La lettre juridique n°441 du 26 mai 2011

La lettre juridique - Édition n°441

Éditorial

Entre ordalie médiatique et sérénité des prétoires : du dévoiement de notre procédure inquisitoire

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N2872BS8

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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la publication

Le 27 Mars 2014


"Ce qu'un étranger comprend avec le plus de peine, aux Etats-Unis, c'est l'organisation judiciaire. Il n'y a pour ainsi dire pas d'événement politique dans lequel il n'entende invoquer l'autorité du juge ; et il en conclut naturellement qu'aux Etats-Unis le juge est une des premières puissances politiques" - A. de Tocqueville, De la démocratie en Amérique.

Et, il n'est pas certain que la médiatisation outrancière de l'Affaire permette à l'opinion publique d'appréhender, avec sérénité, les rouages d'une justice américaine, opinion publique qui a du mal à dérouler les arcanes de sa propre justice. Pourtant, si l'Affaire présente une vertu, ce n'est certainement pas celle d'un voyeurisme judiciaire mené tambour battant par les chaînes de télévision, mais l'occasion de donner un aperçu, même lointain, de l'avenir de notre système judiciaire, si l'on y prend garde.

D'abord, à n'en pas douter, il s'est passé quelque chose, ces dernières semaines, de hautement plus important que la comparution d'un homme, présumé innocent, devant répondre de ses éventuels actes auprès de la justice de son pays d'accueil. Le cas d'espèce fait malheureusement légion et doit, seulement, être réglé sous l'égide de l'impartialité. Non, l'évènement significatif de l'Affaire, c'est l'empressement médiatique à fouler du pied, et sans réserve, les principes les plus importants de notre Constitution (la présomption d'innocence), la loi (le respect de la vie privée), et disons le tout net, l'éthique (la frontière entre la politique et la chambre à coucher). L'hallali fut claironnée par l'ensemble des médias confondus, avec une palme d'or -c'est la saison-, non pour les chaînes de télévision traditionnellement jugées trash, mais pour le service public. Les chaînes étatiques ayant raté le coche de la télé-réalité, elles semblent vouloir rattraper leur retard et proposer, sous couvert d'actualité, un nouveau concept : la télé-réalité judiciaire. On savait le succès d'une émission hertzienne contant, sous le sceau documentaire, les affaires criminelles les plus sordides ; désormais, le direct est de mise, même en matière judiciaire, qu'il en aille de la dignité humaine ou non -mais cela, on savait déjà que c'était le cadet des soucis de la télé-réalité de droit commun-. Et, le "journaliste" de présenter l'Affaire dans les prétoires comme un "jeu", comme un "match" ; de "compter les points" entre l'accusation et la défense... Pour peu, on s'attendait à ce que l'émission propose de téléphoner à un standard -moyennant le coût d'un appel surtaxé ou d'un SMS- pour éliminer l'un des protagonistes ! "Si vous voulez que Dominique soit libéré sous conditions, tapez 1" ! Un certain malaise ne pouvait que transparaître à la vision d'une telle curée, d'une atteinte manifeste, non plus au seul homme incriminé, mais à la Justice toute entière, en ce qu'elle revêt, en principe, une solennité, une dignité, une sérénité que le système accusatoire peut envier au système inquisitoire.

Car c'est bien de cela qu'il est, encore, question aujourd'hui : de la prédominance d'un système judiciaire sur un autre. Depuis le Concile de Latran de 1215, adoptant, dans l'Europe ecclésiastique, la procédure inquisitoire, rien n'est véritablement réglé entre le système accusatoire et le système inquisitoire. Et, malgré la promotion de plus en plus vive, mais tardive, du droit continental, force est de constater que l'hégémonie accusatoire est une réalité, dont la télévision assure, à des degrés divers, la promotion dans l'inconscient collectif (séries américaines à profusion et, désormais, sensationnalisme judiciaire que seuls peuvent offrir les pays anglo-saxons).

Il n'y a qu'à faire état des dernières réformes de la Justice et, plus particulièrement, de la procédure pénale, pour s'apercevoir de l'influence grandissante du système accusatoire sur notre propre système judiciaire.

C'est bien entendu "le plaider coupable" à la française ou comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, introduit par la loi du 9 mars 2004, qui ouvrit la transformation progressive et insidieuse de notre système inquisitoire. Même si cette procédure ne concerne, aujourd'hui, que les délits punis d'une peine d'amende ou d'une peine d'emprisonnement inférieure ou égale à cinq ans -tout de même-, il s'agit, comme en pays de common law, de proposer à un prévenu une peine inférieure à celle encourue en échange de la reconnaissance de sa culpabilité. Où la Justice n'est plus affaire de vérité mais de pragmatisme...

Le second opus de ce dévoiement progressif de notre système inquisitoire se joue, en ce moment même à l'Assemblée, avec la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs. La rigueur juridique et l'obligation de motivation risquaient de voir disparaître la notion de jury populaire en matière criminelle ; voici que le Gouvernement s'échine à en développer le concept, en plaçant deux "citoyens assesseurs" aux côtés de magistrats professionnels au sein des tribunaux correctionnels, des chambres des appels correctionnels ainsi que des juridictions d'application des peines. En pratique, cette nouvelle composition juridictionnelle traitera des violences, des vols avec violence et des agressions sexuelles. On assure que, dans le cadre de ces "tribunaux correctionnels citoyens" -sur lesquels plane déjà la sagesse révolutionnaire de thermidor-, seule la décision sur la qualification des faits, la culpabilité du prévenu et sur la peine est prise par les magistrats et les citoyens assesseur (sic). Sur toute autre question, la décision est prise par les seuls magistrats... Cette introduction des "citoyens" -comme si les magistrats n'était pas eux-mêmes citoyens, d'ailleurs-, dans quasiment toutes les juridictions (assises, correctionnelle, prud'hommes, tribunaux de commerce... juridiction de proximité), revêt le plus haut sceau démocratique : "la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale est la démonstration la plus évidente que la justice, et notamment la justice pénale, est rendue au nom du peuple français'" nous dit le ministre de la Justice, en introduisant son projet de loi -sous procédure accélérée, tant il est vrai qu'il convient de précipiter les choses en la matière !-. Mais la sémantique est importante : "au nom du peuple français", ce n'est pas la même chose que "par le peuple français". Et, de deux choses l'une : soit le système représentatif n'assure pas la démocratie, les juges ne représentant pas ce peuple souverain et que dire, alors, de l'exécutif lui-même... Soit, il convient, pour les tenants des jurys populaires à tout va, de surveiller des magistrats professionnels parfois trop respectueux du droit et de la loi au goût de certains. Plus vraisemblablement, ces "citoyens assesseurs" vont être contraints à un "stage d'immersion" dans le monde judiciaire, à l'image d'un "vis ma vie de juge", à travers lequel les magistrats qui ne croulent pas tant sous les dossiers, comme chacun le sait, devront faire oeuvre de pédagogie pour expliquer aux citoyens les rouages de la Justice...

Enfin, pour parachever l'influence croissante du système accusatoire sur notre système judiciaire, on ne peut omettre la prochaine réforme de l'instruction. La disparition du juge charger d'instruire à charge et à décharge, d'enquêter pour la manifestation de la vérité marquera l'avènement d'un Parquet accusatoire chargé d'administrer la preuve de la culpabilité et d'une défense qui, avec les moyens qu'on voudra bien lui conférer, devra administrer la preuve de l'innocence. Et, suivant que vous soyez puissant ou misérable...

A travers l'Affaire, ce n'est finalement pas tant un homme "dans le viseur" (couverture de l'Express), dont "la chute" (couverture du Nouvel observateur et du Point) est ainsi précipitée, qui doit interpeller ; mais l'appétence des "citoyens", futurs assesseurs, pour une justice médiatique, aux ressorts dramatiques, dont le culte de la transparence -ou supposé tel, 90 % des affaires judiciaires se réglant finalement par voie transactionnelle- assassine le fondement suprême de notre justice, notamment, pénale, la présomption d'innocence, sur l'autel du sensationnel médiatique. Voir un juge arbitre, compter les points entre une accusation publique sous suffrage électoral et une défense au talent proportionnel au curseur pécuniaire, voilà l'hégémonie anglo-saxonne dont d'aucuns vantent les mérites, et qui risque bien de pourrir le fruit séculaire d'une justice inquisitoriale, qui malgré tous ces défauts, tentait de respecter la dignité humaine, et dont l'une des vertus fut d'interdire l'ordalie -ce jugement de Dieu par l'épreuve du feu et autres tortures-.

Un pas en avant (la réforme de la garde à vue), trois pas en arrière (le "plaider coupable", les jurys populaires, la suppression du juge d'instruction) : il n'est pas certain que la Justice française gagne au change... D'autant, que l'une des caractéristiques enviables du système accusatoire, l'exclusion autant que faire ce peut de la détention provisoire aux fins d'organiser au mieux la défense du prévenu, n'est, quant à elle, naturellement pas envisagée pour la patrie de la Liberté...

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Avocats

[Textes] L'introduction en droit français du contreseing de l'avocat par la loi n° 2011-331 de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et certaines professions réglementées

Réf. : Loi n° 2011-331 du 28 mars 2011, de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et certaines professions réglementées (N° Lexbase : L8851IPI)

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N2914BSQ

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par David Bakouche, Agrégé des Facultés de droit, Professeur à l'Université Paris-Sud (Paris XI)

Le 26 Mai 2011

L'Assemblée nationale et le Sénat ont, le 28 mars 2011, définitivement adopté la loi n° 2011-331, de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et certaines professions réglementées. L'article 3 de la loi insère, après le chapitre Ier du titre II de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques (N° Lexbase : L6343AGZ), un nouveau chapitre Ier bis, intitulé "Le contreseing de l'avocat". Il est l'aboutissement d'un texte présenté en Conseil des ministres par Madame Michèle Alliot-Marie le 16 mars 2010, inspiré des conclusions du rapport "Darrois" remis au Président de la République le 8 avril 2009 et préconisant de renforcer la valeur de l'acte sous seing privé signé par les parties lorsqu'il est contresigné par l'avocat. Ce nouveau chapitre comporte trois articles, ainsi rédigés :

Un article 66-3-1, qui dispose que "en contresignant un acte sous seing privé, l'avocat atteste avoir éclairé pleinement la ou les parties qu'il conseille sur les conséquences juridiques de cet acte".

Un article 66-3-2, aux termes duquel "l'acte sous seing privé contresigné par les avocats de chacune des parties ou par l'avocat de toutes les parties fait pleine foi de l'écriture et de la signature de celles-ci tant à leur égard qu'à celui de leurs héritiers ou ayants cause. La procédure de faux prévue par le code de procédure civile lui est applicable".

Et un article 66-3-3, énonçant que "l'acte sous seing privé contresigné par avocat est, sauf disposition dérogeant expressément au présent article, dispensé de toute mention manuscrite exigée par la loi".

Le premier intéresse, ainsi, la responsabilité de l'avocat, le deuxième la force probante de l'acte contresigné par l'avocat, tandis que le dernier tire une conséquence de la valeur reconnue à l'acte contresigné en dispensant d'un certain formalisme légal jugé, dans ce cas, superfétatoire. Bouleversant l'ordre de ces textes, on aimerait, après avoir exposé la teneur des deux dernières dispositions, revenir sur la première en ce qu'elle nous paraît, contrairement à ce qui en est généralement dit, recéler quelques difficultés d'appréciation et de mise en oeuvre.

I - Sur la force probante de l'acte contresigné

Le nouvel article 66-3-2 de la loi du 31 décembre 1971, en conférant à l'acte d'avocat une force probante renforcée, introduit dans notre système juridique un nouveau type d'acte à mi-chemin entre l'acte sous seing privé ordinaire, autrement dit non contresigné, qui n'offre aucune garantie quant à son origine, et qui, de ce fait, est facilement contestable, et l'acte authentique, certes moins facilement contestable mais plus complexe et plus coûteux.

L'acte contresigné par un avocat se trouve assimilé à l'acte sous seing privé reconnu par celui auquel on l'oppose ou légalement tenu pour reconnu visé par l'article 1322 du Code civil (N° Lexbase : L1433ABP), et suivant lequel un tel acte a "entre ceux qui l'ont souscrit et entre leurs héritiers et ayants cause la même foi que l'acte authentique". L'article 1322 reprend, sur ce point, la formulation de l'article 1319 (N° Lexbase : L1430ABL) qui prévoit que "l'acte authentique fait pleine foi de la convention qu'il renferme entre les parties contractantes et leurs héritiers ou ayants cause".

Aussi bien, alors que, s'agissant d'un acte sous seing privé ordinaire, où les signatures qui y figurent peuvent être des faux puisque personne n'a pu vérifier l'identité des signataires, le juge n'est jamais tenu de tenir pour vrai un acte sous seing privé du seul fait qu'il est produit devant lui, il en va différemment pour les actes visés à l'article 1322 du Code civil, dont l'acte contresigné par un avocat fait désormais partie. Disposant de "la même foi que l'acte authentique", l'acte visé par ce texte constitue une preuve parfaite s'imposant à la conviction des juges.

Encore faut-il distinguer selon qu'il est question de la régularité matérielle de l'acte ou de sa régularité intellectuelle.

De l'assimilation de l'acte contresigné par l'avocat aux actes de l'article 1322 du Code civil, il résulte, en premier lieu, qu'un tel acte ne peut faire l'objet d'une dénégation ou d'une méconnaissance de la signature ou de l'écriture par les parties ou par leurs ayants cause. Les parties ne pourront donc pas soutenir que la signature ou l'écriture de l'acte n'est pas la leur, pas plus que les héritiers ou ayants cause ne pourront affirmer qu'ils ne la reconnaissent pas. L'acte fait foi de l'identité de ses signataires et du fait que les parties ont bel et bien exprimé leur consentement. Sa régularité matérielle est, dès lors, acquise. Le seul moyen de contester la régularité matérielle d'un tel acte consisterait dans la procédure de faux prévue par les articles 299 (N° Lexbase : L1924H4Z) et suivants du Code de procédure civile : si, en effet, au cours d'une instance, l'écrit sous seing privé produit par un plaideur est argué de faux matériel par son adversaire, le juge procèdera à un examen en suivant les règles de la vérification d'écriture incidente, l'article 299 du Code de procédure civile renvoyant sur ce point aux articles 287 (N° Lexbase : L1892H4T) à 295 (1).

Mais il se peut, en second lieu, que ce soit non plus la régularité matérielle de l'acte qui soit contestée, mais sa régularité intellectuelle, autrement dit que ce ne soit pas la signature ou l'écriture d'une partie qui soit en cause, mais une mention de l'acte. Dans un acte authentique, contrairement aux énonciations relatives à des faits que l'officier public a pu constater personnellement, qui sont, en raison de sa qualité, incontestables, les faits relatés dans l'acte qui n'ont pas été constatés directement par l'officier public sont soumis à la preuve contraire. Par hypothèse, les mentions figurant dans un acte contresigné par un avocat n'ayant pas été constatées par un officier public, il faut considérer qu'elles ne font foi que jusqu'à preuve contraire des faits juridiques qu'elles relatent et des énonciations qu'elles contiennent.

Une fois ces observations faites, la question se pose de savoir si l'acte contresigné par l'avocat apporte réellement une plus-value par rapport à l'acte sous seing privé ordinaire ?

Evidemment, tel est le cas d'un point de vue strictement théorique puisque, on l'a relevé, s'il est exact que l'acte contresigné par l'avocat n'ajoute rien à la force probante d'un acte sous seing privé ordinaire quant au contenu ou quant à la date de l'acte, qui ne font foi que jusqu'à preuve contraire, il n'en demeure pas moins que, quant à l'origine de l'acte, la réforme accroît la force probante de l'acte. Comme, en effet, on l'a déjà dit, le nouvel article 66-3-2 de la loi du 31 décembre 1971 empêche désormais à la partie à laquelle on oppose l'acte de se contenter, pour le contester, de désavouer son écriture ou sa signature. L'apport de la loi nouvelle est donc, sous cet aspect, incontestable.

Pour autant, si l'on examine la question d'un point de vue plus pragmatique, les choses paraissent plus nuancées (2). On passera, en premier lieu, assez rapidement, tant la question ne souffre d'aucune discussion, sur le fait que la contestation de la validité d'un acte juridique ne dépend pas de la force probante de l'instrumentum qui permet de le constater. Les règles de preuve devant être distinguées des règles de forme -Carbonnier disait que preuve et forme sont deux mondes différents-, il est évident que la validité d'un acte juridique peut toujours être contestée, peu important, de ce point de vue, qu'il ait été constaté par un acte authentique, un acte sous seing privé contresigné par un avocat ou par un acte sous seing privé ordinaire.

Tout cela est, bien que les promoteurs de la réforme aient, semble-t-il, entretenu une certaine confusion, parfaitement entendu. Mais c'est surtout, en second lieu, l'idée selon laquelle l'acte sous seing privé serait, sur le plan probatoire, faible, idée qui permettrait d'attester de l'intérêt de l'acte contresigné par l'avocat, qui est en réalité assez exagérée. Comme un auteur a justement pu le faire observer, l'acte sous seing privé "fait foi jusqu'à preuve contraire et cette preuve n'est pas si aisée à rapporter" (3). Ce à quoi on ajoutera encore que, même quant à son origine, "en fait, en raison des progrès de l'expertise en écriture, il est devenu assez rare qu'un plaideur de mauvaise foi désavoue sa signature" .

II - Sur la dispense du formalisme légal de la mention manuscrite

L'article 66-3-3 introduit dans la loi du 31 décembre 1971 par la loi du 28 mars 2011 n'appelle, à vrai dire, que de brèves observations.

On rappellera en effet que le législateur, particulièrement à l'époque contemporaine, conscient des limites des méthodes classiques de protection du consentement et tirant ainsi les conséquences des insuffisances de la théorie des vices du consentement, a mis en oeuvre de nouvelles méthodes de protection du consentement destinées à rétablir l'inégalité objective existant souvent entre les contractants. D'où, suivant cette logique, un essor du formalisme et, notamment, du formalisme informatif : de plus en plus, dans un souci de protection du consentement du contractant, on l'oblige à recopier dans le contrat certaines mentions légales destinées à attirer son attention sur le contenu et la portée de son engagement. Ce formalisme, requis à peine de nullité de l'acte, est supposé mettre en mesure celui qui s'engage de le faire en connaissance de cause (5).

Cependant, l'avocat ayant pour mission de conseiller et éclairer les parties, on présume, quand il contresigne l'acte, qu'il a correctement exécuté son obligation d'information et de conseil, de telle sorte qu'il est cohérent de supposer que les parties sont pleinement conscientes de leur engagement. Du même coup, l'exigence d'une mention manuscrite devient assez inutile. C'est la raison pour laquelle la loi propose, dans ces hypothèses, de dispenser de cette exigence, le contreseing de l'avocat, sensé remplir en partie la même finalité, se substituant en quelque sorte à la mention manuscrite. On peut d'ailleurs, à cet égard, penser que la présence de l'avocat, tenu d'une obligation générale d'information et de conseil, sera plus à même d'éclairer efficacement le consentement des parties, le recopiage d'une mention légale n'étant pas toujours, loin s'en faut, le gage d'une bonne compréhension par celles-ci de la teneur de leurs engagements : l'abondance et la complexité de ce formalisme paperassier en fait, en effet, un instrument difficilement maîtrisable par ceux-là mêmes auxquels il est destiné. Surtout, malgré leur minutie, les exigences légales omettent parfois une information qu'aurait pu imposer l'obligation générale de renseignements. Or la jurisprudence décide que lorsque le formalisme informatif a été respecté, le destinataire de celui-ci ne saurait se plaindre (6).

III - Sur la responsabilité de l'avocat

En énonçant que "en contresignant un acte sous seing privé, l'avocat atteste avoir éclairé pleinement la ou les parties qu'il conseille sur les conséquences juridiques de cet acte", l'article 66-3-1, introduit dans la loi du 31 décembre 1971 par la loi nouvelle de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et certaines professions réglementées, intéresse, naturellement, la mission d'information et de conseil qu'assume l'avocat et, le cas échéant, la responsabilité qu'il encourt en cas de manquement.

Il va de soi que cette disposition n'emporte pas création d'un nouveau régime de responsabilité pour l'avocat contresignataire de l'acte. La question est bien connue en jurisprudence : tenu, en tant que rédacteur d'acte, de prendre toutes dispositions utiles pour assurer la validité et l'efficacité de l'acte (7), il lui incombe d'apporter la diligence à se renseigner sur les éléments de droit et de fait qui commandent les actes qu'il prépare ou les avis qu'il doit fournir, et d'informer ses clients sur la portée de l'acte et sur la conduite à tenir (8). Sous cet aspect, il n'est pas douteux que le devoir d'information et de conseil du rédacteur d'actes implique qu'il ait pris en considération les mobiles des parties, fussent-ils extérieurs à l'acte, au moins lorsqu'il en a eu connaissance (9).

Il est en outre à présent parfaitement acquis que le devoir d'information et de conseil du débiteur subsiste lorsque le créancier se fait assister par une personne compétente : ainsi a-t-il été jugé que la présence d'un avoué dans la procédure d'appel ne dispense pas l'avocat de son devoir de conseil (10). Et l'on sait, suivant d'ailleurs la même logique, que la compétence personnelle du client ne supprime pas dans son principe le devoir d'information et de conseil du professionnel : la jurisprudence décide, en effet, que les compétences professionnelles d'un client ne peuvent, à elles seules, dispenser l'avocat choisi par celui-ci de toute obligation de conseil (11) et, plus généralement, qu'elles ne dispensent pas le rédacteur d'actes de son devoir de conseil (12).

Aussi bien l'apport du texte nouveau ne consiste-t-il pas tellement pas le rappel de l'obligation d'information et de conseil de l'avocat, dont personne ne saurait douter, mais plutôt dans l'idée selon laquelle, à présent, les parties conseillées par l'avocat n'auront plus à apporter la preuve que la rédaction retenue est celle suggérée ou acceptée par l'avocat. Le contreseing permettra, en effet, de l'attester.

On comprend dès lors que le texte puisse être, sous cet angle, présenté comme "un puissant moyen de sécurisation des rapports juridiques, tant pour les personnes physiques que pour les entreprises" (13). Tel serait même "un atout majeur de l'acte d'avocat" (14). L'objectif, a-t-on encore ajouté, est avéré : "apporter une plus grande sécurité juridique pour les actes conclus entre les parties, grâce à l'intervention plus fréquente des avocats" (15).

On se permettra tout de même de poser une question, la formule de l'article 66-3-1 nous paraissant pouvoir susciter quelques hésitations quant à son appréciation. Quid en effet de l'hypothèse dans laquelle il ne serait certes pas contesté que le contenu de l'acte est celui suggéré ou accepté par l'avocat, mais plutôt de celle dans laquelle la partie conseillée par lui soutiendrait que l'information qui lui a été donnée lui apparaît, finalement, parcellaire ou incomplète, en sorte que, si elle avait été mieux informée, elle se serait peut-être déterminée différemment ? Autrement dit, la question se pose de savoir, dans le cas de figure où le client contesterait la qualité de l'information qui lui a été communiquée, si le contreseing de l'avocat ne risque pas de produire un effet pervers se retournant contre le client supposé protégé ? Faudrait-il en effet, dans une telle hypothèse, considérer que le recours par les parties à un acte sous seing privé contresigné par un avocat pourrait valoir de leur part reconnaissance de la bonne exécution par l'avocat de son devoir d'information et de conseil ? Si tel était le cas, il faudrait alors en déduire qu'il lui incomberait de rapporter la preuve du manquement allégué, ce qui, concrètement, conduirait à un renversement de la charge de la preuve défavorable aux parties à l'acte ayant eu recours au contreseing de l'avocat (13).

L'avenir nous dira si cette interrogation est ou non légitime.


(1) S. Guinchard et F. Ferrand, Procédure civile, Précis Dalloz, 28ème éd., n° 1191 et s..
(2) Voir not., en ce sens, Ph. Théry, RDC, 2010, p. 773.
(3) Ph. Théry, RDC, 2010, p. 775.
(4) Ph. Malinvaud, Introduction à l'étude du droit, Litec, 2008, n° 522.
(5) Sur l'essor de cette tendance, voir not. F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit civil, Les obligations, Précis Dalloz, 10ème éd., n° 262 et s..
(6) Cass. civ. 1, 14 juin 1989, n° 88-12.665 (N° Lexbase : A0039AB3), JCP éd. G, 1991, II, 21632, jugeant que "dès lors que le législateur lui-même n'avait pas jugé utile de faire figurer cet avertissement sur le modèle type qu'il avait lui-même rédigé [...] aucune réticence dolosive ne pouvait être imputée au cocontractant".
(7) Cass. civ. 1, 5 février 1991, n° 89-13.528 (N° Lexbase : A4419AH7), Bull. civ. I, n° 46.
(8) Cass. civ. 1, 27 novembre 2008, n° 07-18.142, F-P+B sur la première branche (N° Lexbase : A4608EBB), Bull. civ. I, n° 267, jugeant que l'avocat, unique rédacteur d'un acte sous seing privé, est tenu de veiller à assurer l'équilibre de l'ensemble des intérêts en présence et de prendre l'initiative de conseiller les deux parties à la convention sur la portée des engagements souscrits de part et d'autre, peu important le fait que l'acte a été signé en son absence après avoir été établi à la demande d'un seul des contractants.
(9) Cass. civ. 1, 13 décembre 2005, n° 03-11.443, FS-P+B (N° Lexbase : A0335DMD), Bull. civ. I, n° 496.
(10) Cass. civ. 1, 29 avril 1997, n° 94-21.217 (N° Lexbase : A0136ACZ), Bull. civ. I, n° 132.
(11) Cass. civ. 1, 12 janvier 1999, n° 96-18.775 (N° Lexbase : A2743ATR), Bull. civ. I, n° 15.
(12) Cass. civ. 1, 7 juillet 1998, n° 96-14.192 (N° Lexbase : A4535AG3), Bull. civ. I, n° 238.
(13) H. Letellier, L'acte d'avocat : c'est parti !, D., 2011, p. 1208.
(14) H. Letellier, préc..
(15) P. Michaud, Acte d'avocat : l'acte de la liberté contractuelle sera-t-il une révolution ?!, Gaz. Pal., 29 mars 2011, n° 88, p. 11.
(16) Alors que la jurisprudence jugeait que celui qui était légalement ou contractuellement tenu d'une obligation particulière d'information devait rapporter la preuve de l'exécution de cette obligation, admettant ainsi une présomption simple de non exécution de l'obligation. Voir ainsi, s'agissant de l'avocat : Cass. civ. 1, 29 avril 1997, n° 94-21.217 (N° Lexbase : A0136ACZ).

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Avocats/Institutions représentatives

[Questions à...] Le point de vue d'un Bâtonnier aujourd'hui... Philippe Pourchez, Bâtonnier de l'Ordre des avocats du barreau d'Amiens

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N2909BSK

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par Anne-Laure Blouet Patin, Directrice de la Rédaction

Le 26 Mai 2011



Régulièrement, les éditions juridiques Lexbase se plaisent à donner la parole au Bâtonnier d'un des Barreaux qui constituent le maillage ordinal de la profession d'avocat, afin qu'il ou elle évoque, avec nos lecteurs, son point de vue sur l'avenir des professions juridiques et, plus particulièrement, celui sur la profession qui l'anime au quotidien, et ses ambitions pour le Barreau dont il ou elle a la charge. Aujourd'hui, rencontre avec... Philippe Pourchez, Bâtonnier de l'Ordre des avocats du barreau d'Amiens.

