N° Lexbase : L6799IWQ), modifiant le décret n° 2010-30 du 8 janvier 2010 (N° Lexbase : L3218IGB), pris en application de l'article 77 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière (N° Lexbase : L8100AG4), a été publié au Journal officiel du 25 avril 2013. Le décret du 8 janvier 2010 énonce que les fonctionnaires occupant les emplois dont le statut est prévu par le décret n° 2005-921 du 2 août 2005 (N° Lexbase : L1237HBG), ou appartenant au corps dont le statut est fixé par le décret n° 2007-1930 du 26 décembre 2007 susvisé (N° Lexbase : L6982H3Y), bénéficient de concessions de logement par nécessité absolue de service. Ces concessions comportent, d'une part, la gratuité du logement nu dépourvu de biens meubles et, d'autre part, la fourniture à titre gratuit de l'électricité, du chauffage, du gaz et de l'eau, à l'exclusion de toute autre prestation qui fait l'objet d'un remboursement, à la valeur réelle, à l'établissement concerné. Le décret du 23 avril 2013 prévoit que pourront, dorénavant, bénéficier d'un logement pour nécessité absolue de service : les directeurs des soins, dans les mêmes conditions que les autres personnels de direction (la condition tenant au nombre minimum de gardes annuelles à effectuer étant supprimée) ; certains administrateurs provisoires ; et certains personnels ouvriers et cadres techniques de l'Assistance publique-hôpitaux de Paris, afin d'assurer les gardes techniques opérationnelles.

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Habitat-Logement

[Jurisprudence] L'exercice par le préfet du droit de préemption des communes ayant méconnu leurs engagements de réalisation de logements sociaux est conforme à la Constitution

Réf. : Cons. const., décision n° 2013-309 QPC, du 26 avril 2013 (N° Lexbase : A6251KCI)

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N6890BTD

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par Yann Le Foll, Rédacteur en chef de Lexbase Hebdo - édition publique

Le 01 Mai 2013

Dans une décision rendue le 26 avril 2013, le Conseil constitutionnel, après renvoi du Conseil d'Etat (CE 1° et 6° s-s-r., 13 février 2013, n° 364159, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A7904I7U), est venu indiquer que l'exercice, par le préfet, du droit de préemption des communes ayant méconnu leurs engagements de réalisation de logements sociaux est conforme à la Constitution. Il était saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité relative au deuxième alinéa de l'article L. 210-1 du Code de l'urbanisme (N° Lexbase : L9954IPD), lequel énonce que "les biens acquis par exercice du droit de préemption [exercé par le représentant de l'Etat dans le département] doivent être utilisés en vue de la réalisation d'opérations d'aménagement ou de construction permettant la réalisation des objectifs fixés dans le programme local de l'habitat [...]". En effet, les communes dépassant certains seuils démographiques ont des obligations en matière de construction et de réalisation de logements locatifs sociaux. Lorsqu'elles ne respectent pas ces obligations, une procédure de constat de carence peut être engagée à leur encontre, ce qui enclenche cette procédure de préemption. Les Sages ont estimé que le pouvoir de substitution ainsi conféré au préfet pour exercer le droit de préemption en lieu et place de la commune, en vue de la construction ou de la réalisation de logements sociaux, ne porte pas une atteinte disproportionnée à la libre administration des collectivités territoriales. Ils ont donc déclaré le deuxième alinéa de l'article L. 210-1 du Code de l'urbanisme conforme à la Constitution. I - Rappelons que la libre administration des collectivités territoriales est un principe de valeur constitutionnelle défendu, à ce titre, par la rue de Montpensier (Cons. const., décision n° 83-168 DC du 20 janvier 1984 N° Lexbase : A8087ACI), et dont la méconnaissance peut être sanctionnée dans le cadre de la procédure de la QPC (Cons. const., décision n° 2010-12 QPC du 2 juillet 2010 N° Lexbase : A5938E3C). Elle suppose l'existence d'un conseil élu (Cons. const., décision n° 82-149 DC du 28 décembre 1982 N° Lexbase : A8051AC8), l'existence d'attributions effectives (Cons. const., décision n° 85-196 DC du 8 août 1985 N° Lexbase : A8115ACK), l'autonomie financière (Cons. const., décisions n° 2004-500 DC du 29 juillet 2004 N° Lexbase : A1349DDC et n° 90-277 DC du 25 juillet 1990 N° Lexbase : A8225ACM) et la liberté contractuelle (Cons. const., décision n° 2006-543 DC du 30 novembre 2006 N° Lexbase : A7578DSH). Le Conseil a, par ailleurs, déjà jugé que l'instauration d'un pouvoir de substitution du préfet n'était pas contraire à la libre administration des collectivités territoriales en matière de blocage des organes décisionnels locaux (Cons. const., décision n° 2007-559 DC du 6 décembre 2007 N° Lexbase : A9924DZL) (1).

Les dispositions contestées ont déjà fait l'objet d'une première QPC posée devant les juridictions administratives et que le Conseil d'Etat avait refusé de renvoyer au Conseil constitutionnel, au motif que les dispositions n'étaient pas applicables au litige (CE 1° et 6° s-s-r., 23 juillet 2012, n° 359934, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A0698ISN). En outre, dans une décision rendue le 7 décembre 2000 (Cons. const., décision n° 2000-436 DC N° Lexbase : A1727AIS), les Sages avaient censuré, en raison de son automaticité, le dispositif de sanction institué par la loi "SRU" (loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000, relative à la solidarité et au renouvellement urbains N° Lexbase : L9087ARY) à l'encontre des communes n'ayant pas réalisé l'objectif triennal de création de logements sociaux. En revanche, les Sages avaient validé l'article 16 la loi relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social (loi n° 2013-61 du 18 janvier 2013 N° Lexbase : L0425IWN), relatif à la procédure pouvant conduire à un prélèvement majoré pesant sur les communes n'ayant pas atteint leur objectif de réalisation du nombre de logements sociaux. Ils avaient estimé que ces dispositions ont pour but de mettre en oeuvre l'objectif de mixité sociale et d'accroissement de la production de logements locatifs sociaux et répondent, ainsi, à une fin d'intérêt général et ne sont pas manifestement inappropriées à l'objectif poursuivi (Cons. const., décision n° 2012-660 DC, du 17 janvier 2013 N° Lexbase : A2953I3R).

La Haute juridiction administrative a déjà rappelé qu'il résulte de l'article L. 210-1 du Code de l'urbanisme que la mise en oeuvre du droit de préemption urbain doit, eu égard notamment aux caractéristiques du bien faisant l'objet de l'opération ou au coût prévisible de cette dernière, répondre tant aux finalités mentionnées à l'article L. 300-1 du même code (N° Lexbase : L4059ICC) qu'à un intérêt général suffisant (CE 1° et 6° s-s-r., 7 janvier 2013, n° 357230, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A7386IZL). De manière générale, le juge de l'excès de pouvoir vérifie si le projet d'action ou d'opération envisagé par le titulaire du droit de préemption est de nature à justifier légalement l'exercice de ce droit (CE 1° et 6° s-s-r., 6 juin 2012, n° 342328, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A4023INC). Le juge administratif a précisé que ces dispositions ont bien institué des garanties suffisantes à la protection du droit de propriété et de la liberté contractuelle et, dès lors, ne méconnaissent pas la compétence que le législateur tient de l'article 34 de la Constitution (N° Lexbase : L0860AHC) pour déterminer les principes fondamentaux du régime de la propriété, des droits réels et des obligations civiles et commerciales (CE 1° et 6° s-s-r., 12 septembre 2011, n° 347444, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A7584HX8).

Ces objectifs sont formulés de manière suffisamment générale pour laisser une certaine marge d'appréciation aux collectivités. Il peut s'agir de la mise en oeuvre d'un projet urbain tel que la rénovation des rues d'un quartier ou de la mise en oeuvre d'une politique locale de l'habitat destinée à maintenir la population sur place. Le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques constituent un objectif fréquemment invoqué : la création d'un pôle d'attraction industriel et commercial peut justifier l'exercice du droit de préemption (CE 2° et 10° s-s-r., 31 mars 1989, n° 88113, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A1918AQ4). Le développement du loisir et du tourisme et la création d'équipements collectifs figurent, également, au nombre des objectifs de l'article L. 300-1 du Code de l'urbanisme. La construction de logements sociaux et d'un immeuble de bureaux destiné à abriter des locaux administratifs peuvent, ainsi, justifier une décision de préemption (CAA Paris, 17 février 1995, n° 93PA014169).

Le Conseil d'Etat censure les motivations jugées insuffisantes parce qu'elles ne traduisent pas l'existence d'un projet. Ont, ainsi, été censurées des décisions de préemption qui se bornent à invoquer la réalisation d'un équipement public sans autres précisions (CE 3° et 5° s-s-r., 19 février 1993, n° 95104, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A8563AM4), ou la relance de l'activité économique (CE 1° et 4° s-s-r., 30 juillet 1997, n° 157313, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A0814AEU). Initialement, le projet d'action ou d'opération d'aménagement devait présenter un caractère suffisamment précis pour que la préemption soit légalement motivée (CE 2° et 6° s-s-r., 25 juillet 1986, n° 62539, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A4793AMH). Depuis 2008, l'exercice du droit de préemption est légal à condition de justifier de la réalité d'un projet au jour de la préemption et d'indiquer la nature de ce projet de manière suffisamment précise dans la décision de préemption (CE 1° et 6° s-s-r., 7 mars 2008, n° 288371, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A3807D77, CE 1° et 6° s-s-r., 26 juillet 2011, n° 324767, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A8306HWK). Hors la procédure de substitution qui nous occupe ici, le droit de préemption est normalement exercé par la commune (C. urb., art. L. 214-1 N° Lexbase : L5743ISI), mais le maire, par délégation de son conseil municipal, a le pouvoir d'exercer, au nom de la commune et dans les conditions fixées par le conseil municipal, le droit de préemption des communes sur les cessions des fonds et des baux (CGCT, art. L. 2122-22 N° Lexbase : L2832IPL).

