Réf. : Cass. civ. 1, 23 janvier 2019, n°17-18.219, FS-P+B+I (N° Lexbase : A8527YTY)
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N7367BX7
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par Gözde Lalloz
Le 30 Janvier 2019
► Une banque, n’ayant eu connaissance de la dévolution successorale de son débiteur que trois ans après le décès, s'était trouvée dans l’impossibilité d’agir contre les héritiers du défunt précédemment ; dès lors, l’action en paiement de la banque contre le codébiteur et les héritiers ne devait pas être considérée comme prescrite. Telle est la solution adoptée par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 23 janvier 2019 (Cass. civ. 1, 23 janvier 2019, n°17-18.219, FS-P+B+I N° Lexbase : A8527YTY).
En l’espèce, un acte sous seing privé a été signé entre un établissement de crédit et des époux. A la suite du décès d’un des deux époux, la banque a assigné en paiement du solde du prêt l’époux survivant ainsi que les héritiers. Soutenant que l’action intervenait plus de trois ans après le décès, la prescription de l’action a été soutenue par les co-débiteurs. Bien que la cour d'appel de Paris ait confirmé la prescription de l'action contre les co-débiteurs, la Cour de cassation a rejeté cette position au motif que la dévolution successorale a été révélée à l’établissement de crédit très tardivement et qu’il s’était trouvée dans l’impossibilité d’agir contre les héritiers du défunt jusqu’à cette date au sens de l’article 2234 du Code civil (N° Lexbase : L7219IAM) et l’article 1203 (N° Lexbase : L1305ABX) du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 (N° Lexbase : L4857KYK))
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Réf. : Décret n° 2019-38 du 23 janvier 2019, relatif aux compétences des préfets en matière d'enregistrement de la demande d'asile et de mise en œuvre des procédures relevant du Règlement du 26 juin 2013 dit «Dublin III» (N° Lexbase : L0819LPZ)
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N7374BXE
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par Yann Le Foll
Le 29 Janvier 2019
► Le décret n° 2019-38 du 23 janvier 2019, relatif aux compétences des préfets en matière d'enregistrement de la demande d'asile et de mise en œuvre des procédures relevant du Règlement du 26 juin 2013 dit «Dublin III» (N° Lexbase : L0819LPZ), a été publié au Journal officiel du 24 janvier 2019.
Il procède à des mesures de coordination dans la partie réglementaire du Code de l'entrée et du séjour des étrangers en France à la suite de la loi n° 2018-187 du 20 mars 2018, permettant une bonne application du régime d'asile européen (N° Lexbase : L7968LIX).
Il précise par ailleurs la compétence du préfet de département en matière de renouvellement de l'attestation de demande d'asile pour les personnes relevant du Règlement «Dublin III» (Règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride N° Lexbase : L3872IZG).
Sans modifier le droit en vigueur, il maintient le principe de la compétence du préfet de département en matière d'asile dans le Code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile, tout en inscrivant, dans les textes généraux relatifs aux pouvoirs des préfets, la possibilité d'y déroger en donnant compétence à un préfet dans plusieurs départements.
Il modifie également les décrets n° 2004-374 du 29 avril 2004 modifié, relatif aux pouvoirs des préfets (N° Lexbase : L1781DYM), à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements, n° 2009-906 du 24 juillet 2009, relatif aux pouvoirs du représentant de l'Etat, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin (N° Lexbase : L5864IEW), et n° 2014-1292 du 23 octobre 2014, relatif aux exceptions à l'application du principe «silence vaut acceptation» (N° Lexbase : L6764I4B), ainsi qu'aux exceptions au délai de deux mois de naissance des décisions implicites sur le fondement du II de l'article 21 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations (N° Lexbase : L0420AIE).
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Réf. : Cass. soc., 23 janvier 2019, n° 17-19.393, FS-P+B (N° Lexbase : A3199YUZ)
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N7414BXU
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par Blanche Chaumet
Le 30 Janvier 2019
►Dès lors qu’il ne pouvait être dérogé aux dispositions d'ordre public des articles L. 3123-14 (N° Lexbase : L3882IBE) et L. 3123-25, 5° du Code du travail (N° Lexbase : L0682IXK) dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 (N° Lexbase : L7392IAZ), toutes les heures effectuées, qu'elles soient imposées par l'employeur ou qu'elles soient prévues par avenant au contrat de travail à temps partiel en application d'un accord collectif, devaient être incluses dans le décompte de la durée du travail ;
►L’obligation de l'employeur de supporter les conséquences financières résultant de l'absence de respect de dispositions d'ordre public se rapportant à la durée du travail à temps partiel, ne peut, en l'absence de base suffisante en droit interne, constituer l'atteinte à un «bien» au sens de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (N° Lexbase : L1625AZ9).
Telles sont les règles dégagées par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 23 janvier 2019 (Cass. soc., 23 janvier 2019, n° 17-19.393, FS-P+B N° Lexbase : A3199YUZ).
En l’espèce, une salariée a été engagée le 31 mai 2006 par une société en qualité de distributrice dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel modulé. Elle a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à la requalification de son contrat en contrat à temps plein ainsi qu'au paiement de diverses sommes.
La cour d’appel (CA Rennes, 5 avril 2017, n° 15/01699 N° Lexbase : A3307UXR) ayant requalifié le contrat à temps partiel modulé en contrat de travail à temps complet à compter de décembre 2008 et ayant condamné l’employeur à payer à la salariée diverses sommes en conséquence de la requalification, ce dernier s’est pourvu en cassation.
Cependant, en énonçant les règles susvisées, la Haute juridiction rejette le pourvoi (sur La durée minimale de travail à temps partiel et les heures complémentaires, cf. l’Ouvrage «Droit du travail» N° Lexbase : E3906EYC).
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Réf. : CEDH, 18 décembre 2018, Req. 2282/17 (N° Lexbase : A0100YUA)
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N7370BXA
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par Yann Le Foll
Le 29 Janvier 2019
► Le placement d’un enfant autiste en institut médico-éducatif plutôt qu’en milieu scolaire ordinaire ne viole pas son droit à l’éducation. Telle est la solution d’une décision rendue par la CEDH le 18 décembre 2018 (CEDH, 18 décembre 2018, Req. 2282/17 N° Lexbase : A0100YUA).
En l’espèce, les juridictions nationales ont opté en l’espèce pour une scolarisation en milieu spécialisé au sein d’un institut médico-éducatif avec des méthodes adaptées à son handicap. Elle constate que l’orientation ainsi retenue permet à cet adolescent de bénéficier d’une prise en charge adaptée à ses troubles autistiques, comprenant un temps de scolarité. La Cour note que pendant la période au cours de laquelle l’enfant a été scolarisé à l’école ordinaire, il avait peu de contacts avec les autres élèves, ne parlait pas, n’écrivait pas, ne lisait pas. Ces constatations donnent à penser qu’il n’était pas capable d’assumer les contraintes et les exigences minimales de comportement qu’implique la vie dans une école normale.
Les autorités nationales ont considéré l’état de l’enfant comme un obstacle à son éducation dans le cadre du droit commun. Après avoir mis en balance le niveau de son handicap et le bénéfice qu’il pourrait tirer de l’accès à l’enseignement inclusif, elles ont opté pour une éducation appropriée à ses besoins, en milieu spécialisé. La Cour note que cette orientation satisfait le père de l’enfant qui en a la garde. Au regard de l’ensemble des éléments qui lui ont été soumis, elle ne saurait considérer que le choix opéré par les autorités nationales a été fait par défaut, en raison d’une déficience de moyens et de l’assistance scolaire au sein de l’école ordinaire.