Lexbase : Pouvez-vous nous présenter le barreau d'Amiens ?

Philippe Pourchez : La particularité du barreau d'Amiens est d'être installé au siège de la cour d'appel. Son autre caractéristique est d'être un barreau qui a été impacté très largement par la réforme de la carte judiciaire. En effet, la Somme est un des rares départements à ne disposer que d'un seul tribunal de grande instance, puisque que ceux d'Abbeville et de Péronne ont été intégrés à celui d'Amiens. Cette fusion a entraîné un accroissement du nombre de confrères : nous étions environ 170 avocats avant la fusion et nous sommes aujourd'hui un peu plus de 240. Cette fusion génère quantité de dysfonctionnements (approximations au niveau des greffes, problématique des délais de traitement, transmission des dossiers, numéros de dossier identiques, notamment avec la mise en place du RPVA faite en simultané) que nous allons être amenés à régler rapidement. Le barreau d'Amiens est un barreau jeune et il est implanté dans une région très largement touchée par la crise économique. Aussi, une bonne partie de nos jeunes confrères travaille à l'aide juridictionnelle.

Lexbase : Comment s'est organisée la mise en place de la nouvelle garde à vue au sein de votre barreau ?

Philippe Pourchez : Le barreau d'Amiens est un barreau courageux ! Lorsqu'il y a eu la réforme de la garde à vue, certains de mes homologues Bâtonniers faisaient valoir que leurs confrères ne souhaitaient pas intervenir dès lors qu'ils n'avaient pas de garanties de paiement de leurs prestations : je n'ai eu, dans mon barreau, aucune réaction de ce type là.

Tous les confrères sont très motivés. Ils considèrent que c'est un droit nouveau qui leur a été offert et, même s'il n'y avait pas de certitude du règlement à l'époque -puisqu'il y a eu une période d'une quinzaine de jours où cette question est restée en suspend-, je n'ai vu strictement aucune réaction hostile. Tous ceux qui étaient de permanence y sont allés sans rechigner, comme un seul homme, pour passer nuits et jours à assister les gardés à vue.

Je dirai que quelque part c'est exemplaire et je m'en suis même entretenu avec le Procureur de la République qui convenait qu'il n'y avait eu absolument aucun dysfonctionnement dans le ressort sur la mise en oeuvre des nouvelles interventions en matière de garde à vue. Le barreau a donc réussi à faire face et j'en suis assez satisfait !

Je n'ai qu'un espoir maintenant, c'est que les conditions de règlements qui vont nous être proposées, ou imposées, soient suffisamment raisonnables. En effet, il est indispensable qu'elles prennent en compte les frais de déplacements -le département est très vaste-, ainsi que les majorations de nuit et durant le week-end.

Pour faire fonctionner le système j'ai besoin de beaucoup de volontaires.

Jusqu'alors le barreau pouvait compter sur une cinquantaine de volontaires qui étaient de permanence chacun leur tour une semaine d'affilée. Avec le nouveau système, cette organisation va devoir être revue, les confrères ne pouvant pas délaisser leur cabinet jour et nuit pendant huit jours de suite. Cela pénaliserait et désorganiserait la structure de leurs cabinets.

En tant que Bâtonnier, il est de mon ressort de mettre en oeuvre un système où il y aura un minimum de contrainte pour mes confrères.

Le temps de permanence sera réduit et passera d'une semaine à deux jours et demi.

Il restera la question des volontaires pour le week-end, mais si l'indemnisation pour cette période n'est pas majorée, il se peut que des difficultés surgissent...

Lexbase : Justement que pensez-vous du financement proposé par le Conseil national des barreaux et la Chancellerie ?

Philippe Pourchez : Le CNB s'est calé sur les calculs qui avaient été faits par la Conférence des Bâtonniers, elle-même se fondant sur la rémunération qui était celle applicable à l'époque pour la demi-heure. Une extrapolation a été faite pour arriver à peu près à 365 euros. La Chancellerie de son côté propose 300 euros. L'un et l'autre ne sont pas très éloignés.

Ce qui me semble être à ce jour un écueil est l'absence des majorations de la nuit et de week-end, ainsi que la prise en compte des frais de déplacement. Sur le ressort du barreau, nous avons, par exemple, des points de garde à vue qui sont distants de soixante kilomètres donc je vous laisse faire le calcul des distances parcourues pour assister les gardés à vue...

Et il ne semble guère imaginable que les confrères ne soient pas indemnisés de ces kilomètres. La rémunération doit être équitable et, à défaut, je crains de ne pas disposer de suffisamment de volontaires et la qualité de service risquerait d'être moindre pour les dossiers où les lieux de garde à vue seront éloignés. Il n'est pas impossible, dès lors, que nous ne soyons plus en mesure de répondre à toutes les demandes. Mais, pour le moment il y a un certain engouement, encore (!), et tout fonctionne très bien.

Lexbase : Comment se déroule le passage au RPVA dans votre barreau ?

Philippe Pourchez : Le barreau a eu la chance d'avoir l'un de ses membres très intéressé par les nouvelles technologies et qui a été un élément moteur depuis l'origine du lancement de ce système. Le Président du tribunal de grande instance y était également très favorable ce qui fait qu'Amiens a été pratiquement une juridiction pilote pour l'installation du RPVA.

Il est en place depuis deux ou trois ans, et parfaitement opérationnel depuis près de dix-huit mois, date qui coïncide surtout avec une baisse des tarifs d'environ 30 % opérée par le CNB. Donc simultanément nous avons eu un système plus fiable et moins cher !

Pratiquement les trois quarts des confrères sont inscrits au RPVA. Tout fonctionnait très bien jusqu'à décembre 2010. Mais, un ralentissement s'est fait ressentir depuis le début de l'année avec l'intégration de deux barreaux supplémentaires. Sachant qu'elles allaient disparaître, les juridictions d'Abbeville et de Péronne n'ont pas pris la peine de se mettre au RPVA, ce que l'on peut bien évidemment comprendre. Par ailleurs, les greffes n'ont pas anticipé les fusions de tribunaux. Je m'explique : pour la numérotation des dossiers au greffe le système est le même à travers toute la France et donc nous nous retrouvons aujourd'hui avec des numéros "RG" identiques pour Amiens, Abbeville et Péronne... Il était impossible de fusionner les numéros de dossier, il aurait fallu réaffecter de nouveaux numéros et cela aurait généré un surcroît de travail pour le personnel du greffe, déjà très chargé. Donc au final, malheureusement, le système a un peu baissé en qualité du fait de l'arrivée de ces deux tribunaux. Mais progressivement les choses vont rentrer dans l'ordre.

Hormis cela, ce système nous convient très bien et nous l'utilisons même au-delà de ce qui est prévu. En effet, normalement le noyau dur du RPVA tourne autour du tribunal de grande instance, mais nous nous en servons auprès du tribunal correctionnel pour la mise en état des procédures pénales sur intérêts civils. Nous disposons également à la cour d'appel de greffiers qui nous informent des injonctions et des dates de fixation, via le RPVA. Enfin, il nous est possible d'adresser, par ce système, des conclusions à la chambre sociale de la cour.

Lexbase : Du côté des nouveautés, l'acte d'avocat a fait son entrée dans le paysage juridique le 28 mars dernier ; comment appréhendez-vous ce nouvel outil ?

Philippe Pourchez : J'ai mobilisé les confrères via un éditorial de la newsletter du barreau sur ce sujet. Il faut attirer leur attention à la fois sur la nouveauté que cela représente et sur l'intérêt que cela apporte à la profession pour le grand public. Dans l'esprit du public, avec l'acte d'avocat, les confrères seront sollicités non seulement en cas de litige, mais aussi et surtout pour obtenir une sécurité juridique à un prix concurrentiel. L'intervention de l'avocat doit dès lors, nécessairement, se banaliser.

Le barreau va donc organiser une formation sur ce thème où un universitaire expliquera l'outil en lui-même, et où des confrères, spécialisés par domaine d'activité, en présenteront l'intérêt spécifique dans le domaine d'activité considéré.

Lexbase : Bâtonnier depuis le début de l'année, qu'allez vous prévoir pour votre barreau durant ce mandat ?

Philippe Pourchez : Tout d'abord, la fusion me prend beaucoup de temps. Il faut récupérer les archives, régulariser les écritures en retard, s'occuper des questions d'assurance, gérer la continuation des contrats en cours, résoudre le sort du personnel des barreaux absorbés, établir un nouveau tableau de l'Ordre, etc.. On n'imagine pas tout l'administratif qu'il peut y avoir derrière une telle réforme !

Au niveau des formations, le barreau a organisé, récemment, un colloque avec Monsieur Antoine Garapon, Secrétaire général de l'Ecole des hautes études juridiques, sur l'application de la théorie du néo-libéralisme à la Justice. Cette religion de la statistique va générer un mode d'exercice un peu particulier que ce soit au niveau des avocats ou au niveau des juridictions. Il y a un virage important qui, sous couvert de rentabilité et d'efficacité, entraîne un changement de la nature de l'activité : si vous devez gagner 5 à 10 % d'efficacité et de rentabilité, vous aller travailler un peu plus vite sans modifier la nature de l'activité ; en revanche s'il vous faut gagner 50 % de rentabilité, vous ne faites plus le même métier.

Autant dire que ce colloque a remporté un franc succès !

Comme évoqué précédemment, le prochain colloque organisé par le barreau sera consacré à l'acte d'avocat.

Durant mon mandat, je souhaiterais également continuer dans le développement des nouvelles technologies. A cet égard, toute l'informatisation des locaux de l'Ordre va être mise en place et, au Palais de justice avec l'accord des magistrats, des bornes wi-fi devraient voir le jour pour permettre aux confrères équipés de tablettes, en attendant leur tour à l'audience, d'avoir accès à internet et de relever leur courriel. Enfin, je souhaite également installer à la bibliothèque de l'ordre un ou plusieurs ordinateurs connectés à des bases de données juridiques.

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Procédure civile

[Textes] Fusion des professions d'avocat et d'avoué : la valse des décrets

Réf. : Décret n° 2011-361 du 1er avril 2011 (N° Lexbase : L9137IP4) ; décret n° 2011-419 du 18 avril 2011 (N° Lexbase : L9974IP4) ; décret n° 2011-443 du 21 avril 2011 (N° Lexbase : L0113IQA) ; décret n° 2011-451 du 22 avril 2011 (N° Lexbase : L0069IQM)

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N2978BS4

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par Cédric Tahri, Directeur de l'Institut rochelais de formation juridique, Chargé d'enseignement à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV

Le 26 Mai 2011

La loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011, portant réforme de la représentation devant les cours d'appel (N° Lexbase : L2387IP4), a pour objet de fusionner, au 1er janvier 2012, les professions d'avocat et d'avoué près les cours d'appel. A cette date les offices d'avoués seront supprimés, les avoués, sauf s'ils y renoncent au plus tard le 1er octobre 2011, deviendront automatiquement avocats, et la postulation devant la cour d'appel sera ouverte à l'ensemble des avocats du ressort de la cour (1). L'objectif du texte consiste à simplifier et à moderniser les règles de représentation devant les juridictions en permettant au justiciable d'être représenté par un seul auxiliaire de justice tant en première instance qu'en appel. La réforme achève ainsi un mouvement amorcé par la loi du 31 décembre 1971 (loi n° 71-1130 N° Lexbase : L6343AGZ) qui a unifié les professions d'avocat et d'avoué près des tribunaux de grande instance. Elle permet également à la France d'assurer le respect de ses engagements européens. Depuis le vote de la loi du 25 janvier 2011, quatre décrets d'application ont été publiés au Journal officiel. Les uns détaillent les modalités d'indemnisation des avoués (I) ; les autres exposent les modalités de renonciation à la profession d'avoué (II) et d'accès à certaines professions juridiques et judiciaires (III). I - Modalités d'indemnisation des avoués

En application de la loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011, qui a ouvert un droit à indemnisation aux avoués et à leurs salariés, deux décrets sont venus préciser le fonctionnement de la commission nationale d'indemnisation (A) et du fonds d'indemnisation de la profession d'avoué (B).

A - Le fonctionnement de la commission nationale d'indemnisation

Les membres. Le décret n° 2011-361 du 1er avril 2011 précise la composition de la commission nationale d'indemnisation. Il dispose que les membres de ladite commission sont désignés pour cinq ans par arrêté du Garde des Sceaux, ministre de la Justice et des Libertés (2). Pour chaque membre titulaire, un suppléant est désigné dans les mêmes conditions. Les membres représentant les avoués près les cours d'appel sont désignés sur proposition de la Chambre nationale des avoués près les cours d'appel. En cas d'empêchement d'un ou plusieurs membres titulaires ou suppléants de la commission, il est procédé à leur remplacement dans les mêmes conditions pour la durée du mandat restant à courir.

A noter que les fonctions des membres de la commission sont gratuites. Toutefois, ils ont droit au remboursement de leurs frais de déplacement dans les conditions applicables aux personnels civils de l'Etat.

Les délibérations. La commission ne délibère valablement que lorsque le président et au moins un des deux membres représentant respectivement le ministre de la Justice et le ministre chargé du Budget et un des deux membres représentant les avoués près les cours d'appel, ou leurs suppléants respectifs, sont présents. Dans tous les cas, si le quorum n'est pas atteint, la commission peut délibérer valablement après une nouvelle convocation si la moitié au moins de ses membres sont présents. En cas de partage égal des voix, le président a voix prépondérante.

Les décisions. La commission établit des offres d'indemnisation en s'appuyant sur les justificatifs fournis par l'avoué. Ses décisions sont motivées. Elles sont communiquées au Garde des Sceaux, ministre de la Justice et des Libertés, et notifiées au bénéficiaire concerné par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, à l'adresse à laquelle il aura formé élection de domicile pour le temps de la procédure d'indemnisation.

Le montant de l'offre correspondant à l'indemnisation de la perte du droit de présentation est calculé en prenant pour base la moyenne entre, d'une part, la recette nette moyenne des cinq derniers exercices comptables dont les résultats sont connus de l'administration fiscale à la date de la publication de la loi et, d'autre part, trois fois le solde moyen d'exploitation des mêmes exercices. La recette nette est égale à la recette encaissée par l'office, retenue pour le calcul de l'imposition des bénéfices, diminuée des débours payés pour le compte des clients et des honoraires rétrocédés. Le solde d'exploitation est égal aux recettes totales retenues pour le calcul de l'imposition des bénéfices, augmentées des frais financiers et des pertes diverses et diminuées du montant des produits financiers, des gains divers et de l'ensemble des dépenses nécessitées pour l'exercice de la profession, telles que retenues pour le calcul de l'imposition des bénéfices en application des articles 93 (N° Lexbase : L1207IPE) et 93 A (N° Lexbase : L1987HL8) du Code général des impôts. Les données utilisées sont celles qui figurent sur les déclarations fiscales annuelles.

En cas d'acceptation de l'offre par l'avoué, l'indemnité correspondante est versée à l'avoué dans le délai d'un mois à compter de cette acceptation. A défaut d'avoir été acceptée dans le délai de six mois, l'offre de la commission est réputée avoir été refusée par l'avoué, auquel il appartient de saisir le juge de l'expropriation.

Du reste, le décret décrit la procédure d'indemnisation des salariés d'avoué : les indemnités exceptionnelles de licenciement (à hauteur d'un mois de salaire par année d'ancienneté, dans la limite de trente mois), indemnités exceptionnelles de reconversion, et sommes dues au titre du reclassement des salariés licenciés non prises en charge par le Fonds national pour l'emploi, sont calculées par le dernier employeur auquel le salarié doit remettre l'ensemble des pièces permettant de reconstituer sa carrière et de justifier de la demande.

B - Le fonctionnement du fonds d'indemnisation

Le décret n° 2011-419 du 18 avril 2011 précise les modalités de fonctionnement du fonds d'indemnisation de la profession d'avoué institué par l'article 19 de la loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011. Pour mémoire, ce fonds est chargé d'une triple mission : il paie les sommes dues aux avoués près les cours d'appel et aux chambres, ainsi que les sommes dues à leurs salariés ; il procède au remboursement au prêteur du capital restant dû au titre des prêts d'acquisition de l'office ou de parts de la société d'exercice à la date où il intervient ; il prend en charge les éventuelles indemnités liées à ce remboursement anticipé.

La composition du fonds. Doté de la personnalité morale et de l'autonomie financière, le fonds est placé sous la tutelle du ministère de la Justice et du ministre chargé du Budget. Il est administré par un conseil de gestion composé d'un représentant du Garde des Sceaux, ministre de la Justice, d'un représentant du ministre chargé du Budget, d'un représentant de la Caisse des dépôts et consignations et de deux représentants des avoués près les cours d'appel. Ces derniers sont désignés pour une durée de cinq ans par arrêté du ministre de la Justice, sur proposition de la Chambre nationale des avoués près les cours d'appel (3).

Le conseil de gestion se réunit au moins deux fois par an sur convocation de son président. Ses délibérations sont adoptées à la majorité simple des suffrages exprimés. En cas de partage, la voix du président est prépondérante. Par ailleurs, le conseil de gestion ne délibère valablement que si trois des membres sont présents. Lorsque le conseil ne peut, faute de quorum, délibérer valablement, il peut à nouveau être réuni et délibérer valablement, quel que soit le nombre des membres présents, sous un délai d'un jour franc.

Au demeurant, il convient de relever que chaque année, sur proposition du président, le conseil de gestion adopte, avant le 31 mars :

- un état prévisionnel pluriannuel de l'équilibre économique et financier du fonds établi conjointement par la Caisse des dépôts et consignations et le ministère de la justice ;

- pour l'exercice à venir, l'état prévisionnel des recettes et des dépenses afférentes aux obligations de toute nature incombant au fonds établi conjointement par la Caisse des dépôts et consignations et le ministère de la justice ;

- le bilan, le compte de résultat et le rapport de gestion du fonds établis par la Caisse des dépôts et consignations concernant l'exercice écoulé.

La gestion du fonds. Le décret indique que la gestion administrative, comptable et financière du fonds d'indemnisation de la profession d'avoué est confiée à la Caisse des dépôts et consignations, dans les conditions fixées par une convention de gestion passée entre le fonds représenté par son président et la caisse. Cette convention fait l'objet d'une approbation par le conseil de gestion du fonds.

De plus, le décret énumère les recettes et les dépenses du fonds d'indemnisation en son article 6. Les premières sont constituées par le droit dû par les parties à l'instance d'appel lorsque la constitution d'avocat est obligatoire devant la cour d'appel, mentionné à l'article 1635 bis P du Code général des impôts (N° Lexbase : L3226IGL), le montant des emprunts ou des avances contractés auprès de la Caisse des dépôts et consignations, le produit correspondant au placement des éventuels excédents de trésorerie, ainsi que les recettes non prévues et diverses. Les secondes comprennent notamment les frais de gestion du fonds dus à la Caisse des dépôts et consignations, les frais financiers liés à la mise en place des emprunts ou des avances par la Caisse des dépôts et consignations au bénéfice du fonds, le remboursement des emprunts ou des avances contractés auprès de la Caisse des dépôts et consignations et le règlement des intérêts y afférents, les frais de gestion liés aux modalités de versement par l'Etat au fonds du droit mentionné à l'article 1635 bis P du Code général des impôts, ainsi que les dépenses non prévues et diverses.

Enfin, le décret dispose que les paiements du fonds d'indemnisation de la profession d'avoué des sommes dues en application des articles 13, 14, 15 et 17 de la loi du 25 janvier 2011 sont effectués par la Caisse des dépôts et consignations en exécution et après notification des décisions de la commission prévue à l'article 16 de ladite loi ou du président de la commission statuant seul ou encore des décisions de justice exécutoires ou définitives du juge de l'expropriation, avec la production de toutes pièces de nature à établir le caractère exécutoire ou définitif des décisions.

II - Modalités de renonciation à la profession d'avocat

Le décret n° 2011-443 du 21 avril 2011, pris en application de la loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011, portant réforme de la représentation devant les cours d'appel, définit les modalités selon lesquelles les avoués exercent leur faculté de renonciation à entrer dans la profession d'avocat, ou expriment leur choix d'être inscrits à un autre barreau que celui établi près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel est situé leur office.

La procédure de renonciation. Les avoués près les cours d'appel qui, en application de l'article 26 de la loi du 25 janvier 2011, renoncent à faire partie de la profession d'avocat en avisent le président de la chambre de la compagnie des avoués près la cour d'appel dont ils dépendent, au plus tard le 1er octobre 2011, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Selon les mêmes modalités, les avoués près les cours d'appel qui choisissent d'être inscrits au tableau d'un barreau autre que celui prévu au premier alinéa du I de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1971 en avisent le président de la chambre de la compagnie des avoués près la cour d'appel dont ils dépendent, qui en informe immédiatement le président de la chambre dans le ressort de laquelle se situe le barreau au tableau duquel l'avoué demande son inscription.

La désignation d'un successeur. Par ailleurs, le décret comprend des dispositions relatives à la transmission des dossiers en cours, par les avoués cessant leur activité. Précisément, l'avoué renonçant avise ses clients de la nécessité pour eux de constituer un avocat pour le substituer à compter du 1er janvier 2012 dans les instances en cours et transmet sans délai à son successeur les pièces dont il est dépositaire ainsi que les actes de procédure. A défaut de désignation d'un successeur par le client, trois mois après l'envoi de la lettre recommandée, l'avoué transmet les pièces et les actes de la procédure au Bâtonnier du barreau dans le ressort duquel il a son office. Il informe son client de cette transmission. En l'absence de demande en restitution du client, le Bâtonnier est dépositaire des pièces pendant un délai de cinq ans.

III - Modalités d'accès à certaines professions

L'accès privilégié des avoués aux professions juridiques et judiciaires. Pris pour l'application de la loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011, portant réforme de la représentation devant les cours d'appel, le décret n° 2011-451 du 22 avril 2011 détermine les conditions dans lesquelles les avoués qui renoncent à entrer dans la profession d'avocat et leurs collaborateurs, titulaires de l'examen d'aptitude à la profession d'avoué, d'une part, et, d'autre part, leurs autres collaborateurs juristes, peuvent sur leur demande présentée dans le délai de cinq ans bénéficier d'un accès privilégié aux professions juridiques et judiciaires.

Ce texte permet aux avoués et à leurs collaborateurs titulaires du diplôme d'avoué d'accéder aux professions de notaire, d'huissier de justice, de commissaire-priseur judiciaire et de greffier de tribunal de commerce sous réserve d'accomplir un stage professionnel de six mois au sein de la profession qu'ils intégreront.

Pour accéder aux professions d'administrateur judiciaire et de mandataire judiciaire ils doivent accomplir un stage pratique de un an et passer un examen d'aptitude allégé. Pour la profession d'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, un stage de deux ans est requis pour les collaborateurs et l'examen d'aptitude, qui reste nécessaire, est allégé pour les avoués.

Les autres collaborateurs, bénéficient d'une dispense de l'examen ou des conditions d'accès à la formation ou au stage, suivant les professions. Ils demeurent soumis à l'obligation d'accomplir la durée du stage et de subir l'examen d'aptitude. Une dispense partielle de stage peut leur être accordée par décision du procureur général ou des commissions nationales d'inscription et de discipline des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires.

Le décret fixe, en outre, les conditions de diplôme et d'expérience professionnelle requises pour permettre aux collaborateurs juristes de bénéficier de l'accès direct à la profession d'avocat accordé par la loi aux collaborateurs titulaires de l'examen d'aptitude à la profession d'avoué.

Ce texte comprend également, s'agissant spécifiquement de l'accès à la profession d'avocat, des dispositions relatives à l'inscription des avoués au tableau de l'Ordre ainsi qu'à leur faculté d'exercer simultanément cette profession et celle d'avoué pendant une période transitoire de trois mois à compter du 1er octobre 2011.

La désignation du Bâtonnier de la cour d'appel. Dans un autre registre, le décret fixe les modalités de désignation du Bâtonnier de la cour d'appel, nouveau représentant de la profession d'avocat créé par la loi pour prévenir les difficultés qui pourraient surgir du fait de l'extension du nombre de postulants devant la cour d'appel. Ainsi, selon le nouvel article 6-1 du décret du 27 novembre 1991 (N° Lexbase : L8168AID), tous les deux ans dans le premier mois de l'année civile, les Bâtonniers des barreaux d'une même cour d'appel désignent à la majorité celui d'entre eux chargé, en qualité de bâtonnier en exercice, de les représenter pour traiter des questions mentionnées au dernier alinéa de l'article 21 de la loi du 31 décembre 1971. La décision est communiquée sans délai au premier président de la cour d'appel et au procureur général près cette même cour. En l'absence de désignation à l'expiration du délai prévu, le Bâtonnier du barreau du tribunal de grande instance situé au siège de la cour d'appel ou, à défaut, du tribunal de grande instance le plus proche de la cour assure cette représentation.

Les transferts. Sur un plan pratique, le décret règle le sort des archives des chambres d'avoués ainsi que le transfert des fonds détenus par les anciens avoués à la caisse des règlements pécuniaires des avocats. Sauf pour les besoins de l'application des articles 28 et 29 de la loi du 25 janvier 2011, les documents, dossiers et archives professionnels détenus par les anciennes chambres des compagnies d'avoués près les cours d'appel ainsi que par la Chambre nationale des avoués sont respectivement transférés aux barreaux, établis près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel est situé le siège de la chambre, et au Conseil national des barreaux. En outre, les fonds, valeurs ou effets déposés avant le 1er janvier 2012 par un avoué pour le compte de ses clients ou de tiers sur un compte de dépôt ouvert dans une banque ou à la Caisse des dépôts et consignations sont transférés au plus tard le 31 décembre 2012 à la Caisse des règlements pécuniaires des avocats instituée par le barreau auquel l'avoué aura été inscrit.


(1) Sur la loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011, portant réforme de la représentation devant les cours d'appel, v. nos observations La réforme de la représentation devant les cours d'appel, Lexbase Hebdo n° 66 du 3 mars 2011 - édition professions (N° Lexbase : N5089BRW).
(2) V. Arrêté du 4 avril 2011, fixant la composition de la commission prévue à l'article 16 de la loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011, portant réforme de la représentation devant les cours d'appel (N° Lexbase : L3654IQE).
(3) V. Arrêté du 26 avril 2011, portant nomination au conseil de gestion du fonds d'indemnisation de la profession d'avoué ({"IOhtml_internalLink": {"_href": {"nodeid": 4683114, "corpus": "sources"}, "_target": "_blank", "_class": "color-textedeloi", "_title": "Arr\u00eat\u00e9 du 26 avril 2011 portant nomination au conseil de gestion du fonds d'indemnisation de la profession d'avou\u00e9", "_name": null, "_innerText": "N\u00b0\u00a0Lexbase\u00a0: L3655IQG"}}).

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Collectivités territoriales

[Questions à...] Stationnement irrégulier de véhicules appartenant à des membres de la communauté des gens du voyage, quelles solutions apporter ? - Questions à Jérôme Maudet, avocat au barreau de Nantes

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N2861BSR

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par Yann Le Foll, Rédacteur en chef de Lexbase Hebdo - édition publique

Le 26 Mai 2011

En matière d'occupation illégale de leur territoire, les collectivités locales sont le plus souvent confrontées à la question du stationnement irrégulier de véhicules appartenant à des membres de la communauté des gens du voyage. Selon le ministère de l'Equipement, environ 150 000 personnes en France ont un mode de vie itinérant et vivent en résidence mobile. Pour lutter contre les stationnements illégaux sur leur territoire, les communes disposent d'un arsenal très complet mais souvent méconnu. Afin d'apporter quelques éclaircissements sur cette législation parfois complexe, ainsi qu'un mode opératoire à suivre en fonction des différents types d'occupation, Lexbase Hebdo - édition publique a rencontré Jérôme Maudet, avocat au barreau de Nantes au sein du cabinet Cornet Vincent Ségurel. Lexbase : Pouvez-vous nous rappeler les pouvoirs du maire en matière de stationnement illégal ?