II - Les communes que vise le deuxième alinéa de l'article L. 210-1 du Code de l'urbanisme sont celles ayant fait l'objet d'une "procédure de constat de carence" prévue par l'article L. 302-9-1 du Code de la construction et de l'habitation (N° Lexbase : L0592IWT), soit parce qu'elles n'ont pas tenu les engagements de construction ou de réalisation de logements locatifs sociaux figurant dans le programme local de l'habitat, soit parce que, à défaut de programme local de l'habitat, le nombre de logements locatifs sociaux à réaliser n'a pas été atteint. Le constat de la carence a pour effet de confier au préfet le pouvoir de se substituer à la commune et, afin de renforcer l'efficacité de ce pouvoir de substitution, le législateur, en modifiant l'article L. 210-1 du Code de l'urbanisme par la loi du 25 mars 2009, de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion (loi n° 2009-323 N° Lexbase : L0743IDU), lui a conféré, pendant la durée d'application de l'arrêté de carence, l'exercice du droit de préemption lorsque l'aliénation porte sur un terrain, bâti ou non bâti, affecté au logement.

Dans un arrêt rendu le 28 juin 2012 (CAA Paris, 1ère ch., 28 juin 2012, n° 11PA03557, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A7964I74), la cour administrative d'appel de Paris a indiqué que ces dispositions se sont appliquées immédiatement à cette date en l'absence d'impossibilité manifeste, y compris dans les cas où un arrêté de carence était antérieurement intervenu. Le maire, après avoir été informé par le préfet de son intention, formellement motivée, d'engager la procédure de constat de carence, est invité à présenter ses observations dans les deux mois. Il peut, ensuite, former un recours de pleine juridiction à l'encontre de l'arrêté préfectoral de carence. Le préfet peut donc prendre en considération, sous le contrôle du juge, la nature et la valeur des raisons à l'origine du retard mis par la commune pour atteindre son objectif triennal, ce qui ôte à ce pouvoir tout caractère arbitraire (Cons. const., décision n° 2001-452 DC du 6 décembre 2001 N° Lexbase : A4253AXS).

Reprenant l'argumentation invoquée à l'occasion de la décision n° 2001-452 DC du 6 décembre 2001, le Conseil constitutionnel souligne que les dispositions en litige ont pour objet de remédier au non-respect par la commune en cause de l'objectif de construction ou de réalisation de logements sociaux fixé par le législateur, afin d'atteindre cet objectif. Il ajoute que, d'une part, elles sont justifiées par un but d'intérêt général et, que, d'autre part, l'objet et la portée de la compétence ainsi conférée au préfet est précisément définie en adéquation avec l'objectif poursuivi. La sanction n'a donc pas le caractère automatique qui avait conduit à la censure de la décision du 7 décembre 2000 (Cons. const., décision n° 2000-436 DC, préc.). Dès lors, l'atteinte portée à la libre administration des collectivités territoriales qui en résulte ne revêt pas un caractère disproportionné au regard de l'objectif poursuivi. Sur le plan procédural, les Sages indiquent que "l'arrêté préfectoral constatant la carence de la commune est pris après une procédure contradictoire et peut faire l'objet d'un recours de pleine juridiction [...] la décision du préfet d'exercer le droit de préemption peut aussi faire l'objet d'un recours juridictionnel [...] par suite, si les dispositions contestées confient de plein droit au préfet, en cas d'arrêté de carence, l'exercice du droit de préemption, il n'en résulte pas que la mise en oeuvre des dispositions contestées est soustraite au contrôle du juge".

L'on ne peut évidemment que se féliciter de cette solution qui, dans le contexte de crise aiguë du logement que nous traversons, devrait faciliter la tâche de l'Etat face aux maires récalcitrants à accueillir sur la commune des populations démunies, au détriment d'autres villes qui, à quelques kilomètres de là, ont atteint un seuil de saturation. Si ce n'est pas cette décision qui, en tant que telle, construira les logements qui font cruellement défaut, le renforcement de la prérogative du préfet, "bras armé" de la puissance publique, ne peut qu'aider à la réalisation de l'objectif de solidarité entre communes riches et pauvres et à la préservation du lien social.


(1) Commentaire de la décision n° 2013-309 QPC du 26 avril 2013.

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Habitat-Logement

[Brèves] Une décision ordonnant le placement d'une personne reconnue prioritaire dans un hébergement d'urgence ne peut être regardée comme procédant à l'exécution de l'injonction juridictionnelle de relogement

Réf. : CE 4° et 5° s-s-r., 22 avril 2013, n° 358427, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A5201KCM)

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N6870BTM

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Le 01 Mai 2013

Une décision ordonnant le placement d'une personne reconnue prioritaire dans un hébergement d'urgence ne peut être regardée comme procédant à l'exécution de l'injonction juridictionnelle de relogement. Telle est la solution d'une décision rendue par le Conseil d'Etat le 22 avril 2013 (CE 4° et 5° s-s-r., 22 avril 2013, n° 358427, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A5201KCM). Il résulte des dispositions des articles L. 441-2-3 (N° Lexbase : L8898IDW) et suivants du Code de la construction et de l'habitation, éclairées par les travaux parlementaires qui ont précédé l'adoption de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007, instituant le droit au logement opposable (N° Lexbase : L5929HU7), que la reconnaissance du droit à un hébergement par une décision d'une commission de médiation doit constituer, pour les demandeurs qui en bénéficient, une étape vers l'accès à un logement autonome. Par suite, l'hébergement attribué à des demandeurs reconnus comme prioritaires par une commission de médiation doit présenter un caractère de stabilité, afin, notamment, de leur permettre de bénéficier d'un accompagnement adapté vers l'accès au logement. Dès lors, en faisant bénéficier d'un hébergement d'urgence prévu par les dispositions de l'article L. 345-2-2 du Code de l'action sociale et des familles (N° Lexbase : L2096IDY), qui se caractérise par son instabilité et sa saisonnalité, une personne dont la demande d'hébergement a été reconnue prioritaire par la commission de médiation, le préfet ne peut être regardé comme procédant à l'exécution de la décision par laquelle le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il a désigné, constatant l'absence de proposition adaptée à la suite de la décision la commission de médiation, a ordonné que soit assuré l'hébergement de l'intéressé. L'ordonnance attaquée n'est donc entachée d'aucune erreur de droit en ce qu'elle a jugé qu'un hébergement dans une structure d'urgence ne pouvait être regardé comme un hébergement adapté au sens des dispositions de l'article L. 441-2-3 précité et a prononcé, pour un montant de 9 050 euros, la liquidation de l'astreinte prononcée à l'encontre de l'Etat par un jugement lui enjoignant d'attribuer un hébergement à M. X.

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Habitat-Logement

[Brèves] Constitutionnalité de l'exercice par le préfet du droit de préemption des communes ayant méconnu leurs engagements de réalisation de logements sociaux

Réf. : Cons. const., décision n° 2013-309 QPC, du 26 avril 2013 (N° Lexbase : A6251KCI)

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N6934BTY

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Le 16 Mai 2013

Dans une décision rendue le 26 avril 2013, le Conseil constitutionnel, après renvoi du Conseil d'Etat (CE 1° et 6° s-s-r., 13 février 2013, n° 364159, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A7904I7U), est venu indiquer que l'exercice, par le préfet, du droit de préemption des communes ayant méconnu leurs engagements de réalisation de logements sociaux est conforme à la Constitution (Cons. const., décision n° 2013-309 QPC, du 26 avril 2013 N° Lexbase : A6251KCI). Il était saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité relative au deuxième alinéa de l'article L. 210-1 du Code de l'urbanisme (N° Lexbase : L9954IPD), lequel énonce que "les biens acquis par exercice du droit de préemption [exercé par le représentant de l'Etat dans le département] doivent être utilisés en vue de la réalisation d'opérations d'aménagement ou de construction permettant la réalisation des objectifs fixés dans le programme local de l'habitat [...]". En effet, les communes dépassant certains seuils démographiques ont des obligations en matière de construction et de réalisation de logements locatifs sociaux. Lorsqu'elles ne respectent pas ces obligations, une procédure de constat de carence peut être engagée à leur encontre, ce qui enclenche cette procédure de préemption. Les Sages ont estimé que le pouvoir de substitution ainsi conféré au préfet pour exercer le droit de préemption en lieu et place de la commune, en vue de la construction ou de la réalisation de logements sociaux, ne porte pas une atteinte disproportionnée à la libre administration des collectivités territoriales. Ils ont donc déclaré le deuxième alinéa de l'article L. 210-1 du Code de l'urbanisme conforme à la Constitution.

