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N9410BY8
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par Vincent Vantighem, Grand Reporter à BFM TV
Le 24 Novembre 2021
Avertissement : cet article contient l'évocation de scènes de viol et de violences à caractère sexuel. |
Quatre acteurs de films pornographiques mis en examen pour des viols commis lors des tournages. Révélée par BFM TV le 28 octobre, l’information a d’abord surpris. Comment de jeunes femmes dont l’activité consiste justement à avoir des relations sexuelles sous l’objectif d’une caméra ont-elles pu ensuite dénoncer des faits de viols ? En réalité, l’affaire illustre surtout l’évolution de la société, et donc de la justice, dans la prise en compte de la notion de consentement. Et lève un coin du voile sur les dessous peu reluisants de l’industrie pornographique dite « amateur », rattrapée depuis quelques mois par le mouvement #MeToo.
Tout a, en fait, commencé le 10 septembre 2020. À cette époque, 20 Minutes révélait l’ouverture d’une enquête préliminaire pour viols et proxénétisme aggravé par le parquet de Paris sur les conditions de tournage de films pornographiques diffusés sur la célèbre plateforme « Jacquie & Michel ». Saisi par trois associations féministes – Les Effrontées, Osez le Féminisme et le mouvement du Nid –, le parquet entendait ainsi vérifier que les actrices, embauchées lors des tournages, étaient bien consentantes pour toutes les pratiques auxquelles on leur demandait de prendre part. La question se posait au vu des premiers témoignages qui commençaient à affluer. À commencer par celui de Karima*.
Aujourd’hui âgée de 44 ans, cette femme regrette son passé de toxicomane. Cette période où elle était « en galère » pour acheter cocaïne et alcool. C’est ce qui l’a poussée à accepter de suivre un ami qui lui avait dit qu’il y avait un moyen simple de gagner un peu d’argent. Un soir, dans une maison de banlieue un peu glauque, elle se retrouve prise au piège. « On est descendus dans une cave, raconte-t-elle. Il y avait trois mecs. J’ai dit que je ne voulais pas autant d’acteurs. Mais ils m’ont répondu que les caméras étaient déjà installées... » Impossible de s’enfuir, de faire demi-tour. « Alors, j’ai fini par me laisser faire. Ils m’ont salie. Ils m’ont imposé des trucs que je ne voulais pas... »
Un faux profil sur les réseaux sociaux pour rabattre des actrices
Il n’a fallu que quelques semaines pour découvrir et comprendre que Karima n’était pas la seule jeune femme à avoir connu pareil sort. Et que « Jacquie & Michel » n’était pas la seule plateforme de diffusion concernée… Le 13 octobre 2020, dès potron-minet, les gendarmes de la section de recherches de Paris procédaient à un vaste coup de filet pour arrêter les responsables du site « French Bukkake ».
Implantée sur le web depuis des années, cette franchise du X dit « amateur » s’est fait connaître en popularisant une pratique sexuelle qui consiste à livrer une jeune femme en pâture à de très nombreux hommes. On est ici dans la recherche de la domination et de la violence. Sauf, qu’après un travail de veille, les enquêteurs se sont aperçus que les jeunes femmes étaient bien souvent en souffrance et ne paraissaient pas du tout être d’accord avec ce qu’on leur imposait. Sur les réseaux sociaux, plusieurs internautes avaient d’ailleurs alerté, dès 2018, après avoir vu des actrices en pleurs, hurlant de douleur ou même recroquevillées en position fœtale à l’issue des scènes tournées…
Il y a un peu plus d’un an, les responsables du site ont donc été mis en examen pour viols, proxénétisme aggravé et traite des êtres humains. Tout comme un homme au centre du stratagème mis en place pour recruter toujours plus de nouvelles actrices. Sous couvert d’un faux profil, il se servait des réseaux sociaux pour approcher des jeunes femmes fragiles et en difficulté financière dans le but de les convaincre de participer à un tournage. « Tout part de ce stratagème » confie Vanina Méplain, une avocate qui défend deux plaignantes. « Le faux profil présentait le porno comme quelque chose de sympa, de marrant, de facile... ».