Jérôme Maudet : Aux termes de l'article 9-I de loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000, relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage (N° Lexbase : L0716AID), dite loi "Besson" : "Dès lors qu'une commune remplit les obligations qui lui incombent en application de l'article 2, son maire [...] peut, par arrêté, interdire en dehors des aires d'accueil aménagées le stationnement sur le territoire de la commune des résidences mobiles mentionnées à l'article 1er". L'édiction d'un tel arrêté est un préalable indispensable à toute procédure contentieuse.

En tout état de cause, la commune concernée ne pourra utilement se prévaloir de cet arrêté qu'autant que l'établissement de coopération intercommunale continuera de satisfaire aux obligations qui lui incombent en matière d'accueil des gens du voyage. En effet, en cas de dégradation manifeste des conditions d'accueil ou de réduction sensible des capacités effectives d'accueil par rapport aux prescriptions du schéma, le juge pourrait considérer que les conditions d'accueil prévues par la loi "Besson" ne sont plus remplies et que l'arrêté interdisant le stationnement, sur tout autre lieu que l'aire aménagée, n'a plus de fondement. Dans cette hypothèse, la commune devra fonder sa demande d'expulsion sur les dispositions des articles 808 (N° Lexbase : L0695H4I) et 809 (N° Lexbase : L0696H4K) du Code de procédure civile, plus restrictives, dès lors qu'il faut prouver l'existence d'un dommage imminent ou d'un trouble manifestement illicite.

Ensuite, pour faire constater la matérialité de l'infraction et le caractère illégal du stationnement, les communes peuvent faire appel soit à un huissier de justice, soit à l'un de ses agents assermentés à cette fin, et, notamment, à un de ses agents de police municipale. Le procès-verbal de constat devra permettre d'établir avec certitude la matérialité de l'infraction : lieu, numéro de parcelle, propriétaire de la parcelle, identités des contrevenants, immatriculations des véhicules, branchement illégaux aux fluides, dégradations éventuelles, décharges illégales....

Lexbase : Qu'en est-il de la question de la propriété du terrain ?

Jérôme Maudet : Une commune est fondée à engager une procédure, dès lors que les intéressés sont stationnés illégalement sur son domaine public ou privé sans avoir à justifier d'un quelconque autre trouble. En revanche, si les contrevenants ont investi une parcelle privée, le maire devra justifier d'un trouble à l'ordre, à la salubrité ou à la tranquillité publique. L'alinéa 2 de l'article 9-II de la loi n° 2000-614 de la loi du 5 juillet 2000 prévoit, en effet que, "sauf dans le cas où le terrain appartient à la commune, le maire ne peut agir que si le stationnement est de nature à porter atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques".

S'il s'agit d'un terrain appartenant à l'Etat, c'est auprès du juge administratif que la commune devra solliciter l'expulsion. En pratique, tel est, notamment, le cas lorsque les contrevenants ont effectué des branchements illégaux sur les réseaux, ou si leur présence génère des nuisances importantes pour les riverains (dégradations, déchets sauvages). Il convient de souligner que l'article 9-III de la loi "Besson" exclut expressément trois hypothèses de son champ d'application : " [...] lorsque ces personnes sont propriétaires du terrain sur lequel elles stationnent [...] lorsqu'elles disposent d'une autorisation délivrée sur le fondement de l'article L. 443-1 du Code de l'urbanisme (N° Lexbase : L3487HZ8) [...] lorsqu'elles stationnent sur un terrain aménagé dans les conditions prévues à l'article L. 443-3 du même code (N° Lexbase : L3489HZA)". Les procès verbaux doivent donc être particulièrement circonstanciés pour permettre notamment au magistrat de définir qui est propriétaire du terrain (indication du numéro de parcelle, nom du propriétaire...).

Lexbase : Quelles sont les différentes procédures contentieuses d'expulsions ?

Jérôme Maudet : Une fois l'infraction constatée, il appartient à la commune de saisir, soit le Procureur de la République, soit le Président du tribunal de grande instance d'une assignation ou d'une requête par l'intermédiaire de son conseil habituel.

Concernant la saisine du Procureur de la République, l'article 53 de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003, pour la sécurité intérieure (N° Lexbase : L9731A9B), a créé une nouvelle infraction pénale qui réprime l'installation illicite en réunion sur un terrain appartenant à autrui en vue d'y établir une habitation, même temporaire. Cette infraction, désormais prévue à l'article 322-4-1 du Code pénal (N° Lexbase : L0596DHK), est réprimée par une peine de six mois d'emprisonnement et 3 750 euros d'amende. Lorsque l'installation s'est faite au moyen de véhicules automobiles, le Procureur peut décider de procéder à leur saisie immédiate en vue de leur confiscation, à l'exception des véhicules destinés à l'habitation, et à la suspension du permis de conduire pour une durée de trois ans au plus. Néanmoins, la saisine du Procureur de la République me paraît inadaptée puisqu'il dispose de l'opportunité des poursuites et peut décider de classer sans suite la demande.

Le maire peut, ensuite, faire saisir le Président du tribunal de grande instance par voie d'assignation, laquelle doit être délivrée par exploit d'huissier aux contrevenants au moins 48 heures avant l'audience durant laquelle les parties seront invitées à présenter leurs observations. Si certains contrevenants n'ont pu être identifiés, il est possible de solliciter dans l'assignation que l'ordonnance de référé vaille également ordonnance sur requête. Dans cette même hypothèse, la commune a, également, la possibilité de saisir, par l'intermédiaire de son conseil, le Président du tribunal par voie de requête.

Cette procédure étant non contradictoire, les magistrats sont souvent très réticents à l'utiliser. Néanmoins, celle-ci présente un intérêt tout particulier pour la commune dans la mesure où la requête peut être déposée rapidement et que les délais sont extrêmement réduits. Toutefois, s'il considère qu'il existe un quelconque risque pour sa sécurité ou pour l'ordre public, l'huissier ou l'agent missionné à cet effet pourra légitimement décider qu'il lui est impossible de relever les plaques d'immatriculation ou les identités. Le procès-verbal de constat devra, alors, justifier de l'existence d'un risque lié à l'attitude des contrevenants ou au nombre de ces derniers.

Lexbase : Comment se déroule l'exécution des décisions d'expulsion ?

Jérôme Maudet : La décision est exécutoire nonobstant appel et, en cas de nécessité, il est possible de demander au Président du tribunal de grande instance que sa décision soit exécutoire sur minute, c'est-à-dire avant même l'accomplissement des formalités d'enregistrement. L'ordonnance sur requête et l'ordonnance de référé doivent être signifiées aux contrevenants par voie d'huissier. Dans le cas d'une ordonnance sur requête, la signification est faite au Parquet. En pratique, il est fréquent que les gens du voyage quittent les lieux à réception de l'assignation voire, au plus tard, à la date de signification de l'ordonnance de référé ou de l'ordonnance sur requête. Néanmoins, si les contrevenants refusent de quitter l'emplacement qu'ils occupent illégalement, la commune devra solliciter le concours de la force publique de la part du préfet.

En effet, aux termes de la circulaire ministérielle n° 2001-49 du 5 juillet 2001, relative à l'application de la loi "Besson" (N° Lexbase : L3010IQK), les préfets ont reçu pour consigne d'accorder le concours de la force publique aux communes respectueuses des dispositions de ladite loi. Si le préfet refusait d'accorder à la commune le concours de la force publique, celle-ci pourrait, alors, le saisir d'une demande indemnitaire préalable pour couvrir son préjudice. En cas de refus, la commune serait alors fondée à saisir la juridiction administrative pour obtenir réparation. Dans une telle hypothèse, la commune n'aura malheureusement d'autre choix que de subir la présence des gens du voyage illégalement stationnés jusqu'au départ spontané de ces derniers, ou jusqu'à ce que les services de l'Etat dans le département accordent enfin le concours de la force publique.

Afin de favoriser une telle issue, il conviendra de réitérer les demandes de concours auprès du préfet. Lorsque la mise en demeure de quitter les lieux prévue aux articles 27 et suivants de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007, relative à la prévention de la délinquance (N° Lexbase : L6035HU3), modifiant l'article 9 de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000, n'a pas fait l'objet d'un recours dans les conditions fixées, le préfet peut procéder à l'évacuation forcée des résidences mobiles, sauf opposition du propriétaire ou du titulaire du droit d'usage du terrain dans le délai fixé pour l'exécution de la mise en demeure.

Enfin, il résulte des mêmes dispositions que le maire peut désormais solliciter auprès du préfet le concours de la force publique sans avoir à obtenir préalablement l'autorisation judiciairement. Cependant, le législateur n'a pas encadré la réponse du préfet dans un délai quelconque. Dès lors, il m'apparaît, à l'instar de la procédure de saisine directe du Procureur, que cette procédure est inadaptée aux exigences des collectivités en la matière, et que celles-ci auront tout intérêt à solliciter le concours de la force publique auprès des juridictions compétentes en parallèle.

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Concurrence

[Panorama] Panorama d'actualité en droit de la concurrence (octobre 2010 à janvier 2011) Freshfields Bruckhaus Deringer : table des matières

Lecture: 3 min

N2883BSL

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Le 27 Mai 2011

Lexbase Hebdo - édition affaires vous propose, cette semaine, un numéro spécial "Droit de la concurrence". Les membres du Groupe Concurrence parisien de Freshfields Bruckhaus Deringer (sous la direction de Jérôme Philippe et Maria Trabucchi, avocats associés, avec la collaboration de Jérôme Fabre et Jean-Nicolas Maillard, Counsels, Amélie Alduy, Clémentine Baldon, Jérémy Bernard, France-Hélène Boret, Christine Chansenay, Karima El Sammaa, François Gordon, Aude-Charlotte Guyon, Amandine Jacquemot, Delphine Liégeon, avocats à la cour) ont donc sélectionné l'essentiel de l'actualité législative et jurisprudentielle qui a émaillé la matière au cours des mois d'octobre 2010 à janvier 2011, présentée sous la forme de huit panoramas thématiques :
- législation communautaire ;
- jurisprudence communautaire - Cour de justice de l'Union européenne ;
- jurisprudence communautaire - Tribunal de première instance de l'Union européenne ;
- jurisprudence communautaire - Commission européenne ;
- jurisprudence française - Hautes juridictions ;
- jurisprudence française - cour d'appel de Paris ;
- jurisprudence française - Autorité de la concurrence ;
- divers.
  • Panorama d'actualité en droit de la concurrence (octobre 2010 à janvier 2011), Freshfields Bruckhaus Deringer : législation communautaire (N° Lexbase : N2862BSS)

- Règlement (UE) n° 1217/2010 de la Commission du 14 décembre 2010, relatif à l'application de l'article 101, paragraphe 3, TFUE à certaines catégories d'accords de recherche et de développement (N° Lexbase : L3011IQL) ; Règlement (UE) n° 1218/2010 de la Commission du 14 décembre 2010 relatif à l'application de l'article 101, paragraphe 3, TFUE à certaines catégories d'accords de spécialisation (N° Lexbase : L3012IQM) ; lignes directrices concernant les accords de coopération horizontale

  • Panorama d'actualité en droit de la concurrence (octobre 2010 à janvier 2011), Freshfields Bruckhaus Deringer : jurisprudence communautaire - Cour de justice de l'Union européenne (N° Lexbase : N2870BS4)

- CJUE, 14 octobre 2010, aff. C-280/08 P (N° Lexbase : A7319GBP)
- CJUE, 7 décembre 2010, aff. C-439/08 (N° Lexbase : A4956GMI)
- CJUE, 20 janvier 2011, aff. C-90/09 P (N° Lexbase : A1071GQQ) ; TPIUE, 27 octobre 2010, aff. T-24/05 (N° Lexbase : A7798GCS)

  • Panorama d'actualité en droit de la concurrence (octobre 2010 à janvier 2011), Freshfields Bruckhaus Deringer : jurisprudence communautaire - Tribunal de première instance de l'Union européenne (N° Lexbase : N2869BS3)

- TPIUE, 15 décembre 2010, aff. T-141/08 (N° Lexbase : A6840GNN)

  • Panorama d'actualité en droit de la concurrence (octobre 2010 à janvier 2011), Freshfields Bruckhaus Deringer : jurisprudence communautaire - Commission européenne (N° Lexbase : N2865BSW)

Décision de la Commission européenne du 26 janvier 2011, aff. COMP/M.5984
- Décision de la Commission européenne du 9 novembre 2010, aff. COMP/39258 ; communiqué de presse IP/10/1487
Décision de la Commission européenne du 8 décembre 2010, aff. COMP/39398
Décision de la Commission européenne du 12 octobre 2010, aff. N97/2010

  • Panorama d'actualité en droit de la concurrence (octobre 2010 à janvier 2011), Freshfields Bruckhaus Deringer : jurisprudence française - Hautes juridictions (N° Lexbase : N2875BSC)

- Cass. civ. 1, 15 novembre 2010, n° 09-11.161, FS-P+B+I (N° Lexbase : A0230GHY)
- Cass. com., 23 novembre 2010, n° 09-72.031, FS-D (N° Lexbase : A7610GLG)
- Ass. plén., 7 janvier 2011, n° 09-14.316, P+B+R+I (N° Lexbase : A7431GNK)
- CE 3° et 8° s-s-r., 23 décembre 2010, n° 337533 (N° Lexbase : A7063GNW)

  • Panorama d'actualité en droit de la concurrence (octobre 2010 à janvier 2011), Freshfields Bruckhaus Deringer : jurisprudence française - cour d'appel de Paris (N° Lexbase : N2873BS9)

- CA Paris, Pôle 5, 7ème ch., 28 octobre 2010, n° 2010/03405 (N° Lexbase : A1996GDB)
- CA Paris, Pôle 5, 7ème ch., 2 novembre 2010, 3 ordonnances du premier président, n° 10/01858 (N° Lexbase : A4416GDW) ; n° 10/01875 (N° Lexbase : A4417GDX) et n° 10/01884 (N° Lexbase : A4419GDZ)
- CA Paris, Pôle 5, 7ème ch., 27 janvier 2011, n° 2010/08945 (N° Lexbase : A7276GSB)

  • Panorama d'actualité en droit de la concurrence (octobre 2010 à janvier 2011), Freshfields Bruckhaus Deringer : jurisprudence française - Autorité de la concurrence (N° Lexbase : N2871BS7)

- Autorité de la conc., décision n° 10-DCC-198, 30décembre 2010 (N° Lexbase : X9836AHR)
- Autorité de la conc., décision n° 10-DCC-140, 13 octobre 2010 (N° Lexbase : X9129AHL)
- Autorité de la conc., décision n° 10-DCC-98, 20 août 2010 (N° Lexbase : X9055AHT)
- Autorité de la conc., décision n° 10-D-32, 16 novembre 2010 (N° Lexbase : X8884AHI)
- Autorité de la conc., décision n° 10-D-37, 17 décembre 2010 (N° Lexbase : X9208AHI)

  • Panorama d'actualité en droit de la concurrence (octobre 2010 à janvier 2011), Freshfields Bruckhaus Deringer : divers (N° Lexbase : N2876BSC)

- CNIL, délibération n° 2010-369 du 14 octobre 2010, modifiant l'autorisation unique n° 2005-305 du 8 décembre 2005 n° AU-004 relative aux traitements automatisés de données à caractère personnel mis en oeuvre dans le cadre de dispositifs d'alerte professionnelle (N° Lexbase : X3503AIL) ; communiqué de la CNIL du 8 décembre 2010

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Contrats administratifs

[Doctrine] Chronique de droit interne des contrats publics - Mai 2011

Lecture: 10 min

N2980BS8

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par François Brenet, Professeur de droit public à l'Université Paris VIII Vincennes Saint-Denis

Le 20 Octobre 2011

Ce mois-ci, la chronique d'actualité des contrats publics en droit interne met l'accent sur trois décisions. Dans un avis contentieux du 11 mai 2011, le Conseil d'Etat précise le régime contentieux de l'action indemnitaire exercée par un concurrent illégalement évincé (CE 2° et 7° s-s-r., 11 mai 2011, n° 347002, publié au recueil Lebon). Dans un deuxième arrêt, la Haute juridiction administrative fixe les limites et les conditions de l'indemnisation du cocontractant en cas de résiliation du contrat administratif pour motif d'intérêt général (CE 2° et 7° s-s-r., 4 mai 2011, n° 334280, publié au recueil Lebon). Enfin, le Tribunal des conflits pose le principe de la compétence des juridictions judiciaires pour connaître d'un litige relatif au mauvais fonctionnement d'un service de télésurveillance et de téléassistance mis en place par une commune (T. confl., 2 mai 2011, n° 3776).
  • Précisions relatives au régime contentieux de l'action indemnitaire exercée par un concurrent illégalement évincé (CE 2° et 7° s-s-r., 11 mai 2011, n° 347002, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A8775HQ3)

Dans quel délai et en respectant quelles procédures et formalités un concurrent illégalement évincé de la passation d'un contrat administratif peut-il exercer une action indemnitaire ? C'est à cette interrogation riche d'enjeux pratiques, et non dépourvue d'intérêts théoriques, que répond le Conseil d'Etat dans un avis contentieux du 11 mai 2011. Un tribunal administratif l'avait, en effet, saisi d'une telle question, comme le lui permet l'article L. 113-1 du Code de justice administrative (N° Lexbase : L2626ALT), au sujet d'une demande indemnitaire formée par la société X à propos d'un contrat conclu entre une commune et la société Y, portant sur la reprise de sépultures au cimetière nord de la ville.

Le Conseil d'Etat avait le choix entre deux options. Il pouvait décider de faire primer les règles classiques de l'action en responsabilité que peuvent exercer les candidats illégalement évincés au titre de la perte de chance. Il pouvait, également, faire primer les règles fixées par l'arrêt "Tropic" qui a ouvert aux candidats évincés "un recours de pleine juridiction contestant la validité de ce contrat ou de certaines de ses clauses, qui en sont divisibles, assorti, le cas échéant, de demandes indemnitaires" (1). Même si elles sont toutes les deux des actions en responsabilité quasi-délictuelle, ces actions se distinguent sur deux points essentiels. La première peut être exercée sans condition de délai, à condition, toutefois, d'avoir lié le contentieux en faisant naître une décision préalable de l'administration, obligation qui ne s'impose, cependant, pas en matière de travaux publics. L'exercice du recours "Tropic" obéit, quant à lui, à un régime distinct puisque l'action en contestation de validité du contrat doit être exercée par le concurrent évincé dans un délai de deux mois à compter de l'accomplissement des mesures de publicité appropriées, cette solution valant, également, en matière de travaux publics.

L'avis contentieux ici commenté opte pour la première solution, y compris lorsque l'action indemnitaire du concurrent évincé est exercée accessoirement à un recours "Tropic". C'est dire que l'unité de l'action indemnitaire est préservée, et que le recours "Tropic" est, ainsi, éclaté puisque ses conditions d'exercice varieront désormais selon qu'il sera assorti, ou non, de conclusions indemnitaires. En effet, si le recours en contestation de validité doit toujours être exercé dans un délai de deux mois à compter de l'accomplissement des mesures de publicité appropriées, le concurrent évincé pourra présenter des conclusions indemnitaires sans condition de délai. Il lui appartiendra seulement de lier le contentieux en faisant naître une décision préalable de l'administration, sauf en matière de travaux publics.

Cette solution s'explique largement par le souci du Conseil d'Etat de préserver l'unité du recours indemnitaire dont les principes de fonctionnement sont éprouvés et parfaitement maîtrisés par les requérants. Les conclusions indemnitaires présentées par un concurrent évincé accessoirement à un recours "Tropic" ou de façon tout à fait autonome dans le cadre d'une action en responsabilité quasi-délictuelle pour perte de chance obéiront donc au même régime juridique : obligation de lier le contentieux en provoquant une décision préalable de l'administration sauf en matière de travaux publics, possibilité de présenter de telles conclusions sans condition de délai, obligation sous peine d'irrecevabilité de motiver et de chiffrer de telles conclusions. Elle pose, cependant, un certain nombre de questions dont la première d'entre elles est de savoir si elle doit être transposée aux conclusions indemnitaires présentées par un contractant dans le cadre d'un recours en reprise des relations contractuelles, tel qu'il vient d'être consacré par la jurisprudence "Béziers II" (2).

  • Les limites et les conditions de l'indemnisation du cocontractant en cas de résiliation du contrat administratif pour motif d'intérêt général (CE 2° et 7° s-s-r., 4 mai 2011, n° 334280, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A0953HQD)

L'un des traits caractéristiques du régime juridique général du contrat administratif réside dans l'existence du pouvoir de résiliation unilatérale pour motif d'intérêt général. Il ne faut, cependant, pas oublier que sa mise en oeuvre est compensée par la reconnaissance au profit du cocontractant d'importants droits financiers que l'on range classiquement dans la théorie de l'équation financière du contrat administratif. C'est précisément ce balancement entre les prérogatives d'action unilatérale de la personne publique et les droits financiers du cocontractant que le contrat administratif parvient à l'équilibre. Or, il peut arriver que cet équilibre soit rompu, ou, à tout le moins, bouleversé par le jeu des clauses du contrat qui ne sont, faut-il le rappeler, que le résultat d'un rapport de forces entre les parties. Il se peut, par exemple, que le cocontractant de l'administration soit parvenu à obtenir de cette dernière un droit à indemnisation particulièrement important, et parfois si important qu'il risque d'interdire en pratique à la personne publique d'exercer son pouvoir de résiliation unilatérale. Dans le sens inverse, il se peut, également, que la personne publique soit parvenue à imposer à son cocontractant un droit à indemnisation tellement faible que le contrat est alors totalement déséquilibré. Ces risques ne relèvent pas de la pure hypothèse d'école comme le montre l'arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 4 mai 2011.

Par un arrêté du 4 juin 1969, l'Etat avait concédé à une chambre de commerce et d'industrie (CCI) l'établissement et l'exploitation d'un port de plaisance pour une durée de cinquante ans. A la suite du transfert de cette dépendance du domaine public à une commune en application des dispositions de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 (N° Lexbase : L5399HUI), complétant la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983, relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat (N° Lexbase : L4726AQ4), ledit contrat a été résilié par la commune qui a repris en régie l'exploitation des équipements précités. Ladite résiliation était justifiée par un motif d'intérêt général classique (3), et non contestable dans son principe : la volonté de la personne publique d'améliorer la gestion du port.

Il faut rappeler que l'intérêt général constitue le fondement et la limite du pouvoir de résiliation unilatérale. Il se confond avec l'intérêt du service public lorsqu'un service public est en cause (résiliation pour améliorer la gestion du service public, ou pour le supprimer), mais ne s'épuise pas dans le service public. Il peut consister en la transformation de la nature de l'activité objet du contrat (4), en la perte de confiance de la personne publique envers son délégataire à la suite d'une importante modification de son capital social (5). Il peut être lié aux difficultés suscitées par la juxtaposition de deux régimes distincts (6), à un changement de politique (7). En revanche, ne constitue pas un tel motif "l'existence d'un projet de réforme [...] dont l'aboutissement, le contenu et les conséquences ne pouvaient être tenus pour certains avant la promulgation de la loi" (8). De la même façon, il semble que l'intérêt général ne puisse pas être constitué par un motif purement financier, sauf peut-être en ce qui concerne les conventions domaniales (9).

Il reste que c'est "sous réserve des droits à indemnité des intéressés" que la personne publique peut résilier unilatéralement le contrat administratif pour motif d'intérêt général (10). La CCI a donc demandé à la commune une indemnisation conséquente au titre des divers préjudices subis du fait de la résiliation. Sa demande a été rejetée par le tribunal administratif de Nîmes, puis par la cour administrative d'appel de Marseille (11). Saisi d'un pourvoi en cassation contre l'arrêt des juges d'appel, le Conseil d'Etat rejette à nouveau le recours de la CCI, mais après avoir livré de précieuses indications relatives aux limites et conditions d'indemnisation du cocontractant en cas de résiliation du contrat administratif pour motif d'intérêt général. Le Conseil d'Etat confirme la solution déjà retenue par la cour administrative d'appel de Versailles dans un arrêt du 7 mars 2006 (12).

Dans cette dernière affaire, la cour avait précisé que "le pouvoir de résiliation unilatérale d'un contrat par l'administration a pour contrepartie l'obligation d'indemniser intégralement le préjudice causé au cocontractant du fait de l'exercice de ce pouvoir [...] aucune disposition législative ou réglementaire, ni aucun principe général du droit, n'interdit à l'administration de conclure un contrat comportant des stipulations prévoyant, en cas d'exercice de résiliation pour motif d'intérêt général, le versement au cocontractant d'une indemnité pouvant excéder le montant de ce préjudice [...] en présence de telles stipulations contractuelles, il appartient au juge du contrat, dès lors que les personnes de droit public ne peuvent jamais être condamnées à payer une somme qu'elles ne doivent pas, de contrôler s'il n'existe pas une disproportion manifeste entre l'indemnité, ainsi, fixée et l'indemnisation du préjudice résultant pour le cocontractant des dépenses qu'il a réalisées et du gain qu'il a manqué". Le Conseil d'Etat fait sienne cette solution en indiquant que "l'étendue et les modalités de cette indemnisation peuvent être déterminées par les stipulations du contrat, sous réserve qu'il n'en résulte pas, au détriment de la personne publique, une disproportion manifeste entre l'indemnité ainsi fixée et le montant du préjudice résultant, pour le concessionnaire, des dépenses qu'il a exposées et du gain dont il a été privé".

Possibilité est donc laissée à la personne publique de verser une indemnité supérieure au montant du préjudice subi, mais à la stricte condition que la différence entre les deux ne soit pas manifestement excessive. Cette limite s'explique par le principe selon lequel les personnes publiques ne peuvent consentir de libéralités. L'arrêt du 4 mai 2011 innove cependant par rapport à la jurisprudence de la cour administrative d'appel de Versailles du 7 mars 2006, et d'une façon notable, en précisant que cette limite, qui est en réalité un plafond, ne vaut pas à l'égard des personnes privées. Cela signifie que les clauses du contrat peuvent parfaitement prévoir une indemnisation inférieure au montant du préjudice subi par le cocontractant privé de l'administration. Avec cette solution, le Conseil d'Etat renoue avec la conception classique du contrat administratif dans laquelle l'administration est en situation de supériorité sur son cocontractant. Il reste que cette solution n'aura sans doute qu'un impact limité en pratique, car rares seront les cocontractants privés qui accepteront de se voir imposer une clause réduisant leur droit à indemnisation à une peau de chagrin. Par définition, cette solution ne vaut qu'à l'égard des contrats conclus entre une personne publique et une personne privée. Les contrats conclus entre deux personnes publiques ne peuvent pas valablement comporter de telles clauses. Ces derniers se caractérisent donc par un égalitarisme renforcé par rapport aux contrats conclus entre une personne publique et une personne privée. Dans la présente espèce, dès lors que la CCI est une personne morale de droit public, le contrat conclu avec l'Etat, puis transféré à la commune, ne pouvait valablement comporter une clause prévoyant une indemnisation manifestement disproportionnée par rapport à son préjudice.