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Institutions

[Le point sur...] Le statut du chef de l'Etat

Lecture: 21 min

N6876BTT

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par Lauréline Fontaine, Professeur de droit public, Université de la Sorbonne Nouvelle - Paris III

Le 01 Mai 2013

Les interrogations, voire les atermoiements sur le statut du chef de l'Etat en France, sont, depuis les débuts de la Vème République, le signe d'une spécificité quasi inédite dans l'histoire institutionnelle française. Plus, le chef de l'Etat français présente aussi une spécificité au sein de l'Union européenne. Certes, il est loin d'être le seul chef d'Etat élu au suffrage universel direct, car quinze autres pays de l'Union européenne ont, à ce jour, adopté ce système. Mais il est le seul, avec le président chypriote, à être le véritable leader de l'exécutif, là où partout ailleurs c'est le chef du Gouvernement qui exerce cette fonction. Preuve de ce particularisme, les deux Présidents français et chypriote sont les seuls chefs d'Etat à siéger au Conseil européen qui réunit les "chefs d'Etat et de Gouvernement" : vingt-cinq chefs de Gouvernement, bientôt vingt-six, pour deux chefs d'Etat. La situation reste, d'ailleurs, la même dans l'hypothèse d'une cohabitation, où le Gouvernement a seul le soutien de l'assemblée parlementaire, même si, dans cette hypothèse, des aménagements collaboratifs sont organisés. Mais c'est bien là, sans doute, la raison des discussions autour du statut du chef de l'Etat : son statut ne coïnciderait pas vraiment avec ses pouvoirs. Parce qu'il dispose de pouvoirs importants, le chef de l'Etat en France devrait avoir un statut qui le mette dans une situation de responsabilité dans l'exercice de ses pouvoirs. Car, du point de vue des fonctions politiques, le chef de l'Etat dispose de prérogatives essentielles. Elles sont repérables à travers la distinction posée par l'article 19 de la Constitution française (N° Lexbase : L0845AHR), entre les actes soumis au contreseing ministériel et ceux dispensés de cette formalité, qui, justement, n'en n'est pas une. En contresignant un acte du chef de l'Etat, le Premier ministre et les ministres responsables, le cas échéant, endossent la responsabilité de cet acte, responsabilité qui s'exerce ensuite devant la représentation nationale en vertu des articles 49 (N° Lexbase : L0867AHW) et 50 (N° Lexbase : L0877AHX) de la Constitution. C'est ainsi que les décrets délibérés en Conseil des ministres et que signe le Président de la République sur le fondement de l'article 13 de la Constitution (N° Lexbase : L0839AHK), sont contresignés par le Premier ministre et les ministres responsables. Ces décrets, comme d'ailleurs les projets de loi du Gouvernement qui sont délibérés en Conseil des ministres, ou les ordonnances prises sur la base d'une habilitation parlementaire, elles aussi signées par le Président de la République en vertu du même article 13, constituent une modalité essentielle de la politique conduite par l'exécutif que le Parlement est porté à contrôler et à évaluer, jusqu'à la mettre en cause en renversant le Gouvernement.

Que le chef de l'Etat soit, lui, irresponsable des actes qu'il signe pourtant, ne devrait donc pas constituer une véritable difficulté, dès lors que les auteurs du contreseing peuvent en être tenus responsables : s'ensuivrait en quelque sorte logiquement, une possibilité pour le Premier ministre et les ministres de ne pas apposer leur contreseing sur les actes présidentiels. Mais cela apparaît évidemment plus problématique dès lors que, en période "normale", c'est-à-dire quand le chef de l'Etat est le chef de la majorité parlementaire, la discipline ministérielle entraîne une obligation politique de contresigner. Et que dire des actes qui, eux, sont dispensés de contreseing ? Dans cette hypothèse, il y a exercice d'un pouvoir sans la contrepartie "démocratique" de cet exercice, à savoir la responsabilité. Et ces pouvoirs ne sont pas inoffensifs, notamment pour la démocratie ; ils peuvent même être déterminants : recours direct, sans passer par le Parlement, au référendum législatif (ou constitutionnel comme l'a illustré la pratique gaullienne), dissolution de l'Assemblée nationale, exercice du droit de grâce, nomination de trois membres du Conseil constitutionnel, saisine du Conseil constitutionnel, et enfin, last but not least, décision de faire usage de pouvoirs "exceptionnels", dans une situation déterminée par lui seul. Ces pouvoirs apparaissent de toute évidence exorbitants et, nonobstant, ne le conduisent à "rendre des comptes" politiques que s'il décide de briguer un nouveau mandat présidentiel. On comprend évidemment le hiatus existant entre les pouvoirs présidentiels et son irresponsabilité pourtant corrélative.

Ce hiatus se trouve renforcé par les positions institutionnelles conférées par la fonction présidentielle. Le chef de l'Etat n'exerce pas seulement des pouvoirs exorbitants, il intervient aussi, de manière plus ou moins décisive, dans l'exercice des pouvoirs et fonctions d'autres institutions ou organes constitués. Ainsi, le chef de l'Etat est-il, pendant l'exercice de son mandat, le chef des armées, garant de l'indépendance de l'autorité judiciaire et, à ce titre, "assisté" par le Conseil supérieur de la magistrature, et, enfin, il nomme aux plus hautes fonctions et organes de l'Etat : nomination du Premier ministre et des membres du Gouvernement certes, mais aussi nomination de trois membres du Conseil constitutionnel, de membres du Conseil supérieur de la magistrature et de bien d'autres autorités administrativo-politiques, nomination des hauts fonctionnaires, magistrats et administrateurs. Des réformes ont permis au Parlement d'être impliqué dans certaines de ces nominations (Conseil constitutionnel par exemple), ce qui est une bonne chose, mais qui ne nuance qu'assez modérément le statut ainsi conféré au chef de l'Etat. Il faut ajouter à cela l'incompréhensible maintien jusqu'à aujourd'hui du "droit" pour un ancien Président de la République de siéger au Conseil constitutionnel, qui porte actuellement le nombre de membres à douze (au lieu de neuf), même si les trois anciens chefs d'Etat aujourd'hui concernés ne siègent qu'occasionnellement.

On relève, à ce propos, que, jusqu'à la cessation des fonctions du Président Jacques Chirac, on avait coutume d'entendre que cette règle constitutionnelle qui faisait d'un ancien Président de la République française un membre de droit du Conseil constitutionnel, était coutumièrement tombée en désuétude, par son non usage par ceux qui auraient pu en faire usage (ceux n'étant pas empêchés par la maladie ou, a fortiori, le décès). C'est la preuve que le maintien de l'inscription d'une règle dans un texte maintient en même temps la possibilité d'en faire usage à tout moment, dès lors qu'il n'existe pas d'autorité compétente pour affirmer le contraire et sanctionner le comportement déviant. En bref, compte tenu de ces éléments, il apparaît particulièrement légitime de continuer à s'interroger sur le statut du chef de l'Etat, pas très en adéquation avec les règles d'un régime démocratique contemporain. A cela s'ajoute encore le fait que, même pour des comportements qui ne sont pas liés à l'exercice de la fonction présidentielle, les règles ne sont, à ce jour, pas encore parfaitement établies, et paraissent avoir trop souvent fait du chef de l'Etat une personne véritablement privilégiée. Si donc, en France, on semble plutôt s'accorder sur l'idée qu'il est nécessaire d'instaurer un régime de responsabilité plus clair et en conformité avec les exigences minimales de la démocratie, toutefois, pour ne pas céder à la tentation de l'ordinarité ou de la normalité absolue de la fonction, qui est précisément unique dans le pays, on considère aussi que le chef de l'Etat, incarnation de l'unité nationale, doit pouvoir bénéficier d'une protection spéciale pour ne pas être entravé dans l'exercice de ses fonctions. C'est le fondement même du particularisme de son statut.

Depuis de nombreuses années, les politiques hésitent donc entre responsabilité et irresponsabilité, entre lui conférer le statut d'un citoyen ordinaire et nier cette qualité. En bref, et à ce jour, la présidence "normale" reste tout de même en dehors de la norme, mais dans le cadre d'un mouvement tendant à la normalisation. Il en résulte une dualité de statut, mais dont les éléments sont loin d'être parfaitement clairs et homogènes, à tel point que c'est souvent le terme de schizophrénie auquel on recourt pour décrire le statut du chef de l'Etat. Selon les hypothèses, il se détermine en considérant la fonction seulement, indépendamment de la personne qui l'exerce (I), ou si c'est en considérant la personne physique citoyenne, ce n'est jamais indépendamment de la fonction présidentielle (II).

I - Le statut du chef de l'Etat comme autorité constituée

Le chef de l'Etat est non seulement la plus haute autorité de l'Etat, mais, comme il est dit partout depuis 1958, la "pierre angulaire" du système politique français, c'est-à-dire du système démocratique en vigueur en France. Les conditions de son statut politique et leurs évolutions s'apprécient, en conséquence, toutes au regard de la manière dont la démocratie est ainsi conçue. L'enjeu est de mettre en adéquation les modalités juridiques du statut du chef de l'Etat avec la conception idoine de la démocratie, tant du point de vue de son statut électif (1), que du point de vue de sa responsabilité comme chef de l'Etat, au plan politique comme au plan pénal (l'hypothèse d'une responsabilité civile de la fonction présidentielle étant exclue par celle de l'existence de la responsabilité administrative) (2).

