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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la rédaction
Le 27 Mars 2014
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Réf. : Cass. soc., 13 septembre 2005, n° 04-40.135, Société Crédit lyonnais c/ Mme Corinne Rechaussat, FS-P+B (N° Lexbase : A4536DK9)
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N8886AIX
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par Christophe Radé, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition sociale
Le 07 Octobre 2010
Décision
Cass. soc., 13 septembre 2005, n° 04-40.135, Société Crédit lyonnais c/ Mme Corinne Rechaussat, FS-P+B (N° Lexbase : A4536DK9) Cassation partielle (CA Paris, 22ème chambre, section B, 14 novembre 2003) Textes visés : C. civ., art. 1134 (N° Lexbase : L1234ABC) ; C. trav., art. L. 121-1, al. 1er (N° Lexbase : L5443ACL) ; C. trav., art. L. 321-1, al. 2 (N° Lexbase : L8921G7K) Mots clefs : accords de rupture amiable ; motif économique ; validité ; priorité de réembauchage. Liens bases : ; |
Résumé
La rupture d'un contrat de travail pour motif économique peut résulter d'un départ volontaire dans le cadre d'un accord collectif mis en oeuvre après consultation du comité d'entreprise et constitue une résiliation amiable du contrat de travail. |
Faits
1. Le Crédit lyonnais a conclu le 12 décembre 1996 avec certaines organisations syndicales un accord social pour l'emploi qui prévoyait des mesures destinées à favoriser les départs volontaires. Mme Rechaussat, salariée de la société Crédit lyonnais depuis le 17 août 1976, a demandé le bénéfice de ces mesures. Son projet professionnel de reconversion ayant été validé par le Crédit lyonnais, elle a quitté son emploi le 31 janvier 1999. Elle a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la requalification de la convention de départ négocié en licenciement sans cause réelle et sérieuse et une indemnité pour non-respect de la priorité de réembauchage. 2. La cour d'appel de Paris a décidé que la rupture du contrat de travail s'analysait en un licenciement pour motif économique sans cause réelle et sérieuse. |
Solution
1. Sur le bénéfice de la priorité de réembauchage : "En vertu de l'article L. 321-1, alinéa 2, du Code du travail, les dispositions d'ordre public des articles L. 321-1 à L. 321-15 de ce Code sont applicables à toute rupture de contrat de travail pour motif économique ; qu'il en résulte que le salarié ayant accepté un départ volontaire négocié avec son employeur dans le cadre d'un accord collectif bénéficie de la priorité de réembauchage ; que la cour d'appel, qui a retenu à bon droit que le contrat de travail avait été rompu pour un motif économique, a pu décider que la priorité de réembauchage prévue par l'article L. 321-14 du Code du travail pouvait être invoquée par l'intéressée ; que le moyen n'est pas fondé". 2. Sur la requalification de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse : "Pour décider que la rupture du contrat de travail s'analysait en un licenciement pour motif économique, l'arrêt attaqué retient que, confronté à de graves difficultés économiques, le Crédit lyonnais a élaboré un plan d'adaptation de l'emploi envisageant la réduction des effectifs par des suppressions d'emplois et conclu avec les syndicats un accord prévoyant des mesures d'accompagnement de ce plan ; que dans ce contexte, c'est l'employeur qui a pris l'initiative de rompre le contrat de travail et la salariée s'est contentée de solliciter le bénéfice du plan et de négocier les conséquences de la rupture ; qu'il ne peut dès lors être affirmé que cette rupture relève d'un commun accord des parties, la salariée n'ayant jamais envisagé, avant l'élaboration du plan, de quitter l'entreprise ; qu'en l'absence de motifs énoncés dans la lettre de validation du projet de départ de la salariée, le licenciement ne procède pas d'une cause réelle et sérieuse". "La rupture d'un contrat de travail pour motif économique peut résulter d'un départ volontaire dans le cadre d'un accord collectif mis en oeuvre après consultation du comité d'entreprise ; que cette rupture constitue une résiliation amiable du contrat de travail". "En statuant comme elle l'a fait, alors qu'elle avait constaté que le départ volontaire de la salariée entrait dans le cadre de l'accord social du 12 décembre 1996 qui avait fait l'objet d'une consultation du comité central d'entreprise, la cour d'appel a violé les textes susvisés". Cassation et renvoi sur ce motif. |
