Réf. : CA Rouen, 12 mai 2021, n° 20/03250 (N° Lexbase : A80584RU)
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N7771BYH
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par Marie Le Guerroué
Le 08 Juin 2021
► En ne régularisant aucune assignation au fond, contrairement à ce qui lui avait été demandé par son client, l’avocat a commis un manquement à ses obligations contractuelles.
Faits et procédure. Une banque avait consenti à une SARL un prêt professionnel d'un montant de 472 600 euros. Les deux co-gérants de la société emprunteuse s’étaient portés cautions solidaires. Le redressement judiciaire de la société ayant été prononcé, la créance de la banque avait été admise pour un montant de 491 240,48 euros à titre privilégié.
La banque avait fait assigner la société d’avocat qui la représentait devant le tribunal de grande instance d'Alençon afin d'obtenir sa condamnation au paiement de la somme de 217 499,50 euros au titre de sa responsabilité civile professionnelle pour avoir omis d’engager une action. La cour d'appel de Rouen statue, dans cette affaire, sur renvoi après cassation.
La Cour de cassation (Cass. civ. 1, 9 septembre 2020, n° 19-19.351, F-D, N° Lexbase : A54943TN) avait dans un arrêt du 9 septembre 2020 constaté que pour rejeter la demande indemnitaire formée par la banque, après avoir admis que l'avocat avait commis une faute en omettant d'engager une action contre les cautions et que cette action avait des chances de succès, la cour d'appel de Caen (CA Caen, 14 mai 2019, n° 17/01058 N° Lexbase : A2247ZBT) avait retenu que la banque échouait à rapporter la preuve de ses chances raisonnables de recouvrement de sa créance. Elle avait relevé qu'en statuant ainsi en considération de perspectives de recouvrement étrangères aux chances de succès de l'action que l'avocat aurait dû exercer, la cour d'appel avait violé les articles 1147 (N° Lexbase : L0866KZ4) et 1149 (N° Lexbase : L0864KZZ) du Code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 (N° Lexbase : L4857KYK), alors que le préjudice subi par un justiciable, privé, par la faute de son avocat, d'une chance de voir ses prétentions accueillies par une juridiction, doit s'apprécier exclusivement au regard de la probabilité de succès de l'action envisagée. La Cour de cassation avait censuré l'arrêt rendu, dans cette affaire, par la cour d'appel de Caen.
La cour d’appel de Rouen rappelle qu’en vertu de l'article 1147 ancien du Code civil, applicable au litige, le débiteur est condamné au paiement de dommages-intérêts à raison de l'inexécution de son obligation et, en vertu de l'article 13 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005 (N° Lexbase : L6025IGA), l'avocat doit conduire jusqu'à son terme l'affaire dont il est chargé, sauf si son client l'en décharge ou s'il décide de ne pas poursuivre sa mission. Dans ce dernier cas, il en informe son client en temps utiles pour que les intérêts de celui-ci soient sauvegardés.
La cour fait sienne l’analyse du premier juge retenant la faute de l’avocat après avoir constaté que la banque justifiait avoir demandé, à deux reprises à ce qu'une assignation au fond soit entreprise à l'égard des cautions du prêt bancaire accordé de la société dont ils étaient gérants, et en retenant qu'il n'était pas contesté qu’il était l'avocat habituel de la banque dans le département de la Sarthe. Elle énonce la solution susvisée.
La cour rappelle qu’il convient de rechercher, pour évaluer le préjudice pouvant résulter de la faute de l'avocat, s'il existait une chance sérieuse de succès de l'action en paiement qu'il avait été chargé d'engager, en reconstituant fictivement, au vu des conclusions des parties et des pièces produites aux débats, la discussion qui aurait pu s'instaurer devant le juge (Cass. civ. 1, 2 avril 2009, n° 08-12.848, F-P+B N° Lexbase : A5253EEB). À ce titre, la cour constate que les chances de succès de la banque apparaissaient très sérieuses. Elle fixe à la somme de 160 000 euros le préjudice subi par la banque au titre de cette perte de chance. À noter, qu’en première instance, le préjudice de la banque avait été évalué à 10 875 euros.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La responsabilité civile professionnelle de l'avocat, Le montant de la réparation du préjudice causé par la défaillance de l'avocat, in La profession d'avocat, (dir. H. Bornstein), Lexbase (N° Lexbase : E40493RE). |
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newsid:477771
Réf. : Décret n° 2021-651, du 26 mai 2021, relatif à l'adaptation au titre du mois de mai 2021 du fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences de l'épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation (N° Lexbase : L6027L4Y)
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N7729BYW
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par Vincent Téchené
Le 07 Juin 2021
► Un décret, publié au Journal officiel du 27 mai 2021, adapte le fonds de solidarité pour le mois de mai 2021.