1 - La lente construction d'un statut électif démocratique du chef de l'Etat

a) La candidature et le mandat présidentiel : entre conception politique et effort de démocratisation

Il n'est pas possible de dégager une doctrine "claire" du statut électif du chef de l'Etat. Sa conception politique ne paraît pas toujours an adéquation avec les règles effectivement établies pour son élection, qui en font indéniablement une élection partisane. Le statut initial du chef de l'Etat fut conçu à partir de la doctrine selon laquelle il devait être "au-dessus des partis" et donc détaché des structures politiques faisant naturellement la part belle à ceux-ci, à savoir le Parlement : son mandat était donc distinct, sept ans, contre cinq pour les députés et neuf pour les sénateurs. Pourtant, il était élu par un collège composé d'élus nationaux et locaux (environ 80 000 électeurs), impliquant presque structurellement un lien partisan. Son élection au suffrage universel direct à partir de 1965 a permis de distendre un peu ce lien partisan, quoique la condition pour être candidat à l'élection présidentielle dépende toujours en partie des élus puisque le système de parrainages instauré, et en vigueur aujourd'hui, implique qu'il doive obtenir auparavant l'assentiment de cinq cent élus, issus d'au moins trente départements ou collectivités d'outre-mer différents sans que plus d'un dixième de ces élus proviennent du même département ou de la même collectivité d'outre-mer. Le Conseil constitutionnel vérifie la validité des candidatures.

L'élection du chef de l'Etat au suffrage universel a aussi et simultanément créé les conditions d'une bipolarisation de la vie politique autour des grands partis susceptibles de procurer à la France un personnage présidentiable. Le Président "de tous les français" est, ainsi, surtout celui qui réussit à s'imposer comme présidentiable au plus haut niveau de l'un des deux grands partis politiques français. La réforme de la durée du mandat présidentiel de sept à cinq ans et la mise en coïncidence des deux calendriers électoraux, présidentiels et législatifs, a accentué, à partir de 2002, le caractère partisan de la fonction, par la proximité qu'il entretient désormais bien plus avec les parlementaires. En bref, sans parler de l'exercice postérieur du pouvoir par le chef de l'Etat élu, les conditions politiques de l'élection présidentielle créent une "ambiance" sensiblement préjudiciable au lien que le Président de la République pourrait entretenir avec l'ensemble des électeurs. Le système des parrainages, par exemple, est mis en accusation depuis de nombreuses élections déjà. C'est ainsi que la Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique, dite "Commission Jospin", à l'automne 2012, a proposé que les parrainages soient désormais "citoyens", avec un seuil minimum de 150 000, issus d'au moins cinquante départements (ou collectivités d'outre-mer) sans qu'un département ou une collectivité ne puisse représenter plus de 5 % des parrainages (c'est-à-dire pas plus de 7 500 signatures sur 150 000).

Ces nouvelles règles, si elles étaient effectivement adoptées, participeraient d'une démarche de démocratisation de la fonction (il peut désormais être candidat à partir de l'âge de dix-huit ans et ne peut briguer plus de deux mandats successifs), qui doivent être lues en combinaisons avec les règles relatives à l'organisation et au contrôle de l'élection présidentielle.

b) L'organisation et le contrôle de l'élection présidentielle : une déontologie affichée pour une pratique ambiguë

Il existe des règles relativement détaillées sur l'obligation de respect du pluralisme, tant au niveau de la campagne que des modalités du scrutin, qui sont pour l'essentiel mises en oeuvre par les autorités publiques (par exemple les règles sur l'impression, la distribution et la disposition des bulletins de vote), ou par les autorités privées (par exemple les règles sur le temps de parole dans les médias). Si des irrégularités dans les votes ou des manoeuvres particulières des candidats avant le scrutin sont susceptibles d'entraîner l'annulation du scrutin présidentiel par le Conseil constitutionnel, dans la mesure où ces irrégularités ou ces manoeuvres auraient été déterminantes, les règles sur les conditions du financement des candidats sont celles qui, bien qu'a priori non susceptibles d'entraîner l'invalidation du scrutin, ont suscité le plus de débats et d'évolution ces dernières années. Elles ont évolué vers le sens d'une limitation des dons privés (et de leur forme aussi), vers un accroissement du financement public, sous conditions, et bien sûr au plafonnement des dépenses de campagne.

L'ensemble de ces règles implique que chaque candidat à la fonction présidentielle a l'obligation de tenir un compte de campagne, géré par un mandataire. Le compte doit, par la suite, être déposé devant la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP), au plus tard le neuvième vendredi suivant le second tour de scrutin, qui vérifiera les comptes, un appel étant ensuite possible devant le Conseil constitutionnel. Les conséquences de ce contrôle peuvent être de plusieurs ordres : d'une manière générale, la non-validation des comptes entraîne le non-remboursement légal des dépenses. Celui-ci est prévu pour tous les candidats selon des modalités distinctes, selon qu'ils sont présents ou non au deuxième tour, et selon que, pour les candidats présents seulement au premier tour, ils ont obtenu plus ou moins 5 % des suffrages exprimés. Le taux de remboursement est fixé par référence au plafond par ailleurs instauré pour les dépenses. Un candidat du premier tour de l'élection présidentielle de 1995 (Jacques Cheminade) a vu ses comptes non validés, sanction qui a entraîné le non remboursement de ses dépenses. Actuellement, le Conseil constitutionnel examine l'appel formé par Nicolas Sarkozy contre la décision de la CNCCFP d'invalider ses comptes pour la campagne de 2012. Sont en jeu près de onze millions d'euros, qui pourraient ne pas être reversés à l'UMP, parti du candidat perdant. Il est difficile de prédire la décision du Conseil constitutionnel, mais le précédent de 1995 et les révélations postérieures sur les choix opérés à cette époque par le Conseil pour ne pas entacher de soupçon le déroulement du scrutin illustrent qu'il est bien difficile d'appliquer les règles sans perturber la vie démocratique. Entre l'un et l'autre, les juges choisissent souvent la deuxième solution, celle d'une paix, mais toujours provisoire.

2 - Entre irresponsabilité et quasi irresponsabilité de la fonction présidentielle

L'exercice de la fonction présidentielle depuis 1958 ne laisse aucun doute sur les pouvoirs du chef de l'Etat. La cohabitation n'a pas amoindri ses pouvoirs et on a même parlé ces dernières années d'hyperprésidence. La question de sa responsabilité politique semble pourtant être vainement posée depuis les débuts de la Vème République. Politiquement, seul le Gouvernement est responsable, et c'est lui qui a été sanctionné en 1962 lorsque le général de Gaulle a décidé de se passer de l'accord du Parlement pour proposer la révision de la Constitution sur le mode d'élection du chef de l'Etat en recourant directement à l'article 11 de la Constitution (N° Lexbase : L0837AHH) qui lui permet d'organiser un référendum. On a bien pu arguer de la responsabilité du chef de l'Etat devant les électeurs lorsqu'il brigue un nouveau mandat, mais celle-ci apparaît bien maigre, surtout depuis que le nombre de mandats successifs est fixé à deux. Le problème démocratique posé par l'irresponsabilité politique a entraîné, toutefois, des changements dans le statut pénal du chef de l'Etat, dont on pouvait définitivement accepter qu'il lui confère une totale inviolabilité. Auparavant seulement responsable pour une infraction mal définie, la "haute trahison", il était jugé par la Haute Cour de justice constituée de parlementaires, la procédure étant virtuellement très longue.

Depuis la réforme constitutionnelle de 2007 (loi constitutionnelle n° 2007-238 du 23 février 2007, portant modification du titre IX de la Constitution N° Lexbase : L4654HUW), qui a réécrit les articles 67 (N° Lexbase : L0896AHN) et 68 (N° Lexbase : L0897AHP) de la Constitution, il peut être "destitué" par la Haute Cour, nouvelle formation remplaçant la Haute Cour de justice, cette fois constituée de l'intégralité des parlementaires (l'article 68 précise que le Parlement se constitue en Haute Cour). Cette nouvelle procédure de destitution est applicable en cas de "manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l'exercice de son mandat". C'est la seule hypothèse de responsabilité du chef de l'Etat envisagée par la Constitution, avec, toutefois, l'article 53-2 (N° Lexbase : L0882AH7), qui permet à la République française de "reconnaître la juridiction de la Cour pénale internationale". La réforme du statut du chef de l'Etat en 2007 vise, avec le remplacement de la haute trahison par celle de "manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l'exercice de ses fonctions", et avec la simplification considérable de la procédure, à rendre possible la mise en oeuvre de la responsabilité pénale du chef de l'Etat pour les actes accomplis dans le cadre de l'exercice de ses fonctions, hypothèse qui avait toujours paru pratiquement impossible jusqu'alors. Si la notion de "manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l'exercice de son mandat" n'est pas plus définie que l'ancien chef d'infraction que constituait la haute trahison, elle paraît plus en relation avec la problématique contemporaine et semble aussi laisser une plus grande latitude aux parlementaires. Mais du coup, d'une responsabilité sans conteste pénale à l'origine, elle pourrait être désormais considérée comme politique car ne reposant plus sur une infraction proprement dite. Au surplus, la procédure, qui est désormais enfermée dans des courts délais, sans actes particuliers autres que la proposition de réunion de la Haute Cour et la décision de destitution prises à la majorité des deux tiers des membres de l'assemblée ou de la Haute Cour, pourrait plaider en faveur d'une simplicité de sa mise oeuvre et permettre, ainsi, au Parlement d'y recourir plus aisément. Mais il semble que nous soyons loin d'en être à ce stade et le phénomène majoritaire semble devoir en limiter fortement la portée.