La Cour relève enfin que depuis octobre 2013, il bénéficie d’un accompagnement éducatif effectif au sein d’un IME, et que cette prise en charge scolaire convient à son épanouissement. La Cour estime donc que le refus d’admettre l’intéressé en milieu scolaire ordinaire ne saurait constituer un manquement de l’Etat à ses obligations au titre de l’article 2 du Protocole n°1 à la Convention (droit à l’instruction) (N° Lexbase : L1625AZ9), ni une négation systémique de son droit à l’instruction en raison de son handicap.
Il en résulte la solution précitée.
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N7380BXM
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par Fleur Chidaine, Avocate à la Cour
Le 04 Février 2021
L’article 34 de la loi de finances pour 2019 (loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018, de finances pour 2019 N° Lexbase : L6297LNK) est venue réformer totalement le dispositif limitant la déduction des charges financières. Comme indiqué dans notre article précédent, ce nouveau dispositif étant complexe, il fait l’objet d’une étude à part entière ci-dessous.
I - Sociétés non membres d’un groupe fiscal
A - Champ d’application
Entreprises concernées
Sont visées par le nouveau dispositif toutes les sociétés assujetties à l’impôt sur les sociétés. Sont par conséquent concernées par le dispositif les sociétés partiellement exonérées d’impôt, mais sur la part relevant du secteur taxable. Les sociétés non membres d’un groupe fiscal appliquent les dispositions de l’article 212 bis du Code général des impôts (N° Lexbase : L9039LN4), tandis que celles membres d’un groupe fiscal intégré appliquent le plafond prévu par l’article 223 B bis du Code général des impôts (N° Lexbase : L9038LN3).
Charges financières visées
Sont concernées par le nouveau dispositif les charges financières nettes obtenues par calcul de la différence entre les charges et produits financiers, c’est-à-dire les intérêts sur toutes formes de dettes (i.e. sommes laissées ou mises à disposition de l’entreprise ou par l’entreprise), quelle que soit l’origine des sommes laissées ou mises à disposition (tiers, associés, entreprises liées), rendues déductibles après application de l’article 212, I du Code général des impôts. Pour rappel, l’article 212, I du Code général des impôts prévoit un plafonnement du taux d’intérêt servi aux entreprises liées à un taux de référence et une non-déduction des charges d’intérêts versées à des entreprises liées lorsque les produits correspondants ne sont pas soumis à une imposition minimale d’au moins 25 % de l’impôt sur les sociétés.
A noter que le nouveau dispositif prévoit un champ de produits et charges retenus pour déterminer le montant des charges financières nettes plus large que le précédent.
L’article 34 de la loi de finances est venu transposer la Directive «ATAD», laquelle établit une règle de limitation de la déduction des intérêts sur la base des recommandations du projet BEPS mené par l’OCDE. A ce titre, certaines des charges qui n’entraient pas dans l’ancien dispositif sont à présent inclues dans son champ d’application.
A ce titre, la Directive vise expressément les paiements liés aux instruments issus de la finance islamique, catégorie qui pourrait également recouvrir les charges et produits liés aux nouveaux modes de financement dès lors que l’opération peut être considérée comme un prêt. Comme dans l’ancien dispositif, les intérêts capitalisés inclus dans le coût d’origine d’un actif (qui permet sur option aux entreprises d’inscrire à l’actif du bilan les intérêts d’emprunt afférents à l’acquisition de certaines immobilisations en lieu et place d’une comptabilisation immédiate en charges), sont retenus dans l’assiette des charges financières nettes de l’entreprise pour leur montant intégral au titre de l’exercice de cession ou de mise au rebut de l’actif en présence d’une immobilisation non amortissable. Nouvel élément inclus dans le champ d’application du fait de la transposition de la Directive, les montants mesurés par référence à un rendement financier déterminé par comparaison avec des entreprises similaires exploitées normalement au sens de l’article 57 restent, à ce stade, difficiles à cerner. Ils pourraient viser toutes les opérations de prix de transfert entre entreprises d’un même groupe dans le cadre desquelles est réalisée une facturation d’intérêts entre une société et ses filiales ou succursales. Les gains et pertes de change relatifs à des prêts, emprunts et instruments liés à des financements qui n’étaient auparavant pas inclus dans le champ d’application le sont à présent, de même que les frais de dossier et de garantie liés à des opérations de financement. A noter que le législateur a également prévu dans son nouveau dispositif une sorte de clause balai incluant dans le champ d’application tous les «autres coûts ou produits équivalents à des intérêts», incluant ainsi toutes les sommes qui par leur nature ou objets sont économiquement assimilables à des intérêts.
B - Principe de limitation de déduction
Plafond de déduction de droit commun
- Entreprises qui ne sont pas sous-capitalisées : l’article 212 bis, II du Code général des impôts prévoit une possibilité pour les entreprises n’étant pas sous-capitalisées de déduire leurs charges financières nettes dans la limite du montant le plus élevé entre (i) 3 millions d’euros par exercice de douze mois et (ii) 30 % du résultat fiscal avant impôt, intérêts, dépréciations et amortissements (Ebitda fiscal). L’Ebitda fiscal se calcule par référence au résultat fiscal (déterminé au tableau de la liasse n° 2058-A), duquel il convient de retraiter un certain nombre de postes afin d’obtenir la base d’application de la nouvelle limitation de la déductibilité des charges financières.
- Entreprises sous-capitalisées : le dispositif de lutte contre la sous-capitalisation est désormais intégré à l’article 212 bis, VII du Code général des impôts. Auparavant, la situation de sous-capitalisation était caractérisée en cas de dépassement (i) du ratio d’endettement ou (ii) du ratio de couverture d’intérêts ou (iii) du ratio d’intérêts servis à des entreprises liées. Désormais, le seul dépassement du ratio d’endettement suffit à caractériser une situation de sous-capitalisation. Une société est donc placée en situation de sous-capitalisation dès lors que le montant moyen de ses dettes vis-à-vis d’entreprises liées excède une fois et demie le montant de ses fonds propres. Il convient de préciser que deux différences importantes existent en comparaison avec le ratio d’endettement prévu à l’article 212, II du Code général des impôts : (i) le nouveau ratio compare le montant moyen des dettes aux fonds propres là où l’ancien ratio comparait ce montant aux capitaux propres, et (ii) les dettes vis-à-vis d’entreprises tierces garanties par des entreprises liées ne sont plus prises en comptes. La définition de la sous-capitalisation est donc durcie par rapport à l’ancien dispositif. Le plafond prévu en cas de sous-capitalisation suppose la détermination de deux assiettes de charges financières nettes :
La première assiette est constituée par les intérêts relatifs à la dette vis-à-vis d’entreprises non liées et à la dette vis-à-vis d’entreprises liées n’excédant pas une fois et demie les fonds propres : la déduction est possible à hauteur de 30 % de l’Ebitda fiscal proratisé ou de 3 millions d’euros proratisés si ce dernier montant est plus élevé ;
La seconde assiette est constituée des intérêts relatifs à la dette vis-à-vis d’entreprises liées excédant une fois et demie les fonds propres : la déduction est alors limitée à 10 % de l’Ebitda fiscal proratisé ou à 1 millions d’euros proratisés si ce dernier montant est plus élevé.