Il ajoute, à ce titre, au décret n° 2020-371 du 30 mars 2020, relatif au fonds de solidarité (N° Lexbase : L6019LWT), un article 3-27 prévoyant le dispositif pour le mois de mai 2021. Celui-ci reconduit le régime prévu par l'article 3-26 pour le mois d'avril 2021.
En outre, il supprime le caractère ininterrompu de la fermeture au cours du mois de mai pour les entreprises exerçant leur activité principale dans le commerce de détail et ayant au moins un de leurs magasins de vente situés dans un centre commercial comportant un ou plusieurs bâtiments dont la surface commerciale utile est supérieure ou égale à 10 000 mètres carrés, en raison de leur réouverture le 19 mai 2021. Il apporte des précisions sur les aides perçues et à déclarer dans le cadre du régime des aides temporaires.
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newsid:477729
Réf. : Cass. crim., 26 mai 2021, n° 20-80.884, FS-P (N° Lexbase : A88474SH)
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N7818BY9
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par Adélaïde Léon
Le 09 Juin 2021
► Il doit désormais être jugé que le prévenu qui a offert de prouver la vérité des faits diffamatoires, conformément aux articles 35 et 55 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, reste recevable à soutenir, lors des débats au fond, que les propos poursuivis ne renferment pas l’imputation ou l’allégation d’un fait précis, susceptible de faire l’objet d’un débat sur la preuve de sa vérité.
Rappel des faits. Le 3 juillet 2013, l’édition 19/20 région Île-de-France du journal de France 3 diffusait un reportage concernant le licenciement de trois gardiennes par la société Financière Saint-James, nouveau propriétaire des lieux désireux de récupérer les locaux. À la requête de cette société, la directrice de la publication de France télévision et la société France télévisions, en sa qualité de civilement responsable, ont été citées à comparaître devant le tribunal correctionnel du chef de diffamation publique envers un particulier. Le tribunal a déclaré la prévenue coupable et l’a condamnée. L’ensemble des parties a interjeté appel.
En cause d’appel. La cour d’appel a débouté la société Financière Saint-James de l’ensemble de ses demandes. Cette dernière a formé un pourvoi.
Moyens du pourvoi. Il était reproché à la cour d’appel d’avoir débouté la société Financière Saint-James de ses demandes alors que les propos poursuivis constituaient une diffamation et, par ailleurs, que le prévenu qui a spontanément formé une offre de preuve de la vérité des faits diffamatoires ne peut ensuite soutenir que les termes ou expressions incriminées ne seraient pas diffamatoires faute de contenir l’imputation d’un fait précis susceptible de preuve.
Décision. La Cour censure l’arrêt d’appel au visa de l’article 593 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3977AZC) estimant que la cour d’appel n’avait pas apprécié le caractère diffamatoire des propos poursuivis en se fondant sur toutes les circonstances, même extrinsèques au passage concerné.
Mais l’intérêt de cet arrêt réside dans la nouvelle règle que dégage la Cour de cassation s’agissant des conséquences de la signification d’une offre de preuve sur les moyens de défense ultérieurement présentés.