II - Le statut du chef de l'Etat comme personne privée

S'il ne fait aucun doute que la personnalité élue au suffrage universel pour exercer la fonction présidentielle est bien une personne physique comme les autres, un "sujet de droit", le régime juridique qui s'applique à lui cesse d'être comme les autres à compter de son élection. D'ailleurs, les différents titulaires de la fonction présidentielle se sont généralement tenus à distance du système judiciaire. Leur statut comme personne privée étant alors assez incertain, on estimait plutôt que la question ne se posait pas vraiment, faute, effectivement, de l'existence d'un contentieux. L'avant-dernier titulaire de la fonction a, toutefois, donné des occasions assez nombreuses de préciser le statut du chef de l'Etat.

Il ne peut participer à des instances civiles ou pénales que dans certaines conditions, qui sont directement déterminées comme la conséquence de sa fonction. Pour les faits impliquant le chef de l'Etat, que ces faits soient antérieurs ou concomitants à l'exercice de la fonction présidentielle, il bénéficie d'un régime particulier, construit au fil des affaires soumises à la justice depuis surtout la fin des années 1990. En tout état de cause, et malgré une volonté parfois affichée de faire du chef de l'Etat un citoyen "ordinaire", son traitement dans les différentes instances judiciaires, civiles ou pénales, ne paraît pas, pour l'heure, susceptible d'être aligné sur celui des simples particuliers. Pendant l'exercice de son mandat, il faut distinguer selon la circonstance que le chef de l'Etat prend lui-même l'initiative d'une action judiciaire (1), ou qu'il a, au contraire, le statut de défendeur à l'instance (2).

1 - L'admissibilité des initiatives judiciaires du chef de l'Etat et l'inapplication subséquente de la totalité du statut de partie au procès

Signalons, d'abord, qu'il existe encore aujourd'hui une infraction spécifique d'"offense au chef de l'Etat" institué par l'article 26 de la loi du 29 juillet 1881, sur la liberté de la presse (N° Lexbase : L7589AIW). Auparavant passible de prison, le fait d'offenser le chef de l'Etat n'est plus sanctionné aujourd'hui que par une amende de 45 000 euros depuis l'ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000 (N° Lexbase : L0609ATQ). Une récente affaire a permis à la Cour européenne des droits de l'Homme de se prononcer sur cette infraction (1), qu'elle ne semble pas avoir remise en cause, même si elle a condamné la France pour atteinte à la liberté d'expression. Mais la France s'apprête tout de même à renoncer à cette infraction. A l'occasion du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation dans le domaine de la justice en application du droit de l'Union européenne et des engagements internationaux de la France, l'abrogation de l'article 26 de la loi du 29 juillet 1881 a été proposée, puis a été adoptée le 27 mars 2013 par la Commission des lois de l'Assemblée nationale. Il est assez probable que l'abrogation soit effectivement et définitivement adoptée par le Parlement dans les semaines qui viennent, qui fera du titulaire de la fonction présidentielle un individu soumis au droit commun de l'injure et de la diffamation. Il pourra donc, en principe, toujours défendre son honneur par l'invocation du délit d'injure publique, puni de 12 000 euros ou même de l'outrage, puni de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende, lorsqu'il est fait à l'égard d'une personne dépositaire de l'autorité publique (C. pén., art. 433-5 N° Lexbase : L1857AMQ).

Indépendamment des affaires impliquant le statut présidentiel lui-même, c'est surtout la "vie privée" du chef de l'Etat qui a provoqué un contentieux substantiel depuis plusieurs années. Pendant l'exercice de son mandat, Nicolas Sarkozy a intenté sept actions civiles et pénales, pour s'opposer à la diffusion d'une publicité usant de son image (et de celle de sa compagne), pour obtenir le retrait d'un produit le représentant (poupée vaudou), pour obtenir la condamnation d'un journaliste qui avait publié un SMS pour faux, usage de faux et recel ou encore pour interdire la confection de tee-shirts où figurait son nom accompagné du commentaire "zéro tolérance". Ces différentes affaires ont permis de déterminer que, pendant l'exercice de son mandat, le chef de l'Etat pouvait, d'une part, se constituer partie civile dans un procès pénal et, d'autre part, entamer une action civile, y compris une procédure de divorce, dès lors que celle-ci n'implique aucune des parties, c'est-à-dire en réalité le chef de l'Etat- en reposant sur le consentement mutuel.

Cette possibilité que le Président de la République soit partie à un procès, dès lors qu'il est une partie demanderesse, a soulevé beaucoup de discussions et d'arguments à propos de son statut de partie "ordinaire". En effet, plusieurs éléments sont susceptibles de venir troubler le déroulement normal d'un procès, puisque il n'est pas étranger à la constitution du corps judiciaire, par son rôle de garant de l'autorité judiciaire, de participation au Conseil supérieur de la magistrature et de nomination des plus hauts magistrats. Son lien avec la magistrature pourrait faire du chef de l'Etat une partie, en quelque sorte, et par nature faire obstacle au principe d'impartialité et d'indépendance du tribunal, garantie nécessaire au déroulement d'un procès équitable. Par ailleurs, ces liens, et parce qu'aussi le Président de la République est inattaquable devant un tribunal ordinaire (2), interrogent sur le principe de l'égalité des armes au procès. Des arguments furent soulevés en ce sens dans le cadre des poursuites engagées pour escroquerie en bande organisée auxquelles s'est associé Nicolas Sarkozy pour usurpation de son identité bancaire.

Dans un premier temps, le tribunal correctionnel de Nanterre, par un jugement rendu le 29 octobre 2009, choisit de surseoir à statuer sur la demande dommages-intérêts du chef de l'Etat, "jusqu'à l'expiration du délai d'un mois après la cessation de ses fonctions", car "le lien entre le Président de la République et les magistrats peut laisser croire aux justiciables qu'ils ne bénéficieraient pas d'un tribunal indépendant et impartial". Mais dans un second temps, le 8 janvier 2010, la cour d'appel de Versailles a infirmé ce jugement (3). Dans le même temps, et à propos de l'affaire "Clearstream", le tribunal de grande instance de Paris, par un jugement rendu le 28 janvier 2010, a considéré que, si le chef de l'Etat n'était pas un justiciable ordinaire, "le principe de l'égalité des armes doit s'apprécier in concreto dans une instance en cours". Le tribunal considère, en l'espèce, que "le déroulement des débats a montré l'effectivité de ce principe en ce que chacune des parties a été en mesure de librement présenter ses propres arguments et de combattre ceux qui lui étaient opposés". Le tribunal accepte, ainsi, la constitution de partie civile du chef de l'Etat, en indiquant, au passage, pour répondre à l'argument de la contrariété aux exigences du procès équitable posées par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme, qu'il ne lui appartient pas "d'apprécier l'inconventionnalité d'une norme constitutionnelle".

La Cour de cassation, réunie en Assemblée plénière, a confirmé ce statut de demandeur du chef de l'Etat le 15 juin 2012 (4). D'abord, elle a considéré que "la nomination des juges par le Président de la République ne crée pas, en lui-même, un lien de dépendance à son égard dans la mesure où les juges demeurent protégés par leur inamovibilité et, de manière générale, ne peuvent pas faire l'objet de pression ou d'instruction diverses provenant de l'exécutif". A l'appui du principe d'égalité des armes, qui ne serait pas respecté en l'espèce, était invoquée l'inapplicabilité des articles 91 (N° Lexbase : L7165A47), 472 (N° Lexbase : L9928IQR) et 516 (N° Lexbase : L3908AZR) du Code de procédure pénale, donnant la possibilité à un prévenu d'engager une action en dommages et intérêts contre la partie civile lorsque celle-ci est abusive ou non justifiée. La Cour de cassation a considéré, que, dans les faits de l'espèce, les conditions nécessaires à l'ouverture de ces moyens d'action (décision de non-lieu ou de relaxe du prévenu et seulement lorsque c'est la partie civile qui est à l'origine de la mise en mouvement de l'action publique) manquaient en fait. D'autres moyens furent invoqués dans le même esprit, qui furent tous rejetés par la Cour sur le fondement d'une appréciation in concreto certes, mais relativement rapide et laconique, laissant tout de même demeurer une sensible insatisfaction sur la pertinence de ce déséquilibre entre le chef de l'Etat demandeur et le chef de l'Etat défendeur, dans la mesure où, dans une même instance, une partie peut être tour à tour l'un ou l'autre : car si son action est recevable, il est lui inviolable, et donc inattaquable tant que dure son (ou ses) mandat(s).