En principe, une entreprise sous-capitalisée ne bénéficie pas de la déduction supplémentaire prévue pour les entreprises membres d’un groupe consolidé, le montant de charges financières nettes déductibles est donc constitué par la somme des deux plafonds ci-dessus décrits, sauf à ce que le groupe consolidé auquel appartient l’entreprise en question soit davantage sous-capitalisé. Ainsi, et comme dans l’ancien dispositif, une clause de sauvegarde permet aux sociétés sous-capitalisées d’échapper aux plafonds précités à condition de prouver que leur ratio d’endettement (dettes / fonds propres) est inférieur ou égal au ratio d’endettement du groupe consolidé auquel elle appartient.
Clause prévue pour les entreprises membres d’un groupe consolidé
Les entreprises membres d’un groupe consolidé bénéficient d’un complément de déduction lorsque le ratio entre leurs fonds propres et l’ensemble de leurs actifs est égal ou supérieur à ce même ratio déterminé au niveau du groupe consolidé auquel elle appartient. La directive prévoit par ailleurs que ce ratio est considéré comme égal à celui de l’entreprise lorsque la différence entre les deux ratios est inférieure à deux points de pourcentage.
La déduction supplémentaire est limitée à 75 % du montant des charges financières nettes qui n’ont pu faire l’objet d’une déduction en application des plafonds de droit commun précités. Les charges financières nettes placées en report, non admises en déduction au titre d’exercices antérieurs, ne se voient pas appliquer le complément de déduction. Une difficulté est susceptible d’intervenir pour la notion de fonds propres qui n’existe en principe pas pour l’établissement de comptes consolidés. Les normes françaises prévoient une catégorie « autres fonds propres consolidés » qui pourrait être ajoutée aux capitaux propres consolidés afin de déterminer les fonds propres consolidés, mais des précisions de l’administration fiscale sont attendues.
C - Report des charges non déduites
L’article 212 bis, VIII du Code général des impôts prévoit des mécanismes de report des charges financières non admises en déduction et des capacités de déduction non utilisées au cours d’un exercice. Ce dispositif est novateur par rapport à l’ancien régime.
- Charges financières non admises en déduction : l’article 212 bis, VIII-1 du Code général des impôts prévoit que les charges financières restantes après application des plafonds de déduction, de la clause de sauvegarde prévoyant une déduction supplémentaire pour les entreprises membres d’un groupe consolidé et des deux plafonds de dispositif de sous-capitalisation ne sont pas définitivement exclues de la déductions mais reportées sans limite de temps afin de faire l’objet d’une déduction ultérieure, étant précisé qu’en cas de sous-capitalisation, la partie restante de charges financières après application du deuxième plafond prévu en cas de sous-capitalisation n’est reportable qu’à hauteur du tiers de leur montant.
- Charges reportées d’exercices antérieurs : selon que la sous-capitalisation est caractérisée au cours de l’exercice d’imputation, les modalités de déduction des charges financières placées en report diffèrent :
En cas d’absence de sous-capitalisation au titre de l’exercice de déduction des charges financières antérieures, l’excédent de charges financières peut être déduit à hauteur de la différence entre la limite de droit commun précitée (i.e. 3 millions d’euros ou 30 % de l’Ebitda fiscal) et les charges financières de l’exercice ;
En cas de sous-capitalisation caractérisée au cours de l’exercice de déduction des charges financières antérieures, les charges financières antérieures ne peuvent être déduites que dans la limite de la différence entre les deux plafonds de droit commun précités (i.e. 3 millions d’euros proratisés ou 30 % de l’Ebitda fiscal) et les charges financières nettes de l’exercice minorées de celles soumises au second plafond (i.e. 10 % de l’Ebitda fiscal ou 1 million d’euros proratisés)
L’article 212 bis, VIII-2 du Code général des impôts permet de reporter la capacité de déduction inemployée au cours d’un exercice sur les cinq exercices suivants afin de déduire les charges financières nettes non admises en déduction au cours d’un exercice, cette capacité de déduction étant égale à la différence entre la limite de droit commun précitée et les charges financières nettes admises en déduction au titre de cet exercice en application de la règle de droit commun, de la clause de sauvegarde et de la clause de report dans le temps des charges financières non déduites.
D - Ordre d’imputation des dispositifs
L’ordre d’imputation des différents dispositifs est le suivant : 1. Application des règles de l’article 212, I du Code général des impôts afférent au taux d’intérêt limite et aux intérêts versés à des entreprises non soumises à une imposition au moins égale à 25 % de l’impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun et 2. Nouveau plafonnement aux charges financières nettes.
II - Sociétés membres d’un groupe d’intégration fiscale
Comme dans l’ancien dispositif, la règle de plafonnement de déduction des charges financières s’applique au niveau du groupe intégré. Les règles sont identiques pour la plupart à celles applicables aux entreprises non membres d’un groupe fiscal intégré.
A - Champ d’application et plafond de déduction de droit commun
L’article 223 B du Code général des impôts (N° Lexbase : L9036LNY), dans sa nouvelle rédaction prévoit que le groupe fiscal se doit de déterminer la somme des produits et charges financiers tels que définis précédemment de l’ensemble des sociétés du groupe intégré afin de déterminer le montant des charges financières nettes de l’intégration. En outre, l’Ebitda fiscal (en partant du résultat d’ensemble du groupe avant imputation des déficits à l’exception des déficits antérieurs à l’intégration que les sociétés membres auraient imputé sur leur résultat propre) doit être déterminé au niveau du groupe et un certain nombre de charges financières doivent être réintégrées au niveau du résultat d’ensemble du groupe.
La clause de sauvegarde précitée permettant une déduction supplémentaire de 75 % des charges financières excédant 30 % de l’Ebitda fiscal nécessite de comparer le ratio fonds propres sur les actifs du groupe intégré au ratio fonds propres sur actifs du groupe consolidé auquel les sociétés membres de l’intégration appartiennent. Pour appliquer la clause de sauvegarde il convient de réaliser un palier de sous consolidation au niveau de l’intégration fiscale permettant de déterminer les montants des fonds propres et des actifs du groupe fiscal.
B - Sous-capitalisation
Dans l’ancien dispositif, la sous-capitalisation devait être caractérisée au niveau de chaque société membre du groupe d’intégration. Le nouveau dispositif prévoit que la situation de sous-capitalisation est désormais caractérisée au niveau du groupe fiscalement intégré. Pour déterminer la présence d’un groupe sous-capitalisé, il convient de calculer son ratio d’endettement aux bornes de l’intégration fiscale en comparant les fonds propres consolidés de l’intégration aux dettes existantes vis-à-vis d’entreprises liées mais non membres du groupe d’intégration fiscale (i.e. somme de l’ensemble des dettes vis-à-vis d’entreprises liées non membres du groupe d’intégration divisée par le nombre de jours de l’exercice).
C - Report des charges financières non déduites
Comme pour le régime de droit commun, les règles de report permettent d’imputer sur des exercices ultérieures (i) les charges financières non déduites et (ii) la capacité de déduction inutilisée au cours des exercices précédents. En revanche, en cas d’entrée dans un groupe de sociétés qui disposent de charges financières nettes ou de capacité de déduction inemployée en report avant l’entrée dans le groupe ne pourront être utilisés tant que la société est membre de l’intégration. En revanche, elle pourra le faire en cas de sortie du groupe et dans un délai de cinq ans pour la capacité de déduction inemployée auparavant.
D - Ordre d’application des dispositifs
Une possible difficulté qui devra être éclairée par les précisions de l’administration fiscale existe en matière d’ordre d’application des dispositifs. Ainsi, l’article 223 B bis du Code général des impôts tel que rédigé par la loi de finances pour 2019 ne précise pas si le plafonnement s’applique avant ou après application du dispositif de l’amendement Charasse. Outre cette précision qui devra être apportée incessamment sous peu par l’administration fiscale, l’ordre d’application des dispositifs en cas de groupe intégré est le même qu’en l’absence de groupe intégré.