Assez logiquement, la Chambre criminelle jugeait auparavant que le prévenu qui a, conformément à l’article 55 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse (N° Lexbase : L7589AIW), signifié une offre de preuve de la vérité des faits ne saurait ensuite soutenir que les propos incriminés ne seraient pas diffamatoires faute de contenir l’imputation d’un fait précis (Cass. crim., 22 mai 1990, n° 87-81.387 N° Lexbase : A5647CIY). Citant ce dernier arrêt à propos de l’incidence de l’offre de preuve sur la contestation du caractère diffamatoire de l’imputation litigieuse, Madame Sylvie Menotti, conseiller référendaire à la Cour de cassation expliquait très distinctement que : « Partant de l’idée que l’offre de preuve n’est possible que lorsque les faits sont suffisamment précis et qu’il est donc paradoxal de prétendre, à la fois, faire la preuve d’un fait précis et contester la précision dudit fait, la Cour de cassation a posé en règle que "le prévenu qui a spontanément offert, dans les conditions précisées à l’article 55 de la loi du 29 juillet 1881, de faire la preuve de la vérité des faits diffamatoires ne saurait ensuite soutenir que les termes ou expressions incriminés ne seraient pas diffamatoires, faute de contenir l’imputation d’un fait précis susceptible de preuve" ».
La Cour admettait en revanche que le prévenu qui forme une offre de preuve conserve la faculté de soutenir la suite que les propos incriminés ne portent pas atteinte à l’honneur ou à la considération de la partie civile (Cass. crim., 2 septembre 2003, n° 03-80.349, F-P+F+I N° Lexbase : A5616C9U).
La Chambre criminelle rappelle ici que l’offre de preuve ne peut être présentée que dans les dix jours de la signification de la citation et avant que ne s’ouvrent les débats (Loi du 29 juillet 1881, art. 35 et 55).
La Cour affirme ensuite que l’exceptio veritatis constitue un moyen de défense subsidiaire à celui consistant à contester que les propos incriminés contiennent l’imputation d’un fait précis attentatoire à l’honneur ou la considération de la partie civile. La Chambre criminelle en déduit que le respect des droits de la défense oblige à admettre que le prévenu qui a, pour les besoins de ce moyen de défense subsidiaire que constitue l’offre de preuve, considéré que les propos incriminés renferment l’imputation d’un fait précis susceptible donc d’un débat sur la preuve de sa vérité, puisse ensuite librement, devant le tribunal, soutenir, à titre principal cette fois, que tel n’est pas le cas et ainsi participer au débat au terme duquel les juges ont d’office la charge de prononcer sur ce point.
La Chambre criminelle pose donc un nouveau principe selon lequel le prévenu qui a formé une offre de preuve conformément aux délais et formes prévus aux articles 35 et 44 de la loi du 19 juillet 1881 reste recevable à soutenir, lors des débats au fond, que les propos poursuivis ne renferment pas l’imputation ou l’allégation d’un fait précis, susceptible de faire l’objet d’un débat sur la preuve de sa vérité.
En l’espèce, les juges ne pouvaient donc sur ce fondement déclarer irrecevable l’argumentation de la prévenue selon laquelle une partie des propos était trop lapidaire pour contenir l’imputation d’un fait précis. Les magistrats devaient, en tout état de cause, apprécier le sens et la portée dudit propos.
Pour aller plus loin :
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newsid:477818
Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 4 juin 2021, n° 436100, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A29554UY)
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N7823BYE
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par Yann Le Foll
Le 08 Juin 2021
► Pour réclamer l’indemnité due par un ancien élève de l'École polytechnique en cas de rupture de son engagement de servir, l’administration dispose d’un délai de cinq ans à compter de la date à laquelle l'agent a épuisé ses droits à disponibilité.
Principe. L'administration se doit de connaître la date à laquelle un agent a épuisé ses droits à disponibilité. C'est à compter de cette date, à laquelle elle peut constater que l'intéressé n'a pas demandé dans le délai prévu sa réintégration dans son corps d'origine, qu'elle peut le soumettre à l'obligation de remboursement de ses frais de scolarité faute d'avoir accompli la durée de services effectifs auprès de l'État. En vertu de l'article 2224 du Code civil (N° Lexbase : L7184IAC), l'administration dispose alors d'un délai de cinq ans pour le soumettre à cette obligation (CE 5° et 6° ch.-r., 3 juin 2020, n° 432172, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A70263M8).