2 - L'inviolabilité du chef de l'Etat pendant la durée de son mandat

Lorsque des "affaires" mettant en cause un chef de l'Etat français en exercice ont commencé à être traitées par la justice à partir des années 1990, le statut du chef de l'Etat comme justiciable devant les juridictions ordinaires était assez incertain, mais semblait plutôt procurer à celui-ci une immunité absolue. Quelques tempéraments ont été formulés depuis, même si c'est la notion d'immunité qui reste prégnante. Pour les actes relevant de l'exercice de ses fonctions, il bénéficie d'une immunité absolue devant les juridictions de droit commun, et d'un "privilège" de juridiction puisque seul le Parlement réuni en Haute Cour pourrait prononcer sa destitution. Il résulte donc de la jurisprudence et de la Constitution que, pendant son mandat, le chef de l'Etat ne saurait être convoqué par un juge d'instruction, ni même être convoqué comme témoin dans une affaire pénale. Mais, pour les actes ne relevant pas de l'exercice de ses fonctions, qu'ils soient accomplis postérieurement ou concomitamment à celui-ci, l'immunité dont il bénéficie, inscrite à l'article 67, alinéa 2, de la Constitution, est temporaire puisqu'elle ne dure que le temps de son mandat, pour cesser aussitôt après son terme. Grâce à un arrêt du 10 octobre 2001 rendu par la Cour de cassation réunie en Assemblée plénière (5) (à la demande d'un militant associatif demandant à ce que Jacques Chirac, président alors en exercice, soit entendu comme témoin dans le cadre de l'instruction sur l'affaire dite de "l'imprimerie de la ville de Paris"), dont la solution a finalement été inscrite dans la Constitution par la réforme de 2007, l'immunité temporaire ne ressortit plus ses effets négatifs puisque le délai de prescription applicable aux faits en cause est interrompu le temps de la durée du mandat présidentiel. L'exercice de la fonction présidentielle n'est donc pas susceptible de permettre à son titulaire d'échapper définitivement au système judiciaire, dès lors que l'immunité temporaire n'emporte pas comme conséquence une immunité définitive et donc absolue.

Mais, comme l'a relevé le rapport "Jospin" remis le 7 novembre 2012, "l'impossibilité absolue, pour les demandeurs potentiels, de faire entendre leur cause devant un tribunal civil pendant une période de cinq ans, voire de dix ans en cas de second mandat, pose un grave problème, en particulier dans l'hypothèse d'actions relevant de l'état des personnes et du droit de la famille (divorce, filiation, autorité parentale...). Et l'idée suivant laquelle leurs droits et intérêts seraient sauvegardés par le mécanisme de suspension des délais de prescription et de forclusion reste largement théorique". La Commission juge, ainsi, que "l'extension de l'inviolabilité au champ des actions civiles est tout à la fois contestable dans son principe, disproportionnée par rapport au but poursuivi et choquante du point de vue de ses conséquences". La Commission a, également, considéré qu'en matière pénale, les règles actuellement en vigueur "empêchent que le Président de la République soit poursuivi et jugé dans un délai raisonnable pour des crimes ou des délits qu'il aurait commis avant son élection ou au cours de son mandat". Ces règles, souligne encore la Commission, parce qu'elles empêchent aussi qu'il fasse l'objet, pendant son mandat, "de tout acte d'enquête ou d'information préalable au renvoi au jugement", ont été particulièrement critiquées. "Au-delà du risque d'atteinte au principe du droit à être juge dans un délai raisonnable, dont la Cour européenne des droits de l'Homme rappelle qu'il trouve à s'appliquer, en matière pénale, à l'auteur de l'infraction comme à la victime, c'est l'effectivité même de la répression qui a été mis en doute". A partir de l'ensemble de ces constatations, la Commission a, ainsi, formulé deux propositions remettant en cause le principe de l'inviolabilité du chef de l'Etat pour les actes qui n'ont pas été accomplis en sa qualité de chef de l'Etat

En attendant, et comme l'a relevé le tribunal de grande instance de Paris, par son jugement du 28 janvier 2010, "l'immunité dont bénéficie le chef de l'Etat en vertu des dispositions de l'article 67 de la Constitution peut être de nature à créer un déséquilibre entre les parties à un procès pénal, en ce que son statut le protège de toute attaque judiciaire sans pour autant lui interdire d'agir comme justiciable ordinaire". Quand bien même l'égalité des armes s'apprécie in concreto, il paraît à peu près évident que la dualité judiciaire du chef de l'Etat manque aux objectifs de modernisation et de moralisation de la vie politique française, qui certes ne se limite pas au droit, mais dont le droit constitue une donnée incontournable.


(1) CEDH, 14 mars 2013, Req. 26118/10 (N° Lexbase : A6606I9K) ; lire "Casse toi, pov'con" : le délit d'offense au Président de la République méconnaît la liberté d'expression - Questions à Dominique Noguères, avocate au barreau de Paris, Lexbase Hebdo n° 282 du 27 mars 2013 - édition publique (N° Lexbase : N6358BTN).
(2) Voir infra, point 2.
(3) CA Versailles, 9ème ch., 8 janvier 2010, n° 09/02791 (N° Lexbase : A6211EQ4).
(4) Ass. plén., 15 juin 2012, n° 10-85.678, P+B+R+I (N° Lexbase : A8936INB).
(5) Ass. plén., 10 octobre 2001, n° 01-84.922 (N° Lexbase : A1629AWA).

newsid:436876

Institutions

[Brèves] Réserve parlementaire : droit à communication des demandes de subvention

Réf. : TA Paris, 23 avril 2013, n° 1120921 (N° Lexbase : A5605KCL)

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N6938BT7

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Le 11 Mai 2013

Le jugement du tribunal administratif de Paris du 23 avril 2013 a annulé le refus du ministre de l'Intérieur de communiquer les documents relatifs aux demandes de subventions présentées au titre des crédits répartis par la commission des finances du Sénat ou de l'Assemblée nationale pour l'année 2011, crédits dits de la "réserve parlementaire" (TA Paris, 23 avril 2013, n° 1120921 N° Lexbase : A5605KCL). Il a jugé que les documents produits ou reçus par le ministre de l'Intérieur, relatifs à la mise en oeuvre des décisions de l'Etat liées aux demandes d'aide financières présentées au titre de ces crédits, n'ont pas le caractère d'actes ou documents produits ou reçus par les assemblées parlementaires et sont communicables sur le fondement de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978, relative à la communication des documents administratifs (N° Lexbase : L6533AG3), à la différence des documents relatifs à la constitution ou à la répartition de la réserve émanant du Sénat ou de l'Assemblée nationale. Les documents demandés par l'association pour une démocratie directe, sous forme électronique, relatifs aux demandes de subvention adressées au ministre de l'Intérieur et présentées au titre des crédits répartis par les commissions des finances des assemblées parlementaires pour l'année 2011, relèvent donc du champ d'application de la loi du 17 juillet 1978, ainsi que l'avait estimé la Commission d'accès aux documents administratifs, saisie au préalable de la demande d'avis obligatoire. Le tribunal constate que les documents demandés ne se limitent pas au tableau de consommation des crédits transmis par le ministre antérieurement au recours de l'association. Il relève, également, que le ministre ne fait pas valoir que les procédures relatives à la mise en oeuvre des décisions ne pourraient être identifiées et que les documents s'y rapportant ne seraient pas en sa possession ou ne pourraient être obtenus par des procédés de traitement automatisé courants. Ils sont donc communicables sous réserve, comme le prévoit la loi, de la perte de leur caractère préparatoire à la date de la décision en litige.

newsid:436938

Marchés publics

[Brèves] La méthode de notation doit s'adapter aux offres des candidats

Réf. : CE 2° et 7° s-s-r., 19 avril 2013, n° 365340, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A4189KC7)

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N6939BT8

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Le 14 Mai 2013

La méthode de notation doit s'adapter aux offres des candidats, mais ses détails n'ont pas obligatoirement à être rendus publics, tranche le Conseil d'Etat dans une décision rendue le 19 avril 2013 (CE 2° et 7° s-s-r., 19 avril 2013, n° 365340, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A4189KC7). Le juge des référés a constaté, par une appréciation souveraine, que la méthode de notation retenue, consistant en la détermination d'une note globale par la somme des notes attribuées, d'une part, à la proposition de prix payable par la ville à son cocontractant pour l'enlèvement des véhicules et, d'autre part, à la proposition de prix de reprise du véhicule payable, à l'inverse, par le cocontractant à la ville, ne pouvait être mise en oeuvre dans l'hypothèse d'une offre de prix pour l'enlèvement des véhicules d'un montant égal à zéro euro, dès lors qu'elle reposait sur le calcul du quotient entre le montant de l'offre la moins disante et le montant de l'offre du candidat, et que cette difficulté avait suscité une incertitude au moment du dépôt des offres, conduisant la ville à modifier la formule au moment de l'analyse des offres. En se prononçant, ainsi, sur la méthode de notation retenue -laquelle, au demeurant, compte tenu de l'examen indépendant des propositions relatives au prix d'enlèvement des véhicules payable par la ville et au prix de reprise de ceux-ci payable à la ville, ne permettait pas d'attribuer de manière certaine la meilleure note au candidat proposant l'offre la plus avantageuse pour la ville- le juge des référés ne s'est pas fondé, contrairement à ce que soutient la ville de Marseille, sur ce que les détails de la méthode de notation auraient dû être rendus publics .

newsid:436939

Outre-mer

[Brèves] La procédure d'autorisation des travaux de recherches minières en Nouvelle-Calédonie est conforme à la Constitution

Réf. : Cons. const., décision n° 2013-308 QPC du 26 avril 2013 (N° Lexbase : A6250KCH)