La réalité était beaucoup plus sordide. L’enquête a permis d’identifier une cinquantaine de victimes potentielles, considérées ni plus ni moins que comme des « morceaux de viande », selon l’expression qui revient le plus souvent dans leur bouche aujourd’hui. « Une fois la proposition acceptée, elles ne se sentaient plus le droit de partir. Elles n’osaient plus reculer », poursuit Vanina Méplain.
Comme Sophie* qui s’est ainsi retrouvée, du jour au lendemain, avec deux acteurs sans scrupules sur le canapé d’un appartement loué sur Airbnb pour une enveloppe de 250 euros. « Alors qu’elle était en train de prendre une douche après une scène, l’un des acteurs est rentré dans la salle de bains pour avoir, à nouveau, un rapport avec elle » décrit son avocate, « comme ça. Comme si cela ne posait aucun problème. Comme si, de toute façon, elle était consentante à jamais... ».
« Il faudra voir si cela ne constitue pas des actes de torture et de barbarie »
Fin octobre, la justice est donc passée à la vitesse supérieure en mettant en examen quatre acteurs ayant participé aux scènes pour « French Bukkake ». Plombier, éducateur spécialisé dans la vraie vie… Ils sont d’abord tombés des nues quand les gendarmes les ont interpellés. Selon nos informations, ils ont commencé par nier les faits en garde à vue, expliquant qu’ils étaient persuadés que le consentement des actrices avait été recueilli et figurait noir sur blanc sur des contrats.
Mais quand les enquêteurs ont commencé à leur montrer les films dans lesquels ils avaient joué, les rushs non diffusés où l’on pouvait voir la souffrance des jeunes femmes, ils n’ont pu que se rendre à l’évidence. L’un d’entre eux a même demandé d’arrêter la diffusion, choqué par ce qu’il voyait et dont il ne s’était pas rendu compte à l’époque. Preuve de la gravité des charges, trois des quatre mis en examen ont été placés en détention provisoire.
« La question de la qualification pénale va se poser, réagit, de son côté, Gérard Tcholakian qui défend l’une des plaignantes. Pour l’instant, on est sur des faits de viols et de traite des êtres humains. Mais il faudra voir si cela ne constitue pas, en fait, des actes de torture et de barbarie... »
Il faut laisser le temps au juge d’instruction d’analyser les choses. Il faut aussi et surtout laisser du temps aux jeunes femmes de se reconstruire. Pas simple : la quasi-totalité des plaignantes explique ne pas parvenir à surmonter les faits dans la mesure où les vidéos dans lesquelles elles estiment avoir été violées continuent à circuler sur la toile, disséminées dans des pays étrangers, recopiées de site pornographique en site pornographique. « Ma cliente est partie prendre l’air à l’étranger » indique sobrement Gérard Tcholakian. «Socialement, la situation était devenue trop difficile à vivre pour elle ».
Comme pour la jeune femme que défend également Quentin Dekimpe. Lui affirme que sa cliente a déjà été reconnue et alpaguée dans la rue par un « amateur » qui l’avait reconnue. « Aujourd’hui, elle doit composer avec ça aussi. Alors qu’elle vivait tranquillement comme tout le monde et qu’elle a juste cédé lors d’un moment de faiblesse dans sa vie personnelle ».
Les géants du X se défendent à coups de chartes
Mais il aura fallu en passer par cette souffrance pour que l’industrie pornographique prenne conscience du problème. Dans la foulée de l’ouverture de l’enquête préliminaire, la plateforme « Jacquie & Michel » a publié une charte de bonnes conduites dans le but de protéger les actrices. La major « Dorcel » a fait de même. Quant au géant de la diffusion « Pornhub », il a décidé de supprimer des millions de vidéos après une longue enquête du New-York Times révélant qu’il diffusait du contenu présentant des scènes de viol, des scènes avec des mineurs et même ce que l’on appelle du revenge porn (le fait de publier une vidéo à caractère sexuel de quelqu’un sans son consentement dans le but de lui nuire).