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Réf. : Cass. crim., 22 janvier 2019, n° 18-82.614, FS-P+B (N° Lexbase : A3216YUN)
Lecture: 2 min
N7420BX4
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par June Perot
Le 30 Janvier 2019
► Des propos échangés par courriel, au sujet du comportement d’une jeune élève, entre le chef d’un établissement scolaire sous contrat d’association et les membres de l’inspection académique, ne sont pas publics au sens de l’article 23 de la loi du 29 juillet 1881 (N° Lexbase : L7589AIW), dès lors qu’il existe un groupement de personnes liées par une communauté d’intérêts, l’Etat devant veiller, quelles que soient les modalités de scolarisation, à la mise en œuvre d’une procédure disciplinaire garantissant les droits des élèves, notamment le principe du contradictoire et les droits de la défense, ainsi qu’à protection de l’enfance ;
► cependant, les juges du fond ne peuvent déclarer irrecevable une plainte avec constitution de partie civile sans rechercher, comme ils y sont invités par un mémoire déposé devant eux, l’identité de toutes les personnes qui ont pu prendre connaissance du courriel, comportant en pièce-jointe l’écrit litigieux, à partir de la boîte structurelle de l’académie sur laquelle il a été envoyé.
Ainsi statue la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 22 janvier 2019 (Cass. crim., 22 janvier 2019, n° 18-82.614, FS-P+B N° Lexbase : A3216YUN).
Au cas de l’espèce, la directrice d’une école privée, sous contrat d’association avec l’Etat, a envoyé un courrier aux adresses électroniques d’une parent d’élève, d’une inspectrice d’académie et de la boîte de réception structurelle, et par lettre recommandée à l’adresse postale des deux parents, le compte-rendu du conseil des maîtres au sujet du comportement de leur fille mineure, alors âgée de sept ans et scolarisée dans l’établissement, concluant à une prise en charge de l’enfant en dehors de cette école et comportant des passages relatifs au comportement dérangeant de l’enfant et portant pour responsables les parents dans la prise en charge de leur fille.
Les parents s’estimant atteints dans leur honneur et leur considération ont porté plaine et se sont constitués parties civiles. Par ordonnance, le juge d’instruction, constatant que les textes litigieux n’avaient pas été rendus publics et que seule une contravention de diffamation non publique pouvait être retenue, a déclaré la plainte irrecevable. Les parties civiles ont relevé appel de cette décision.
Pour confirmer l’ordonnance du premier juge, l’arrêt a énoncé que ces deux correspondants, appartenant à l'académie et à l'inspection de l'Education nationale, étaient indiscutablement liés à l'expéditeur par une communauté d'intérêts, de sorte que la publicité des propos, au sens de l'article 23 de la loi du 29 juillet 1881, n'était pas caractérisée. Les juges ont également confirmé l’ordonnance du juge d’instruction sur la recevabilité de la plainte avec constitution de partie civile. Ayant relevé que le courriel avait été adressé en copie à une adresse électronique interne à l’académie, les propos n’avaient pas de caractère public et ne pouvaient donc recevoir que la qualification contraventionnelle, de sorte que la plainte était irrecevable. Un pourvoi a été formé par les parties civiles.
Reprenant la solution susvisée, la Haute juridiction censure l’arrêt sur la question de la recevabilité de la partie civile. Concernant la qualification de diffamation publique ou non, elle retient que la notion de publicité n’était pas caractérisée (cf. l’Ouvrage «Responsabilité civile», La diffamation et l'injure publiques N° Lexbase : E4087ETK).
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newsid:467420
Réf. : Cass. civ. 3, 24 janvier 2019, n° 17-25.793, FS-P+B+I (N° Lexbase : A0097YU7)
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N7371BXB
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par Anne-Lise Lonné-Clément
Le 30 Janvier 2019
► La nullité d’un acte pour défaut d’objet, laquelle ne tend qu’à la protection des intérêts privés des parties, relève du régime des nullités relatives ; sous l’empire de l’article 1304 du Code civil (N° Lexbase : L8527HWQ), dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016, le point de départ du délai de prescription d’une action en nullité d’un contrat pour défaut d’objet se situait au jour de l’acte ; la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, portant réforme de la prescription en matière civile (N° Lexbase : L9102H3I) n’a pas eu pour effet de modifier le point de départ du délai de la prescription extinctive ayant commencé à courir antérieurement à son entrée en vigueur ;
► il en résulte, en l’espèce, que le délai quinquennal de prescription extinctive de l’action en nullité, pour défaut d’objet, d’un acte constitutif d’une servitude, avait commencé à courir le jour de l’acte argué de nullité, et non le jour où le titulaire de l’action avait eu connaissance des faits lui permettant de l’exercer (à savoir la connaissance d’une servitude préexistente).
Telle est la solution retenue par la troisième chambre civile de la Cour de cassation, aux termes d’un arrêt rendu le 24 janvier 2019 (Cass. civ. 3, 24 janvier 2019, n° 17-25.793, FS-P+B+I N° Lexbase : A0097YU7).
En l’espèce, par acte sous seing privé du 26 novembre 2004 réitéré par acte authentique du 5 janvier 2006, M. et Mme Z avaient concédé à Mme X et à tous futurs propriétaires de sa parcelle un droit de passage sur la voie coupant leur propriété, moyennant le versement d’une indemnité ; par acte du 8 mars 2013, soutenant avoir découvert, par un jugement d’un tribunal administratif du 3 novembre 2011, que la servitude était pré-existante à la convention, Mme X avait assigné M. et Mme Z en nullité, pour défaut d’objet, de l’acte du 26 novembre 2004 et en remboursement du montant de l’indemnité et des frais d’acte notarié.
Elle faisait grief à l’arrêt attaqué de déclarer irrecevable comme prescrite son action en nullité de l’acte du 26 novembre 2004 et de rejeter en conséquence ses demandes en restitution des sommes versées et en paiement de dommages-intérêts. Elle faisait notamment valoir que le point de départ du délai de prescription devait être reporté au jour où elle avait eu connaissance d’une servitude préexistante, qui seule lui avait permis d’exercer l’action en nullité pour défaut d’objet.
Elle n’obtiendra pas gain de cause devant la Cour suprême qui, après avoir énoncé les règles précitées, et relevé que l’acte argué de nullité pour défaut d’objet avait été conclu le 26 novembre 2004, précise qu’il en résultait que l’action en nullité de l’acte introduite le 8 mars 2013, soit au-delà du délai quinquennal de la prescription extinctive ayant commencé à courir le 26 novembre 2004, était prescrite.
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Réf. : Cass. soc., 23 janvier 2019, n° 17-21.550, FS-P+B (N° Lexbase : A3141YUU)
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N7404BXI
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par Blanche Chaumet
Le 30 Janvier 2019
► En l'absence de vice du consentement, l'existence de faits de harcèlement moral n'affecte pas en elle-même la validité de la convention de rupture intervenue en application de l'article L. 1237-11 du Code du travail (N° Lexbase : L8512IAI).
Telle est la règle dégagée par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 23 janvier 2019 (Cass. soc., 23 janvier 2019, n° 17-21.550, FS-P+B N° Lexbase : A3141YUU).
En l’espèce, une salariée a été engagée par une société en qualité d'agent administratif et commercial le 10 juin 2011. Les parties ont signé une convention de rupture du contrat de travail le 28 avril 2014. La salariée a saisi la juridiction prud'homale.