  • Compétence judiciaire pour connaître des dommages causés par le service public de télésurveillance et de téléassistance exploité par une commune (T. confl., 2 mai 2011, n° 3776 N° Lexbase : A2856HQT)

Il est aujourd'hui fréquent que les collectivités publiques mettent en place sur leur territoire des dispositifs de surveillance des voies publiques ou des lieux publics. Il est plus rare qu'elles destinent de tels dispositifs techniques à la surveillance de locaux privés, même si cela peut, également, se comprendre dans des zones dites sensibles où les commerces sont l'objet de délits récurrents. Tel était précisément le cas dans l'affaire jugée par le Tribunal des conflits le 2 mai 2011. En l'espèce, une commune avait confié à la société X en 2006, par le biais d'un marché public, le soin d'assurer une partie du système de télésurveillance d'habitations et de commerce que la municipalité avait mis en place. La société devait gérer cette activité une partie des nuits et le dimanche. La société Y avait souscrit un abonnement auprès de la commune, afin de bénéficier des prestations offertes par ce service. Elle a, cependant, été victime de plusieurs délits et a constaté que la société X avait commis plusieurs négligences dans l'accomplissement de sa mission de surveillance lors du déclenchement de l'alarme dans ses locaux au cours de l'année 2007. Pour cette raison, elle a cherché à mettre en cause la responsabilité de la société prestataire devant le tribunal de commerce de Perpignan, lequel a décliné la compétence de la juridiction judiciaire pour connaître de ce litige. Saisi à son tour, le tribunal administratif de Montpellier a décliné sa compétence et saisi le Tribunal des conflits en application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 (N° Lexbase : L5010IPA).

Le juge des conflits retient la solution de la compétence judiciaire en faisant application de la jurisprudence classique relative aux relations unissant les services publics à caractère industriel et commercial à leurs usagers (13). L'activité prise en charge par la commune présentait bien les traits d'une mission de service public (rappelons que les activités prises en charge par les personnes publiques sont présumées être des activités de service public et qu'il n'en va autrement que dans des hypothèses exceptionnelles : gestion du domaine privé, organisation de fêtes locales non traditionnelles, etc.) et, plus encore, d'une mission de service public à caractère industriel et commercial au regard de son objet (service marchand), de son mode de financement (système d'abonnement) et de ses modalités de fonctionnement. Or, la jurisprudence considère que les relations entre les SPIC et leurs usagers relèvent invariablement du droit privé et de la compétence judiciaire, y compris lorsqu'une opération de travaux publics est en cause (14). L'intérêt de la décision du Tribunal des conflits réside dans la réaffirmation de cette solution alors que la personne privée chargée de l'exécution du SPIC était, par ailleurs, titulaire d'un marché public, c'est-à-dire d'un contrat administratif par détermination de la loi.

François Brenet, Professeur de droit public à l'Université Paris VIII Vincennes Saint-Denis et Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition publique


(1) CE, Ass., 16 juillet 2007, n° 291545, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A4715DXW), Rec. CE, p. 360.
(2) CE, Sect., 21 mars 2011, n° 304806, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A5712HIE).
(3) CE, Ass., 2 mai 1958, Distillerie de Magnac-Laval, Rec. CE, p. 24.
(4) CE 2° et 7° s-s-r., 19 janvier 2011, n° 323924, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A1539GQ3) : résiliation d'une convention domaniale fondée sur la volonté de la commune d'ériger l'activité de gestion d'un hôtel-restaurant en mission de service public.
(5) CE, 31 juillet 1996, n° 126594, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A0116APY).
(6) CE, 22 avril 1988, n° 86241, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A7655AP9), Rec. CE, p.157.
(7) CE 2° et 7° s-s-r., 21 décembre 2007, n° 293260, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A1521D3Q), Rec. CE, p. 534.
(8) CE, Ass., 2 février 1987, n° 81131, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A3244APT).
(9) CE, 8 janvier 1960, Lafon, Rec. CE, p. 15 ; CE, 18 mars 1963, Cellier, Rec. CE, p. 189 ; CE 3° et 5° s-s-r., 23 juin 1986, n° 59878, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A4769AML), Rec. CE, p. 167 ; CE 2° et 10° s-s-r., 31 mai 1989, n° 66683, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A3142AQG).
(10) CE 2° et 6° s-s-r., 2 février 1983, n° 34027, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A1402AMU).
(11) CAA Marseille, 7ème ch., 1er octobre 2009, n° 07MA03249 (N° Lexbase : A2899ENP).
(12) CAA Versailles, 7 mars 2006, n° 04VE01381 (N° Lexbase : A8309DN3).
(13) CE, Sect., 17 décembre 1961, Etablissements Campanon-Rey, Rec. CE, p. 567 ; T. confl., 17 décembre 1962, Dame Bertrand, Rec. CE, p. 831, concl. J. Chardeau.
(14) CE, 25 avril 1958, Dame veuve Barbaza, Rec. CE, p. 228.

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Droit pénal fiscal

[Chronique] Chronique de droit pénal fiscal - Mai 2011

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N2888BSR

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par Christian Lopez, Maître de conférences à l'Université de Cergy-Pontoise

Le 15 Juin 2011

Lexbase Hebdo - édition fiscale vous propose de retrouver la chronique d'actualités en droit pénal fiscal réalisée par Christian Lopez, Maître de conférences à l'Université de Cergy-Pontoise. Cette chronique traite, tout d'abord, d'un arrêt publié de la Chambre criminelle de la Cour de cassation, qui revient sur les éléments constitutifs d'une escroquerie à la TVA. En effet, ce délit peut être constitué en cas de manoeuvres frauduleuses opérées par le biais de déclarations fictives, dans le but d'obtenir un remboursement indu de taxe déductible (Cass. crim., 6 avril 2011, n° 10-85.209, F-P+B). Ensuite, elle revient sur un arrêt rendu par la cour administrative d'appel de Paris (CAA Paris, 7ème ch., 11 mars 2011, n° 09PA00511, mentionné aux tables du recueil Lebon), relatif à une affaire dans laquelle un contribuable, condamné par ailleurs pour trafic de stupéfiants, est redressé par l'administration fiscale sur les sommes issues de ce trafic, en vertu du principe de l'amoralisme du droit fiscal. Notre auteur insiste sur l'importance du débat contradictoire entre le vérificateur et le contribuable qui, s'il fait défaut, remet en cause toute la procédure. Enfin, cette chronique reprend un arrêt rendu par la Cour de cassation, par lequel elle refuse de transmettre au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité relative à l'article 1745 du CGI, celui-ci prévoyant la solidarité de tous ceux qui ont fait l'objet d'une condamnation définitive pour le paiement de l'impôt (Cass. crim., 6 avril 2011, n° 10-87.634, F-D). En effet, selon la juridiction suprême, le juge peut moduler cette solidarité selon les circonstances de l'espèce. Ainsi, cette disposition n'a pas la qualification de punition et n'est pas obligatoire, elle n'est donc pas soumise à la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen.
  • TVA : constituent une escroquerie les manoeuvres frauduleuses consistant en des déclarations fictives effectuées dans le but d'obtenir un remboursement indu de taxe déductible (Cass. crim., 6 avril 2011, n° 10-85.209, F-P+B N° Lexbase : A5728HNH)

La Chambre criminelle de la Cour de cassation casse et annule l'arrêt de la troisième chambre de la cour d'appel de Rennes en date du 10 juin 2006, en ses seules dispositions ayant relaxé les prévenus du chef d'escroquerie à la TVA.

Selon la cour d'appel, les remboursements de crédits de TVA avaient été effectués sur la seule présentation des déclarations mensuelles et des demandes de remboursement. Or, le caractère sciemment erroné constituait un simple mensonge dépourvu de toute manoeuvre frauduleuse. En effet, les écritures comptables d'opérations diverses et l'édition de fausses factures, qui étaient postérieures au remboursement des sommes litigieuses, n'avaient pas pu constituer le caractère de manoeuvres, mais n'avaient eu d'autre utilité que de dissimuler le caractère mensonger des déclarations de TVA. Ainsi, selon les juges d'appel, le délit d'escroquerie ne pouvait être constitué en raison de l'absence de manoeuvres frauduleuses antérieures ou concomitantes aux remboursements indus de TVA.

Le problème soulevé dans le cadre de cette affaire repose essentiellement sur l'appréciation de l'élément matériel de l'infraction, et notamment sur la détermination des manoeuvres frauduleuses, lorsque celles-ci semblent intervenir postérieurement au remboursement d'une demande de crédit de TVA. En l'espèce, des manipulations comptables avaient permis de faire établir, postérieurement au remboursement de la TVA, de fausses factures pour justifier en comptabilité du montant de la TVA récupérable.

La seule présentation des déclarations mensuelles de TVA ayant entraîné des demandes de remboursement trimestrielles dont le caractère sciemment erroné n'est pas contesté, est-elle constitutive de manoeuvres frauduleuses visées par l'article 313-1 du Code pénal (N° Lexbase : L2012AMH) ?

Pour pouvoir répondre à cette question, il convient d'analyser le mécanisme de la TVA au regard de l'infraction d'escroquerie avant de cerner l'élément matériel.

Impôt sur la consommation, la TVA n'est pas payée directement au Trésor par le consommateur final (redevable réel), mais par les entreprises de toute nature (redevables légaux). Tout se passe comme si le bien n'était taxé qu'une seule fois, au stade de la consommation finale. Le système des paiements fractionnés permet au Trésor d'encaisser en plusieurs fois la taxe relative au produit ou à un service consommé. Ces paiements interviennent à chaque stade du circuit de production ou de distribution, où, par le jeu des déductions, chaque intermédiaire se retrouve, soit à acquitter la TVA sur le supplément de valeur qu'il ajoute au produit, soit à bénéficier d'un crédit d'impôt. Bénéficiant de la mise en place d'un remboursement du crédit de taxe lorsque la TVA déductible est supérieure à la TVA collectée, certains assujettis commerçants obtenant indûment des remboursements de crédit de TVA ont été appelés les "détaxeurs". Les entreprises de façade qui délivraient les factures de complaisance sur lesquelles était mentionnée la TVA, se sont faites appeler les "taxeurs" ou les "taxis" ; quant aux sociétés intermédiaires s'intercalant entre les "détaxeurs" et les "taxis", elles ont été appelées les "relais" ou "écran" (lire Jean Cosson, Les industriels de la fraude, Seuil, 1974 ; La fraude par opérations fictives, Gaz. Pal., 1969, 1, doct., p. 81). Cette fraude, issue de la mise en place de la technique du paiement fractionné, ne pouvait pas être réprimée par l'ancien article 1835 (N° Lexbase : L4651HM9), dans sa rédaction antérieure à la loi n° 59-1472 du 28 décembre 1959 (N° Lexbase : L3443IP9) (aujourd'hui CGI, art. 1741 N° Lexbase : L1670IPK). En effet, l'assujetti au paiement de la TVA ne s'était pas soustrait à l'établissement ou au paiement de l'impôt mais il avait fait payer l'impôt par l'Etat. Par conséquent, la seule possibilité de réprimer de tels agissements résidait dans l'article 405 ancien du Code pénal (N° Lexbase : L4788DGG), lequel visait "quiconque, soit en faisant usage de faux noms, ou de fausses qualités, soit en employant des manoeuvres frauduleuses pour persuader de l'existence de fausses entreprises, d'un pouvoir ou d'un crédit imaginaire, ou pour faire naître l'espérance ou la crainte d'un succès d'un accident ou de tout autre événement chimérique, se sera fait remettre ou délivrer, ou aura tenté de se faire remettre ou délivrer, des fonds, des meubles ou des obligations, dispositions, billets, promesses, quittances ou décharges, et aura, par un de ces moyens, escroqué ou tenté d'escroquer la totalité ou partie de la fortune d'autrui, sera puni d'un emprisonnement d'un an au moins et de cinq ans au plus, et d'une amende de 3 600 francs [environ 549 euros] au moins et de 2 500 000 francs [381 123 euros] au plus".

La nouvelle rédaction ne fait que modifier de manière formelle la définition de l'escroquerie, sans en modifier les éléments constitutifs, permettant de laisser à la jurisprudence établie sous l'ancien texte toute sa force. Notons que l'article 313-3 du Code pénal réprime également la tentative d'escroquerie lorsque sont remplies les conditions énoncées par l'article 121-5 du Code pénal (N° Lexbase : L2132AMW), c'est-à-dire qu'il y ait commencement d'exécution et qu'elle ait échoué par suite de circonstances indépendantes de la volonté de leur auteur. Concernant les manoeuvres frauduleuses énumérées ci-dessous, elles constituent de simples actes préparatoires, insuffisants pour caractériser un commencement d'exécution du délit, elles doivent, dès lors, être suivies d'un acte tendant à obtenir la remise des fonds.

Ainsi, la tentative peut résulter de la souscription d'une demande de remboursement de crédit de TVA, mais ne peut être constituée en cas d'imputation, car elle se confondrait avec l'escroquerie même. Bien qu'entrée dans la phase active du commencement d'exécution, la tentative ne serait pas légalement établie si elle se trouvait suspendue par une renonciation volontaire de l'auteur à consommer le délit. Mais elle est caractérisée si ce sont des circonstances indépendantes de la volonté de son auteur qui ne lui permettent pas d'aboutir, comme une demande de remboursement de crédit de TVA rejetée à la suite d'un contrôle ayant révélé la fraude.

En l'espèce, le dépôt de la demande de remboursement de crédit de TVA n'est nullement contesté, et constitue donc, en lui-même, l'infraction d'escroquerie, et cela indépendamment des manoeuvres supplémentaires intervenues postérieurement. En effet, les manipulations comptables par l'intermédiaire du compte des opérations diverses (OD), ainsi que l'établissement des factures de complaisance lors du contrôle fiscal ultérieur à la demande de remboursement ne sont que des éléments supplémentaires susceptibles, en eux-mêmes, de constituer des infractions spécifiques.

L'auteur principal de l'escroquerie est l'assujetti destinataire ou non de la facture. Il devient auteur principal de l'infraction du fait même de l'imputation de la TVA litigieuse, avec ou sans facture. L'émission de factures de complaisance n'apporte pas d'éléments indispensables à la constitution de l'escroquerie à la TVA, constituée du fait des dépôts des déclarations de TVA. Les manipulations comptables et les factures de complaisance ne font que contribuer à donner une apparence de réalité à des manoeuvres frauduleuses constituées.

Une circulaire du ministère de la Justice, en date du 16 septembre 1998, relative à la fraude fiscale et à l'escroquerie à la TVA (circ. crim. 98/8/G du 16 septembre 1998), distingue les possibilités de fraude résultant du mécanisme de la TVA. La fraude peut se faire par dissimulation du chiffre d'affaires réalisé, que les opérations aient été effectuées "hors taxe" ou que la taxe ait été réclamée au client et conservée par le commerçant. Cela entraîne une diminution de la TVA brute et, par voie de conséquence, de la TVA nette à payer au Trésor. Cette fraude se rencontre habituellement dans les opérations sans facture ou, en tout cas, non comptabilisées et réglées en espèces. Elle peut être mise en place également par augmentation de la TVA nette à payer au Trésor, et peut même faire ressortir un crédit de taxe susceptible de remboursement. Cette fraude s'opère fréquemment par fausse facture.

Dans le cadre du délit d'escroquerie de l'article 313-1 du Code pénal, il convient de prouver une machination, une ruse ou une combinaison d'actes, c'est-à-dire la réalisation de manoeuvres frauduleuses extérieures aux déclarations inexactes qui ne peuvent, en elles-mêmes, constituer cette preuve. Pour que l'allégation mensongère constitue une manoeuvre frauduleuse, elle doit être accompagnée d'un fait extérieur, d'un acte matériel susceptible de la rendre plausible. Ainsi en est-il d'un mensonge soutenu par la production de documents vrais ou faux, ou d'une mise en scène donnant l'apparence de sincérité aux allégations mensongères.

La récupération de la TVA résultant d'une facturation fictive qui a permis d'éviter le paiement de la TVA due constitue une manoeuvre frauduleuse au préjudice du Trésor, alors même que le montage utilisé et la facturation effectuée n'étaient pas, initialement, destinés à tromper le fisc. La facturation entre les deux sociétés avait été considérée comme fictive car elle ne correspondait pas aux flux monétaires intervenus entre elles. La Cour de cassation a considéré que cette manoeuvre a eu pour effet d'éteindre, par compensation, une dette de TVA, constituant ainsi le délit d'escroquerie (Cass. crim., 16 janvier 1996, n° 95-80.772 N° Lexbase : A8785AGH).

Il a déjà été jugé que les demandes de paiement de crédits indus de TVA, justifiées par des déclarations mensuelles de chiffre d'affaires indiquant un montant fictif de taxe déductible sous le couvert d'une comptabilité inexacte, dissimulant le montant de la taxe effectivement décaissée, constituent une mise en scène, et non pas de simples mensonges écrits. Elles caractérisent les manoeuvres frauduleuses visées par l'article 313-1 du Code pénal (Cass. crim., 14 novembre 2007, n° 07-83.208, F-P+F N° Lexbase : A0500D3W). Dans cet arrêt de principe, la Cour de cassation énonce que toute demande de remboursement d'un crédit fictif de TVA constitue une mise en scène, caractérisant les manoeuvres frauduleuses du délit d'escroquerie commis au préjudice de l'Etat français. En effet, une telle demande ne peut s'appuyer que sur des déclarations mensongères de chiffre d'affaires -mensuelles, trimestrielles ou annuelles-, elles-mêmes justifiées par des écritures inexactes ou fictives. En l'espèce, une société s'était constituée un crédit fictif de taxe en comptabilisant au taux normal de 19,60 % des opérations de travail à façon réalisées à son profit et soumises au taux réduit de 5,5 %, le montant de cette taxe déductible indue étant dissimulé par l'absence de comptabilisation des factures des prestataires et la production ultérieure de factures fictives mentionnant le taux normal.

L'escroc ayant, dans un premier temps, persuadé l'administration de l'existence à son profit d'un crédit de TVA imaginaire, va ensuite obtenir la remise des fonds, soit par remboursement direct sur demande en restitution, soit par imputation sur le montant de la TVA due. Selon la jurisprudence de la Cour de cassation, le délit se trouve établi en cas de majoration du crédit de TVA déductible au moyen de facture fictive, la déclaration de chiffre d'affaires ayant la valeur d'un titre de créance contre l'Etat pour le montant des sommes prétendument déductibles (Cass. crim., 25 janvier 1967, n° 66-92.968, publié au Bulletin N° Lexbase : A8925CIE, Bull. crim., n° 39, Gaz. Pal., 1967, 1, jur., p. 229, note Jean Cosson, DH 1967, p. 400 ; Cass. crim., 17 octobre 1967, n° 66-92.187, publié au Bulletin N° Lexbase : A8946CHS Bull. crim., n° 252, Gaz. Pal., 1968, 1, jur., p. 148 ; Cass. crim., 6 février 1969, n° 66-91.594, publié au Bulletin N° Lexbase : A2774CGT Bull. crim., n° 65, JCP éd. G, 1969, II, n° 16116, note Guérin H. ; Cass. crim., 10 décembre 1969, n° 67-91.046, publié au Bulletin N° Lexbase : A9691CGZ, Bull. crim., n° 335 ; Cass. crim., 13 octobre 1971, n° 70-92.124 N° Lexbase : A8799AYK, Bull. crim., n° 261).

De même, en soulignant qu'il avait été vérifié que, dans toutes les affaires où ont été utilisées les fausses factures établies par le "taxi" et se rapportant à des fournitures fictives, les sommes mentionnées sur les factures comme ayant été payées au titre de la TVA avaient été reprises sous forme de crédit de taxes par les bénéficiaires de ces factures, et déduites par eux des montants dont ils étaient redevables, afin d'en obtenir frauduleusement décharge par voie d'imputation scripturale, alors qu'en réalité ces sommes n'avaient pas été reversées au Trésor, les juges ont caractérisé le délit d'escroquerie commis par les prévenus (Cass. crim., 19 décembre 1973, n° 73-90.224 N° Lexbase : A7820AXW, Bull. crim., n° 480 ; voir également, Cass. crim., 20 janvier 1976, n° 75-91.685, RJF, n° IV, p. 221 ; Cass. crim., 19 juin 1978, n° 73-92.860, publié au Bulletin N° Lexbase : A3315CKY, Bull. crim., n° 201 ; Cass. crim., 19 octobre 1987, n° 85-94.605, publié au Bulletin N° Lexbase : A1809CIT, Bull. crim., n° 353).

A ce stade, il est intéressant de noter les évolutions de l'escroquerie en matière de TVA et notamment de la fraude dite "carrousel". La Cour de cassation a reconnu qu'en l'absence de remise matérielle des fonds, comme en l'absence de délivrance effective d'une quittance ou d'une décharge, la déclaration de chiffre d'affaires vaut titre de créance à l'encontre du Trésor public pour le montant des taxes déclarées comme déductibles, étant précisé que la circonstance que le titre qui constate l'extinction par déduction de la créance du Trésor public, créé par l'assujetti, ne fait disparaître aucun des éléments matériels du délit d'escroquerie. Il en est de même en l'absence de remise de fonds, dès lors que le paiement effectué par voie scripturale vaut remise d'espèces. Le délit d'escroquerie se trouve alors consommé par l'acceptation par l'administration de la déclaration de chiffre d'affaires.

La circulaire précitée du 16 septembre 1998 (circ. crim. 98/8/G du 16 septembre 1998) rappelle, d'ailleurs, qu'il est parfaitement établi aujourd'hui que la déclaration du chiffre d'affaires vaut titre de créance à l'encontre du Trésor public pour le montant des taxes déclarées comme déductibles et que la circonstance que le titre constatant l'extinction par déduction de la créance au Trésor public ait été créé par l'assujetti, ne fait disparaître aucun des éléments matériels du délit d'escroquerie. La circulaire rajoute même que le délit d'escroquerie se trouve consommé par l'acceptation par l'administration de la déclaration de chiffre d'affaires, sans qu'il soit nécessaire qu'elle soit accompagnée d'une demande de remboursement et encore moins que ce remboursement soit effectivement intervenu.

C'est la raison pour laquelle la Chambre criminelle casse et annule l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, en ses dispositions ayant relaxé le prévenu du chef d'escroquerie, au motif que les remboursements ont été effectués sur la seule présentation des déclarations mensuelles du chiffre d'affaires taxable et des demandes de remboursement trimestrielles dont les mentions inexactes ne constituent que des mensonges, exclusifs de manoeuvres frauduleuses. Les juges d'appel précisaient que la passation d'écritures fictives en "opérations diverses" et l'émission de fausses factures étaient postérieures aux paiements des sommes indues. Ces actes n'avaient donc pas pu être à l'origine du remboursement de crédit de TVA, mais n'avaient pour "utilité" que la dissimulation du caractère mensonger des déclarations.

Précisons que le ministère public a, seul, qualité pour exercer l'action publique en matière d'escroquerie ou de tentative d'escroquerie à la TVA. Ce sont les dispositions du Code de procédure pénale qui trouvent à s'appliquer, et non celles du Livre des procédures fiscales. La mise en oeuvre de l'action publique, s'agissant d'un délit de droit commun, n'est pas subordonnée, comme en matière de fraude fiscale, au dépôt préalable d'une plainte de l'administration fiscale, même si, dans la pratique, la Direction générale des Finances publiques est amenée à déposer une plainte, afin de faire connaître au Parquet les informations qu'elle a pu recueillir. Il n'en demeure pas moins que l'avis de la Commission des infractions fiscales n'est pas nécessaire en la matière (Cass. crim., 19 octobre 1987, n° 85-94.605, publié au Bulletin N° Lexbase : A1809CIT, Bull. crim., n° 353, relatif à l'article 405 ancien du Code pénal). Constatons toutefois que depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 59-1472 du 28 décembre 1959, qui a modifié la rédaction de l'article 1741 du CGI, l'escroquerie à la TVA tombe à la fois sous le coup de l'article 313-1 du Code pénal et de l'article 1741 du CGI.

  • Taxation d'office : un contribuable coupable de trafic de stupéfiants redressé sur les sommes qu'il a perçues à l'occasion de la commission de ce délit conteste, en vain, le déroulement de la procédure de vérification (CAA Paris, 7ème ch., 11 mars 2011, n° 09PA00511, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A5701HM4)

Cette décision de la cour administrative d'appel de Paris est relative à un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle réalisé à l'encontre d'un trafiquant de stupéfiant, et à l'issue duquel l'administration l'a taxé d'office, en application des dispositions de l'article L. 69 du LPF (N° Lexbase : L8559AEQ), à raison du solde créditeur de sa balance de trésorerie constitué par une somme de 352 000 francs (53 662 euros) trouvée à son domicile, et de la valeur de 70 kilogrammes de cannabis découverts dans son véhicule personnel, estimés par l'administration à la somme de 1 400 000 francs (213 429 euros). Il a été considéré que l'administration pouvait rattacher ces produits au titre des années vérifiées, dès lors que ces sommes étaient emballées dans des journaux marocains datant des mois de janvier et mars de l'année en cause. Le contribuable n'était pas dans la possibilité d'établir que la somme de 352 000 francs (53 662 euros), et celle avec laquelle il a acheté les produits stupéfiants se rattachent à des revenus ou à des éléments dans son patrimoine constitués avant le 1er janvier de l'année vérifiée. Les dispositions de l'article L. 16 du LPF (N° Lexbase : L5579G4E), concernant une demande d'éclaircissement pouvaient donc être mises en oeuvre par l'administration fiscale pour demander au contribuable de justifier de l'origine des sommes dont il a disposé au titre de l'année concernée. La juridiction d'appel rappelle les termes de l'article L 16 du LPF : "en vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements [...]. Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés". Il est également précisé qu'aux termes de l'article L. 69 du même livre : "sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16" et qu'aux termes de l'article L. 193 du même livre (N° Lexbase : L8356AE9) : "dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition". En l'espèce, le contribuable n'apporte pas la preuve que les revenus en cause ne concernent pas l'année vérifiée.

Par ailleurs, concernant le déroulement du contrôle fiscal, le requérant reproche à l'administration d'avoir mis en place un unique entretien avec le vérificateur, et que la demande de justifications lui a été remise à l'issue de cet entretien. La cour administrative d'appel rappelle, dans un premier temps, l'article L. 10 du LPF (N° Lexbase : L4149ICN) : "avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 (N° Lexbase : L6793HWI) et L. 13 (N° Lexbase : L6794HWK), l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration. Selon cette charte, il est exigé que le vérificateur ait recherché un dialogue avant même d'avoir recours à la procédure écrite et contraignante de l'article L. 16 du LPF ; que la méconnaissance de cette exigence a le caractère d'une irrégularité substantielle portant atteinte aux droits et garanties reconnus par la charte au contribuable vérifié". Il s'agit là du point le plus contestable, pour lequel le juge d'appel considère que le contribuable n'établit toutefois pas que cette seule rencontre aurait été insuffisante pour lui permettre de dialoguer avec l'administration sur le seul redressement envisagé, au vu des renseignements obtenus auprès de l'autorité judiciaire. Selon la cour d'appel administrative de Paris, le contribuable ne peut soutenir qu'il a été privé de la garantie d'un dialogue contradictoire prévu par la charte du contribuable vérifié et que, par suite, la demande de justifications lui aurait été remise sans avoir été précédée d'un tel dialogue.