Un début loin d’être suffisant pour les associations féministes à l’origine du premier signalement. Elles militent toujours aujourd’hui pour l’interdiction pure et simple de l’industrie pornographique, qu’elles considèrent ni plus ni moins que comme une industrie avilissant la femme. Un avis qui n’est pas partagé par l’ensemble des actrices. Ces derniers mois, de nombreuses d’entre elles se concentrent sur des plateformes personnelles et privées, telles qu’Onlyfans. Sans intermédiaires, cela leur permet de ne participer qu’à ce qu’elles souhaitent et de diffuser leur contenu à leurs abonnés en direct. « Cela permet d’avoir des échanges avec son public, précise l’une d’entre elles. Cela marche bien. Même si pour l’instant, cela ne me permet de gagne que 500 à 600 euros par mois... ».
*Tous les prénoms ont été changés.
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newsid:479410
Réf. : Cass. civ. 2, 10 novembre 2021, n° 20-14.433, F-B (N° Lexbase : A45057BH)
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N9394BYL
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par Marie Le Guerroué
Le 16 Novembre 2021
► La procédure de contestation en matière d'honoraires d'avocats concerne les seules contestations relatives au montant et au recouvrement de leurs honoraires, à l'exclusion, notamment, de celles afférentes à la désignation du débiteur de l'honoraire ; dès lors, le premier président, saisi d'une contestation relative à l'identité du débiteur des honoraires, doit surseoir à statuer dans l'attente de la décision de la juridiction compétente pour en connaître.
Faits et procédure. Une avocate était intervenue, à la demande d'un mandataire pour la défense des intérêts de son frère. L'avocate avait adressé au mandataire une facture d'un montant de 2 500 euros HT, soit 3 000 euros TTC, correspondant aux diligences effectuées dans ce dossier. Celui-ci ayant refusé de régler cette facture, l'avocate avait saisi le Bâtonnier de l'Ordre des avocats de Mâcon d'une demande de fixation de ses honoraires. Soutenant que le seul client de l'avocate était son frère, le mandataire a sollicité du premier président, saisi du recours formé contre la décision rendue par le Bâtonnier, un sursis à statuer dans l'attente de la décision qui serait rendue par la juridiction compétente pour trancher la question de l'identité du débiteur des honoraires.
Ordonnance. Pour dire n'y avoir lieu de surseoir à statuer, l'ordonnance retient qu'il résulte des pièces produites que, même si le bénéficiaire de l'assistance de l’avocate est le frère du mandataire, il n'en demeure pas moins que l'avocate, qui n'était pas de permanence pénale, est intervenue pour la défense de celui-ci à la demande du mandataire et qu'elle ne l'a défendu qu'en raison des liens confraternels qu'elle entretenait avec ce dernier et que, dès lors, c'est à juste titre qu'elle sollicite la rémunération de sa prestation envers celui qui l'a mandatée.
Réponse de la Cour. La Cour rend sa décision au visa de l'article 174 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 (N° Lexbase : L8168AID) et des articles 49 (N° Lexbase : L0569I8L) et 378 (N° Lexbase : L2245H4W) du Code de procédure civile. Elle considère qu’il résulte du premier de ces textes que la procédure de contestation en matière d'honoraires d'avocats concerne les seules contestations relatives au montant et au recouvrement de leurs honoraires, à l'exclusion, notamment, de celles afférentes à la désignation du débiteur de l'honoraire. En application des deux derniers, le premier président, saisi d'une contestation relative à l'identité du débiteur des honoraires, doit surseoir à statuer dans l'attente de la décision de la juridiction compétente pour en connaître. Dès lors, en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations qu'était contestée l'identité du débiteur des honoraires réclamés, le premier président, qui devait, dès lors, surseoir à statuer sur la fixation des honoraires dans l'attente de la décision de la juridiction compétente pour statuer sur cette question préalable, a violé les textes précités.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les honoraires, émoluments, débours et modes de paiement des honoraires, La détermination du débiteur de l'honoraire, in La profession d’avocat, (dir. H. Bornstein), Lexbase (N° Lexbase : E37843RL). |
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newsid:479394
Réf. : Cass. soc., 20 octobre 2021, n° 19-24.483, F-B (N° Lexbase : A525149D)
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N9326BY3
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par Marie Le Guerroué
Le 16 Novembre 2021
► Un défenseur syndical n'a pas à notifier ses conclusions en envoyant un pli recommandé à chacun des avocats membres de la même société.