Faits. Le requérant a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, le décret du 25 juin 2018, par lequel le Président de la République l'a radié des cadres à compter du 1er décembre 2012 et l'a soumis à l'obligation de remboursement des frais supportés par l'État lors de sa scolarité à l'École polytechnique, et d'autre part, la décision du 16 avril 2019 par laquelle le président du conseil d'administration de l'École polytechnique l'a déclaré redevable d'une somme de 23 309,45 euros au titre du remboursement de ses frais de scolarité.
Application du principe. L’intéressé avait épuisé ses droits à disponibilité à la date du 1er décembre 2012. Par suite, c'est à compter de cette date, que l'administration se devait de connaître et à laquelle elle pouvait constater que l'intéressé n'avait pas demandé dans le délai prévu sa réintégration dans son corps d'origine, que le requérant pouvait être soumis à l'obligation de remboursement de ses frais de scolarité faute d'avoir accompli la durée de services effectifs auprès de l'État.
Solution. Le décret du 25 juin 2018 ayant été pris après l'expiration du délai de cinq ans précité, la prescription quinquennale fait obstacle à ce que soit mis à la charge de l’intéressé le remboursement de ses frais de scolarité. Celui-ci est donc fondé à soutenir que cette créance est prescrite.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les positions statutaires, La fin de la mise en disponibilité, in Droit de la fonction publique, (dir. P. Tifine), Lexbase (N° Lexbase : E57103KP). |
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newsid:477823
Réf. : Cass. avis, 3 juin 2021, n° 15008 (N° Lexbase : A29374UC)
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N7819BYA
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par Alexandra Martinez-Ohayon
Le 08 Juin 2021
► La Cour de cassation énonce dans son avis rendu le 3 juin 2021, que le conseiller de la mise en état ne peut connaître ni des fins de non-recevoir qui ont été tranchées par le juge de la mise en état, ou par le tribunal, ni de celles qui, bien que n’ayant pas été tranchées en première instance, auraient pour conséquence, si elles étaient accueillies, de remettre en cause ce qui a été jugé au fond par le premier juge.
Demande d’avis. La Cour de cassation avait reçu la demande d'avis suivante : « Aux termes de l’article 907 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L3973LUP), dans sa rédaction issue du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 (N° Lexbase : L8421LT3), en procédure ordinaire avec désignation d’un conseiller de la mise en état, l’affaire est instruite sous le contrôle d’un magistrat de la chambre à laquelle elle est distribuée, dans les conditions prévues par les articles 780 (N° Lexbase : L9318LTB) à 807 (N° Lexbase : L9111LTM).
L’article 907 renvoie ainsi à l’article 789 (N° Lexbase : L9322LTG) qui définit, aux termes de sa nouvelle rédaction, les compétences du conseiller de la mise en état comme celles du juge de la mise en état, avec notamment une compétence pour statuer sur "6° les fins de non-recevoir".
La réforme de la procédure civile ajoute un pouvoir considérable dans son étendue et ses conséquences au magistrat chargé de la mise en état, dont les pouvoirs se trouvaient antérieurement limités, en cause d’appel, à la fin de non-recevoir tirée de l’irrecevabilité de l’appel et des conclusions des parties.
L’article 795 (N° Lexbase : L8605LYD) du même code prévoit une possibilité d’appel devant la cour d’appel des ordonnances du juge de la mise en état lorsque "2° Elles statuent sur une exception de procédure ou une fin de non-recevoir".
L’article 916 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L8615LYQ), modifié seulement par le décret n° 2020-1452 du 27 novembre 2020 (N° Lexbase : Z7419194) réformant la procédure civile, applicable aux instances en cours à compter du 1er janvier 2021, prévoit que les ordonnances du conseiller de la mise en état qui statuent sur une fin de non-recevoir, sont susceptibles de déféré.
L’article 123 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L9280LTU), dans sa nouvelle rédaction, conserve le principe selon lequel les fins de non-recevoir peuvent être invoquées en tout état de cause, c’est-à-dire devant le tribunal ou pour la première fois en cause d’appel, prenant cependant en compte des possibilités d’exceptions "s’il en était disposé autrement".