Enfin, il est reproché au juge administratif de ne pas avoir tenu compte de l'obligation faite à l'administration de tenir à la disposition du contribuable qui le demande, avant la mise en recouvrement des impositions, les documents ou copies de documents qui contiennent les renseignements qu'elle a utilisés pour procéder aux rehaussements. En l'occurrence, il s'agissait du procès-verbal établi par les services de police à la suite de l'interrogatoire du trafiquant de stupéfiants. Or, les services fiscaux ont seulement pris connaissance, dans l'exercice du droit de communication, de documents détenus par d'autres administrations ; l'obligation à laquelle est tenue l'administration fiscale consiste donc à renvoyer l'intéressé vers les services concernés. Il résulte de l'instruction que l'administration a indiqué n'être pas détentrice du document en cause et qu'elle a cependant précisé au requérant les références du procès-verbal, afin de lui permettre d'en demander la communication au service qui le détient. Par conséquent, la procédure d'imposition n'est pas entachée d'irrégularité.

De notre avis, le point le plus sérieux de la contestation relève de l'absence de débat oral et contradictoire dans le cadre de l'examen de la situation fiscale personnelle. En effet, la mise en oeuvre, par l'administration fiscale, d'un ESFP entraîne le bénéfice, par le contribuable, d'un certain nombre de garanties qui, pour certaines d'entre elles, sont analogues à celles prévues en matière de vérification de comptabilité.

Selon une jurisprudence constante, le caractère contradictoire de l'ESFP implique que le vérificateur engage un débat avec le contribuable. Par ailleurs, comme le souligne le juge d'appel, la charte du contribuable vérifié, dont les dispositions sont opposables à l'administration fiscale, précise, dans ses dernières dispositions en vigueur, que "dans le cadre de l'ESFP, le dialogue joue un rôle très important tout au long de la procédure". Quant à la forme et l'étendue du débat, il résulte de l'examen de la jurisprudence que le vérificateur doit seulement engager un dialogue sur les points qu'il envisage de retenir, et que le débat n'a pas, nécessairement, à prendre une forme orale.

Il est vrai que la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, opposable à l'administration sur le fondement de l'article L. 10, alinéa 4, du LPF, exige, en outre, que le vérificateur engage un dialogue contradictoire avec le contribuable qui fait l'objet d'un ESFP, avant de lui adresser une demande de justifications en application de l'article L. 16 du LPF. La méconnaissance de cette exigence a le caractère d'une irrégularité substantielle, portant atteinte aux droits et garanties reconnus par la charte. Ceci a été rappelé à de multiples reprises par le Conseil d'Etat (CE 3° et 8° s-s-r., 10 janvier 2001, n° 211967-212114, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6474APH ; CE 10° et 9° s-s-r., 26 février 2003, n° 222163, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A3400A73). Soulignons que dans un arrêt de principe du 10 novembre 2000 (CE 9° et 10° s-s-r., 10 novembre 2000, n° 204805, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A9063AH7), le Conseil d'Etat a jugé qu'au sein des dispositions de la charte qui ajoutent à la loi, il convient de distinguer les dispositions qui confèrent aux contribuables de véritables droits et garanties et celles qui instituent de simples formalités de procédure. Seule la méconnaissance des premières d'entre elles affecte la procédure d'imposition d'une irrégularité substantielle. Dans cette affaire, similaire sur ce point à celle qui nous occupe, le vérificateur n'avait pas respecté la clause de la charte lui imposant de rechercher un dialogue contradictoire avec le contribuable faisant l'objet d'un ESFP, avant d'avoir recours à la procédure contraignante de l'article L. 16 du LPF. Le Conseil d'Etat sanctionne l'administration pour irrégularité de la procédure, en considérant que l'exigence ainsi formulée par la charte apporte aux contribuables une garantie supplémentaire par rapport à l'exigence de débat contradictoire prévue par la loi.

A ce stade, il convient de souligner que la version actuelle de la charte n'exige plus clairement que le vérificateur engage un dialogue contradictoire avec le contribuable avant d'envoyer une demande de justifications.

Indépendamment du problème relatif à la mise en oeuvre du débat contradictoire avant l'envoi d'une demande d'éclaircissements, soulignons l'importance du dialogue tout au long de la procédure. Ainsi, lorsque l'administration taxe d'office un contribuable, à l'issue d'un ESFP, notamment à raison du solde créditeur de deux balances des espèces, provenant pour partie d'une évaluation de marchandise, même illicite, sans débattre de ce point avec le contribuable avant l'envoi de la demande de justifications, l'examen ne semble pas revêtir un caractère contradictoire et les sommes afférentes à cette évaluation doivent être retranchées des bases imposables du contribuable.

Le débat oral et contradictoire fait partie des garanties du contribuable vérifié dont le respect doit être assuré par l'administration fiscale elle-même sous le strict contrôle du juge.

  • QPC : la question prioritaire de constitutionnalité relative à l'article 1745 du CGI n'étant ni nouvelle, ni sérieuse, elle n'est pas renvoyée au Conseil constitutionnel (Cass. crim., 6 avril 2011, n° 10-87.634, F-D N° Lexbase : A6905HN3)

Aux termes de l'article 1745 du CGI (N° Lexbase : L1736HNM), tous ceux qui ont fait l'objet d'une condamnation définitive, prononcée en application des articles 1741 (N° Lexbase : L1670IPK), 1742 (N° Lexbase : L1734HNK) ou 1743 (N° Lexbase : L3101IQW) du CGI, peuvent être solidairement tenus, avec le redevable légal de l'impôt fraudé, au paiement de cet impôt, ainsi qu'à celui des pénalités fiscales y afférentes.

La Cour de cassation vient de préciser que la demande d'un contribuable de saisir le Conseil constitutionnel sur la question de la conformité de l'article 1745 du CGI au principe de personnalisation des peines, qui découle des dispositions de l'article 8 de la Déclaration du 26 août 1789 (N° Lexbase : L6813BHS), n'est pas nouvelle et ne présente pas un caractère sérieux. Elle précise que cette mesure n'a pas un caractère obligatoire et qu'ainsi, en tenant compte des circonstances propres à chaque espèce, le juge n'est pas tenu de prononcer la solidarité. Il n'y a donc pas lieu de renvoyer cette question devant le Conseil constitutionnel.

La solidarité n'est pas une "punition", au sens des articles 8 et 9 de la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 (lire les observations de Thierry Lambert dans la Chronique de fiscalité des entreprises - Mars 2011 N° Lexbase : N6458BRM, note sous Cons. const., décision n° 2010-90 QPC du 21 janvier 2011 N° Lexbase : A1523GQH). Par conséquent, le grief tiré de la non-conformité de la solidarité est inopérant. Les personnes tenues par la solidarité édictée par l'article 1745 du CGI sont tous les auteurs, coauteurs ou complices d'une même infraction, qui ne sont pas le redevable légal de l'impôt fraudé. En effet, la solidarité ne peut affecter la situation du redevable légal qui, par application des règles propres au droit fiscal, demeure tenu au paiement total des impôts fraudés et des pénalités qui sont la conséquence de cette fraude. Par ailleurs, lorsque le redevable légal de l'impôt fraudé est une personne morale, la Cour de cassation a jugé que la solidarité n'est encourue par le dirigeant poursuivi pénalement que dans la mesure où ce dernier avait la direction de la société au sein de laquelle la fraude fiscale a été perpétrée (Cass. crim., 6 avril 1987, n° 85-96.581 N° Lexbase : A0042AAS, Bull. crim. n° 157, p. 425).

Soulignons, également, qu'il appartient au juge répressif d'apprécier souverainement s'il y a lieu d'ordonner la solidarité, pour le paiement de l'impôt fraudé et des pénalités fiscales y afférentes, entre le redevable légal de l'impôt et les personnes qui ont été condamnées, comme auteur ou comme complice, par application des articles 1741, 1742 et 1743 du CGI (Cass. crim., 22 décembre 1986 n° 85-91140 N° Lexbase : A6784AAI ; Cass. crim., 10 juin 1987 n° 86-94.488 N° Lexbase : A8419AA3; Cass. crim., 16 novembre 1992 n° 91-83.504 N° Lexbase : A4277CUX ; CAA Versailles, 8 novembre 2005 n° 04VE01914, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A9468DLA).

Enfin, précisons qu'une action récursoire contre le débiteur principal peut être mise en oeuvre. La Cour de cassation a eu l'occasion d'affirmer que le complice a droit au remboursement de la totalité des sommes payées par lui (Cass. com., 19 novembre 1991, n° 89-19.709 N° Lexbase : A3990ABE). En l'espèce, un complice de fraude fiscale ayant payé les impôts fraudés et les pénalités y afférentes en vertu de la solidarité de l'article 1745 du CGI, a intenté une action tendant au remboursement par un contribuable condamné pour fraude fiscale. Le juge ne peut limiter ce remboursement en proportion des fautes commises par chacun des condamnés. En effet, l'impôt fraudé et les pénalités en constituant l'accessoire ne procèdent pas de la condamnation pénale et sont personnels au contribuable. Cette solidarité n'est qu'une garantie de recouvrement d'une créance.

Ainsi, concernant l'article 1745 du CGI, la Cour de cassation ne pouvait que refuser le renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité devant le Conseil constitutionnel.

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Droit privé général

[Textes] Loi de simplification et d'amélioration de la qualité du droit : présentation des dispositions de droit civil et de droit pénal

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N2983BSB

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par Anne-Lise Lonné, Rédactrice en chef de Lexbase Hebdo - édition privée

Le 26 Mai 2011

La loi de simplification et d'amélioration de la qualité du droit a été publiée au Journal officiel du 18 mai 2011, achevant le travail mené depuis plusieurs années par les parlementaires pour simplifier le droit français et le rendre plus intelligible. Ce texte, en effet, fait suite aux lois n° 2007-1787 du 20 décembre 2007, relative à la simplification du droit (N° Lexbase : L5483H3H) et n° 2009-526 du 12 mai 2009, de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures (N° Lexbase : L1612IEG), qui ont permis d'abroger un grand nombre de textes désuets, de clarifier de nombreux pans de la législation, de corriger des erreurs de rédaction ou de coordination et de simplifier, voire de supprimer certaines démarches administratives pesantes. Dans ce prolongement, la loi du 17 mai 2011, comporte très exactement 200 articles qui s'articulent autour de 9 chapitres : "Dispositions tendant à améliorer la qualité des normes et des relations des citoyens avec les administrations" ; "Dispositions relatives au statut des groupements d'intérêt public" ; "Dispositions de simplification en matière d'urbanisme" ; "Dispositions tendant à tirer les conséquences du défaut d'adoption des textes d'application prévus par certaines dispositions législatives" ; "Simplification et clarification de dispositions pénales" ; "Dispositions électorales concernant les Français établis hors de France" ; "Dispositions d'amélioration de la qualité du droit et de simplification des normes applicables aux secteurs sanitaire, social et médico-social" ; "Habilitation du Gouvernement à modifier des dispositions législatives" ; "Dispositions transitoires et diverses". Lexbase Hebdo - édition privée vous propose une présentation des mesures principales relevant du droit privé (pour les dispositions relevant du droit social, lire N° Lexbase : N2973BSW).

1. En matière de droit civil...

  • Inscription du nom du partenaire d'un PACS sur l'acte de décès (loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, art. 1er)

L'article premier de la loi du 17 mai 2011 a pour objet de faire porter sur l'acte de décès, les prénoms et nom du partenaire de pacte civil de solidarité du défunt. Une telle mention est actuellement prévue à l'article 79 du Code civil (N° Lexbase : L2924IQD) pour les conjoints survivants. Elle vise à faciliter l'identification et de prouver la situation de famille des intéressés dans la perspective notamment du règlement successoral.

Si le partenaire de PACS ne possède pas de vocation successorale légale, il n'est pas pour autant privé de tout droit sur la succession. En effet, la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006, portant réforme des successions et des libéralités (N° Lexbase : L0807HK4), a reconnu à son profit un droit d'occupation temporaire du domicile commun, pour un an, ainsi que la possibilité de bénéficier de l'attribution préférentielle d'une entreprise ou de parts sociales d'une entreprise à laquelle il participait avant le décès. Ces dispositions visent à garantir le maintien temporaire des conditions de vie de celui qui a partagé la vie du défunt, sans pour autant le placer en concurrence avec les héritiers privilégiés du défunt.

De ce fait, même si les droits successoraux du conjoint ou du partenaire de PACS survivants ne sont pas identiques, le même intérêt qui s'attache, pour le premier, à pouvoir exciper aisément de sa qualité, grâce à la mention inscrite sur l'acte de décès, est ainsi reconnu au second, qui peut désormais, sans avoir forcément à produire la convention de pacte civil de solidarité qui le liait au défunt, opposer aux autres héritiers ou au bailleur son droit d'occuper temporairement le logement.

  • Autorité chargée de recevoir la déclaration de nationalité à Paris (loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, art. 18)

L'article 18 de la loi, modifie l'article 26 du Code civil (N° Lexbase : L2930IQL), afin de désigner le préfet de police, à Paris, et non le préfet de Paris, comme autorité compétente pour recevoir la déclaration de nationalité souscrite à raison du mariage d'un étranger avec un français.

L'article 12 de la précédente loi de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures du 12 mai 2009 (N° Lexbase : L1612IEG) a, en effet, transféré des tribunaux d'instance aux préfectures départementales, ou, à l'étranger, aux consulats français, la compétence pour recevoir ces déclarations souscrites à l'occasion du mariage des époux. L'une des raisons de ce choix tient précisément au rôle qui est celui des préfectures pour conduire les enquêtes administratives menées dans le cadre des procédures de constitution des dossiers de déclaration d'acquisition de la nationalité française par mariage, pour s'assurer de la continuité de la communauté de vie affective et matérielle des époux ou le degré de connaissance de la langue française par le conjoint étranger.

Or, il s'avère qu'à Paris, la compétence pour mener ces enquêtes appartient, en vertu de l'article 15 du décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 (N° Lexbase : L3371IMS), au préfet de police et non au préfet de Paris, par ailleurs préfet de la région Ile-de-France, alors même que, compte tenu de la généralité des termes retenus par l'ancienne rédaction de l'article 26 du Code civil, c'est à ce dernier que les déclarations de nationalité devaient être adressées.

Dans un souci d'efficacité, la loi du 17 mai 2011 vient alors préciser que, à Paris, la compétence en cause revient au préfet de police.

  • Conditions dans lesquelles un mariage posthume peut être autorisé (loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, art. 19)

La procédure du mariage posthume, prévue par l'article 171 du Code civil dans sa rédaction antérieure à la loi (N° Lexbase : L1760ABS), permet au Président de la République, lorsque des motifs graves le justifiaient, d'autoriser la célébration d'un mariage en dépit du décès de l'un des deux époux, à la condition que le consentement du défunt soit établi, sans équivoque, par l'accomplissement de formalités officielles relative à ce mariage. Historiquement cette procédure a notamment permis de garantir la filiation légitime d'enfants conçus avant le mariage des époux ou d'assurer la protection nécessaire au conjoint du défunt.

L'article 19 de la loi de simplification et d'amélioration de la qualité du droit vient remplacer la condition tenant à l'accomplissement préalable de formalités officielles, jugée trop restrictive car limitée à trop peu d'actes, par une condition liée à la seule réunion de faits suffisants pour établir le consentement du défunt au mariage.

A ce titre, les rapports parlementaires évoquent, par exemple, aussi bien une formalité (demande de copie d'acte de naissance, demande d'un dossier de mariage...), qu'une démarche (rendez-vous avec un notaire en vue de l'établissement d'un contrat de mariage...) ou un préparatif de mariage (impression de faire-part, achat d'alliances, réservation de salle...).

Quoi qu'il en soit, il appartient au chef de l'Etat d'apprécier souverainement si les éléments présentés sont de nature à marquer sans équivoque le consentement au mariage de l'époux décédé, le juge vérifiant, en cas de contentieux tendant à l'annulation du mariage posthume, si ce consentement a bien persisté jusqu'au décès.

  • Neutralisation des armes remises au greffe du tribunal par le conjoint violent (loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, art. 20)

Cette mesure, modifiant l'article 515-11 du Code civil (N° Lexbase : L2932IQN) prévoit le transfert de la compétence du greffe du tribunal de grande instance à la police ou à la gendarmerie nationales, en matière de neutralisation des armes détenues par un conjoint violent.

La loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010, relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants (N° Lexbase : L7042IMR), permet au juge aux affaires familiales de prévoir, dans le cadre de l'ordonnance de protection, la remise au greffe des armes dont le conjoint violent est détenteur. La remise des armes peut ainsi être décidée afin de garantir la protection effective des victimes.

Il est jugé plus opportun de prévoir que la remise des armes doit se faire auprès des services compétents pour les neutraliser, c'est-à-dire la police ou la gendarmerie nationales, qui, seules, peuvent les prendre en charge dans de parfaites conditions de sécurité.

  • Simplification du régime d'acceptation des libéralités (loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, art. 21)

L'article 21 de la loi du 17 mai 2011 a un double objet. Il vient, d'abord, consolider l'application en Alsace-Moselle de la procédure d'octroi des libéralités à des établissements ou à des Etats étrangers et les soumettre au droit applicable en la matière, c'est-à-dire un régime de déclaration ouvrant un droit d'opposition au ministre de l'Intérieur.

Il prévoit, ensuite, de substituer un régime de déclaration à un régime d'autorisation, en coordination avec l'ordonnance n° 2005-856 du 28 juillet 2005, portant simplification du régime des libéralités consenties aux associations, fondations et congrégations, de certaines déclarations administratives incombant aux associations (N° Lexbase : L8518HB4), dans la loi du 2 janvier 1817 sur les donations et legs aux établissements ecclésiastiques et dans la loi du 12 mai 1825, relative à l'autorisation et à l'existence légale des congrégations et des communautés religieuses de femmes.

L'article 21, II, vient ainsi substituer aux articles 2 et 3 de la loi du 2 janvier 1817 une nouvelle rédaction de ce même article 2, de portée générale, qui prévoit que les congrégations religieuses autorisées ou légalement reconnues et, dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, les établissements publics du culte peuvent, avec l'autorisation du représentant de l'Etat dans le département, délivrée dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat :

- acquérir, à titre onéreux, des biens immeubles, des rentes sur l'Etat ou des valeurs garanties par lui destinés à l'accomplissement de leur objet ;

- aliéner les biens immeubles, les rentes ou valeurs garanties par l'Etat dont ils sont propriétaires.

A noter, également, que l'article 21 rétablit le premier alinéa de l'article 910 du Code civil (N° Lexbase : L2933IQP) dans sa rédaction antérieure à l'adoption de l'ordonnance n° 2010-177 du 23 février 2010 (N° Lexbase : L5981IGM), de coordination avec la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009, portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (N° Lexbase : L5035IE9), afin de soumettre explicitement les libéralités consenties au profit " des établissements de santé et des établissements sociaux et médico-sociaux" au régime plus contraignant d'autorisation préalable. Cette disposition vient en cohérence avec l'interdiction faite aux membres des professions médicales ayant prodigué des soins à une personne pendant la maladie dont elle meurt d'hériter de ces dernières ou de bénéficier de libéralités en leur faveur, qui se trouve définie à l'article 909 du Code civil (N° Lexbase : L8526HWP).

  • Création d'une possibilité de modification, à la demande de l'intéressé, de l'ordre de ses prénoms (loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, art. 51)

L'article 51 de la loi du 17 mai 2011, modifie l'article 60 du Code civil (N° Lexbase : L3089IQH) afin d'ajouter, aux possibilités, pour un motif légitime, de modification, d'adjonction ou de suppression d'un ou plusieurs prénoms, la faculté d'en modifier l'ordre.

En effet, la jurisprudence refuse de considérer qu'une personne justifie d'un intérêt légitime à obtenir la modification de l'ordre de ses prénoms, dans la mesure où il lui est possible d'utiliser, à titre de prénom d'usage l'un quelconque des prénoms inscrits à son état civil, ce choix s'imposant tant aux tiers qu'aux autorités publiques. Cependant, même si dans l'usage courant, l'intéressé peut faire prévaloir l'un quelconque de ses prénoms, symboliquement, il ne peut obtenir la mise en conformité de son état civil avec son choix de prénom d'usage. L'article 51 apporte ainsi une réponse à cette difficulté.

2. En matière de droit immobilier...

  • Dispositions touchant la profession d'architecte (loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, art. 7 et 11)

En premier lieu, l'article 7 de la loi du 17 mai 2011 modifie la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 (N° Lexbase : L6905BH9) afin de renforcer les sanctions pénales applicables en cas d'usurpation du titre d'architecte. Les sanctions sont alignées sur celles prévues pour les professions réglementées, soit les peines prévues à l'article 433-17 du Code pénal (N° Lexbase : L9633IEI) pour l'usurpation de titres.

A noter que l'article 7 prévoyait initialement d'intégrer deux coordinations en matière de définition de la profession d'architecte, découlant de la transposition de la Directive européenne du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles, opérée par l'ordonnance n° 2008-507 du 30 mai 2008. Ces mesures de coordination, ont été adoptées dans le cadre de la loi n° 2011-302 du 22 mars 2011, portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques (N° Lexbase : L8628IPA).

En second lieu, l'article 11 vient, d'abord, ratifier l'ordonnance n° 2005-1044 du 26 août 2005, relative à l'exercice et à l'organisation de la profession d'architecte. Pour rappel, cette ordonnance a allongé la durée de mandat des membres du Conseil national et des conseils régionaux de l'Ordre des architectes afin d'éviter des opérations électorales trop rapprochées et coûteuses et d'apporter à ces conseils davantage de stabilité. Elle a également instauré le principe d'un mandat unique dès lors qu'il est complet. Elle a imposé aux architectes de produire chaque année au conseil régional de l'Ordre une attestation d'assurance sous peine d'une suspension temporaire du tableau. Elle a modifié l'organisation et les modalités de fonctionnement de la Chambre nationale et des chambres régionales de discipline des architectes. Elle a permis la régularisation de la situation des professionnels de la maîtrise d'oeuvre exerçant une activité de conception architecturale et qui avaient formulé une demande de reconnaissance de qualification professionnelle sur laquelle il n'avait pas été statué. Enfin, elle a tiré les conséquences de la nouvelle organisation des études d'architecture autour des grades licence, master et doctorat sur les conditions d'accès et d'exercice de la profession d'architecte.

Ensuite, l'article 11 modifie les articles 22, 24 et 26 de la loi du 3 janvier afin d'apporter deux corrections contribuant à l'objectif d'amélioration de la qualité du droit.

Il est ainsi prévu d'autoriser les conseillers régionaux et nationaux à exercer deux mandats consécutifs afin de garantir la stabilité nécessaire au développement de l'expertise, gage d'une meilleure efficacité. Toutefois, afin d'éviter l'excès inverse sur une longue durée en cas de mandats non consécutifs, la durée totale d'exercice est limitée à douze ans, soit l'équivalent de deux mandats.

L'article 26 de la loi, dont la rédaction apparaît aujourd'hui trop restrictive et conduit le juge à écarter des actions formées par le conseil national et les conseils régionaux de l'ordre des architectes, est complété afin d'élargir la définition de l'intérêt à agir, de manière à donner à l'ordre les moyens juridiques d'assurer pleinement le rôle que lui confère la loi.

  • Extension aux bénéficiaires du RSA du préavis de congé au bailleur réduit (loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, art. 12)

L'article 12 modifie l'article 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 (N° Lexbase : L8461AGH) afin d'étendre aux bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) le préavis de congé au bailleur limité à un mois, au lieu de trois mois.

En effet, ce délai réduit bénéficie au locataire percevant le revenu minimum d'insertion (RMI). Or, le RMI a été remplacé par le RSA depuis le 1er juin 2009 et tous les droits annexes connexes devraient être applicables de la même manière au RSA. Ainsi, le locataire bénéficiaire du RSA, alors qu'il recevait auparavant le RMI, doit conserver la possibilité de donner congé au bailleur avec un délai de préavis réduit à un mois.

  • Suppression de la différence de traitement entre les souscripteurs de contrats préliminaires (loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, art. 22)

L'article 22 vise à supprimer la différence de traitement entre les souscripteurs de contrats préliminaires, selon qu'ils ont ou non déclaré faire leur affaire de l'obtention d'un prêt. La Cour de cassation avait, en effet, jugé que le souscripteur ayant déclaré faire son affaire personnelle de l'obtention du prêt et ne l'ayant pas obtenu ne pouvait prétendre à la restitution du dépôt de garantie versé lors de la signature du contrat préliminaire (Cass. civ. 3, 21 juin 2006, n° 04-18.239, FS-P+B+I N° Lexbase : A9596DP4). Comme le souligne le rapport, une telle différence de traitement allait à l'encontre des intérêts des souscripteurs de contrats préliminaires, sans que, sans doute, ce résultat ait été voulu.

Le contrat préliminaire, et non plus seulement le contrat de vente, est désormais soumis aux dispositions protectrices des articles L. 312-15 (N° Lexbase : L2934IQQ) à L. 312-17 du Code de la consommation.

  • Simplification des procédures en matière de lutte contre les termites (loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, art. 125)

L'article 125 de la loi de simplification et d'amélioration de la qualité du droit vise à simplifier les procédures applicables en matière de lutte contre les termites.

Il s'agit d'adopter, pour les immeubles en copropriété soumis à la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, des procédures de notification aux copropriétaires s'inspirant de celles qui prévalent en matière de ravalement (CCH, art. L. 132-3 N° Lexbase : L8341IDB) ou de police spéciale de l'insalubrité (C. santé publ., art. L. 1331-28-1 N° Lexbase : L6974IGE).

L'article L. 133-1 du Code de la construction et de l'habitation (N° Lexbase : L3231IQQ), relatif à la possibilité ouverte aux maires d'enjoindre aux propriétaires de procéder à la recherche de termites, ainsi qu'aux travaux préventifs ou d'éradication nécessaires, est ainsi modifié afin de prévoir que "la notification de l'injonction aux copropriétaires est valablement faite au seul syndicat des copropriétaires pris en la personne du syndic, qui doit en informer sans délai chaque copropriétaire par lettre recommandée avec demande d'avis de réception".

De même, le nouvel article L. 133-2 (N° Lexbase : L3230IQP), qui concerne les cas de carence d'un propriétaire (après mise en demeure infructueuse, le maire peut faire procéder d'office à cette recherche ou ces travaux), prévoit une modalité identique de notification de la mise en demeure aux copropriétaires.

3. En matière de droit de la consommation...

  • Mise en conformité avec le droit communautaire de la législation relative aux pratiques commerciales déloyales (loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, art. 45)

L'article 45 de la loi du 17 mai 2011 vise à mettre en conformité le droit français avec le droit communautaire en matière de pratiques commerciales, à la suite d'une mise en demeure adressée à la France par la Commission européenne en mai 2009, concernant la transposition de la Directive du 11 mai 2005, relative aux pratiques commerciales déloyales (N° Lexbase : L5072G9Q) : réalisée en 2008, cette transposition dans le Code de la consommation a été jugée incorrecte par la Commission européenne.

Sont ainsi modifiés les articles L. 115-30 (N° Lexbase : L3371IMS), L. 121-8 (N° Lexbase : L3087IQE), L. 121-35 (N° Lexbase : L3086IQD), L. 121-36 (N° Lexbase : L3085IQC), L. 122-1 (N° Lexbase : L3084IQB), L. 122-3 (N° Lexbase : L3083IQA), L. 122-11-1 (N° Lexbase : L3082IQ9) et L. 421-6 (N° Lexbase : L3081IQ8) du Code de la consommation.

Divers domaines sont abordés dans cet article, notamment la législation interdisant les ventes liées. Ces adaptations sont faites a minima, pour respecter le sens de la Directive, sans refonte des dispositions concernées du Code de la consommation.