Faits et procédure. Le défendeur au pourvoi représenté par un défenseur syndical, avait relevé appel d’un jugement de conseil de prud'hommes dans un litige l’opposant à un liquidateur judiciaire en présence de l'Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (AGS). Les intimées avaient constitué chacun un avocat, exerçant tous deux au sein de la même société d’avocat. Le défenseur syndical avait notifié ses conclusions aux intimées par un seul courrier recommandé adressé à la société d’avocat. Le liquidateur de la société estime toutefois qu’en retenant que le défenseur syndical représentant avait valablement notifié ses conclusions d’appelant en adressant celles-ci une seule fois à la société d’avocat, sans avoir à les notifier en envoyant un pli recommandé aux deux avocats concernés, la cour d’appel d’Orléans (CA Orléans, 25 septembre 2019, n° 19/01110 N° Lexbase : A6988ZPI) a violé les articles 906 (N° Lexbase : L7238LES), 908 (N° Lexbase : L7239LET), 911 (N° Lexbase : L7242LEX), 930-2 (N° Lexbase : L6687LEE), 930-3 (N° Lexbase : L6642LEQ) du Code de procédure civile, ensemble les articles 19 et 21 du décret n° 93-492 du 25 mars 1993 relatif à l’exercice de la profession d’avocat dans le cadre d’une société d'exercice libéral (N° Lexbase : L4321A4S). Il forme un pourvoi devant la Cour de cassation.
Réponse de la Cour. Selon l'article 21 du décret n° 93-492 du 25 mars 1993, chaque avocat associé exerçant au sein d’une société d’exercice libéral exerce les fonctions d'avocat au nom de la société. En outre, en application de l’article 690 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L6891H7D), les notifications entre un avocat et un défenseur syndical, sont régulièrement accomplies, à l’égard d’une société d'avocat, au siège de celle-ci. Il s'ensuit que c’est à bon droit que la cour d’appel a confirmé l'ordonnance du conseiller de la mise en état ayant rejeté la demande de caducité de la déclaration d’appel après avoir relevé que le défenseur syndical avait notifié le 10 avril 2018, ses conclusions d’appel par un seul pli recommandé avec demande d’avis de réception à l’adresse de la société d'avocats, représentant, par deux avocats distincts, associés au sein de cette structure, chacun des intimés.
Rejet. La Cour rejette par conséquent le pourvoi.
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Réf. : Cass. civ. 3, 20 octobre 2021, n° 20-18.171, F-D (N° Lexbase : A00507A4)
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N9330BY9
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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, Rome Associés, Chargée d’enseignements à l’UPEC et Paris Saclay, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats
Le 16 Novembre 2021
► Le défaut du caractère contradictoire d’une expertise judiciaire ne peut être sanctionné que par la nullité ; et non l’inopposabilité ;
► faute de demande d’annulation, il n’y a pas de sanction possible d’autant que le juge n’est pas lié par le rapport d’expertise.
Le procès se gagne ou se perd devant l’expert judiciaire. Cette phrase, aux allures de slogan, résume l’importance du rapport déposé par l’expert. Même si le juge n’est jamais lié par les conclusions de l’expert, ces conclusions sont, dans la grande majorité des cas, entérinées par le juge. Cela n’est d’ailleurs pas surprenant puisque le juge désigne l’expert justement pour l’éclairer.