Pour déclarer nulle la rupture conventionnelle, la cour d’appel retient :
- qu'un salarié peut obtenir l'annulation de la rupture de son contrat de travail dès lors qu'il établit qu'elle est intervenue dans un contexte de harcèlement moral, sans avoir à prouver un vice du consentement ;
- que la salariée n'invoque en l'espèce aucun vice du consentement ;
- mais que, le harcèlement moral étant constitué, il convient de constater la nullité de la rupture conventionnelle.
A la suite de cette décision, la société s’est pourvue en cassation.
En énonçant la règle susvisée, la Haute juridiction casse l’arrêt au visa des articles L. 1237-11, L. 1152-1 (N° Lexbase : L0724H9P) et L. 1152-3 (N° Lexbase : L0728H9T) du Code du travail (sur La liberté de consentement des parties, cf. l’Ouvrage «Droit du travail» N° Lexbase : E0217E78).
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Réf. : Cass. civ. 3, 17 janvier 2019, n° 17-26.695, FS-P+B+I (N° Lexbase : A3170YTL)
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N7379BXL
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par Frédérique Julienne, Maître de conférences - HDR, Université de Bordeaux
Le 30 Janvier 2019
Droits sociaux / Démembrement de propriété / Indivision / Demande de désignation d'un administrateur provisoire
Commentaire de Cass. civ. 3, 17 janvier 2019, n° 17-26.695, FS-P+B+I
La confrontation entre le droit des sociétés et le droit de l’indivision fait naitre classiquement des interrogations concernant l’exercice des prérogatives attachées à la qualité d’associé. Ces difficultés sont accrues lorsque les droits sociaux sont soumis à une indivision complexe [1], c’est-à -dire, portant sur des droits démembrés. La troisième chambre civile de la Cour de cassation a dû se prononcer dans un arrêt en date du 17 janvier 2019 sur l’exercice du pouvoir de désignation d’un administrateur provisoire à l’égard d’un associé indivis en nue-propriété.
Les faits découlent, comme c’est le cas souvent pour les indivisions complexes, du décès d’un associé majoritaire et gérant d’une SCI constituée avec une autre personne. Ses trois enfants et son épouse ont reçu par voie d’héritage la nue-propriété indivise des parts pour les premiers et l’usufruit des parts pour la dernière. A la suite de la désignation d’un des associés nus-propriétaires des parts en qualité de gérant, les autres indivisaires ont assigné la SCI et l’épouse du défunt afin d’obtenir la désignation d’un administrateur provisoire avec mission de convoquer une assemblée générale afin de désigner un nouveau gérant et d’examiner les comptes. Dans un arrêt du 29 juin 2017, la cour d’appel d’Aix-en-Provence [2] a déclaré recevable la demande de désignation d’un administrateur provisoire. La SCI et l’associé désigné gérant se pourvoient en cassation sur un moyen unique. Dans ce moyen, les demandeurs avancent que la qualité d’associé des indivisaires des parts sociales ne leur accordant individuellement des droits d’associé que dans la mesure où l’exercice de ceux-ci demeure compatible avec les droits des autres indivisaires, le demande de nomination d’un administrateur provisoire en tant que mesure grave, ne peut être présentée par un seul des indivisaires associé minoritaire. Les hauts magistrats rejettent le pourvoi avançant que le nu-propriétaire indivis des droits sociaux ayant la qualité d’associé, était bien recevable à agir en désignation d’un administrateur provisoire.
A la question de savoir si un associé indivis en nue-propriété peut prendre seul la décision de solliciter la désignation d’un administrateur provisoire dans le cadre d’une SCI, la troisième chambre civile de la Cour de cassation répond par l’affirmative. Elle contribue ainsi à clarifier les modalités d’exercice des prérogatives des associés dont les parts sont indivises. Son apport pratique important justifie une publication au Bulletin. Elle privilégie la prise d’initiative individuelle, le régime de l’indivision ne devant pas se traduire par une paralysie de l’exercice des droits des associés. Deux enseignements peuvent donc être tirés de cet arrêt. D’un part, il affirme la reconnaissance d’un pouvoir de désignation d’un administrateur par l’associé soumis au régime de l’indivision en nue-propriété et, d’autre part, il clarifie les modalités d’articulations entre le droit de l’indivision et le droit des sociétés.
I - Pouvoir individuel de désignation d’un administrateur provisoire fondé sur la qualité d’associé
La décision rendue par la troisième chambre civile de la Cour de cassation le 17 janvier 2019 reconnait à l’indivisaire en nue-propriété de parts sociales la faculté de prendre seul l’initiative de solliciter la désignation d’un administrateur provisoire. Cette solution conforte l’idée selon laquelle l’attribution de la qualité d’associé implique l’exercice individuel de prérogatives et, ce, indépendamment du régime de l’indivision.
L’un des aspects techniques qu’il convient de souligner est que l’indivision sur les parts sociales était, dans le cas d’espèce, en nue-propriété. L’arrêt commenté offre alors l’occasion de rappeler les règles d’attribution de la qualité d’associé en présence d’un démembrement de droit. Elle conforte la solution classique selon laquelle le nu-propriétaire de parts sociales a la qualité d’associé [3]. En l’état actuel du droit positif en effet, seul le nu-propriétaire s’est vu reconnaitre clairement cette qualité. Si le débat reste vif sur le sort réservé à l’usufruitier à l’égard de la qualité d’associé, la jurisprudence jusqu’ici n’a jamais affirmé expressément qu’il pouvait prétendre à ce statut. La solution ici dégagée est donc difficilement transposable à une situation d’indivision de parts sociales en usufruit. Notons qu’au titre de sa qualité d’associé, le nu-propriétaire ne peut, dans le cadre des aménagements des statuts, être privé de son droit de participer aux décisions collectives [4].
La qualité d’associé reconnue individuellement à chaque indivisaire impose que chacun puisse bénéficier d’une sphère d’intervention autonome. L’indivisaire, en effet, se voit attribuer les mêmes prérogatives qu’un associé qui serait propriétaire exclusif des parts sociales [5]. L’enjeu est alors de déterminer leurs modalités d’exercice. Les hauts magistrats mettent ici l’accent sur leur exercice individuel sous l’angle de la demande de désignation d’un administrateur provisoire. Dans la même logique, chacun a le droit, en application de l’article 1844 du Code civil (N° Lexbase : L2020ABG), de participer aux décisions collectives même si un mandataire représentant les intérêts des indivisaires a été, par ailleurs, désigné [6]. Chaque indivisaire associé doit donc être personnellement convoqué à participer aux décisions collectives. Par ailleurs, chacun a un droit de communication ou d’information au sein de la société. D’une manière plus générale, il peut être considéré que les prérogatives d’information et les prérogatives à caractère conservatoire restent dans la sphère d’intervention individuelle de chaque indivisaire [7].
Si la prévalence de l’initiative personnelle de l’associé indivis se justifie au regard de la qualité d’associé, notons qu’elle peut trouver également appui sur le régime de l’indivision. Ce dernier prévoit des contraintes d’exercice des pouvoirs de gestion en fonction de la gravité des actes. Ainsi, l’acte de disposition suppose l’unanimité et l’acte d’administration la majorité des deux tiers. En revanche, chaque indivisaire a la faculté de passer seul des actes conservatoires même s’ils ne présentent pas un caractère d’urgence en application de l’article 815-2 du Code civil (N° Lexbase : L9931HN7). Or, on peut considérer que la demande de désignation d’un administrateur provisoire s’inscrit dans la logique des actes conservatoires.