Les nouvelles dispositions constituent ainsi une régression de la protection des consommateurs français, notamment en matière de ventes liées. En effet, certaines pratiques commerciales jusqu'à présent considérées en France comme déloyales n'étaient pas désignées comme telles par la Directive du 11 mai 2005, de sorte que la Commission européenne interdit d'offrir un niveau de protection des consommateurs supérieur à celui prévu par la Directive.

4. En matière pénale...

  • Insertion dans le Code de procédure pénale de dispositions concernant les autopsies judiciaires (loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, art. 147)

En l'état du droit et de la jurisprudence de la Cour de cassation, aucune restitution d'organes placés sous scellés à l'issue d'une autopsie judiciaire n'est juridiquement possible.

Dans son rapport annuel pour 2009, la Cour de cassation avait observé que "les demandes de restitution d'organes soulèvent des enjeux humains majeurs touchant tant à la dignité de l'être humain qu'à des considérations morales" et qu'il y avait "dans le silence des textes, une opportunité de légiférer en la matière".

En réponse à cette observation, l'article 147 de la loi introduit ainsi, au sein du Code de procédure pénale, trois nouveaux articles 230-6 à 230-8.

L'article 230-6 du Code de procédure pénale prévoit, tout d'abord, le cadre juridique dans lequel une autopsie judiciaire peut être ordonnée : il s'agit de l'enquête de flagrance, de l'enquête préliminaire, de l'enquête en recherche des causes de la mort et de l'information judiciaire.

Il est ensuite précisé que l'autopsie judiciaire ne peut être réalisée que par un praticien titulaire d'un diplôme attestant de sa formation en médecine légale ou d'un titre justifiant de son expérience en médecine légale.

Au cours d'une autopsie judiciaire, le praticien désigné à cette fin procède aux prélèvements biologiques qui sont nécessaires aux besoins de l'enquête ou de l'information judiciaire.

Sous réserve des nécessités de l'enquête ou de l'information judiciaire, le conjoint, le concubin, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité, les ascendants ou les descendants en ligne directe du défunt sont informés dans les meilleurs délais de ce qu'une autopsie a été ordonnée et que des prélèvements biologiques ont été effectués.

L'article 230-29 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3042IQQ) précise, ensuite, que lorsque la conservation du corps du défunt n'est plus nécessaire à la manifestation de la vérité, l'autorité judiciaire compétente délivre dans les meilleurs délais l'autorisation de remise du corps et le permis d'inhumer.

Le praticien ayant procédé à une autopsie judiciaire est tenu de s'assurer de la meilleure restauration possible du corps avant sa remise aux proches du défunt.

Il ne peut être refusé aux proches du défunt qui le souhaitent d'avoir accès au corps avant sa mise en bière, sauf pour des raisons de santé publique. L'accès au corps se déroule dans des conditions qui leur garantissent respect, dignité, décence et humanité. Une charte de bonnes pratiques, dont le contenu est défini par voie réglementaire, informe les familles de leurs droits et devoirs. Elle est obligatoirement affichée en un lieu visible.

A l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'autopsie, les proches du défunt ayant qualité pour pourvoir aux funérailles peuvent demander la restitution du corps auprès du procureur de la République ou du juge d'instruction, qui doit y répondre par une décision écrite dans un délai de quinze jours.

Le nouvel article 230-30 (N° Lexbase : L3043IQR) précise que lorsque les prélèvements biologiques réalisés au cours d'une autopsie judiciaire ne sont plus nécessaires à la manifestation de la vérité, l'autorité judiciaire compétente peut ordonner leur destruction (laquelle s'effectue selon les modalités prévues par l'article R. 1335-11 du Code de la santé publique N° Lexbase : L8760HNR). Toutefois, sous réserve des contraintes de santé publique et lorsque ces prélèvements constituent les seuls éléments ayant permis l'identification du défunt, l'autorité judiciaire compétente peut autoriser leur restitution en vue d'une inhumation ou d'une crémation.

  • Possibilité de prononcer cumulativement les peines complémentaires d'affichage et de diffusion d'une décision juridictionnelle (loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, art. 148)

Aux termes de l'article 131-35 du Code pénal (N° Lexbase : L9868GQK), la juridiction peut ordonner, à titre de peine complémentaire, l'affichage ou la diffusion de l'intégralité ou d'une partie de la décision, ou d'un communiqué informant le public des motifs et du dispositif de celle-ci.

Pour rappel, cette peine, qui a une évidente fonction vexatoire, est également un moyen d'information, d'éducation et de dissuasion, permettant de faire mieux connaître les interdits légaux et les conséquences de leur transgression. Elle représente parfois également la compensation du trouble causé par l'infraction lorsque l'objet ou l'effet de celle-ci était de faire tort à la réputation de la victime.

L'article 148 de la loi du 17 mai 2011 modifie l'article 131-35 du Code pénal en prévoyant que l'affichage et la diffusion peuvent désormais être ordonnés cumulativement.

  • Application de la circonstance aggravante de guet-apens au meurtre (loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, art. 149)

L'article 149 de la loi de simplification et d'amélioration de la qualité du droit vient compléter l'article 221-3 du Code pénal (N° Lexbase : L3256IQN) afin de prévoir que le guet-apens constitue, à l'instar de la préméditation, une circonstance aggravante du meurtre, réparant ainsi une lacune de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007, relative à la prévention de la délinquance (N° Lexbase : L6035HU3).

En effet, cette loi avait réintroduit dans le Code pénal la notion de guet-apens figurant dans l'ancien droit pénal. Définie par l'article 132-7-1 du Code pénal (N° Lexbase : L2045AMP) comme "le fait d'attendre un certain temps une ou plusieurs personnes dans un lieu déterminé pour commettre à leur encontre une ou plusieurs infractions", le guet-apens a ainsi été retenu comme une circonstance aggravante pour les tortures et actes de barbarie, les violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner, les violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente, les violences ayant entraîné une incapacité totale de travail de plus de huit jours ou inférieure ou égale à huit jours. En revanche, cette circonstance aggravante n'avait pas été mentionnée pour le meurtre.

L'article 149 répare cette incohérence. De même que la préméditation, le guet-apens fait désormais du meurtre un assassinat, passible de la réclusion criminelle à perpétuité. Le principe de l'aggravation se fonde indépendamment de la préméditation, sur l'effet de surprise interdisant à la victime de préparer sa défense.

  • Application à l'escroquerie organisée de l'intégralité des moyens d'investigation prévus pour la criminalité organisée (loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, art. 157)

L'article 157 de la loi vise à rendre de nouveau applicable à l'escroquerie en bande organisée l'intégralité des moyens d'investigation prévus en matière de criminalité et de délinquance organisée comportant la possibilité d'une garde à vue prolongée et les perquisitions de nuit.

La loi n° 2007-297 du 5 mars 2007, relative à la prévention de la délinquance, en ajoutant le délit d'escroquerie organisée à la liste des infractions énumérées à l'article 706-73 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3304IQG), avait soumis cette infraction à l'ensemble des procédures d'investigation renforcées mises en place par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004, portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité (N° Lexbase : L1768DP8).

Cependant, la loi n° 2007-1598 du 13 novembre 2007, relative à la lutte contre la corruption (N° Lexbase : L2607H3X), a rangé l'escroquerie en bande organisée parmi les autres infractions en matière économique et financière pour lesquelles seules certaines techniques spéciales d'enquête sont possibles, à l'exclusion de la garde à vue prolongée (96 heures) et des perquisitions nocturnes.

Selon les auteurs de l'amendement à l'origine de cet article, la répression s'en est trouvée amoindrie alors même que ces infractions peuvent être commises par des bandes utilisant la violence et porter sur des montants considérables.

L'article 157 rétablit ainsi l'escroquerie en bande organisée dans la liste des infractions énumérées par l'article 706-73 du Code de procédure pénale.

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Filiation

[Jurisprudence] La tierce opposition des héritiers contre l'adoption de la concubine

Réf. : Cass. civ. 1, 4 mai 2011, n° 10-13.996, F-P+B+I (N° Lexbase : A7126HPM)

Lecture: 6 min

N2910BSL

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par Adeline Gouttenoire, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Directrice de l'Institut des Mineurs de Bordeaux

Le 26 Mai 2011

L'arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 4 mai 2011 est le terme d'une très longue histoire opposant les neveux et nièces d'une vieille dame richissime à la concubine de cette dernière. Six ans, et deux arrêts de la Cour de cassation (le premier a été rendu le 6 février 2008 (1)) après le décès de leur tante, les consorts P. obtiennent, enfin, gain de cause. Les donations des parts sociales détenues par Jeanine X, dont ils avaient bénéficié en 2001, étaient en effet menacées de révocation depuis le décès de celle-ci, à la demande de Mme Y qui avait été adoptée par la donatrice en 2002. Cette dernière, qui était en réalité la concubine de la défunte, prétendait que les donations avaient été de plein droit révoquées par le jugement d'adoption et avait engagé une action en ce sens en 2004. Le seul moyen pour les consorts X d'échapper à la révocation des donations consistait à remettre en cause le lien de filiation adoptive. Conformément à l'article 353-2 du Code civil (N° Lexbase : L2871ABX), ils ont formé une tierce opposition à l'encontre du jugement d'adoption en se fondant sur les liens entretenus par les deux femmes.

Mais le seul lien de concubinage s'est révélé insuffisant pour permettre la remise en cause de l'adoption à l'initiative des neveux et nièces de l'adoptante ; encore fallait-il établir la fraude qui subordonne la recevabilité de la tierce opposition à l'encontre d'un jugement d'adoption. Dans l'arrêt du 4 mai 2001, et contrairement à ce qu'elle avait jugé en 2008, la Cour de cassation admet enfin la recevabilité de la tierce opposition des héritiers (I) avant d'en reconnaître le bien fondé (II).

I - La recevabilité de la tierce opposition à l'encontre du jugement d'adoption

Confusion entre la recevabilité et le bien fondé de la tierce opposition. L'arrêt du 4 mai 2011 n'est pas seulement un arrêt venant affirmer la prohibition de l'adoption entre personnes ayant entretenu des relations de couple (cf. infra), c'est surtout un arrêt venant préciser la condition de fraude qui subordonne la recevabilité d'une tierce opposition à l'encontre d'un jugement d'adoption. Plus exactement, il rappelle, surtout lorsqu'on le confronte au précédent arrêt du 6 février 2008 de la Cour de cassation dans cette affaire, que la recevabilité de la tierce opposition au jugement d'adoption ne doit pas être confondue avec le bien fondé de la demande en adoption. Le premier arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, rendu le 5 septembre 2006 (2) avait, en effet, considéré que les liens entre l'adoptante et l'adopté constituaient la fraude permettant de déclarer recevable la tierce opposition des consorts X à l'encontre du jugement d'adoption. Or, ces liens, s'ils caractérisent à l'évidence le détournement de l'adoption (cf. infra) et son absence de bien fondé, ne suffisent pas à caractériser la fraude à laquelle est subordonnée le recours des tiers contre le jugement d'adoption. Pour garantir la sécurité juridique, les tiers ne sauraient en effet se voir ouvrir une voie de recours trop large contre une décision qui ne les concernent qu'indirectement.

Caractérisation de la fraude. Il était donc logique que l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 5 septembre 2006, selon lequel "la fraude est constituée lorsque l'adoption est détournée de son but qui est de créer un lien de filiation" soit cassé par la Cour de cassation pour défaut de base légale. Sur renvoi après cassation, la même cour d'appel, autrement constituée, a revu sa motivation. Dans son arrêt du 25 novembre 2009, elle a, cette fois, pris soin de caractériser la fraude, autrement que par le seul détournement de l'adoption. C'est le fait que l'adoptante a gardé le silence sur la nature véritable de ses relations avec l'adopté lors de la procédure d'adoption qui caractérise, selon ce deuxième arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, la fraude, et rend la tierce opposition recevable.

Cette motivation a reçu, dans l'arrêt du 4 mars 2011, l'aval de la Cour de cassation selon laquelle la cour d'appel a, "par une appréciation souveraine", estimé que l'adoptante avait "commis une omission dolosive constitutive d'une fraude de nature à influer de façon déterminante sur la décision d'adoption et rendant recevable la tiers opposition". Comme le fait remarquer un auteur en effet, "l'existence d'un dol ou d'une fraude relève du pouvoir souverain des juge du fond, mais la qualification de dol ou de fraude est contrôlée par la Cour de cassation" (3).

Cette fois, la cour d'appel a bien distingué l'existence même des relations entre l'adoptante et l'adopté, qui fonde le bien fondé de la tierce opposition, et le fait que ces relations aient été dissimulées par l'adoptante au juge compétent pour prononcer l'adoption, qui permet d'établir la recevabilité de la tierce opposition. La fraude consiste, en effet, "à travestir la réalité par de véritables maquillages ou de simples silences, pour obtenir du juge la décision souhaitée" (4), ce qui était à l'évidence le cas en l'espèce.

La position stricte de la Cour de cassation quant à la recevabilité de la tierce opposition s'explique par la nécessité de ne pas permettre aux tiers de remettre en cause le bien fondé de l'adoption admis par un juge. Dans l'hypothèse, certes peu probable, dans laquelle l'adoption aurait été admise alors que le juge était informé de la nature véritable des liens entre l'adoptante et l'adoptée, la tierce opposition n'aurait pas été recevable. Une telle solution est toutefois clairement exclue par la Cour de cassation dans l'arrêt du 4 mai 2011.

II - Le bien fondé de la tierce opposition à l'encontre du jugement d'adoption

Détournement de l'adoption. Le second moyen du pourvoi portait sur le bien fondé de la tierce opposition. La cour d'appel avait, en effet, accueilli la tierce opposition au fond en affirmant que "l'adoption simple a pour objet non de renforcer des liens d'affection ou d'amitié entre deux personnes, ayant des relations sexuelles, mais de consacrer un rapport filiation". Ayant constaté, notamment à partir d'un rapport de police établi lors du décès de l'adoptante, que cette dernière vivait en concubinage avec l'adopté depuis 1990, les juges du fond ont, selon la Cour de cassation, "souverainement apprécié leur demande au regard de la finalité de l'institution et constaté son détournement".

Révocation des donations pour survenance d'enfant. Il est, en outre, précisé dans l'arrêt du 4 mars 2011 que l'adoption simple permettait de contourner les règles civiles régissant les donations entre vifs. En établissant un lien de filiation, l'adoptante créait en effet, artificiellement, les conditions de la révocation pour survenance d'enfant des donations qu'elle avait consenties précédemment au bénéfice de ses neveux et nièces. Ainsi, l'adoption prononcée constituait, semble-t-il, un double détournement d'adoption, d'une part, parce qu'elle visait à établir un lien de filiation entre les membres d'un couple, d'autre part, parce que son principal objectif était de bénéficier d'un effet en principe secondaire de l'établissement d'un lien de filiation, c'est-à-dire la remise en cause de donations antérieures.

Exclusion de l'adoption entre concubins. Dans l'arrêt du 4 mai 2011, la Cour de cassation approuve clairement la cour d'appel d'avoir rejeté la possibilité d'une adoption simple entre personnes ayant entretenu des relations sexuelles. Une telle solution, si elle avait été plusieurs fois affirmée par des juges du fond (5), n'avait finalement jamais fait l'objet d'une affirmation aussi nette par la Cour de cassation. Certains auteurs avaient même déduit de certaines décisions de la Haute Cour une certaine tolérance de sa part vis-à-vis d'une telle hypothèse (6). L'arrêt du 4 mars 2011 possède le grand mérite de clarifier la jurisprudence : l'adoption ne saurait être admise dans un couple de concubins.

Exclusion de l'adoption d'un ex-époux. Cette décision doit être rapprochée de l'arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 23 juin 2010 (7), selon lequel "la cour d'appel a retenu, à bon droit, que l'institution de l'adoption n'avait pas vocation à créer un lien de filiation entre deux ex-époux". Ainsi, quel que soit le mode de conjugalité -la solution est applicable dans le cadre du PACS-, il est exclusif d'une adoption d'un membre du couple par l'autre, et ce que ce soit pendant la vie commune ou après la rupture.

Finalité de l'adoption. La position de la Cour de cassation repose sur la finalité de l'adoption qui consiste à établir un lien de filiation dans l'intérêt d'un enfant. Une telle finalité exclut à l'évidence que l'adoption puisse être admise dans le cadre d'un couple ou d'un ex-couple puisqu'elle aboutirait à la création d'un inceste juridique.

L'arrêt du 4 mars 2011 met définitivement fin, s'il en était encore besoin, aux velléités de certains couples, notamment homosexuels, de détourner l'institution de l'adoption dans un but de transmission patrimoniale. Il constitue également un mode d'emploi pour les héritiers susceptibles de vouloir remettre en cause une telle adoption : avant d'invoquer le détournement, ceux-ci doivent impérativement prouver la fraude, et plus précisément le fait que le demandeur à l'adoption avait caché au juge la nature exacte de ses relations avec l'adopté ; en effet, il est désormais certain qu'aucun juge ne devrait prononcer une adoption s'il a connaissance de l'existence de relations de couples entre le demandeur à l'adoption et l'adopté.


(1) Cass. civ. 1, 6 février 2008, n° 06-20.054, FS-P+B (N° Lexbase : A9211D4W), Dr. Fam., 2008, comm.n° 159, obs. P. Murat.
(2) Dr. fam., 2007, comm. n° 54, obs. A. Gabriel.
(3) P. Chuvin, Chronique de la Cour de cassation, première chambre civile, D., 2008, p. 643.
(4) P. Murat, art. préc..
(5) CA Versailles, 4 novembre 1999, Dr. Fam., 2000, n° 141, obs. P. Murat ; CA Riom, 9 juillet 1981, JCP éd. G, 1982, II, 19799.
(6) Pierre Murat (art. préc.) évoque le doute suscité par l'arrêt de la première chambre civile du 8 juin 1999 (Cass. civ. 1, 8 juin 1999, n° 96-18.908 N° Lexbase : A6216CGC) ; dans le même sens, J. Hauser, obs. ss Cass. civ. 1, 8 juin 1999, RTDCiv., 1999, p. 610.
(7) Dr. Fam. 2010, comm. 150, obs. P. Murat

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Fiscalité du patrimoine

[Questions à...] Les impacts de la réforme de l'ISF et de la suppression du bouclier fiscal sur la fiscalité des particuliers - Questions à Jean-François Desbuquois, Avocat associé et Directeur adjoint du Département droit du patrimoine au sein du cabinet FIDAL

Lecture: 6 min

N2866BSX

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par Sophie Cazaillet, Rédactrice en chef de Lexbase Hebdo - édition fiscale

Le 26 Mai 2011

Le jeudi 3 mars 2011, le Premier ministre, François Fillon, a annoncé une réforme de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et, corrélativement, la suppression du bouclier fiscal. La question de l'avenir de l'ISF a, depuis lors, suscité des solutions diverses, les uns prônant une suppression du dispositif, les autres, plus modérés, proposant de relever la tranche inférieure du barème de cet impôt sur le capital. C'est cette dernière solution qui est retenue par le ministère du Budget, qui a officiellement annoncé, le 18 avril 2011, les mesures qui seront retenues. La première tranche du barème de l'ISF est donc relevée, passant de 800 000 euros à 1,3 millions d'euros. Le bouclier fiscal sera, quant à lui, supprimé en 2012. Ces deux mesures s'inscrivent dans le cadre de la réforme de la fiscalité du patrimoine qui a débuté en France cette année, et résulte de plusieurs évènements : la tenue d'un colloque "Patrimoine et fiscalité", au début du mois de mars, mais aussi la publication du rapport de la Cour des comptes sur la convergence de la fiscalité française et de la fiscalité allemande. Le projet de loi de finances rectificative pour 2011, comprenant cette réforme, a été déposé le 12 mai 2011 à l'Assemblée nationale.
Afin de prendre connaissance des aspects pratiques de la réforme de l'ISF et de la suppression du bouclier fiscal, Lexbase Hebdo - édition fiscale a rencontré Jean-François Desbuquois, Avocat associé et Directeur adjoint du Département droit du patrimoine au sein du cabinet FIDAL, qui a accepté de répondre à nos questions sur l'impact de ces deux évènements marquants de l'année fiscale. Lexbase : Quels éléments ont motivé le relèvement de la tranche inférieure du barème de l'ISF et la suppression du bouclier fiscal ? Pourquoi l'ISF a survécu à ces semaines de réflexion quant à son existence ?

Jean-François Desbuquois : Je pense que le relèvement du seuil d'entrée dans l'ISF était un correctif nécessaire, visant à faire ressortir du champ de l'impôt un nombre important de foyers fiscaux qui avaient été pris au piège de la hausse de valeur de leurs biens immobiliers (résidences principale et secondaire), mais qui n'avaient pas le sentiment d'être devenus plus riches pour autant.

La suppression du bouclier fiscal résulte, sans doute, du fait que, d'une part, il était devenu difficile à assumer politiquement, et que, d'autre part, il s'était révélé techniquement très complexe à mettre en oeuvre. Le Gouvernement a donc fait le choix de l'abrogation, tout en essayant de régler le problème majeur de l'ISF, à savoir son barème, celui-ci ayant, d'ailleurs, motivé la création du bouclier. En effet, les taux de l'ISF ont été fixés à une époque où la rémunération des actifs était très supérieure à celle que l'on peut connaître actuellement, et le taux de prélèvement était alors peut-être plus supportable. En revanche, en 2011, alors que la rémunération des actifs est voisine de 3 %, un prélèvement sur le capital de 1,8 %, auquel s'ajoutent l'impôt sur le revenu et les prélèvements sociaux, était devenu confiscatoire.

La survie de l'ISF est sans doute un choix par défaut. Le Gouvernement n'a pas trouvé d'alternative crédible, car il avait enfermé la réforme dans le postulat qu'elle ne devait entraîner ni pertes budgétaires, ni transfert de l'impôt sur des foyers fiscaux non concernés par l'ISF, ce qui limitait considérablement le champ des possibles. L'autre voie envisagée à une époque (l'impôt sur le revenu de la fortune) me semblait strictement inapplicable.

La meilleure mesure aurait certainement été la suppression pure et simple de l'ISF, mais il fallait accepter la recherche d'une contrepartie budgétaire déconnectée du patrimoine des redevables concernés.

Lexbase : Les grandes lignes de la réforme de l'ISF sont connues, mais il reste des détails juridiques et pratiques à régler avant sa mise en oeuvre. Quel impact aura la réforme sur les déclarations souscrites par les contribuables ? A quelle date ?

Jean-François Desbuquois : 2011 sera effectivement une année de transition. Nous avons compris que, cette année, les contribuables dont le patrimoine est inférieur à 1 300 000 euros seront exonérés, et que ceux qui le dépasseront seront taxables selon le barème actuel de l'ISF pour la fraction de leur patrimoine excédant 800 000 euros.

A compter de 2012, le barème sera abaissé (0,25 % pour un patrimoine inférieur à 3 000 000 d'euros et 0,5 % pour un patrimoine supérieur), mais lorsque le montant de 1 300 000 d'euros sera dépassé, le redevable sera taxable au premier euro. Il s'agira alors d'un seuil de déclenchement. Un mécanisme correctif est prévu pour lisser l'effet de seuil qui aurait pénalisé les redevables se trouvant juste au-dessus des deux nouvelles tranches de 1 300 000 et 3 000 000 d'euros.

Le vote de la loi de finances rectificative étant prévu pour juin/juillet, le Gouvernement va reporter la date habituelle de dépôt des déclarations d'ISF, au 30 septembre 2011, pour permettre l'adoption définitive du texte et l'émission de formulaires de déclarations adaptés.

A compter de 2012, les redevables dont le patrimoine est inférieur à 3 000 000 euros n'auront plus de déclaration spécifique détaillée à fournir, mais reporterons le montant de leur patrimoine net taxable sur leur déclaration d'impôt sur le revenu.

Lexbase : Concernant le bouclier fiscal, sa suppression est attendue pour 2012. Pourquoi ce délai d'un an ? En quoi la mise en place d'une auto-liquidation du bouclier pour sa dernière année d'application modifiera-t-elle les déclarations souscrites par les contribuables ?

Jean-François Desbuquois : Il me semble que la date d'effet de la suppression du bouclier est cohérente avec le fait que les taux d'ISF applicables en 2011 ne seront pas modifiés par la réforme. L'ISF 2011 va donc rester très élevé, les seuls gagnants étant les redevables dont le patrimoine n'excèdera pas 1 300 000 euros. Il était donc parfaitement logique de maintenir le bouclier qui fonctionne avec un décalage d'un an.

Je pense que le choix d'imposer l'auto-liquidation résulte de la volonté d'unifier les modalités techniques du bouclier qui devenaient complexes et peut-être, également, d'éviter, au plan politique, la médiatisation en 2012 de certains montants de restitution qui peuvent paraître importants une fois sortis de leur contexte.

Lexbase : Les pertes de recettes relatives au relèvement de la tranche inférieure du barème de l'ISF ne sont pas compensées intégralement par la suppression du bouclier fiscal. Quelles sont les mesures complémentaires que le Gouvernement compte prendre ?

Jean-François Desbuquois : Plusieurs mesures sont prévues, dont certaines me semblent potentiellement néfastes :

- en matière de droits de donation et de succession, on assiste à un recul par rapport à la loi "Tepa" (loi n° 2007-1223 du 21 août 2007, en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat N° Lexbase : L2417HY8). En effet, le délai de non rappel fiscal, qui permet d'effacer les donations anciennes, reviendrait à dix ans, les deux tranches supérieures du barème de droits seraient augmentées de 5 points, et surtout les réductions sur les droits applicables aux donations consenties avant un certain âge seraient abrogées. Ces mesures auront des effets économiques très négatifs et, particulièrement la dernière, freinant les transmissions entre vifs. Cela contribuera à accumuler le patrimoine entre les mains de personnes de plus en plus âgées, compte tenu de l'accroissement de l'espérance de vie. C'est exactement l'inverse de ce qu'il faut encourager. En outre, les patrimoines les plus touchés seront souvent constitués d'entreprises familiales (PME ou entreprise de taille intermédiaire), ce qui fragilisera les possibilités de transmissions familiales et pourrait conduire, à l'avenir, à la vente de quelques fleurons de l'industrie française ;

- l'exit tax est la nouvelle version d'un dispositif que la France avait dû abandonner à la suite d'un arrêt de la CJCE du 11 mars 2004 (CJCE, 11 mars 2004, aff. C-9/02 N° Lexbase : A5001DBT). Les leçons ont été tirées de ce premier évènement et le nouveau mécanisme est plus sophistiqué. Lorsque un contribuable transfèrera son domicile hors du territoire, il devra déterminer la plus-value latente sur les participations qu'il détient dans des sociétés, si elles excèdent 1 % du capital social ou 1 300 000 euros. L'impôt sera mis en sursis, sans garantie de paiement, lorsque le contribuable s'installera dans un autre Etat de l'Union européenne, et ne deviendra effectivement exigible que lors de la cession effective des biens, si celle-ci intervient dans les huit ans du transfert de domicile. Si la plus value réellement réalisée lors de la vente est inférieure à la plus-value latente lors du transfert de domicile, seule cette première sera imposée ;

- il est proposé aussi de créer une taxation spécifique des résidences secondaires des non-résidents, et de neutraliser certains passifs des SCI dont ils sont associés pour la taxation à l'ISF ;

- il est prévu, enfin, une taxation des trusts aux droits de succession et à l'ISF et un nouvel aménagement des engagements "Dutreil" (CGI, art. 787 B N° Lexbase : L2216IG8 et suivants), pour tenter de régler certaines des multiples difficultés d'application de ces régimes.