Nombreux sont donc ceux qui, déçus des termes du rapport déposé, tentent d’en réduire la portée dans le cadre de la procédure au fond qui conduira à leur jugement. Mais rares sont les fondements juridiques pour y parvenir. Les motifs d’annulation d’un rapport se réduisent comme un peu de chagrin, à l’image des cas d’inopposabilité. Le manquement au principe du contradictoire, garantie d’un procès équitable au sens de l’article 6 de la CESDH (N° Lexbase : L7558AIR), proclamé au célèbre article 16 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1133H4Q), fait toutefois partie de l’un d’eux.
La jurisprudence s’est néanmoins durcie. Pendant longtemps, il était possible de sanctionner par l’inopposabilité une expertise réalisée sans respect du principe du contradictoire. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Si une partie critique une irrégularité dans le déroulement des opérations d’expertise, elle ne doit pas se contenter de demander que le rapport lui soit inopposable, elle doit réclamer la nullité des opérations d’expertise dans leur ensemble (V. notamment Cass. mixte, 28 septembre 2012, n° 11-11.381 N° Lexbase : A5411ITL), mais il faut pour cela rapporter la preuve d’un grief (Cass. civ. 3, 14 mai 2020, n° 19-16.278, FS-P+B+I N° Lexbase : A05823MI).
Autrement dit, un rapport d’expertise, même établi non contradictoirement, n’est pas, per se, nul. Il vaut comme titre et doit, en cela, être examiné par le juge dès lors qu’il est soumis à la discussion des parties (Cass. civ. 2, 9 septembre 2020, n° 19-13.755, FS-P+B N° Lexbase : A32853XX).
Le juge ne peut, cependant, statuer exclusivement sur un tel rapport. Le rapport non contradictoire doit être corroboré par d’autres éléments de preuve (pour exemple, Cass. civ. 2, 13 septembre 2018, n° 17-20.099, F-P+B N° Lexbase : A7884X4R) ainsi que le confirme l’arrêt rapporté.
En l’espèce, une SCI entreprend la rénovation lourde d’un bâtiment pour le revendre en VEFA. Après la réception, les faux plafonds s’effondrent et l’acquéreur assigne les constructeurs et leur assureur en réparation des préjudices subis. Une expertise est ordonnée. Devant les juges du fond, l’un des constructeurs conteste les termes du rapport au motif, notamment, que les opérations conduites par l’expert n’auraient pas été contradictoires.
La cour d’appel de Paris, dans un arrêt rendu le 15 janvier 2020 (CA Paris, 1, 3, 15 janvier 2020, n° 19/06961 N° Lexbase : A08353BK), le condamne sur le fondement du rapport. Le constructeur forme un pourvoi en cassation qui est rejeté.
Les parties à une instance au cours de laquelle une expertise a été ordonnée ne peuvent invoquer l’inopposabilité du rapport d’expertise en raison d’irrégularités affectant le déroulement des opérations d’expertise, lesquelles sont sanctionnées selon les dispositions de l’article 175 du CPC (N° Lexbase : L1574H43) c’est-à-dire par la nullité.
En l’absence d’une demande d’annulation des rapports d’expertise, la cour d’appel, constatant que leur contenu avait pu être débattu contradictoirement devant elle et appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve soumis à son examen, a pu se fonder sur les appréciations de l’expert pour juger de la responsabilité du constructeur.
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Réf. : AMF, recommandation DOC-2021-06, 29 octobre 2021 (N° Lexbase : L7980L83)
Lecture: 3 min
N9336BYG
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par Vincent Téchené
Le 16 Novembre 2021
► À l’approche de l’arrêté des comptes 2021, l’AMF a mis à la disposition des sociétés cotées, le 29 octobre 2021, ses recommandations et la synthèse de ses travaux de revue des états financiers annuels menés entre octobre 2020 et septembre 2021. Ces recommandations abordent notamment le traitement de l’impact de la pandémie et de la prise en compte des risques environnementaux.