Par ailleurs, aux termes des dispositions de l’article 542 (N° Lexbase : L7230LEI) du même code, dans leur rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 (N° Lexbase : L2696LEL), l’appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d’appel.
La combinaison de l’ensemble des dispositions susvisées autorise-t-elle le conseiller de la mise en état à statuer sur une fin de non-recevoir déjà tranchée en première instance par le juge de la mise en état, ou le tribunal, ce qui revient à donner à ce dernier le pouvoir de confirmer, infirmer ou annuler la décision du premier juge alors même que ce pouvoir n’est dévolu qu’à la cour en application de l’effet dévolutif de l’article 542 du Code de procédure civile ?
Doit-on au contraire considérer, par analogie avec le régime applicable aux exceptions de procédure, que l’étendue du pouvoir du conseiller de la mise en état en matière de fins de non-recevoir est limitée aux fins de non-recevoir soulevées pour la première fois en cause d’appel et qui n’ont pas fait l’objet d’une décision du juge de la mise en état ou du tribunal ? »
Examen de la demande d’avis. La Cour rappelle que le CME, dispose de pouvoirs spécifiques, notamment ceux définis par référence à ceux du JME à l’article 977 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L5875IAT). Par ailleurs, que la réforme du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019, conférant au JME la compétence de statuer sur les fins de non-recevoir, s’applique également au CME. Bien plus, la Cour de cassation énonce que l’appel engageant, au terme d’une jurisprudence constante (Ass. plén., 3 avril 1962, n° 61-10.142) une nouvelle instance, la seconde phrase du II de l’article 55 du décret précité est applicable aux appels formés à compter du 1er janvier 2020.
La Cour de cassation précise que les nouvelles attributions conférées par le décret précité au CME s’exercent sous réserve que soit ouvert contre ses décisions un déféré devant la cour d’appel, organe juridictionnel appelé à trancher en dernier ressort les affaires dont elle est saisie. À cette fin, le décret n° 2020-1452 du 27 novembre 2020 a complété l’article 916 du Code de procédure civile pour étendre le déféré aux ordonnances du CME statuant sur toutes fins de non-recevoir, rappelant que dans la rédaction antérieure, le déféré n’était ouvert qu’à l’encontre des ordonnances par lesquelles le CME tranchait les FNR tirées de l’irrecevabilité de l’appel et celles tirées de l’irrecevabilité des conclusions et des actes de procédure. Du fait que le décret précité est entré en vigueur le 1er janvier 2021 pour s’appliquer aux instances d’appel en cours, le CME ne peut donc statuer sur les autres fins de non-recevoir qui lui sont soumises ou qu’il relève d’office qu’à compter de cette date. Enfin, les Hauts magistrats précisent que sous cette réserve, la détermination par l’article 907 du Code de procédure civile des pouvoirs du CME par renvoi à ceux du JME ne saurait avoir pour conséquence de méconnaître les effets de l’appel et les règles de compétence définies par la loi. Seule la cour d’appel dispose, à l’exclusion du CME, du pouvoir d’infirmer ou d’annuler la décision frappée d’appel, revêtue, dès son prononcé, de l’autorité de la chose jugée.
Avis de la Cour de cassation. Par conséquent, la Cour de cassation a rendu l’avis précité au visa des articles L. 441-1 (N° Lexbase : L7222K9D) et suivants du Code de l’organisation judiciaire et 1031-1 (N° Lexbase : L2676K8M) et suivants du Code de procédure civile.
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Réf. : Cass. soc., 27 mai 2021, n° 19-18.089, FS-P (N° Lexbase : A16254TD)
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N7773BYK
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par Charlotte Moronval
Le 08 Juin 2021
► L’absence de remise du rapport par l’expert, tenu pour exécuter la mesure d’expertise de respecter un délai qui court du jour de sa désignation, n’a pas pour effet de prolonger le délai de consultation du CHSCT, fixé par l’article R. 4614-5-3 du Code du travail (N° Lexbase : L1387K9A).
