La simple utilisation d'un site internet par le commerçant ne déclenche pas en elle-même l'application des règles de compétence protectrices à l'égard des consommateurs des autres Etats membres. Telle est la précision apportée par la CJUE dans un arrêt du 7 décembre 2010 (CJUE, 7 décembre 2010, aff. C-585/08
N° Lexbase : A4957GMK). En l'espèce, l'
Oberster Gerichtshof (Cour suprême autrichienne), saisie de deux affaires, a interrogé la Cour de justice afin de savoir si le fait qu'une société établie dans un Etat membre offre ses services par internet implique qu'ils "sont dirigés" également vers d'autres Etats membres, au sens du Règlement n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 (
N° Lexbase : L7541A8S). Pour répondre par la négative, la Cour considère que, aux fins de l'applicabilité de ces règles à l'égard des consommateurs des autres Etats membres, le commerçant doit avoir manifesté sa volonté d'établir des relations commerciales avec ceux-ci. Dans ce contexte, la Cour procède à une recherche des indices permettant de démontrer que le commerçant envisageait de commercer avec des consommateurs domiciliés dans d'autres Etats membres. Figurent au nombre de ces indices, les expressions manifestes de la volonté du commerçant de démarcher ces consommateurs, par exemple, lorsqu'il offre ses services ou ses biens dans plusieurs Etats membres nommément désignés. Néanmoins, d'autres indices moins patents, éventuellement combinés les uns aux autres, sont également susceptibles de démontrer l'existence d'une activité "dirigée vers" l'Etat membre du domicile du consommateur. Il s'agit notamment de la nature internationale de l'activité en cause, telle que certaines activités touristiques, la mention de coordonnées téléphoniques avec l'indication du préfixe international, l'utilisation d'un nom de domaine de premier niveau autre que celui de l'Etat membre où le commerçant est établi, l'utilisation de noms de domaine de premier niveau neutres ou encore la mention d'une clientèle internationale composée de clients domiciliés dans différents Etats membres. De même, si le site internet permet aux consommateurs d'utiliser une autre langue ou une autre monnaie que celles habituellement utilisées dans l'Etat membre du commerçant, ces éléments peuvent constituer des indices démontrant l'activité transfrontalière. En revanche, ne constituent pas de tels indices, la mention sur un site internet de l'adresse électronique ou géographique du commerçant, ni l'indication de ses coordonnées téléphoniques sans préfixe international car ces informations ne précisent pas si le commerçant dirige son activité vers un ou plusieurs Etats membres. La Cour conclut que, eu égard à ces indices, la juridiction autrichienne doit vérifier s'il ressort du site internet et de l'activité globale des commerçants que ceux-ci envisageaient de commercer avec des consommateurs autrichiens ou allemands en ce sens qu'ils étaient disposés à conclure un contrat avec eux.
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