L’AMF relève en premier lieu, que sur la période octobre 2020 à septembre 2021, un peu plus des trois quarts des revues ont conduit à l’envoi aux sociétés de recommandations et points d’amélioration. Les points d’attention les plus fréquents ont porté sur les tests de dépréciation des actifs non financiers (notamment les informations fournies sur les hypothèses opérationnelles utilisées et les analyses de sensibilité) et les informations sur le risque de crédit (dépréciation des créances clients, programme d’affacturage). La reconnaissance du chiffre d’affaires fait également l’objet de recommandations, souvent afin de clarifier le lien entre la présentation de leurs activités et les principes de reconnaissance des revenus.
Par ailleurs, l’AMF illustre également cette partie de quelques cas pratiques spécifiques rencontrés, par exemple la reconnaissance des impôts différés, le classement en équivalents de trésorerie, le traitement comptable des libérations de surface ou encore des SPAC.
Enfin, l’AMF souligne l’obligation d’application du format ESEF aux rapports financiers annuels 2021. Une page dédiée sur le site de l’AMF aborde l’ensemble des problématiques afférentes à cette nouvelle obligation.
Pour l’AMF, l’importance du lien entre les risques environnementaux et les états financiers va continuer de croître et évoluer sur les périodes à venir. Elle rappelle la nécessité de commencer les réflexions sur ce sujet et de faire des liens entre les informations financières et extra-financières, notamment en cas d’engagements climatiques. L’AMF souligne également la nécessité, pour toutes les sociétés, d’être transparentes et claires dans les états financiers sur la manière dont ces éléments ont été pris en compte (dont dans les durées d’amortissement ou encore les tests de dépréciations des actifs).
Du fait de la poursuite de la pandémie de la covid-19, une seconde partie aborde ce thème et revient, dans la continuité des recommandations 2020, sur la nécessité de transparence dans un contexte 2021 de manque de visibilité sur l’évolution de cette crise sanitaire et ses impacts sur l’économie, avec des situations très diverses selon les sociétés.
Enfin, une partie spécifique est consacrée aux institutions financières autour du risque de crédit. Cette partie souligne l’importance d’informations détaillées sur les expositions, les dépréciations ainsi que le modèle de détermination des pertes de crédit attendues.
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Réf. : CE 8° et 3° ch.-r., 20 octobre 2021, n° 449292, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A6515498)
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N9280BYD
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par Marie-Claire Sgarra
Le 16 Novembre 2021
► La circonstance que certains titres sont grevés d’un engagement de conservation ne constitue pas un obstacle à la méthode de la valeur moyenne pondérée pour le calcul d’une plus-value de cession de titres appartenant à une série de titres de même nature acquis pour des prix différents ;
► Pour le calcul du prix moyen pondéré, il doit être tenu compte de tous les titres de même nature, y compris ceux couverts par un engagement de conservation.
Les faits :
🔎 Principe. Les gains nets mentionnés à l'article 150-0 A du CGI (N° Lexbase : L0732L7A) sont constitués par la différence entre le prix effectif de cession des titres ou droits, net des frais et taxes acquittés par le cédant, et leur prix effectif d'acquisition par celui-ci ou, en cas d'acquisition à titre gratuit, leur valeur retenue pour la détermination des droits de mutation. En cas de cession d'un ou plusieurs titres appartenant à une série de titres de même nature acquis pour des prix différents, le prix d'acquisition à retenir est la valeur moyenne pondérée d'acquisition de ces titres.
⚖️ Solution du CE. En appel, pour juger que les requérants n'étaient pas fondés à soutenir que le prix d'acquisition à retenir pour le calcul de la plus-value de cession des titres de la société financière détenus en pleine propriété par l’épouse et cédés le 11 juillet 2013 devait être égal à la moyenne pondérée du prix d'acquisition de l'ensemble des titres de cette même société qu'elle détenait en pleine propriété à la date de la cession, y compris les titres pour lesquels elle avait souscrit un engagement de conservation, la cour administrative d'appel s'est fondée sur ce que ces derniers titres, compte tenu de l'engagement de conservation dont ils avaient fait l'objet, ne pouvaient être regardés comme constituant, avec les titres cédés, une série de titres de même nature. À tort selon le CE qui juge que la CAA a commis une erreur de droit.