Faits et procédure. La société La Poste a conclu avec plusieurs organisations syndicales représentatives un accord national portant « sur l'amélioration des conditions de travail et sur l’évolution des métiers de la distribution et des services des factrices/facteurs et de leurs encadrantes/encadrants de proximité », pour une durée de quatre ans. Les CHSCT ont décidé de recourir à un expert agréé en raison de l’existence d’un projet important. Par ordonnances du 13 septembre 2017, le président du TGI a débouté La Poste de sa demande d’annulation des délibérations des CHSCT. Les 22 et 29 septembre 2017, les CHSCT ont désigné un autre cabinet d’expertise. Le 2 février 2018, La Poste a informé les CHSCT de l’organisation d’une réunion d’information consultation sur les mesures prévues par l’accord du 7 février 2017, fixée au 23 février 2018. À cette date, les CHSCT ont exprimé l’impossibilité pour eux d’émettre un avis, en l’absence de restitution du rapport d’expertise. Le 26 février 2018, La Poste a sollicité du cabinet d’expertise l’arrêt de sa mission, puis a informé les établissements relevant du périmètre des CHSCT de l’application en leur sein, à compter du 5 mars 2018, des mesures prévues par l'accord du 7 février 2017.
Le 15 mars 2018, les CHSCT ont alors saisi le président du TGI de demandes tendant notamment à dire que le délai de consultation n'avait pas commencé à courir, ordonner à La Poste de poursuivre la procédure de consultation et lui faire interdiction, sous astreinte, de mettre en oeuvre l’accord du 7 février 2017 dans les établissements relevant de leur compétence. Le cabinet d’expertise est également intervenu à l'instance pour faire juger notamment que le délai d'expertise n'avait pas commencé à courir, faute de transmission par La Poste des documents nécessaires, et ordonner la transmission de ces documents sous astreinte.
Pour ordonner à La Poste de poursuivre la procédure de consultation des CHSCT et de transmettre au cabinet d’expertise divers documents sous astreinte, la cour d’appel (CA Montpellier, 18 avril 2019, n° 18/01833 N° Lexbase : A4695Y9R) a retenu que le délai imparti à l’expert par l'article R. 4614-18 du Code du travail (N° Lexbase : L1469K9B) ne peut courir qu'à compter du jour où l'employeur lui a fourni les informations nécessaires à l'exercice de sa mission, que le délai préfix de deux mois de consultation des CHSCT, prévu par les articles R. 4614-5-2 (N° Lexbase : L1386K99) et R. 4614-5-3 (N° Lexbase : L1387K9A) du Code du travail, ne peut courir qu'à compter de l'obtention du rapport d'expertise, qu’il ressort d’un courriel d’un représentant de La Poste du 29 janvier 2018 que jusqu'à cette date les parties étaient dans un processus préparatoire de l'expertise et non dans l'expertise elle-même dont la date de démarrage avait été fixée dans ce même courriel au 31 janvier 2018, qu’or dès le 30 janvier 2018, La Poste a écrit à l’expert pour lui indiquer que le délai de réalisation de l'expertise était dépassé et pour le mettre en demeure de rendre ses rapports, alors qu'elle ne pouvait ignorer que cette demande constituait un revirement au regard du courriel du 29 janvier 2018 et que le cabinet d’expertise était dans l'impossibilité de déposer ses rapports, puisqu’à cette date les informations nécessaires ne lui avaient pas été fournies.
La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale casse et annule l’arrêt rendu par la cour d’appel.
Pour rappel. Le délai de consultation fixé par l’article R. 4614-5-3 du Code du travail court à compter de la date à laquelle le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail a reçu une information le mettant en mesure d’apprécier l’importance de l’opération envisagée et de saisir le président du tribunal s’il estime que l’information communiquée est insuffisante. Un accord collectif de droit commun, ou un accord entre l’employeur et le CHSCT, peut cependant fixer d’autres délais que ceux prévus à l’article R. 4614-5-3 précité, les prolonger, ou modifier leur point de départ. |
→ En statuant comme elle l’a fait, par des motifs inopérants relatifs au point de départ tant du délai de consultation de l’instance représentative fixé par l’article R. 4614-5-3 du Code du travail que du délai imparti à l’expert pour exécuter la mesure d’expertise, alors, d’une part, que les CHSCT n’avaient pas saisi le juge dans le délai qui leur était imparti pour donner leur avis à l’effet d’obtenir la communication d’informations complémentaires et la suspension du délai de consultation, tel que fixé par l’article R. 4614-5-3 susvisé, jusqu’à la communication de ces éléments complémentaires, d’autre part, qu’il ne résultait pas de ses constatations que les délais de consultation des CHSCT avaient été prolongés d'un commun accord conclu entre ces derniers et La Poste, la cour d’appel a violé les articles L. 4612-8 (N° Lexbase : L7241K93), L. 4614-13 (N° Lexbase : L7241K93), R. 4614-5-2, R. 4614-5-3, R. 4614-18, alinéa 1er, et R. 4614-19 (N° Lexbase : L8376LBT) du Code du travail.