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N6940BT9

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Le 07 Mai 2013

Les autorisations de travaux de recherches minières en Nouvelle-Calédonie sont conformes à la Constitution, selon une décision rendue le 26 avril 2013 par le Conseil constitutionnel (Cons. const., décision n° 2013-308 QPC du 26 avril 2013 N° Lexbase : A6250KCH). Le Conseil constitutionnel a été saisi le 11 février 2013 par le Conseil d'Etat d'une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des dispositions de l'article Lp. 142-10 du Code minier de la Nouvelle-Calédonie "relatives aux autorisations de travaux de recherches". Ces travaux de recherches consistent à effectuer des travaux superficiels ou profonds en vue d'établir la continuité des indices découverts par la prospection afin de conclure à l'existence de gisements de substances minérales et d'en étudier les conditions d'exploitation et d'utilisation industrielle. L'article Lp. 142-10 du Code minier de la Nouvelle-Calédonie fixe la procédure pour autoriser ces travaux de recherches. L'ouverture de ces travaux est subordonnée à une autorisation du président de l'assemblée de province compétente. Cette autorisation fixe les prescriptions prévenant les nuisances. Elle est précédée d'une notice d'impact ou d'une étude d'impact. Les dispositions du Code minier de la Nouvelle-Calédonie ne concernent que les trois substances minérales que sont le nickel, le chrome et le cobalt. L'association requérante soutenait que cette procédure méconnaissait les principes d'information et de participation du public à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement posés par l'article 7 de la Charte de l'environnement. Le Conseil constitutionnel a écarté ce grief. Il a jugé que, compte tenu de la nature des substances minérales susceptibles d'être recherchées et en l'état des techniques mises en oeuvre, le législateur a pu considérer que les autorisations de travaux de recherches en question ne constituent pas des décisions ayant une incidence significative sur l'environnement. Les dispositions de l'article Lp. 142-10 du Code minier de la Nouvelle-Calédonie relatives aux autorisations de travaux de recherches sont donc conformes à la Constitution.

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Retraite

[Brèves] Définition du mode de preuve de l'imputabilité au service d'une pathologie en l'absence de présomption légale et en présence d'une affection à évolution lente

Réf. : CE 2° et 7° s-s-r., 29 avril 2013, n° 344749, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A8832KC4)

Lecture: 2 min

N6984BTT

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Le 01 Mai 2013

Le Conseil d'Etat précise la définition du mode de preuve de l'imputabilité au service d'une pathologie en l'absence de présomption légale et en présence d'une affection à évolution lente, dans une décision rendue le 29 avril 2013 (CE 2° et 7° s-s-r., 29 avril 2013, n° 344749, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A8832KC4). Il résulte des dispositions combinées des articles L. 2 (N° Lexbase : L1050G9R) et L. 3 (N° Lexbase : L1051G9S) du Code de pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre que, lorsque le demandeur d'une pension ne peut bénéficier de la présomption légale d'imputabilité et que, par ailleurs, cette imputabilité n'est pas admise par l'administration, il incombe à l'intéressé d'apporter la preuve de l'imputabilité de l'affection au service par tous moyens de nature à emporter la conviction des juges. Dans les cas où est en cause une affection à évolution lente et susceptible d'être liée à l'exposition du militaire à un environnement ou à des substances toxiques, il appartient aux juges du fond de prendre en considération les éléments du dossier relatifs à l'exposition du militaire à cet environnement ou à ces substances, eu égard, notamment, aux tâches ou travaux qui lui sont confiés, aux conditions dans lesquelles il a été conduit à les exercer, aux conditions et à la durée de l'exposition ainsi qu'aux pathologies que celle-ci est susceptible de provoquer. Il revient, ensuite, aux juges du fond de déterminer si, au vu des données admises de la science, il existe une probabilité suffisante que la pathologie qui affecte le demandeur soit en rapport avec son activité professionnelle. Lorsque tel est le cas, la seule circonstance que la pathologie pourrait avoir été favorisée par d'autres facteurs ne suffit pas, à elle seule, à écarter la preuve de l'imputabilité, si l'administration n'est pas en mesure d'établir que ces autres facteurs ont été la cause déterminante de la pathologie. En l'espèce, pour juger que le cancer broncho-pulmonaire dont a souffert M. X et qui a causé son décès n'était pas lié au service, la cour régionale des pensions ne s'est fondée que sur la "spécialité" de manoeuvrier de l'intéressé, pour en déduire que son exposition à l'amiante avait été limitée, sans prendre en compte ni les différentes tâches qu'il a exercées au cours de ses trente années de service sur différents navires de la marine nationale, ni les conditions particulières dans lesquelles il les a exercées, ni, enfin, les conditions et la durée de son exposition à l'amiante. Faute d'avoir pris en compte ces éléments, sur lesquels l'intéressé avait fourni des justifications, la cour a donc commis une erreur de droit.

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Public général

[Panorama] Panorama des arrêts mentionnés rendus par le Conseil d'Etat - Semaine du 22 au 26 avril 2013

Lecture: 10 min

N6892BTG

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Le 17 Mai 2013

Lexbase Hebdo - édition publique vous présente cette semaine une sélection des arrêts mentionnés aux tables du recueil Lebon rendus par le Conseil d'Etat, les plus pertinents, classés par thème.
  • Accès aux documents administratifs : les documents relatifs à l'élection d'un organe délibérant d'une fédération sportive ne sont pas des documents administratifs

- CE 9° et 10° s-s-r., 24 avril 2013, n° 338649 (N° Lexbase : A8728KCA): les documents relatifs à l'élection d'un organe délibérant d'une fédération sportive, qui a le statut d'une association à but non lucratif régie par la loi du 1er juillet 1901, relative au contrat d'association (N° Lexbase : L3076AIR), relèvent du fonctionnement interne de celle-ci et ne sont pas des documents administratifs, faute d'un lien suffisamment direct avec la mission de service public impartie à la fédération.

  • Accès aux documents administratifs : conditions de communication du contrat de travail d'un agent public

- CE 9° et 10° s-s-r., 24 avril 2013, n° 343024 (N° Lexbase : A8733KCG) : lorsque la rémunération qui figure dans le contrat de travail d'un agent public est arrêtée d'un commun accord entre les parties sans être déterminée par les règles régissant l'emploi en cause, elle révèle nécessairement une appréciation et un jugement de valeur portés sur la personne recrutée. La communication du contrat ne peut, dans ce cas, intervenir qu'après occultation des éléments relatifs à la rémunération.

  • Accès aux documents administratifs : prérogatives du juge de l'excès de pouvoir dans le contentieux des régimes spéciaux d'accès aux documents administratifs

- CE 9° et 10° s-s-r., 24 avril 2013, n° 337982 (N° Lexbase : A8727KC9) : si l'article 2 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 (N° Lexbase : L6533AG3) fait obligation à l'administration et à la commission d'accès aux documents administratifs, lorsqu'elles sont saisies d'une demande de communication d'un document administratif susceptible de relever de plusieurs des régimes d'accès mentionnés aux articles 20 et 21 de la même loi, de l'examiner d'office au regard de l'ensemble de ces régimes, à l'exception du régime organisé par l'article L. 213-3 du Code du patrimoine (N° Lexbase : L0205IB9), il n'appartient, en revanche, pas au juge de l'excès de pouvoir, saisi de conclusions tendant, sur le fondement de la seule loi du 17 juillet 1978, à l'annulation d'un refus de communiquer un document administratif, d'examiner d'office si ce refus méconnaît l'un des autres régimes d'accès aux documents administratifs.

  • Collectivités territoriales : recensement de la population relevant de communautés implantées sur le territoire de plusieurs communes

- CE 3° et 8° s-s-r., 26 avril 2013, n° 357221 (N° Lexbase : A8790KCK) : pour l'application des dispositions de l'article R. 2151-1 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L1114C97) aux personnes séjournant dans un établissement militaire d'enseignement implanté sur le territoire de plusieurs communes, il appartient à l'INSEE de répartir la population recensée entre ces communes en tenant compte de la situation des locaux d'habitation de l'établissement et de l'utilisation par ces personnes des principaux services publics dont la charge incombe à la commune. Dans le cas où ces personnes utiliseraient principalement des services publics à la charge d'une ou de plusieurs communes autres que celles sur le territoire desquelles les locaux d'habitation sont situés, la répartition de la population correspondant à la situation des locaux d'habitation devrait être pondérée en conséquence.

  • Collectivités territoriales : les dépenses de prise en charge par une personne publique des coûts de dépose et d'enfouissement du réseau câblé d'un opérateur de communications électroniques ne peuvent donner lieu à attribution du FCTVA

- CE 3° et 8° s-s-r., 26 avril 2013, n° 346849 (N° Lexbase : A8741KCQ) : il résulte de la combinaison des dispositions de l'article L. 1615-7 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L7671IPS), dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 (N° Lexbase : L6429HET), et de l'article L. 2224-35 du même code (N° Lexbase : L0735IGC), dans sa rédaction issue de la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 (N° Lexbase : L9189D7H), que la prise en charge, par une personne publique, des coûts de dépose et d'enfouissement du réseau câblé d'un opérateur de communications électroniques à l'occasion de l'enfouissement du réseau public aérien de distribution d'électricité dont les supports accueillaient également le réseau de télécommunications a principalement pour objet et pour effet d'avantager cet opérateur de communications électroniques. Par suite, les dépenses d'investissement correspondantes ne peuvent donner lieu à attribution du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée.