II - Articulation entre le droit de l’indivision et le droit des sociétés
La décision commentée offre l’occasion de faire le point sur l’articulation entre le droit de l’indivision et le droit des sociétés. Si elle met en lumière une sphère de prise de décision individuelle de l’associé indivis à l’égard de la demande de désignation d’un administrateur provisoire, elle doit s’articuler également avec la logique de l’indivision qui suppose l’exercice collectif de certaines prérogatives. Cette adaptation des pouvoirs de gestion de l’associé se manifeste tant à l’égard des droits politiques que financiers.
Principalement, le droit de vote est soumis à la désignation d’un mandataire unique et commun en application de l’article 1844, alinéa 4, du Code civil. Cette solution s’explique par le principe d’indivisibilité des parts sociales qui induit un exercice collectif du droit de vote. Le choix du mandataire est susceptible d’être encadré par les statuts de la SCI qui peuvent imposer, par exemple, la désignation de l’un des indivisaires. La mise en œuvre concrète de la décision de vote dépend de la gravité de l’acte, à savoir, s’il s’agit d’un acte de disposition ou d’administration.
Dans le même sens, les indivisaires associés ne sont pas en mesure d’exiger auprès de la société le versement de sa quote-part des dividendes. Le droit au dividende s’exerce également par l’intermédiaire du mandataire unique au nom et pour le compte de tous les indivisaires. Dans un deuxième temps, chacun pourra faire valoir ses droits aux bénéfices dans les rapports entre indivisaires en application de l’article 815-11 du Code civil (N° Lexbase : L9940HNH).
Enfin, le droit de l’indivision va s’imposer à l’égard de l’opération de cession des droits sociaux qui suppose de respecter la règle de l’unanimité applicable pour les actes de disposition.
Les prérogatives des titulaires de parts sociales indivises en nue-propriété bénéficiant de la qualité d’associé s’organisent donc autour de modalités d’exercice permettant d’allier sphère d’intervention individuelle et collective. L’associé indivis peut seul intervenir à l’égard des prérogatives présentant un caractère conservatoire.
[1] R. Nerson, Observations sur quelques espèces particulières d’indivision, in Mélanges Savatier, Dalloz, Paris, 1965, p. 707
[2] CA Aix-en-Provence, 29 juin 2017, n° 16/19180 (N° Lexbase : A2776WLE).
[3] Cass. com., 4 janvier 1994, n° 91-20.256, publié (N° Lexbase : A4835AC3), Bull. civ. IV, n° 10 ; Dr sociétés, mars 1994, n° 45, note Th. Bonneau ; Defrénois, 1994, art. 35789 p. 556, obs. P. Le Cannu ; M. Cozian, Du nu-propriétaire ou de l’usufruitier, qui a la qualité d’associé ?, JCP éd. N, 1994, I, 374 ; M. Cozian, A. Viandier et F. Deboissy, Droit des sociétés, 31èmé éd., LexisNexis, n°446
[4] Cass. com., 22 février 2005, n° 03-17.421, F-D (N° Lexbase : A8706DGK), JCP éd. E, 2005, 968, note R. Kaddouch et p. 1165, obs. J.-J. Caussain, F. Deboissy et G. Wicker.
[5] Voir, par exemple, B. Joyeux, Gestion et cession des droits sociaux indivis, Dr et Pat., 2018, n° 279, p. 30 ; J.-B Donnier, L’associé indivis, Dr sociétés, mars 2016, p. 41 ; S. Schiller et H. Fabre, L’indivision des droits sociaux, JCP éd. N, 2014, n° 45-46, 1333, n° 2.
[6] Cass. com., 21 janvier 2014, n° 13-10.151, F-P+B (N° Lexbase : A9960MCU) ; B. Saintourens, Lexbase, éd. aff., 2014, n° 371 (N° Lexbase : N0939BUC).
[7] M. Cozian, A. Viandier et F. Deboissy, Droit des sociétés, 31ème éd., LexisNexis, n° 1029.
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par Cabinet HOGO avocats
Le 30 Janvier 2019
L’organisation du temps de travail a toujours été au cœur des préoccupations des entreprises dans la mesure où elle constitue à la fois un outil économique pour l’employeur mais également de fidélisation et d’attractivité des salariés.
Les sujets de ces dernières années sur ladite organisation du temps de travail ne manquent pas : déconnexion, forfait jours, forfaits heures, annualisation, etc..
L’organisation du temps de travail répond à ce titre à plusieurs besoins : production, management, gestion des ressources humaines etc..
Ainsi, par exemple, dans son aspect management et ressources humaines, la déconnexion peut permettre de rappeler aux salariés que l’entreprise veille à l’équilibre entre leur vie privée et leur vie professionnelle mais également de les responsabiliser, afin qu’ils s’organisent de manière efficiente.
De même, dans son aspect production et productivités, les praticiens que nous sommes doivent mener une réflexion pour adapter l’organisation du temps de travail selon une multitude de paramètres avant de formuler la moindre proposition.
Le forfait jours, considéré comme le Saint Graal pour échapper à la législation sur le paiement des heures supplémentaires pour les cadres éligibles, n’est pas nécessairement adapté à la situation de l’entreprise du simple fait des éventuels minimas sociaux majorés (i.e. Convention collective «Syntec» N° Lexbase : X0585AEE).
Au-delà du formalisme juridique de sa mise en place, d’aucun n’oubliera la question éternelle du contrôle de la charge de travail qui, dans les faits, en fonction de la disponibilité du service RH ou tout simplement des dirigeants de l’entreprise, peut constituer un obstacle à toute mise en œuvre du forfait jours.
Ainsi, si le forfait jours peut permet d’adapter l’organisation du temps de travail aux besoins de la production, il comporte des contraintes qui ne sont pas toujours surmontables.
Ce qui nous amène au sujet du jour, l’annualisation du temps de travail, dont certains aspects pratiques ne doivent pas être négligés compte tenu de leur impact financier.
Propos introductifs : quelques aspects théoriques
Avant la loi du 20 août 2008 [1]. Avant la loi du 20 août 2008, il existait une multitude d’organisation plurihebdomadaire du temps de travail, comportant chacun leur lot de règles particulières : JRTT, cycles de travail, modulation, etc..
En effet, dans l’optique de prendre en considération les besoins des entreprises, le législateur a prévu de longue date la possibilité de déroger à l’appréciation hebdomadaire de la durée du travail.
Parmi les dispositifs à l’époque en vigueur figurait notamment le cycle de travail, qui constituait un mode d’aménagement du temps de travail fondé sur l’idée de prévision et donc de programmation préalable.
En d’autres termes, dans le cadre d’un accord collectif, pouvait être négocié une organisation selon des cycles de travail réguliers, les variations du temps de travail étant connues des salariés préalablement.
L’organisation selon des cycles de travail permettait d’échapper à l’appréciation hebdomadaire des heures supplémentaires : à l’intérieur des cycles de travail, les semaines hautes sont compensées par les semaines basses.
La durée du travail est donc organisée, selon des périodes de référence dénommées cycles de travail qui sont souvent définies par service ou par fonction.
Les cycles de travail étaient notamment utilisés au sein de l’industrie ou des hôpitaux, les rythmes de travail étant bien connus et maîtrisés.
L’accord collectif devait fixer la durée maximale du cycle de travail ou encore la répartition de la durée du travail à l'intérieur du cycle.
Après la loi du 20 août 2008. Dans un objectif de simplification, la loi du 20 août 2008 a mis en œuvre le principe de l’aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine, remplaçant les anciens dispositifs.
En dehors de l’aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine, il est prévu par l’article L. 3121-27 du Code du travail (N° Lexbase : L6886K9W) que «la durée légale de travail effectif des salariés à temps complet est fixée à trente-cinq heures par semaine».