Lexbase : Cette réforme de la fiscalité du patrimoine s'inscrit-elle dans un contexte politique particulier ? La campagne et l'élection présidentielle de 2012 vont-elles avoir un impact sur sa mise en oeuvre ?

Jean-François Desbuquois : L'approche du scrutin de 2012 a, sans doute, été l'élément déclencheur de cette réforme, avec, en premier lieu, la suppression du bouclier, qui a induit les autres mesures.

L'élection présidentielle de 2012 est, bien sûr, susceptible d'avoir un impact ultérieur si la majorité qui en sortira estime nécessaire de réformer à nouveau.

C'est bien là sans doute le plus grand risque. La fiscalité française évolue désormais en permanence selon le calendrier électoral, qui ne laisse pas le temps de réfléchir sereinement à une réforme d'ensemble. Les mesures sont à peine votées, que les premières réformes arrivent puis s'enchaînent, et aboutissent parfois à une abrogation du dispositif avant même l'entrée en vigueur des derniers aménagements intermédiaires. Le rythme s'est emballé et les contribuables sont aujourd'hui incapables de construire leur patrimoine ou leur entreprise sur des bases fiscales stables et prévisibles. Cette frénésie législative est, sans doute, désormais, le principal obstacle du retour en France des personnes et des capitaux délocalisés. Rien ne pourra se faire sans un retour de la confiance.

Le législateur est bien conscient du rôle d'incitation économique de l'impôt mais l'utilise surtout sous forme de mesures ponctuelles en faveur d'un type d'investissement.

Il devrait pouvoir comprendre les effets négatifs très importants en la matière lorsque c'est tout un impôt, ou pire encore, le système fiscal en son entier, qui est perçu négativement par les agents économiques.

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Responsabilité

[Jurisprudence] L'employeur responsable de ses videurs

Réf. : Cass. civ. 2, 12 mai 2011, n° 10-20.590, FS-P+B (N° Lexbase : A1197HRR)

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N2880BSH

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par Christophe Radé, Professeur agrégé à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV

Le 26 Mai 2011

Le Code du travail n'a pas consacré de dispositions particulières à la responsabilité civile des employeurs en raison des dommages causés par leurs salariés. C'est donc l'antique article 1384, alinéa 5, du Code civil (N° Lexbase : L1490ABS), relatif à la responsabilité des commettants du fait de leurs préposés, qui s'applique. Dès lors que le préposé a trouvé, dans l'exercice de ses fonctions, les moyens nécessaires au dommage causé, l'employeur sera systématiquement condamné sans pouvoir s'exonérer par la preuve de l'abus de fonction. C'est ce que confirme ce nouvel arrêt rendu par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation le 12 mai 2011 (I). Cette sévérité peut surprendre, voire choquer, mais elle doit être approuvée tant au regard de la fonction de la règle appliquée que de son régime (II).
Résumé

N'agit pas nécessairement hors des fonctions auxquelles il était employé, sans autorisation et à des fins étrangères à ses attributions, le salarié qui commet une infraction pénale volontaire.

Est ainsi responsable des dommages causés à une victime l'exploitant d'une discothèque en raison des troubles causés par trois de ses "videurs" condamnés pour des faits de violences volontaires par un tribunal correctionnel.

I - L'impossible abus de fonction

Responsabilité de l'employeur commettant. L'employeur répond des dommages causés par ses salariés dans le cadre de l'article 1384, alinéa 5, du Code civil, aux termes duquel "les maîtres et les commettants [sont responsables] du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés".

Le contrat de travail créant entre le salarié et l'employeur un rapport de subordination, il est logique de considérer que le salarié qui cause un dommage alors qu'il se trouve dans l'exécution de son contrat de travail engage par la même la responsabilité de son employeur. Il ne peut toutefois s'agir que d'une simple présomption de fait que l'employeur peut renverser en prouvant ce qu'il est convenu d'appeler l'"abus de fonction", défini comme l'hypothèse où le salarié "agit hors des fonctions auxquelles il était employé, sans autorisation et à des fins étrangères à ses attributions" (1).

Une conception très stricte de l'abus de fonction. Dès lors que le préposé a trouvé dans ses fonctions les moyens de commettre les faits qui lui sont reprochés, la jurisprudence refuse d'exonérer l'employeur car le préposé n'a pas, par hypothèse, agi "hors de ses fonctions". La solution, dégagée en 1999, est justifiée par le fait que le préposé "s'est servi, pour causer les dommages, des moyens matériels procurés par sa fonction" (2), ou "a trouvé dans son emploi l'occasion et les moyens de sa faute" (3).

L'entreprise sera alors mise en cause pour des dommages causés par le salarié à l'occasion de l'accomplissement habituel de ses missions, qu'il s'agisse de malversations financières (4), de vols (5), de contrebande commise à l'aide du véhicule de livraison de l'entreprise (6), du délit de marchandage (7), ou de falsification de documents douaniers (8).

Les obligations de l'employeur vont très loin puisqu'il doit également répondre d'atteintes graves aux moeurs dès lors qu'elles se sont déroulées sur le lieu de travail et pendant le temps de travail du salarié concerné (9).

Responsabilité personnelle limitée du salarié. Cette jurisprudence relative à l'abus de fonction doit être mise en relation avec celle qui concerne la responsabilité civile personnelle du préposé qui jouit depuis l'arrêt "Costedoat" rendu en 2000 d'une immunité étendue, puisque le principe désormais affirmé est que "'engage pas sa responsabilité à l'égard des tiers le préposé qui agit sans excéder les limites de la mission qui lui a été impartie par son commettant" (10).

Cette immunité ne joue toutefois pas de manière inconditionnelle et le salarié demeure personnellement responsable de ses fautes lorsqu'elles revêtent le caractère d'une infraction pénale intentionnelle (11) ; il n'est pas nécessaire ici que le préposé ait été effectivement condamné par une juridiction répressive, mais seulement qu'il soit susceptible de l'être (12). La Chambre criminelle de la Cour de cassation a également écarté l'immunité en présence d'une faute caractérisée, au sens où l'entend l'article 121-3 du Code pénal (N° Lexbase : L2053AMY), s'agissant d'un cadre bénéficiant d'une délégation de pouvoir de son employeur (13).

Les juridictions civiles ont semble-t-il étendu cette exclusion à tous les cas de fautes intentionnelles, même si elles ne tombent pas sous le coup d'une qualification pénale (14). Il doit bien s'agir d'une faute intentionnelle, avec conscience et volonté de nuire à la victime, et non d'une faute seulement volontaire comme le fait de conduire le véhicule de l'employeur sans permis de conduire (15).

Combinaison des deux responsabilités. L'application combinée des principes qui gouvernent la responsabilité civile de l'employeur, en tant que commettant, et singulièrement les critères de l'abus de fonction, et de ceux qui s'appliquent à la responsabilité personnelle du salarié, et singulièrement les comportements qui excèdent les limites de sa mission, permet de dégager trois cas de figure.

Le premier est relativement simple et correspond à l'hypothèse la plus courante : un salarié cause involontairement un dommage à un tiers alors qu'il exécute son contrat de travail ; dans cette hypothèse la victime ne peut agir directement contre lui, en raison de l'application de la jurisprudence "Costedoat", mais dispose d'une action contre l'employeur qui ne pourra caractériser, en l'espèce, l'abus de fonctions.

Le deuxième correspond à l'hypothèse du salarié qui commet un abus de fonction. Dans cette hypothèse il apparaît que le salarié qui a "agi hors des fonctions auxquelles il était employé, sans autorisation et à des fins étrangères à ses attributions" a, ce faisant, excédé "les limites de la mission qui lui a été impartie par son commettant" et ainsi perdu le bénéfice de son immunité personnelle. La victime ne pourra donc plus agir contre l'employeur, en raison de l'abus de fonction, mais pourra mettre en cause directement le salarié en raison de la perte de son immunité.

Le troisième correspond à l'hypothèse où le salarié perd son immunité civile, parce qu'il a intentionnellement causé le dommage à la victime, mais n'a pas pour autant commis d'abus de fonction puisqu'il a trouvé dans ses fonctions les moyens de sa faute. Dans ce cas, la victime se retrouve avec deux débiteurs possibles qu'elle peut mettre en cause in solidum ; si elle choisit de réclamer réparation à son employeur, alors celui-ci se retournera contre le salarié. Si l'employeur est assuré, ce qui sera généralement le cas, il se heurtera, au stade du recours, à l'article L. 121-12 du Code des assurances (N° Lexbase : L0088AAI) qui interdit le recours contre le préposé de l'assuré ; le recours redeviendra toutefois possible si le salarié est assuré.

Confirmation de la rareté de l'hypothèse d'un abus de fonction. Dans cette affaire, le client d'une discothèque se plaignait des violences subies lors de son expulsion de la discothèque par trois "videurs". Ces derniers avaient été condamnés par le juge correctionnel au paiement d'une certaine somme en réparation du préjudice subi. La victime avait été indemnisée par le fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions (FGVAT) qui, dans le cadre de son action récursoire, réclamait le remboursement des sommes au gérant de l'établissement en sa qualité de commettant.

La cour d'appel avait rejeté le recours du FGVAT après avoir affirmé "qu'une faute constitutive d'une infraction pénale volontaire, autre que de négligence ou d'inattention de nature quasi-délictuelle, ne peut entrer dans le cadre de l'obligation qui revient à l'employeur d'assumer les conséquences civiles des fautes commises par ses employés ou salariés".

Il ne faisait, ici, pas de doute que pareille affirmation allait conduire directement la deuxième chambre civile de la Cour de cassation à casser l'arrêt. Non seulement la Cour avait procédé par la voie d'une affirmation générale, sans véritablement motiver sa décision au regard des faits de l'espèce, mais de surcroît la solution ne s'inscrivait pas du tout dans la ligne jurisprudentielle très restrictive définie par la Haute juridiction qui a toujours refusé d'exonérer l'employeur sous prétexte que le salarié avait été condamné pénalement, même en raison d'infractions intentionnelles, comme l'a démontré récemment cette même chambre dans une hypothèse de viol commis par un préposé sur son lieu de travail (16).

II - Une sévérité à l'égard des entreprises justifiée

Une jurisprudence qui a du mal à passer. La position finalement très compréhensive à l'égard de l'employeur de la cour d'appel de Riom constituait soit une provocation, soit une preuve de la méconnaissance par les juges du fond de la jurisprudence de la Haute juridiction en matière d'abus de fonction. Elle montre, quelle que soit l'explication retenue, que cette jurisprudence sur l'abus de fonction a du mal à passer, nombreux étant ceux qui trouvent injuste, voire choquant, que l'employeur soit condamné en raison de faits qui sont étrangers, par leur nature ou leur gravité, à l'exécution du contrat de travail.

Une sévérité justifiée. Ces critiques sont parfaitement injustifiées au regard de la fonction même de la responsabilité mise en place par l'article 1384, alinéa 5, du Code civil, et des droits qui sont conférés aux employeurs concernés.

Il n'est pas inutile de rappeler que la responsabilité des commettants constitue avant tout un mécanisme de garantie qui offre aux victimes de dommages causés par un préposé un débiteur solvable (17). L'employeur payant une dette qui n'est pas au premier chef la sienne, il dispose logiquement d'un recours contre son salarié qui, s'il aboutit, sera, en principe, intégral puisque ce commettant n'a pas a priori commis de faute.

Certes, le salarié est protégé tant au stade de l'obligation à la dette qu'à celui de la contribution par l'immunité qui lui a été reconnue depuis l'arrêt "Costedoat" ; mais cette immunité cède devant la preuve qu'il a intentionnellement causé le dommage. Or, lorsqu'un salarié cause intentionnellement un dommage alors qu'il se trouve dans l'exercice de ses fonctions, il engage certes la responsabilité de son employeur, qui ne pourra pas s'exonérer en invoquant l'abus de fonction, mais sera condamné dans le cadre du recours de celui-ci.

La conception très stricte de l'abus de fonction qui prévaut depuis quelques années a donc essentiellement pour objet et pour effet de transférer le risque d'insolvabilité du salarié des épaules des victimes sur celles des employeurs. Faut-il s'en plaindre ? Certainement pas ! Après tout, le risque que des salariés profitent de leurs fonctions pour en abuser peut parfaitement s'analyser comme un risque de l'activité, assumé par l'employeur. Ne peut-on pas voir, d'ailleurs, dans ce mécanisme de responsabilité patronale soit la sanction d'une faute d'organisation ou de surveillance révélée par le dommage, soit un aiguillon à la mise en oeuvre d'une politique de prévention des risques digne de ce nom ?


(1) Ass. plén., 19 mai 1988, n° 87-82.654 (N° Lexbase : A1728ABM).
(2) Cass. crim., 16 février 1999, n° 96-86.225 (N° Lexbase : A6746CHC), Bull. crim., 1999, n° 23 ; Resp. civ. et assur., 1999, comm. n° 248 ; JCP éd. G, 2000, I, 199, n° 11, obs. G. Viney ; RTD Civ., 1999, p. 409, obs. P. Jourdain.
(3) Notamment Cass. civ. 2, 4 mars 1999, n° 96-20270 (N° Lexbase : A0026CG3), Bull. civ., 1999, II, n° 47 et 48 ; Resp. civ. et assur., 1999, comm. n° 124, 2ème esp..
(4) Cass. civ. 2, 28 février 1996, n° 94-15.885 (N° Lexbase : A6409AHT), Bull. civ. II, n° 53 ; Cass. civ. 2, 19 juin 2003, n° 00-22.626, FS-P+B (N° Lexbase : A8751C8M), Resp. civ. et assur., 2003, comm. 223.
(5) Cass. civ. 2, 29 mai 1996, n° 94-15.460 (N° Lexbase : A9872ABA), Resp. civ. et assur., 1996, comm. 270.
(6) Cass. crim., 19 février 2003, n° 02-81.851, FS-P+F (N° Lexbase : A3868A7E), Bull. crim., 2003, n° 43.
(7) Cass. civ. 2, 12 mai 1993, n° 91-18.906 (N° Lexbase : A9539CRQ), Resp. civ. et assur., 1993, comm. 260.
(8) Cass. crim., 8 février 1990, n° 88-85.772 (N° Lexbase : A5407CPX), Resp. civ. et assur., 1990, comm. 143 ; RTD Civ., 1990, p. 495, obs. P. Jourdain.
(9) Cass. civ. 2, 17 mars 2011, n° 10-14.468, FS-P+B (N° Lexbase : A1705HDI) : professeur de musique employé par l'Institut de rééducation des jeunes sourds et aveugles de Marseille (IRSAM) condamné par une cour d'assises pour avoir commis sur plusieurs de ses élèves des viols et agressions sexuelles, avec la circonstance aggravante que ces actes avaient été commis par une personne ayant autorité sur les victimes.
(10) Ass. plén., 25 février 2000, n° 97-17.378, Costedoat (N° Lexbase : A8154AG4), JCP éd. G, 2000, II, 10295, concl. R. Kessous, note M. Billiau ; JCP éd. G, 2000, I, 241, n° 16, obs. G. Viney ; D., 2000, jurispr. p. 673, note P. Brun ; Resp. civ. et assur., 2000, chron. 11, H. Groutel, chron. 22, Ch. Radé ; RTD Civ., 2000, p. 582, n° 5, obs. P. Jourdain.
(11) Ass. plén., 14 décembre 2001, n° 00-82.066 (N° Lexbase : A7314AX8), Bull. civ. ass. plén., 2001, n° 17 ; Resp. civ. et assur., 2002, ss. chron. 4, H. Groutel ; JCP éd. G, 2002, II, 10026, note M. Billiau ; JCP éd. G, 2002, I, 124, n° 7, obs. G. Viney ; RTD Civ., 2002, p. 109, obs. P. Jourdain ; Cass. crim., 25 juin 2005, n° 04-84.281 (N° Lexbase : A3813HSZ) ; Resp. civ. et assur., 2005, comm. 276, note H. Groutel ; Egalement, CA Pau, 25 septembre 2006, n° 05/02614 (N° Lexbase : A3851HSG) : violence volontaires exercées un pensionnaire mineur, D., 2006, p. 1516, note A. Paulin.
(12) Cass. crim., 7 avril 2004, n° 03-86.203, FS-P+F (N° Lexbase : A0772DCL), Resp. civ. et assur., 2004, comm. 215.
(13) Cass. crim., 28 mars 2006, n° 05-82.975, F-P+F (N° Lexbase : A2217DPS), Bull. crim., 2006, n° 349 ; Resp. civ. et assur., 2006, comm. 289, note H. Groutel ; JCP éd. G, 2006, II, 10188, note J. Mouly ; Resp. civ. et assur., 2007, chron. 13, A. Vialard.
(14) Cass. civ. 2, 21 septembre 2004, n° 03-15.451 (N° Lexbase : A4228DDX), Resp. civ. et assur., 2005, comm. 2, obs. H. Groutel. V. Malabat, La responsabilité pénale du subordonné, Mélanges dédiés à B. Bouloc, D., 2006, p. 681.
(15) Cass. crim., 19 octobre 2010, n° 09-87.983 (N° Lexbase : A8498GKX), Resp. civ. et assur., 2011, comm. 46.
(16) Cass. civ. 2, 17 mars 2011, préc..
(17) Ch. Radé, Responsabilité des commettants, (Droit à réparation. Responsabilité du fait d'autrui. Domaine : Responsabilité des commettants), Resp. civ. et assur., 2007, Fasc. 143, p. 18.

Décision

Cass. civ. 2, 12 mai 2011, n° 10-20.590, FS-P+B (N° Lexbase : A1197HRR)

Cassation (CA Riom, ch. com., 12 mai 2010, n° 09/01827 N° Lexbase : A5747E7Y)

Textes visés : C. civ., art. 1384, alinéa 5 (N° Lexbase : L1490ABS) et C. proc. pén., art. 706-1 (N° Lexbase : L9596IAN)

Mots clef : responsabilité civile, employeur, commettant, abus de fonction.

Liens base : (N° Lexbase : E2888ET7)

newsid:422880

Social général

[Textes] Travail et protection sociale : les réformes éclectiques et cosmétiques de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit

Réf. : Loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 (N° Lexbase : L2893IQ9)

Lecture: 18 min

N2981BS9

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par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Rouen et Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Protection sociale"

Le 27 Mai 2011

Quand le législateur légifère sur la loi..., la loi peut alors avoir pour objet la loi elle-même, en vue notamment de "simplifier le droit" (sic) (loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003, autorisant le gouvernement à simplifier le droit N° Lexbase : L6771BHA ; loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004, de simplification du droit N° Lexbase : L4734GUU ; loi n° 2007-1787 du 20 décembre 2007, relative à la simplification du droit N° Lexbase : L5483H3H (1) ; loi n° 2009-526 du 12 mai 2009, de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures N° Lexbase : L1612IEG) et "d'amélioration de la qualité du droit" (sic) : tel est l'objet de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 (2).
Le Conseil constitutionnel a, par sa décision n° 2011-629 DC du 12 mai 2011 (N° Lexbase : A3053HQ7) (3), validé cette loi du 17 mai 2011, alors que les griefs paraissaient sérieux. Par sa complexité et son caractère hétérogène, la loi portait atteinte à l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi. De plus, aurait été méconnue l'exigence constitutionnelle de clarté et de sincérité des débats parlementaires. Le Conseil constitutionnel n'a pas été sensible à l'argumentation, estimant que la complexité de la loi et l'hétérogénéité de ses dispositions ne sauraient, à elles seules, porter atteinte à l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi (cons. 6). En revanche, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution un certain nombre de dispositions de la loi de simplification et d'amélioration de la qualité du droit : le 7° du § I de l'article 55 (Code de commerce) ; les § III et IV de l'article 62 (Code de commerce) ; le 5° de l'article 65 (propriété intellectuelle) ; le § I de l'article 127 ; l'article 187 (justice administrative) ; et, enfin, l'article 190 ( reclassements intervenus en application de la rénovation de la Convention collective nationale du 31 octobre 1951).
La loi n° 2011-525 est assurément complexe et difficile d'accès, si l'on s'en tient à ses objets. Le texte comprend des dispositions relatives aux particuliers et aux entreprises, à la protection et à la preuve de l'identité des personnes physiques, à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, à la gouvernance des entreprises, au fonctionnement des collectivités territoriales et des services de l'Etat et à des dispositifs fiscaux ; au statut des groupements d'intérêt public ; à l'urbanisme. Quant aux dispositions relatives au droit social, elles ne sont pas réductibles à un objet, ni animées d'un objectif précis, d'une volonté identifiable. Eclectique, l'ensemble n'a pas de finalité repérable, puisque les dispositions votées traitent de la réforme du régime de la rupture anticipée du CDD pour cause d'inaptitude (I), du régime du congé de présence parentale (II), du recouvrement des cotisations chômage par l'Urssaf, des comptes des syndicats, du chèque emploi-associatif et enfin du travail dissimulé (III). I - Réforme du régime de la rupture anticipée du CDD pour cause d'inaptitude

L'inaptitude du salarié engagé en contrat de travail à durée déterminée (CDD) présentait un angle mort dans l'analyse juridique, dénoncé par la Cour de cassation dans ses rapports annuels depuis 2002 : les Rapports 2002, 2004, 2005 et 2008.

Par un avis du 29 avril 2002 (4), la Cour de cassation avait déjà retenu que l'employeur d'un salarié engagé par CDD et déclaré par le médecin du travail inapte à son emploi, en conséquence d'un accident ou d'une maladie non professionnels, ne pouvait exercer l'action en résolution judiciaire, une telle action exigeant que l'inaptitude du salarié ait une origine professionnelle. Ainsi, une distorsion était créée, selon que le salarié soit inapte à son emploi en raison soit d'une maladie professionnelle ou d'un accident du travail, soit d'une maladie ou d'un accident non professionnels. Or, cette différence de traitement ne reposait sur aucune justification et plaçait le salarié et l'employeur dans une situation de blocage, le contrat étant théoriquement maintenu, mais ne pouvant être exécuté. Aussi, la Cour de cassation avait émis le souhait d'étendre la possibilité de résiliation judiciaire aux inaptitudes dont l'origine n'est pas professionnelle.

Dans son Rapport 2009, la Cour de cassation a, à nouveau, exprimé sa proposition de modification de l'article L. 1226-20 du Code du travail (N° Lexbase : L2989IQR anciennement article L. 122-32-9 N° Lexbase : L5527ACP) pour permettre l'extension de la résolution judiciaire du contrat de travail pour une inaptitude dont l'origine n'est pas professionnelle. En effet, le sort du salarié relevait de régimes différents selon que cette inaptitude soit due ou non à une maladie ou un accident professionnel.

A - Inaptitude professionnelle

Le législateur (C. trav., art. L. 1226-18 et s. N° Lexbase : L1040H9E) a mis en place un régime spécifique en cas de suspension du contrat de travail et d'inaptitude d'origine professionnelle d'un salarié recruté en contrat à durée déterminée. L'article L. 1226-20, alinéa 2 (N° Lexbase : L1045H9L), prévoit que, si l'employeur justifie de son impossibilité de proposer un emploi, dans les conditions prévues aux articles L. 1226-10 (N° Lexbase : L9617IEW) et L. 1226-11 (N° Lexbase : L1028H9X), au salarié déclaré inapte titulaire d'un tel contrat ou si le salarié refuse un emploi offert dans ces conditions, il est en droit de demander la résolution judiciaire du contrat. La juridiction saisie prononce la résolution après vérification des motifs invoqués et fixe le montant de la compensation financière due au salarié.

B - Inaptitude non professionnelle

En cas d'inaptitude d'origine non professionnelle, la Chambre sociale impose à l'employeur l'obligation de reclasser le salarié, obligation prévue par l'article L. 1226-2 du Code du travail (N° Lexbase : L1006H97) (5). Si l'employeur ne respecte pas cette obligation, le salarié pourra obtenir la résolution judiciaire du CDD aux torts de l'employeur (6).

Par un avis rendu en 2002, la Cour de cassation a refusé d'étendre le régime de l'inaptitude d'origine professionnelle à l'inaptitude ne résultant pas d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, ce cas de rupture n'étant pas prévu par la loi. A la question de savoir si l'on peut prononcer la résiliation judiciaire du CDD au motif d'une impossibilité pour les parties d'exécuter leurs obligations contractuelles jusqu'au terme du contrat, résultant d'une inaptitude physique non professionnelle, la Cour de cassation a répondu que l'employeur d'un salarié engagé par CDD, et déclaré par le médecin du travail inapte à son emploi en conséquence d'un accident ou d'une maladie non professionnels, ne peut pas exercer l'action en résolution judiciaire (prévue à l'article L. 122-32-9 du Code du travail). En effet, une telle action exige que l'inaptitude physique du salarié ait une origine professionnelle. L'employeur doit ainsi chercher à reclasser le salarié. En cas d'impossibilité de reclassement, le contrat ne peut être rompu avant son terme.

Cependant, en 2005, la Cour de cassation a permis à l'employeur, dans l'hypothèse où un salarié en CDD déclaré inapte (dont l'impossibilité de reclassement était démontrée) de ne pas rémunérer ce dernier à hauteur des salaires restant dus (7). Lorsqu'un salarié n'est pas en mesure de fournir la prestation inhérente à son contrat de travail, son employeur ne peut être tenu de lui verser un salaire, sauf disposition légale, conventionnelle ou contractuelle particulière. Si les dispositions de l'ancien article L. 122-24-4, alinéa 1er, du Code du travail (N° Lexbase : L1401G9R) relatives à l'obligation de reclassement sont applicables au contrat à durée déterminée, celles de l'alinéa 2 du même article instituant l'obligation pour l'employeur de reprendre le paiement du salaire du salarié déclaré inapte consécutivement à une maladie ou un accident et ni reclassé, ni licencié, à l'expiration du délai d'un mois à compter de l'examen médical de reprise du travail, ne sont pas applicables, le CDD ne pouvant pas être rompu par l'employeur en raison de l'inaptitude physique et de l'impossibilité du reclassement.

Enfin, la Cour de cassation a décidé, en 2003 (8), que lorsqu'un salarié n'est pas en mesure de fournir la prestation inhérente à son contrat de travail, son employeur ne peut être tenu de lui verser un salaire sauf disposition légale, conventionnelle ou contractuelle particulière. Si l'inaptitude physique du salarié ne constitue pas un cas de force majeure autorisant la rupture anticipée du contrat à durée déterminée, une telle inaptitude et l'impossibilité du reclassement de l'intéressé n'ouvrent pas droit au paiement des salaires restant à courir jusqu'au terme du contrat ni à l'attribution de dommages-intérêts compensant la perte de ceux-ci. Il en résulte que si c'est à tort que l'employeur a rompu le CDD le liant à sa salariée, celle-ci n'ayant pas droit à une rémunération dès lors qu'elle ne pouvait exercer effectivement ses fonctions ne peut prétendre qu'à l'attribution de dommages-intérêts résultant du préjudice subi.

Cette jurisprudence a été confirmée en 2010 (9) : lorsqu'un salarié n'est pas en mesure de fournir la prestation inhérente à son contrat de travail, son employeur ne peut être tenu de lui verser un salaire, sauf disposition légale, conventionnelle ou contractuelle particulière. Les dispositions de l'article L. 1226-4 du Code du travail (N° Lexbase : L1011H9C), instituant l'obligation pour l'employeur de reprendre le paiement du salaire du salarié déclaré inapte consécutivement à une maladie ou un accident et ni reclassé, ni licencié, à l'expiration du délai d'un mois à compter de l'examen médical de reprise du travail, ne sont pas applicables au CDD, celui-ci ne pouvant pas être rompu par l'employeur en raison de l'inaptitude physique et de l'impossibilité du reclassement.