  • Droit des étrangers : les fonctionnaires et employés consulaires et les membres de leur famille ne peuvent bénéficier, dès leur inscription sur les listes consulaires, d'un titre de séjour spécial s'ils n'ont pas notifié leur présence en France au ministère des Affaires étrangères

- CE 1° et 6° s-s-r., 24 avril 2013, n° 354575 (N° Lexbase : A8779KC7) : le bénéfice du régime dérogatoire en matière de séjour des étrangers en France ouvert par le paragraphe 1 de l'article 46 de la Convention de Vienne du 24 avril 1963, sur les relations consulaires (N° Lexbase : L6802BHE), aux termes duquel : "les fonctionnaires consulaires et les employés consulaires, ainsi que les membres de leur famille vivant à leur foyer, sont exempts de toutes les obligations prévues par les lois et règlements de l'Etat de résidence en matière d'immatriculation des étrangers et de permis de séjour", qui permet aux personnes qu'il vise de bénéficier, dès leur inscription sur les listes consulaires, d'un titre de séjour spécial, est subordonné au respect des formalités prévues par le 1 de l'article 24 de cette convention. Par suite, les fonctionnaires et employés consulaires et les membres de leur famille ne peuvent se prévaloir des stipulations de l'article 46 s'ils n'ont pas notifié leur présence en France au ministère des Affaires étrangères, en application de l'article 24 de cette convention.

  • Droit des étrangers : obligation de prise en compte préalable de la situation personnelle de l'intéressé et la motivation des décisions d'éloignement forcé dans le cadre d'une procédure d'OQTF

- CE 1° et 6° s-s-r., 24 avril 2013, n° 351460 (N° Lexbase : A8758KCD) : le respect des exigences posées par les dispositions des articles 28 et 30 de la Directive (CE) 2004/38 du 29 avril 2004 (N° Lexbase : L2090DY3) (obligation de prise en compte préalable de la situation personnelle de l'intéressé et motivation des décisions d'éloignement forcé) doit être apprécié au regard des dispositions et des règles de droit interne applicables, qui devaient être regardées, avant même l'insertion dans le Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile d'un article L. 511-3-1 (N° Lexbase : L7180IQY) par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 (N° Lexbase : L4969IQ4), comme en assurant la complète transposition. En effet, d'une part, l'obligation de quitter le territoire français est une mesure qui doit, en tant que telle, être motivée en application des règles de forme édictées, pour l'ensemble des décisions administratives, par l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 (N° Lexbase : L8803AG7), et devait l'être, s'agissant des ressortissants des Etats membres de l'Union européenne, en application du deuxième alinéa du I de l'article L. 511-1 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur (N° Lexbase : L7189IQC). D'autre part, le prononcé des décisions de retour ne revêt jamais un caractère automatique, dès lors qu'il appartient, dans tous les cas, à l'autorité administrative de se livrer à un examen de la situation personnelle et familiale de l'étranger et de prendre en compte les éventuelles circonstances faisant obstacle à l'adoption d'une mesure d'éloignement à son encontre.

  • Droit rural : la prolongation même irrégulière du délai d'instruction des demandes d'autorisation d'exploiter empêche la naissance d'une autorisation tacite à l'expiration du délai de droit commun

- CE 4° et 5° s-s-r., 22 avril 2013, n° 349212 (N° Lexbase : A8750KC3) : il résulte des dispositions de l'article R. 331-6 du Code rural et de la pêche maritime (N° Lexbase : L5345HZY), qui permet au préfet de porter de quatre à six mois le délai d'instruction des demandes d'autorisation d'exploiter par décision motivée, notamment en cas de candidatures multiples soumises à l'avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture ou de consultation du préfet d'un autre département, que la notification au pétitionnaire, dans les quatre mois suivant l'enregistrement de sa demande, d'une décision portant le délai d'instruction à six mois fait obstacle à la naissance d'une autorisation tacite au terme du délai normal de quatre mois. Il en va, ainsi, alors même que la décision prolongeant le délai d'instruction aurait été prise par un fonctionnaire non habilité à cet effet, serait entachée d'une insuffisance de motivation ou ne serait pas justifiée par l'existence de candidatures multiples ou par la nécessité de recueillir l'avis du préfet d'un autre département, la circonstance que le délai d'instruction ait été prolongé irrégulièrement entachant toutefois d'illégalité la décision d'accorder ou de refuser l'autorisation lorsque celle-ci a eu une incidence sur le sens de la décision.

  • Electoral : l'absence de dépôt du compte de campagne dans les conditions et délai prescrits par le Code électoral peut amener le juge de l'élection à prononcer l'inéligibilité temporaire du candidat

- CE 4° et 5° s-s-r., 22 avril 2013, n° 357562 (N° Lexbase : A8794KCP) et n° 360590 (N° Lexbase : A8800KCW) : le fait pour un candidat de n'avoir pas déposé de compte de campagne dans le délai imparti par les dispositions de l'article L. 52-12 du Code électoral (N° Lexbase : L9949IP8) constitue un manquement à une obligation substantielle, que les circonstances particulières invoquées (décès du père du candidat pendant le délai de dépôt, faibles revenus mensuels du candidat et décès de sa mère deux mois après l'expiration du délai) ne suffisent pas à expliquer, et qui entraîne une inéligibilité de six ou dix-huit mois (cf. l’Ouvrage "Droit électoral" N° Lexbase : E1363A8Y).

  • Energie : la hausse du tarif "bleu" n'est pas manifestement insuffisante pour assurer un début de convergence tarifaire avec les prix de marché

- CE 9° et 10° s-s-r., 24 avril 2013, n° 352242 (N° Lexbase : A8760KCG) : le juge de l'excès de pouvoir contrôle l'absence de caractère manifestement insuffisant de la hausse des tarifs réglementés de vente de l'électricité fixée par les ministres compétents pour assurer la convergence tarifaire avec les prix de marché. En l'espèce, si elle ne permettait pas de résorber instantanément l'écart structurel, compte tenu, notamment, du prix de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique fixé par deux arrêtés des ministres chargés de l'Economie et de l'Energie, la hausse du tarif "bleu" fixée par l'arrêté attaqué du 28 juin 2011 (N° Lexbase : L7168IWE) n'était pas manifestement insuffisante pour assurer un début de convergence tarifaire.

  • Fonction publique : le fait que le non-renouvellement du contrat d'un agent employé depuis six ans sous contrat à durée déterminée par une collectivité territoriale n'ait pas été précédé d'un entretien n'est pas de nature, par elle-même, à entraîner l'annulation de la décision de non-renouvellement

- CE 3° et 8° s-s-r., 26 avril 2013, n° 355509 (N° Lexbase : A8784KCC) : il résulte des dispositions de l'article 38 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 (N° Lexbase : L1035G8T), que la décision d'une collectivité territoriale de ne pas renouveler le contrat d'un agent employé depuis six ans sous contrat à durée déterminée doit être précédée d'un entretien. Toutefois, hormis le cas où une telle décision aurait un caractère disciplinaire, l'accomplissement de cette formalité, s'il est l'occasion pour l'agent d'interroger son employeur sur les raisons justifiant la décision de ne pas renouveler son contrat et, le cas échéant, de lui exposer celles qui pourraient justifier une décision contraire, ne constitue pas pour l'agent, eu égard à la situation juridique de fin de contrat sans droit au renouvellement de celui-ci, et alors même que la décision peut être prise en considération de sa personne, une garantie dont la privation serait de nature, par elle-même, à entraîner l'annulation de la décision de non renouvellement (cf. l’Ouvrage "Fonction publique" N° Lexbase : E0569EQ7).

  • Pensions : conditions dans lesquelles les décisions des juridictions des pensions sont rendues publiques

- CE 1° et 6° s-s-r., 24 avril 2013, n° 350705 (N° Lexbase : A8754KC9) : aucune des dispositions du Code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, du décret n° 59-327 du 20 février 1959, relatif aux juridictions des pensions (N° Lexbase : L1938IN4), auxquelles renvoie ce décret ne précise les conditions dans lesquelles les décisions de ces juridictions sont rendues publiques. Il y a lieu, en pareil cas, de faire application de la règle générale de procédure applicable aux juridictions administratives, qui ne méconnaît pas les exigences de l'article 6 § 1 de la CESDH (N° Lexbase : L7558AIR), selon laquelle la décision juridictionnelle est rendue publiquement, soit par lecture publique, soit par tout moyen approprié assurant l'accès au texte de la décision, en particulier sa consultation au greffe de la juridiction qui l'a prononcée

  • Pensions : conditions dans lesquelles le juge des pensions peut opposer d'office le défaut de qualité pour agir d'un requérant

- CE 1° et 6° s-s-r., 24 avril 2013, n° 349109 (N° Lexbase : A8749KCZ) : aucune des dispositions du Code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, du décret n° 59-327 du 20 février 1959, relatif aux juridictions des pensions (N° Lexbase : L1938IN4), ou de celles du Code de procédure civile auxquelles renvoie ce décret ne précise les conditions dans lesquelles le juge des pensions peut opposer d'office le défaut de qualité pour agir d'un requérant. Il y a lieu, en pareil cas, de faire application de la règle générale de procédure applicable aux juridictions administratives selon laquelle le juge ne peut rejeter une demande pour ce motif, dès lors que cette irrecevabilité est régularisable, sans avoir invité son auteur à procéder à cette régularisation.

  • Responsabilité hospitalière : caractère indemnisable de l'aggravation du préjudice résultant de la faute d'un centre hospitalier

- CE 4° et 5° s-s-r., 22 avril 2013, n° 347883 (N° Lexbase : A8742KCR) : constitue une aggravation du préjudice pouvant ouvrir droit à une indemnisation complémentaire la circonstance que le syndrome neurologique apparu à la suite d'une faute médicale, bien que ne s'étant pas lui-même aggravé, ait eu pour conséquence directe une perte d'autonomie à un âge anormalement précoce.

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