L’article L. 3121-28 (N° Lexbase : L6885K9U) du même Code complète : «toute heure accomplie au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent».
Le principe est donc le suivant : toute heure accomplie au-delà de 35 heures de temps de travail effectif constitue une heure supplémentaire sujette à contrepartie financière ou de repos.
Cependant, l’annualisation du temps de travail (organisation plurihebdomadaire) a pour objet de permettre une répartition de la durée du travail sur douze mois consécutifs et d’adapter l’horaire hebdomadaire de travail aux variations pouvant être enregistrées dans l’activité de la société ou d’un service en limitant le déclenchement des heures supplémentaires.
C’est ainsi que l’article L. 3121-41 du Code du travail (N° Lexbase : L6872K9E) prévoit que «lorsqu'est mis en place un dispositif d'aménagement du temps de travail sur une période de référence supérieure à la semaine, les heures supplémentaires sont décomptées à l'issue de cette période de référence.
Cette période de référence ne peut dépasser trois ans en cas d'accord collectif et neuf semaines en cas de décision unilatérale de l'employeur.
Si la période de référence est annuelle, constituent des heures supplémentaires les heures effectuées au-delà de 1 607 heures.
Si la période de référence est inférieure ou supérieure à un an, constituent des heures supplémentaires les heures effectuées au-delà d'une durée hebdomadaire moyenne de trente-cinq heures calculée sur la période de référence».
Nous vous proposons donc de répondre à certains aspects pratiques que nous rencontrons dans notre quotidien.
I - Peut-on imposer un accord collectif aménageant le temps de travail sur une période supérieure à la semaine ?
Cette question revient souvent chez nos clients qui se demandent s’ils peuvent véritablement imposer la nouvelle organisation qu’ils souhaitent négocier, via un accord collectif.
Répondre oui serait bien évidemment trop simple, notre droit étant jonché d’embuches qu’il convient d’éviter.
En effet, la Cour cassation avait considéré qu’un dispositif d’aménagement du temps de travail ne pouvait être mis en place qu’avec l’accord du salarié et ce pour une raison simple : l’instauration de la modulation du temps de travail emporte modification de la détermination des heures supplémentaires et donc du mode de rémunération du salarié (Cass. soc, 28 septembre 2010, n° 08-43.161, FS-P+B N° Lexbase : A7542GAL).
Tout le débat résidait donc sur la notion de modification du contrat de travail : s’agit-il d’un simple changement des conditions de travail ou d’une véritable modification du contrat de travail ?
Pour la Cour de cassation, la modulation modifie le mode de détermination des heures supplémentaires et, par conséquent, le mode de détermination de la rémunération du salarié.
Or, la rémunération du salarié constituant un élément essentiel du contrat de travail, il s’agissait nécessairement d’une modification du contrat de travail ne pouvant intervenir sans l’accord du salarié.
C’est la raison pour laquelle le législateur est intervenu pour faire échec à cette jurisprudence et qu’a été instauré l’article L. 3121-43 du Code du travail (N° Lexbase : L6870K9C) selon lequel la mise en place d’un dispositif d’aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine par accord collectif ne constitue pas une modification du contrat de travail pour les salariés à temps complet.
Malheureusement, nous sommes en pratique contraints par les termes des contrats de travail soumis à notre analyse. Un avantage, quel qu’il soit, peut être contractualisé par l’employeur de sorte qu’il ne peut plus, par la suite, être modifié sans l’accord préalable du salarié.
Ainsi en est-il de la clause qui fixe une durée de préavis dérogatoire (Cass. soc., 15 juillet 1998, n° 97-43.985 N° Lexbase : A5687ACM), un mode de rémunération particulier (Cass. soc., 19 mai 1998, n° 96-41.573 N° Lexbase : A2891AC3), un horaire de travail «expressément précisé» (Cass. soc., 11 juillet 2001, n° 99-42.710 N° Lexbase : A6237AG4).
En d’autres termes, dans une telle situation, il convient de sortir du débat classique sur la modification du contrat de travail.
Ce qui doit donc attirer notre attention est donc la formulation des contrats de travail soumis à l’analyse. En l’occurrence, la question se pose pour un contrat formulé en ces termes :
«Monsieur […] est informé que l'organisation et la répartition de son temps de travail sont fixées par les dispositions relatives à l'aménagement du temps de travail telles que définies par l'accord de branche du […] et par l'accord d'entreprise conclu le […].
Le travail de Monsieur […] s’organise sur la base d’un horaire hebdomadaire de 37 heures 10 minutes, ouvrant droit à 12 jours de RTT par an.
Monsieur […] pourra occasionnellement travailler le dimanche et les jours fériés dans les conditions et limites fixées par les dispositions légales et conventionnelle».
La question qui se pose est la suivante : les jours de repos de réduction du temps de travail attribués par la clause contractuelle peuvent-ils être modifiés par la voie d’un accord collectif sur l’aménagement du temps de travail ?
Dans le cas d’espèce, il n’est pas stipulé qu’à titre informatif, le salarié aura droit à des JRTT mais bien que le temps de travail de travail du salarié lui ouvre droit à douze jours de RTT par an. C’est donc bien un avantage qui a été contractualisé, à savoir, le fait de bénéficier de douze jours de RTT par an.
Le purisme juridique commanderait donc de s’en tenir à cette analyse mais la pratique se veut bien évidemment différente puisque toute décision est prise en fonction des risques y attenants.
Il en serait différemment si la clause se contentait de renvoyer à l’application de l’accord, ou ne comportait pas de quantification précise voire précisait que le nombre de JRTT n’était qu’indicatif.
II - Quels sont les paramètres à prendre en considération dans la négociation d’un accord collectif organisant le temps de travail sur une période plurihebdomadaire ?
Rappelons-le, l’objectif primaire de l’annualisation du temps de travail est de sortir du carcan des 35 heures hebdomadaires, et partant, répartir le temps de travail sur une période déterminée pour éviter le paiement des heures supplémentaires par des compensations entre périodes hautes et basses d’activité.
NB : rappelons qu’avec ce type d’organisation du temps de travail, le salaire mensuel est lissé et donc invariable.
Le champ de la négociation est à ce titre relativement vaste puisqu’il est prévu, aux termes de l’article L. 3121-44 du Code du travail (N° Lexbase : L6869K9B) qu’«en application de l'article L. 3121-41, un accord d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche peut définir les modalités d'aménagement du temps de travail et organiser la répartition de la durée du travail sur une période supérieure à la semaine. Il prévoit :
1° La période de référence, qui ne peut excéder un an ou, si un accord de branche l'autorise, trois ans ;
2° Les conditions et délais de prévenance des changements de durée ou d'horaires de travail ;
3° Les conditions de prise en compte, pour la rémunération des salariés, des absences ainsi que des arrivées et des départs en cours de période de référence.
Lorsque l'accord s'applique aux salariés à temps partiel, il prévoit les modalités de communication et de modification de la répartition de la durée et des horaires de travail.
L'accord peut prévoir une limite annuelle inférieure à 1 607 heures pour le décompte des heures supplémentaires.
Si la période de référence est supérieure à un an, l'accord prévoit une limite hebdomadaire, supérieure à trente-cinq heures, au-delà de laquelle les heures de travail effectuées au cours d'une même semaine constituent en tout état de cause des heures supplémentaires dont la rémunération est payée avec le salaire du mois considéré. Si la période de référence est inférieure ou égale à un an, l'accord peut prévoir cette même limite hebdomadaire. Les heures supplémentaires résultant de l'application du présent alinéa n'entrent pas dans le décompte des heures travaillées opéré à l'issue de la période de référence mentionnée au 1°.