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Réf. : Cass. civ. 1, 26 mai 2021, n° 19-21.302, FS-P (N° Lexbase : A88484SI)
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N7775BYM
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par Anne-Lise Lonné-Clément
Le 08 Juin 2021
► Les créances de l’époux sur son conjoint constituent, au décès du premier, des dettes du second à l’égard de la succession ; ces créances ne sont soumises à aucune prescription avant la clôture des opérations de partage de la succession.
En l’espèce, une épouse était décédée le 21 mars 2007, laissant pour lui succéder son époux, avec lequel elle était mariée sous le régime de la séparation de biens, et trois enfants issus d’une précédente union. Des difficultés étaient survenues pour le partage de la succession et des intérêts patrimoniaux des époux, notamment s’agissant de deux créances entre époux.
- La première créance était revendiquée par la succession à l’encontre de l’ex-époux au titre du financement d’une soulte par l’épouse prédécédée, mise à la charge de celui-ci pour l’acquisition d’un immeuble qui lui était personnel.
L’époux faisait grief à l’arrêt rendu par la cour d’appel de Rennes (CA Rennes, 14 mai 2019, n° 17/03391 N° Lexbase : A2051ZBL), de déclarer recevables les demandes des enfants à l’inscription des créances ; il invoquait leur prescription, soutenant que le règlement des créances entre époux séparés de biens ne constituait pas une opération de partage, et qu’il ne pouvait être fait application des dispositions relatives aux dettes des copartageants dans le cadre d’un partage successoral.
Mais l’argument est écarté par la Haute juridiction qui rappelle que, selon l’article 865 du Code civil (N° Lexbase : L0007HPX), sauf lorsqu’elle est relative aux biens indivis, la créance de la succession à l’encontre de l’un des copartageants n’est pas exigible et ne peut se prescrire avant la clôture des opérations de partage.
Elle approuve les juges d’appel qui, ayant à bon droit énoncé que les créances de l’époux sur son conjoint constituent, au décès du premier, des dettes du second à l’égard de la succession, avaient retenu que la succession disposait d’une créance à l’encontre de l’époux au titre du financement d’une soulte, mise à la charge de celui-ci pour l’acquisition d’un immeuble qui lui était personnel, et en a exactement déduit que cette créance n’était soumise à aucune prescription avant la clôture des opérations de partage de la succession.
- La seconde créance était revendiquée au titre du financement par l’épouse prédécédée, au moyen d’apports de deniers provenant de la vente d'immeubles personnels, de la part de son époux dans l’acquisition d’un immeuble indivis entre eux.
Les mêmes règles sont appliquées par la Cour suprême, qui rappelle d’abord que, selon l’article 815-13 du Code civil (N° Lexbase : L1747IEG), un indivisaire peut prétendre à une indemnité à l’encontre de l’indivision évaluée selon les modalités qu’il prévoit lorsqu'il a, à ses frais, amélioré l’état d’un bien indivis ou fait de ses deniers personnels des dépenses nécessaires à la conservation de ce bien, et que ce texte ne s'applique pas aux dépenses d’acquisition.
Selon la Haute juridiction, il en résulte qu’un époux séparé de biens qui finance, par un apport de ses deniers personnels, la part de son conjoint dans l'acquisition d’un bien indivis peut invoquer à son encontre une créance évaluable selon les règles auxquelles renvoie l’article 1543 du Code civil (N° Lexbase : L1654ABU).