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Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 5 novembre 2021, n° 433367, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A85527AY)
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N9372BYR
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par Marie-Claire Sgarra
Le 16 Novembre 2021
► Les prestations dont la rémunération est susceptible d'être imposée entre les mains de la personne qui les a effectuées correspondent à un service rendu, pour l'essentiel par elle, et pour lequel la facturation par une personne domiciliée ou établie hors de France ne trouve aucune contrepartie réelle dans une intervention propre de cette dernière, permettant de regarder ce service comme ayant été rendu pour son compte.
Les faits :
🔎 Principe (CGI, art. 155 A). Les sommes perçues par une personne domiciliée ou établie hors de France en rémunération de services rendus par une ou plusieurs personnes domiciliées ou établies en France sont imposables au nom de ces dernières :
⚖️ En appel, la CAA de Paris a jugé qu'au cours des années en litige, la société de droit britannique n'avait aucune activité réelle et que les décisions relatives à l'entretien des marques et brevets étaient prises par la requérante qui devait, dès lors, être regardée comme réalisant les prestations de gestion du portefeuille de ces marques et brevets. La cour en a déduit que l'administration pouvait faire application des dispositions de l'article 155 A du CGI précitées pour imposer au nom des requérants les redevances versées en exécution du contrat de licence.
⚖️ Solution du CE. En statuant par ces motifs alors, d'une part, que les redevances versées en contrepartie de la concession du droit d'exploiter une licence de marques et brevets ne peuvent être regardées comme la contrepartie d'un service rendu au sens et pour l'application de l'article 155 A du CGI et que, d'autre part, l'entretien, le renouvellement, l'extension des marques et brevets et, plus généralement, l'accomplissement des actes nécessaires au maintien de leur protection ne peuvent être regardés comme une activité dissociable de la concession même de ces licences de marques et brevets, la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit.
💡 Le Conseil d’État (CE 3° et 8° ch.-r., 4 novembre 2020, n° 436367, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A517433Z) avait jugé qu’un pilote d’hélicoptères envoyé à l’étranger par une société française, mais payé par une société interposée basée à Jersey devait être considéré :
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newsid:479372
Réf. : CE 2° et 7° ch.-r., 11 octobre 2021, n° 443879, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A864048I)
Lecture: 2 min
N9299BY3
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par Yann Le Foll
Le 16 Novembre 2021
► Pour la liquidation anticipée de la pension en cas d'accomplissement d'années de services dans des emplois classés dans la catégorie active doivent être prises en compte les périodes de détachement accomplies dans ces mêmes emplois.
Principe. L'article L. 24 du Code des pensions civiles et militaires de retraite (N° Lexbase : L2697IZW) a pour objet, en accordant une possibilité de liquidation anticipée de la pension en cas d'accomplissement de quinze années de services dans des emplois classés dans la catégorie active, de tenir compte du risque particulier ou des fatigues exceptionnelles que présentent certains emplois. Par suite, les services accomplis par un fonctionnaire en détachement dans un emploi classé dans la catégorie active qui exerce effectivement des fonctions correspondant à cet emploi doivent être pris en compte au titre de cet article, quelles que soient les fonctions qu'il exerçait ou qu'il avait vocation à exercer dans son corps d'origine.
Première instance. Le tribunal administratif a jugé que le ministre de l'Éducation nationale avait pu refuser de prendre en compte, au titre de la catégorie active pour le calcul des droits à pension, la durée des services effectués par l’agente durant la période précédant sa titularisation comme institutrice pendant laquelle elle était en détachement, dès lors que son emploi dans son corps d'origine ne relevait pas de la catégorie active et ne correspondait pas à des fonctions de même nature et alors même que les deux années accomplies en qualité d'élève institutrice comportaient l'exercice effectif de ces fonctions (jurisprudence CE 9° et 10° ch.-r., 30 septembre 2019, n° 414329, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A1210ZQU).