C - Réforme de la loi du 17 mai 2011

La loi n° 2011-525 consacre l'inaptitude comme nouveau cas de rupture anticipée du CDD, outre la faute grave, la force majeure et l'accord des parties (C. trav., art. L. 1243-1 N° Lexbase : L2987IQP et L. 1243-4 N° Lexbase : L2988IQQ, réd. loi n° 2011-525, art. 49). Ainsi, quelle que soit l'origine de l'inaptitude (professionnelle ou non), l'employeur peut désormais rompre avant terme le CDD du salarié. L'inaptitude doit avoir été régulièrement constatée par le médecin du travail et l'employeur doit respecter son obligation de reclassement.

En cas d'impossibilité de reclasser le salarié déclaré inapte, l'employeur peut rompre de façon anticipée le CDD. Si, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date d'examen médical de reprise, le salarié en CDD déclaré inapte n'est pas reclassé et que son contrat n'a pas été rompu, l'employeur devra reprendre le versement des salaires, comme pour un salarié en CDI (C. trav., art. L. 1226-4-2 N° Lexbase : L2921IQA et L. 1226-20, alinéa 3 N° Lexbase : L2989IQR, réd. loi n° 2011-525, art. 49).

S'il s'agit d'une inaptitude faisant suite à une maladie ou un accident professionnel, les modalités spécifiques du reclassement doivent être respectées. Les délégués du personnel doivent être consultés (C. trav., art. L. 1226-20, réd. loi n° 2011-525, art. 49).

La résiliation judiciaire n'est plus possible en cas d'inaptitude d'origine professionnelle, la rupture anticipée étant désormais la seule voie envisageable (C. trav., art. L. 1226-20, réd. loi n° 2011-525, art. 49). Le recours au juge n'est donc plus nécessaire pour obtenir la rupture du CDD d'un salarié déclaré inapte à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle.

Enfin, la loi précise que lorsque le salarié déclaré inapte voit son CDD rompu de façon anticipée, il doit percevoir une indemnité de rupture dont le montant est au moins égal à celui de l'indemnité de licenciement s'il s'agit d'une inaptitude d'origine non professionnelle. Cette indemnité est doublée en cas de rupture anticipée pour inaptitude professionnelle (C. trav., art. L. 1226-4-3 N° Lexbase : L2922IQB et L. 1226-20, alinéa 4, réd. loi n° 2011-525, art. 49). Dans les deux cas, l'indemnité de précarité, correspondant en principe à 10 % des rémunérations déjà versées, s'ajoute à ce montant.

II - Régime du congé de présence parentale

Créé par la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 (loi de financement de la Sécurité sociale pour 2001 N° Lexbase : L5178AR9), le congé de présence parentale a été profondément réformé par la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005 (loi de financement de la Sécurité sociale pour 2006 N° Lexbase : L9963HDD, art. 87), complété par la circulaire DSS nº 2006-189 du 27 avril 2006 (N° Lexbase : L8222HID) (10).

A - Présentation

Le congé de présence parentale est ouvert, sans condition d'ancienneté, au salarié dont l'enfant à charge est atteint d'une maladie, d'un handicap ou victime d'un accident d'une particulière gravité rendant indispensables une présence soutenue et des soins contraignants. Est considéré comme enfant à charge l'enfant dont le salarié a la charge effective et permanente. Il doit, également, avoir moins de 21 ans et ne doit pas percevoir un salaire supérieur à 55 % du SMIC calculé sur 169 heures (soit 836,55 euros pour l'année 2011).

B - Modalités

- Congé

Le salarié peut bénéficier d'un congé de présence parentale prenant la forme d'un "compte crédit jours", s'appréciant en jours d'absence. Le congé est attribué pour une période maximale de 310 jours ouvrés (soit l'équivalent de 14 mois) par enfant et par maladie, accident ou handicap. Le salarié utilise cette réserve de 310 jours en fonction de ses besoins, espacés sur une période de 3 ans maximum. Le congé peut être pris en une ou plusieurs fois, mais aucun de ces jours ne peut être fractionné (le salarié ne peut pas, par exemple, prendre le congé par demi-journée). La durée initiale de la période au cours de laquelle le salarié peut bénéficier du congé est définie dans le certificat médical. Cette durée initiale fait l'objet d'un nouvel examen tous les 6 mois.

- Allocation journalière de présence parentale

Le salarié bénéficie également, pour chaque jour de congé, d'une allocation journalière de présence parentale, prévue initialement pour une période de trois ans (CSS, art. L. 544-1 N° Lexbase : L9605HEH à L. 544-9 N° Lexbase : L4730H93). L'allocation journalière de présence parentale est attribuée aux parents ou à toute personne qui assume la charge d'un enfant âgé de moins de 20 ans atteint d'une maladie, d'un handicap ou victime d'un accident d'une particulière gravité rendant indispensable une présence soutenue et des soins contraignants. L'allocataire perçoit, pour chaque jour de congé, une allocation journalière.

L'allocataire doit, soit interrompre ponctuellement son activité professionnelle, soit bénéficier du congé de présence parentale. Les personnes pouvant bénéficier de l'AJPP sont : les salariés du secteur privé et les agents du secteur public ; sous certaines conditions, les voyageurs représentants placiers (VRP), les employés de maison et les non-salariés ; les personnes en formation professionnelle et les demandeurs d'emploi à condition d'être indemnisés au titre de l'assurance chômage (11).

C - Renouvellement du congé

En cas de rechute ou de récidive de la pathologie de l'enfant, l'allocation de présence parentale peut être renouvelée, au-delà de la durée maximale de versement (CSS, art. L. 513-1 N° Lexbase : L4471ADX). En revanche, le salarié ne peut bénéficier qu'au maximum de 310 jours ouvrés de congé au sein d'une période maximale de trois ans, sans pouvoir prétendre à un nouveau crédit de jours de congés. Ainsi, alors que l'allocation de présence parentale peut faire l'objet d'un renouvellement en cas de rechute de l'enfant, le congé de présence parentale ne pouvait être reconduit. Une harmonisation s'imposait donc entre les deux régimes. Le dispositif en vigueur était, de l'avis même des parlementaires (12), incohérent, puisque la loi prévoit, en cas de rechute, le droit de déposer une nouvelle demande d'allocation journalière de présence parentale mais pas le droit de reconduire le congé de présence parentale, alors que le droit à la prestation est lié au congé de présence parentale.

La loi du 17 mai 2011 ouvre désormais la possibilité d'accorder, en cas de rechute de l'enfant, un nouveau congé au-delà de la période initiale de trois ans (C. trav., art. L. 1225-62 N° Lexbase : L0978H94, réd. loi du 17 mai 2011, art. 42).(13)

III - Autres réformes : assurance chômage, syndicats, chèque-emploi associatif, travail dissimulé

A - Recouvrement des cotisations chômage par l'Urssaf

- Régime en vigueur

En application de la loi n° 2008-126 du 13 février 2008 (N° Lexbase : L8051H3L) (14), les contributions d'assurance chômage sont payées, depuis le 1er janvier 2011, à l'Urssaf (décret n° 2009-1708 du 30 décembre 2009 N° Lexbase : L1864IG7, modifié par le décret n° 2010-1736 du 30 décembre 2010 N° Lexbase : L0074IPG ; circulaire Unédic n° 2011-14 du 9 mars 2011 N° Lexbase : L3656IQH). La loi n° 2008-126 a, en effet, confié aux Urssaf le recouvrement des cotisations d'assurance chômage, ainsi que des cotisations dues au titre de l'assurance de garantie des salaires (C. trav., art. L. 5422-16 N° Lexbase : L3071IQS et L. 5427-1 N° Lexbase : L3072IQT) (15). Les cotisations chômage sont recouvrées et contrôlées selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations du régime général de la sécurité sociale, le contentieux afférent étant transféré aux tribunaux des affaires de Sécurité sociale.

Ce transfert aux Urssaf présente un certain nombre d'avantages, dont la simplification des obligations des employeurs, qui ne devraient plus avoir qu'une déclaration et un paiement à effectuer à la fois pour les cotisations de sécurité sociale et celles d'assurance chômage. Compte tenu de la très grande proximité des métiers et des règles de recouvrement des cotisations du régime général de sécurité sociale et de l'assurance chômage, la réunion des deux missions devait permettre des économies d'échelle, un seul circuit se substituant à deux.

- Réforme de la loi du 17 mai 2011

Toutefois, les sommes dues dans le cadre de la convention de reclassement personnalisé et du contrat de transition professionnelle ont continué d'être versées à Pôle emploi. Afin de laisser à celui-ci une période de transition plus longue, compte tenu de la particularité de ces contributions, la loi du 17 mai 2011 a repoussé la date du transfert aux Urssaf. Initialement programmé le 1er janvier 2012, il n'aura lieu que le 1er janvier 2013 au plus tard (loi n° 2008-126 du 13 février 2008 N° Lexbase : L8051H3L, art. 11, modifié par loi du 17 mai 2011, art. 41)(16) .

Il faut préciser que ce nouveau régime accompagne le transfert du recouvrement des contributions chômage, applicable à compter du 1er janvier 2011, mais n'affecte pas le financement de la Sécurité sociale. Le dispositif ne peut donc pas figurer dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale.

B - Comptabilité des syndicats

- Présentation

La loi n° 2008-789 du 20 août 2008, portant rénovation de la démocratie sociale (N° Lexbase : L7392IAZ) (17), a fait de la transparence financière des organisations syndicales un des critères de leur représentativité. Le législateur prévu l'obligation, pour les organisations syndicales, d'établir des comptes annuels et d'assurer leur publicité.

En application de l'article L. 2135-2 du Code du travail (N° Lexbase : L5994ICY), les syndicats professionnels et leurs unions et les associations de salariés ou d'employeurs (qui contrôlent une ou plusieurs personnes morales, sans entretenir avec elles de lien d'adhésion ou d'affiliation) sont tenus, dans des conditions déterminées par décret pris après avis du Conseil national de la comptabilité : soit d'établir des comptes consolidés, soit de fournir, en annexe à leurs propres comptes, les comptes de ces personnes morales, ainsi qu'une information sur la nature du lien de contrôle. Dans ce cas, les comptes de ces personnes morales doivent avoir fait l'objet d'un contrôle légal.

Par ailleurs, l'article L. 2135-4 du Code du travail (N° Lexbase : L3751IBK) dispose que les comptes sont arrêtés par l'organe chargé de la direction et approuvés par l'assemblée générale des adhérents ou par un organe collégial de contrôle désigné par les statuts. Enfin, les syndicats professionnels ou d'employeurs, leurs unions et les associations de salariés ou d'employeurs dont les ressources dépassent un seuil fixé par décret sont tenus de nommer au moins un commissaire aux comptes et un suppléant (C. trav., art. L. 2135-6 N° Lexbase : L3754IBN).

- Réforme de la loi du 17 mai 2011

Les formalités initialement prévues se sont révélées trop contraignantes pour les syndicats dont les ressources annuelles seraient trop faibles : la loi de simplification du droit du 17 mai 2011 prévoit donc une présentation simplifiée des comptes, et ce en particulier pour les petites structures (C. trav., art. L. 2135-1 N° Lexbase : L3080IQ7, réd. loi n° 2011-525, art. 44) (18). En principe, les syndicats professionnels et leurs unions ainsi que les associations de salariés et d'employeurs seront soumis aux obligations comptables définies à l'article L. 123-12 du Code de commerce (N° Lexbase : L5570AI7), c'est-à-dire au droit commun de la tenue de comptes des entreprises. Ils devront ainsi procéder à l'enregistrement comptable des mouvements affectant leur patrimoine, contrôler par inventaire, au moins une fois tous les 12 mois, l'existence et la valeur des éléments constituant leur patrimoine et établir des comptes annuels à la clôture de l'exercice. Ces comptes annuels devront comprendre un bilan, un compte de résultat et une annexe, selon des modalités définies par le règlement de l'Autorité des normes comptables.

Ces formalités seront encore plus allégées pour les syndicats dont les ressources n'excèdent pas un certain seuil. Deux possibilités seront alors envisageables :

- les syndicats, unions et associations dont les ressources n'excèdent pas un seuil qui sera fixé par décret (a priori 250 000 euros) auront la possibilité de tenir des comptes simplifiés en n'enregistrant leurs créances et leurs dettes qu'à la clôture de l'exercice ;

- les syndicats, unions et associations dont les ressources n'excèdent pas un second seuil, également fixé par décret (a priori 3 000 euros) pourront tenir un livre enregistrement chronologiquement l'ensemble des mouvements de leur patrimoine.

C - Chèque emploi-associatif

1 - Présentation

A l'instar du chèque-emploi service universel (Cesu) destiné aux particuliers employeurs, le chèque emploi-associatif vise à simplifier les formalités administratives qui s'attachent à l'embauche d'un salarié par une association à but non lucratif. Défini par les articles L. 1272-1 (N° Lexbase : L1789H97) à L. 1272-5 (N° Lexbase : L3077IQZ) du Code du travail, le chèque-emploi associatif peut être utilisé par les associations à but non lucratif employant neuf salariés au plus et les associations de financement électoral, quel que soit le nombre de leurs salariés. Le chèque-emploi associatif peut être utilisé pour rémunérer des salariés et simplifier les déclarations et paiements des cotisations et contributions dues aux régimes obligatoires de Sécurité sociale, au régime d'assurance chômage et aux institutions de retraites complémentaires et de prévoyance. Il ne peut être utilisé qu'avec l'accord du salarié et qu'il se substitue à la remise du bulletin de paie.

La rémunération portée sur le chèque-emploi associatif inclut une indemnité de congés payés dont le montant est égal au dixième de la rémunération totale brute due au salarié pour les prestations réalisées.

2 - Réforme de la loi du 17 mai 2011

Les salariés rémunérés en chèques emploi-associatif sont désormais soumis aux règles de droit commun en matière de congés payés (C. trav., art. L. 1272-3, alinéa 3 N° Lexbase : L1792H9A supprimé par la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, art. 43). Dès lors que le salarié effectue au moins dix jours de travail effectif, il a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois travaillé (19).

Cette prise de congés effective se substitue à l'indemnité de congés payés dont le montant est égal au dixième de la rémunération totale brute due au salarié pour les prestations réalisées. Cette disposition n'est pas applicable aux salariés bénéficiant du chèque emploi service universel, dont les rémunérations continuent d'inclure l'indemnité de congés payés.

Cette modification vise notamment la conformité du chèque-emploi associatif avec la Directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003 (N° Lexbase : L5806DLM), concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail. L'article 7 de cette directive précise que les Etats membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie d'un congé annuel payé d'au moins quatre semaines et que la période minimale de congé annuel payé ne peut être remplacée par une indemnité financière, sauf en cas de fin de relation de travail.

Enfin, les travaux parlementaires (20) ont montré qu'à l'origine, le chèque-emploi associatif ne devait être utilisé que par de toutes petites associations, employant au plus un équivalent temps plein. Intégrer une indemnité de congés payés dans la rémunération du salarié permettait à l'employeur de remplir sans difficulté ses obligations en matière de congés payés même en cas de relation de travail de courte durée. Le champ des associations pouvant recourir à ce chèque a cependant été progressivement élargi. Une association employant neuf personnes est une structure déjà d'une certaine importance et il paraît raisonnable de lui demander d'appliquer le droit commun des congés payés.

D - Travail dissimulé

1 - Régime en vigueur

La personne publique informée que son cocontractant a recours au travail dissimulé peut résilier le contrat si la situation n'est pas régularisée. Comme le relèvent les travaux parlementaires (21), les personnes publiques usent cependant rarement de cette faculté : une telle résiliation les pénalise en effet presque autant que l'entreprise qu'elles cherchent à sanctionner. Une collectivité qui résilie, par exemple, un contrat passé pour la construction d'un équipement public doit lancer un nouveau marché, ce qui peut faire prendre beaucoup de retard à son projet.

2 - Réforme de la loi du 17 mai 2011

L'article 93 de la loi n° 2011-525 donne une nouvelle rédaction de l'article L. 8222-6 du Code du travail (N° Lexbase : L3156IQX) relatif aux obligations des personnes morales de droit public lorsque les personnes ou les entreprises avec lesquelles elles contractent méconnaissent leurs obligations en matière de travail dissimulé. L'objectif, comme le rappelle le Conseil constitutionnel (infra), est de responsabiliser les personnes morales de droit public quant au respect, par leurs contractants, de l'interdiction du travail dissimulé (cons. 13).

Désormais, tout contrat écrit conclu par une personne morale de droit public doit comporter une clause stipulant que des pénalités peuvent être infligées au cocontractant s'il ne s'acquitte pas des formalités (mentionnées aux articles L. 8221-3 N° Lexbase : L3593H9X à L. 8221-5 N° Lexbase : L9736INW du Code du travail). Le montant des pénalités est égal à 10 % du montant du contrat et ne peut excéder celui des amendes encourues en application des articles L. 8224-1 (N° Lexbase : L3622H9Z 45 000 euros d'amende en cas de recours au travail dissimulé), L. 8224-2 (N° Lexbase : L3624H94 75 000 euros d'amende en cas de travail dissimulé d'un mineur soumis à l'obligation scolaire) et L. 8224-5 du Code du travail (N° Lexbase : L3629H9B).

Toute personne morale de droit public ayant contracté avec une entreprise, informée par écrit par un agent de contrôle de la situation irrégulière de cette dernière au regard des formalités (mentionnées aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5), l'enjoint aussitôt de faire cesser cette situation. L'entreprise ainsi mise en demeure apporte à la personne morale de droit public la preuve qu'elle a mis fin à la situation délictuelle.

La personne morale de droit public transmet, sans délai, à l'agent auteur du signalement les éléments de réponse communiqués par l'entreprise ou l'informe d'une absence de réponse. A défaut de correction des irrégularités signalées dans un délai (fixé par décret en Conseil d'Etat), la personne morale de droit public en informe l'agent auteur du signalement et peut appliquer les pénalités prévues par le contrat ou rompre le contrat, sans indemnité, aux frais et risques de l'entrepreneur. A défaut de respecter les obligations (supra), la personne morale de droit public est tenue solidairement responsable des sommes dues au titre des 1° et 3° de l'article L. 8222-2 (N° Lexbase : L3605H9E), dans les conditions prévues à l'article L. 8222-3 (N° Lexbase : L3607H9H).

3 - Validation par le Conseil constitutionnel

Les sénateurs requérants faisaient grief à la loi de simplification du droit d'instituer un dispositif de pénalités contractuelles applicable en cas de méconnaissance, par le contractant d'une personne morale de droit public, de ses obligations en matière de travail dissimulé : or, la loi de simplification du droit permettrait une contractualisation de la responsabilité pénale, méconnaissant l'exigence selon laquelle nul ne saurait être exonéré de toute responsabilité personnelle (principe que le Conseil constitutionnel a rappelé à plusieurs reprises et, dernièrement, dans sa décision sur la loi organique relative au Défenseur des droits (22)).

Le Conseil constitutionnel a écarté le grief d'inconstitutionnalité (décision n° 2011-629, cons. 13). En effet, aucune exigence constitutionnelle ne s'oppose à ce que les contrats conclus par une personne morale de droit public assortissent de pénalités contractuelles la méconnaissance, par le contractant, de ses obligations légales en matière de travail dissimulé. Les dispositions contestées sont sans incidence sur la mise en jeu de la responsabilité pénale des contractants.


(1) Assemblée nationale, Rapport de M. E. Blanc, au nom de la commission des lois, n° 244 ; Sénat, Rapport de B. Saugey, au nom de la commission des lois, n° 36 (2007-2008) ; Assemblée nationale, Rapport de E. Blanc, au nom de la commission des lois, n° 419.
(2) E. Blanc, Rapport Assemblée nationale, au nom de la commission des lois, n° 2095, 24 novembre 2009 ; O. Carré, Avis Assemblée nationale, au nom de la commission des finances, n° 2078 ; B. Saugey, Rapport Sénat, au nom de la commission des lois, n° 20 (2010-2011) ; F. Henneron, au nom de la commission des affaires sociales, Avis sénat n° 3 (2010-2011) ; P. Bordier, au nom de la commission de la culture, Avis Sénat n° 5 (2010-2011) ; H. Maurey, au nom de la commission de l'économie, Avis n° 6 (2010-2011) ; B. Saugey, Sénat, au nom de la commission des lois, n° 341 (2010-2011) ; H. Maurey, au nom de la commission de l'économie, Avis Sénat n° 334 (2010-2011) ; Assemblée nationale, Rapport E. Blanc, au nom de la commission mixte paritaire, n° 3312 ; B. Saugey, Sénat, Rapport au nom de la commission mixte paritaire, n° 404 (2010-2011).
(3) Liaisons Sociales Quotidien n° 15858 du 16 mai 2011 ; Semaine Sociale Lamy n° 1490 du 2 mai 2011.
(4) Cass. avis, 29 avr. 2002, n° 02-00.001 (N° Lexbase : A1114A4Z), Bull. 2002, avis n° 3 p. 3.
(5) Cass. soc., 28 mars 2006, n° 04-41.266, F-D (N° Lexbase : A8615DNE).
(6) Cass. soc., 26 novembre 2008, n° 07-40.802, F-P+B (N° Lexbase : A4653EBX) et les obs. de Ch. Radé, CDD et résolution judiciaire pour manquement à l'obligation de reclassement : les juges du fond doivent caractériser la faute grave, Lexbase Hebdo n° 330 du 12 décembre 2008 - édition sociale (N° Lexbase : N9173BH9).
(7) Cass. soc., 8 juin 2005, n° 03-44.913, FS-P+B (N° Lexbase : A6518DIA), Bull. civ. V n° 193 p. 171 ; v. les obs de S. Martin-Cuenot, Inaptitude : exclusion partielle du salarié sous CDD du bénéfice de la protection, Lexbase Hebdo n° 173 du 23 juin 2005 - édition sociale (N° Lexbase : N5635AIK).
(8) Cass. soc., 18 novembre 2003, n° 01-44.280 (N° Lexbase : A1843DAI), Bull. civ. V n° 285 p. 288.
(9) Cass. soc., 19 mai 2010, n° 09-40.633, F-D (N° Lexbase : A3901EXR), v. les obs. de S. Tourneaux, L'incompatibilité persistante entre inaptitude physique et CDD, Lexbase Hebdo n° 397 du 3 juin 2010 - édition sociale (N° Lexbase : N2203BPB).
(10) E. Blanc, Rapport Assemblée nationale, n° 2095, préc..
(11) Il s'agit des demandeurs d'emploi qui exercent une activité professionnelle réduite et qui sont titulaires d'un congé de présence parentale. Le bénéfice de l'allocation suspend le décompte des droits au chômage. Celui-ci reprend à la fin du congé de présence parentale et est poursuivi jusqu'à son terme. Pour les demandeurs d'emploi qui suspendent leur recherche d'emploi ou interrompent leur formation, une allocation forfaitaire mensuelle leur est versée.
(12) E. Blanc, Rapport Assemblée nationale, n° 2095, préc..
(13) F. Henneron, Avis Sénat n° 3 (2010-2011), prec. Selon la direction de la sécurité sociale, près de 4 500 familles ont bénéficié en 2009 d'une AJPP, pour un coût total de 52 millions d'euros.
(14) Y. Albarello, Avis Assemblée nationale n° 599, 15 janvier 2008 ; J.-M. Boulanger, Contribution à la préparation de la convention tripartite entre l'Etat, l'Unédic et la nouvelle institution créée par la loi du 13 février 2008, Ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, avril 2008 ; C. Procaccia, Rapport Sénat n° 154 (2007-2008), 8 janvier 2008 ; Y. Rousseau, Sur la fusion de l'ANPE et des Assedic, Dr. soc., 2008, p. 151 ; D. Tian, Rapport Assemblée Nationale n° 600, 15 janvier 2008 ; D. Tian et C. Procaccia, Rapport Assemblée Nationale n° 661, 30 janvier 2008 ; O. Troche (rapporteur), Rapport du groupe de travail DGEFP/Unédic/ANPE/CGEFI relatif à la préparation de la fusion de l'ANPE et du réseau de l'assurance chômage, IGAS, rapport RM 2008-019 P, février 2008 ; M. Véricel, La loi du 13 février 2008 et la nouvelle réforme de l'organisation du service de l'emploi, Dr. soc., 2008, p. 406 ; Ch. Willmann, Fusion ANPE-Unédic et nouveaux droits/devoirs du demandeur d'emploi : deux lois (lois du 13 février 2008 et du 1er août 2008) pour une même logique, JCP éd. S, 2008, n° 1475.
(15) Depuis le 1er janvier 2011, les contributions d'assurance chômage et les cotisations AGS dues par les employeurs visés à l'article L. 5422-13 du Code du travail (N° Lexbase : L2771H9I) sont recouvrées, pour le compte du régime d'assurance chômage, par les organismes de la branche du recouvrement du régime général de Sécurité sociale, à l'exception :
- des contributions et cotisations dues au titre de l'emploi de salariés expatriés et de salariés intermittents du spectacle, recouvrées par Pôle emploi,
- des contributions et cotisations dues au titre de l'emploi de salariés relevant du régime agricole, recouvrées par les Caisses de mutualité sociale agricole (CMSA),
- des contributions et cotisations dues au titre de l'emploi de salariés VRP multicartes, recouvrées par la Caisse nationale de Compensation des cotisations de Sécurité sociale des VRP multicartes (CCVRP),
- des contributions et cotisations dues au titre de l'emploi de salariés à Saint-Pierre et Miquelon, recouvrées par la Caisse de prévoyance sociale (CPS),
- des contributions dues au titre de l'emploi de salariés sur le territoire monégasque, recouvrées par la Caisse de compensation des services sociaux (CCSS).
Par ailleurs, les contributions dues au titre de la convention de reclassement personnalisé (CRP) demeurent recouvrées par Pôle emploi.
(16) E. Blanc, Rapport Assemblée nationale, n° 3112, préc..
(17) Edition spéciale sur la réforme du temps de travail, Lexbase Hebdo n° 318 du 18 septembre 2008 - édition sociale (N° Lexbase : N1826BH4) ; v. les obs de G. Auzero, Loi du 20 août 2008 et réforme de la démocratie sociale : nouvelles précisions sur le droit transitoire (Cass. soc., 10 février 2010, n° 09-60.244, FS-P+B (N° Lexbase : A7875ER4), Lexbase Hebdo n° 384 du 25 février 2010 - édition sociale (N° Lexbase : N2502BNY) et v. les obs. de Ch. Radé, Loi du 20 août 2008 et réforme de la démocratie sociale : premières précisions sur le droit transitoire et les règles applicables à la section syndicale, Lexbase Hebdo n° 360 du 22 juillet 2009 - édition sociale (N° Lexbase : N1143BLW).
(18) E. Blanc, Rapport Assemblée nationale n° 2095, préc..
(19) E. Blanc, Rapport Assemblée nationale, n° 3112, préc. ; F. Henneron, Avis Sénat n° 3 (2010-2011), préc..
(20) F. Henneron, Avis Sénat n° 3 (2010-2011), préc..
(21) F. Henneron, Avis Sénat n° 3 (2010-2011), préc..
(22) Cons. const., 29 mars 2011, n° 2011-626 DC, loi organique relative au Défenseur des droits (N° Lexbase : A4851HKU), cons. 6.

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