L'accord peut prévoir que la rémunération mensuelle des salariés est indépendante de l'horaire réel et détermine alors les conditions dans lesquelles cette rémunération est calculée, dans le respect de l'avant-dernier alinéa».
Dans le cadre de l’annualisation, il convient, à notre humble avis, de s’interroger notamment sur les points qui suivent :
=> Les populations ou services visés par l’annualisation du temps de travail
L’objectif est ici d’identifier précisément et exhaustivement les populations visées au sein des principaux pôles d’activités (en termes d’effectifs) pour proposer une typologie d’organisation du temps de travail qui corresponde au plus près aux besoins de productivité.
=> Les périodes d’activités
Si l’activité est continue, sans périodes hautes et basses, il est évident que l’annualisation serait de moindre intérêt.
Il faut donc déterminer :
- le nombre de semaines hautes et basses ;
- évaluer la périodicité de ces semaines hautes et basses.
=> Les contreparties pouvant être mises en œuvre s’agissant de l’annualisation (repos compensateur, majorations, etc.)
L’un des grands mythes de l’annualisation du temps de travail reste bien évidemment l’attribution de JRTT.
Depuis la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, le dispositif des JRTT prévus dans un cadre annuel a disparu en tant que modalité d'aménagement de la durée du travail.
Les JRTT constituaient auparavant une modalité de réduction du temps de travail : étaient ainsi attribués des journées ou demi-journées de repos pour compenser les heures effectuées au-delà de la durée légale hebdomadaire de travail.
Ce dispositif peut bien évidemment toujours être prévu dans le cadre d’une annualisation du temps de travail mais il n’est aucunement obligatoire.
Il faut donc échanger avec le client sur ses souhaits en la matière, ce qui peut varier grandement en fonction de son activité (transport, BTP, services, etc.).
A notre sens, les périodes hautes peuvent être compensées, en périodes basses, par l’attribution de journées ou de demi-journées de repos, voire des périodes de travail quotidienne de plus faible activité, cette dernière option demandant cependant une forte charge en termes de suivi administratif.
III - Comment sont traitées les heures supplémentaires ?
Le principe est le suivant : constituent des heures supplémentaires les heures effectuées au-delà du plafond de 1607 heures par an, à la condition qu’aucune programmation précise n’ait été prévue au sein de l’accord collectif.
Ne pas prévoir de modulation mais bien une annualisation avec programme indicatif au besoin
Il convient d’être particulièrement prudent dans la rédaction des termes de l’accord collectif.
L’article L. 3121-44 du Code du travail précise que l’accord collectif peut prévoir une limite hebdomadaire au-delà de laquelle les heures effectuées au cours d’une même semaine constituent en tout état de cause des heures supplémentaires dont la rémunération est payée avec le salaire du mois considéré.
Une telle stipulation n’a aucun intérêt puisqu’in fine, l’objectif est bien de sortir de l’appréciation hebdomadaire des heures supplémentaires.
A bien lire les textes, si l’accord sur l’annualisation du temps de travail met en place une programmation précise et non une annualisation du temps de travail, toute heure effectuée au-delà de 39 heures par semaine sera en tout état de cause considérée comme une heure supplémentaire, en application de l’article D. 3121-45 du Code du travail (N° Lexbase : L5455LBN).
N’oublions pas l’objectif généralement poursuivi : fournir de la flexibilité en limitant la formalisation d’une programmation indicative (charge de travail importante pour les managers et RH) afin d’éviter tout assimilation de l’organisation du temps de travail à de la modulation et éviter le déclenchement des heures supplémentaires à partir de 39 heures par semaine.
Le terme de modulation est donc à bannir de l’accord et la programmation qui pourrait par exemple figurer en annexe ne doit qu’être indicative.
En synthèse, vous l’aurez compris, à la fin de la période de référence, si le salarié a effectué plus de 1 607 heures de temps de travail effectif, les heures accomplies au-delà de ce plafond constitueront des heures supplémentaires.
Aussi, s’il n’a pas accompli plus de 1 607 heures dans l’année, il n’aura droit au paiement d’aucune heure supplémentaire, même s’il a travaillé plus de 35 heures par semaine certaines semaines de l’année.
Cela ne résout cependant pas une question très pratique, à savoir le taux des heures supplémentaires applicable.
IV - Quel taux appliquer aux heures supplémentaires éventuellement effectuées ?
Il convient selon nous de faire une moyenne : il faut prendre le nombre d’heures effectuées au-delà du plafond de 1 607 heures et le diviser par le nombre de semaines travaillées par le salarié.
Exemple concret : un salarié travaille 1 707 heures dans l’année et 46 semaines. Il a donc effectué 100 heures supplémentaires.
100 heures supplémentaires / 46 = 2,17 heures par semaine en moyenne. Le taux légal applicable est donc de 25 % (8 premières heures).
C’est en tous les cas la solution qui semble avoir été retenue, en filigrane, par la cour d’appel de Besançon dans un arrêt récent, bien qu’en l’espèce le plafond annuel ait été fixé à un seuil inférieur à 1 607 heures (CA Besançon, 13 avril 2018, n° 17/00963 N° Lexbase : A0327XLP).
V - Comment gérer les entrées et sorties ?
Comme précédemment exposé, l’accord prévoyant l’aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine doit notamment prévoir les conditions de prise en compte, pour les rémunérations des salariés, des absences ainsi que des arrivées et départs en cours de période de référence.
Bien que ce champ soit réservé à la négociation collective, il est, en réalité, relativement restreint pas les textes règlementaires.
L’article D. 3121-25 du Code du travail dispose, en effet, qu’en cas d’arrivée ou de départ en cours de période de référence, les heures accomplies au-delà de 35 heures hebdomadaires sont des heures supplémentaires. Les semaines où la durée de travail est inférieure à 35 heures, le salaire est maintenu sur la base de 35 heures hebdomadaire.
Que doit-on comprendre ?
En cas d’entrée ou de sortie en cours d’année, il faut en déduire que l’annualisation du temps de travail cesse de s’appliquer.
C’est la raison pour laquelle les accords prévoient généralement la régularisation du salaire sur la base de son temps réel de travail, à charge pour l’employeur d’effectuer un rappel ou un complément de salaire le cas échéant.
En matière de paie, cela signifie que la rémunération du salarié reste lissée. Il faut donc suivre le temps de travail du salarié et faire le bilan soit à la fin de l’année si le salarié est entré en cours d’année soit lors de l’établissement du solde de tout compte si le salarié est sorti en cours d’année.
A cette occasion, deux situations peuvent se présenter : soit l’employeur devra faire un rappel de salaire (notamment si le salarié est arrivé en cours de période haute), soit l’employeur pourra compenser certaines sommes si le décompte fait apparaître un trop versé (notamment si le salarié est arrivé au cours d’une période basse).
* * * *
Bien évidemment, de nombreuses autres questions pratiques se posent dans le cadre des négociations d’un accord sur l’annualisation du temps de travail et l’objectif n’était pas ici de toutes les aborder mais de faire le point sur les plus essentielles.
L’objectif poursuivi par le client doit toujours nous guider et il est fondamental d’associer dans ces négociations le service paye et les RH : un accord collectif n’est pas fait pour être lu, mais bien pour être utilisé en pratique.
Il faut donc que ceux qui en assumeront la mise en pratique en ait une bonne compréhension et puissent le mettre en œuvre facilement.
[1] Loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail (N° Lexbase : L7392IAZ).
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