Décision CE. Il a ainsi commis une erreur de droit au regard du principe précité selon lequel un fonctionnaire dont l’emploi d’origine relève de la catégorie sédentaire et commençant à effectuer des emplois de catégorie active en détachement avant d’être titularisé dans ce nouveau corps peut voir ses années effectuées pendant le détachement prises en compte au titre de la catégorie active. Dès lors, son jugement doit être annulé.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La fin de carrière des fonctionnaires dans la fonction publique d'État, L'admission à la retraite du fonctionnaire dans la fonction publique d'État : les effets de la mise à la retraite, in Droit de la fonction publique, (dir. P. Tifine), Lexbase (N° Lexbase : E07803LH). |
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Réf. : Cass. civ. 2, 4 novembre 2021, n° 21-14.023, F-B (N° Lexbase : A06927BA)
Lecture: 3 min
N9397BYP
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par Alexandra Martinez-Ohayon
Le 17 Novembre 2021
► La deuxième chambre civile de la Cour de cassation, dans son arrêt rendu le 4 novembre 2021, rappelle que dans le cadre de mesures d’instruction in futurum, l’article 145 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1497H49) n’exige pas que le demandeur ait à établir le bien-fondé de l’action en vue de laquelle la mesure d'instruction est sollicitée.
Faits et procédure. Dans cette affaire, une société invoquant la poursuite par deux sociétés de la production et de la fabrication de modèles de pergolas, en violation des clauses d’un protocole d’accord a saisi un président d’un tribunal de commerce, de deux requêtes aux fins d’ordonner la désignation d’un huissier de justice pour diligenter diverses mesures d’instruction, sur le fondement de l’article 145 du Code de procédure civile. Le 4 juillet 2019 le président a accueilli les requêtes. Le 9 juillet 2019, les mesures d’instruction ont été effectuées.
Le 9 janvier 2020, le président du tribunal de commerce a débouté les défenderesses de leur demande de rétractation des ordonnances, qui ont interjeté appel à l’encontre de sa décision.
Le pourvoi. La demanderesse fait grief à l’arrêt rendu le 15 mars 2019 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence, d’avoir rétracté les deux ordonnances rendues sur requête par le président du tribunal de commerce de Cannes, et d’avoir en conséquence, annulé les opérations de constat et les procès-verbaux de l’huissier désigné ; également d’avoir ordonné la restitution des documents et les copies séquestrées par l’huissier, des constats, du premier et second originaux et de toutes les copies et exemplaires aux sociétés défenderesses ; enfin, de faire interdiction, sous astreinte, d'avoir fait état ou usage du constat d’huissier ou des pièces rétractées.
En l’espèce, pour rétracter les deux ordonnances et annuler les opérations et procès-verbaux diligentés par l’huissier de justice, la cour d’appel a retenu que la requérante ne justifiait pas d’un motif légitime au sens de l’article 145 du Code de procédure civile. Les juges d’appel ont retenu que l’objet du litige au fond était de déterminer les manquements d’une des sociétés défenderesses à ses obligations contractuelles, et d’engager sa responsabilité délictuelle. Enfin que les pièces sollicitées et l’analyse juridique des relations contractuelles ne permettaient pas de trancher ce point.
Solution. Énonçant la solution précitée au visa de l’article 145 du Code de procédure civile, la Cour de cassation censure le raisonnement des juges d’appel, et casse et annule en toutes ses dispositions l’arrêt d’appel.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : L’administration judiciaire de la preuve, Les conditions de recevabilité des demandes de mesures d'instruction in futurum, in Procédure civile (dir. E. Vergès), Lexbase (N° Lexbase : E71773UD). |
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