La Cour de cassation rappelle alors, comme précédemment, la règle posée par l’article 865 du Code civil.
Aussi, en l’espèce, ayant retenu que l’épouse avait financé, au moyen d’apports de deniers provenant de la vente d'immeubles personnels, la part de son époux dans l’acquisition d’un immeuble indivis entre eux, la cour d'appel en avait justement déduit, d’une part, que sa succession disposait à ce titre d’une créance à l'encontre de l’époux, d'autre part, que cette créance n’étant pas relative à des droits dépendant de l'indivision successorale, elle n’était soumise à aucune prescription avant la clôture des opérations de partage de la succession.
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Réf. : Cass. civ. 3, 27 mai 2021, n° 20-23.287, FS-P (N° Lexbase : A46984T8)
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par Yann Le Foll
Le 08 Juin 2021
► ll appartient à la juridiction administrative de statuer sur l’existence d’un permis de construire tacite, conformément auquel la construction aurait été édifiée, né du silence gardé par l’administration à l’expiration du délai d’instruction de la confirmation de la demande de permis de construire, avant que le jugement d’annulation de la décision qui a refusé de délivrer le permis de construire ne soit définitif.
Faits. Le propriétaire d’un domaine viticole situé sur le territoire de la commune de Tresques a déposé une demande de permis de construire en vue de l’édification d’une maison à usage d’habitation. Après refus du maire de délivrer le permis sollicité, il a construit sa maison dans le courant de l’année 2013, avant que la commune ne l’assigne en démolition sur le fondement de l’article L. 480-14 du Code de l’urbanisme (N° Lexbase : L5020LUH).
En cause d’appel. Pour accueillir la demande en démolition, l’arrêt attaqué (CA Nîmes, 5 novembre 2020, n° 19/02045 N° Lexbase : A649233T) retient qu’il se déduit de l’article L. 600-2 du Code de l’urbanisme (N° Lexbase : L7651ACD) que la confirmation de la demande de permis de construire sur le fondement de ces dispositions doit intervenir dans les six mois suivant la notification de la décision qui confère un caractère définitif à l’annulation du refus de permis de construire.
Il ajoute que l’intéressé était irrecevable en sa demande de confirmation de la demande du permis présentée le 2 janvier 2013 puisque, à cette date, la décision du tribunal administratif n’était pas définitive et que, dès lors, il n’était pas titulaire d’un permis de construire tacite lorsqu’il a procédé aux travaux de construction de sa maison dans le courant de l’année 2013, sa demande irrecevable n’ayant pu faire courir le délai à l’issue duquel, en l’absence de refus de l’administration, le pétitionnaire est de plein droit titulaire d’un permis tacite.
Décision. Énonçant le principe précité, la Haute juridiction énonce qu’en statuant ainsi, la cour d’appel, qui a excédé ses pouvoirs, a violé l’article 49, alinéa 2, du Code de procédure civile (N° Lexbase : L0569I8L), la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III. Pour mémoire, lorsqu'une juridiction, à la suite de l'annulation d'un refus opposé à une demande d'autorisation d'occuper ou d'utiliser le sol, fait droit à des conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de réexaminer cette demande, ces conclusions aux fins d'injonction du requérant doivent être regardées comme confirmant sa demande initiale au sens de l'article L. 600-2 du Code de l'urbanisme (CE 2° et 7° ch.-r., 23 février 2017, n° 395274, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A2368TPE).
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les parties au contentieux administratif de l'urbanisme, Les conséquences de certaines annulations juridictionnelles sur le pouvoir de l'autorité administrative, in Droit de l’urbanisme, (dir. A. Le Gall), Lexbase ({"IOhtml_internalLink": {"_href": {"nodeid": 26388283, "corpus": "encyclopedia"}, "_target": "_blank", "_class": "color-encyclopedia", "_title": "Les cons\u00e9quences de certaines annulations juridictionnelles sur le pouvoir de l'autorit\u00e9 administrative", "_name": null, "_innerText": "N\u00b0\u00a0Lexbase\u00a0: E4924E7I"}}). |
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