Commentaire
1. Une solution sans surprise 1.1. La validité de l'accord de rupture amiable pour motif économique
Le Code du travail n'a pas consacré, d'une manière générale, l'accord de rupture amiable comme un mode de rupture à part entière du contrat de travail. Considérant pourtant que cette technique n'avait pas été formellement écartée par le Code du travail et que l'article 1134 du Code civil (N° Lexbase : L1234ABC) avait vocation à s'appliquer au contrat de travail, par renvoi de l'article L. 121-1, alinéa 1er, du Code du travail (N° Lexbase : L5443ACL) ("Le contrat de travail est soumis aux règles du droit commun", visé dans l'arrêt du 13 septembre commenté), la jurisprudence l'admet classiquement comme mode de rupture. Cette admission n'est toutefois pas inconditionnelle et la Cour de cassation a adapté les règles du Code civil aux particularités du droit du travail, singulièrement lorsqu'un tel accord s'inscrit dans un processus plus large de mesures touchant l'emploi dans une entreprise confrontée à des difficultés économiques. C'est ainsi que le 2 décembre 2003, la Chambre sociale de la Cour de cassation rappelait ce principe, mais entourait l'"accord de rupture amiable pour motif économique" de nombreuses garanties, distinguant nettement deux cas de figure, selon que l'entreprise mettait en oeuvre un accord d'entreprise ou non (Cass. soc., 2 décembre 2003, n° 01-46.176, FP-P+B+R+I N° Lexbase : A3401DA9 ; Cass. soc., 2 décembre 2003, n° 01-46.540, FP-P+B+R+I N° Lexbase : A3402DAA, notre chron., Le triomphe de l'accord de rupture amiable du contrat de travail, Lexbase Hebdo n° 98 du 11 décembre 2003 - édition sociale N° Lexbase : N9682AAT). Dans un premier arrêt concernant le licenciement de trois salariés (Cass. soc., 2 décembre 2003, n° 01-46.176, FP-P+B+R+I N° Lexbase : A3401DA9), la Haute juridiction semblait lier la validité du recours à l'accord de rupture amiable au fait que, sur le plan individuel, l'accord avait été proposé par le salarié, dans son intérêt et pour exercer une autre activité, qu'il n'existait aucun litige entre les parties, que ses droits indemnitaires avaient été préservés et que, sur le plan collectif, le comité d'entreprise avait été consulté sur le projet de licenciement économique. Dans le second arrêt qui concernait une entreprise ayant négocié un accord sur la réduction des effectifs (Cass. soc., 2 décembre 2003, n° 01-46.540, FP-P+B+R+I N° Lexbase : A3402DAA), la Cour de cassation avait également validé le recours aux accords de rupture amiable après avoir relevé qu'en l'espèce, le départ volontaire s'inscrivait "dans le cadre d'un accord collectif mis en oeuvre après consultation du comité d'entreprise".
C'est à cette seconde hypothèse que se rattache ce nouvel arrêt rendu par la Chambre sociale de la Cour de cassation le 13 septembre 2005, qui concernait également le Crédit lyonnais. Dans cette affaire, une salariée avait quitté l'entreprise dans le prolongement d'un accord d'entreprise, après avoir conclu un accord de rupture amiable. S'étant ravisée, elle avait demandé à ce que la rupture du contrat de travail soit requalifiée en licenciement, par hypothèse sans cause réelle et sérieuse puisque la procédure afférente n'avait pas été respectée. La cour d'appel avait fait droit à sa demande, après avoir relevé que le départ de la salariée s'inscrivait dans un plan plus général de réduction des effectifs, qu'elle avait quitté l'entreprise à la demande de l'employeur et qu'elle n'avait, en réalité, fait qu'adhérer à cette proposition. Sur ce point, l'arrêt est cassé, la Cour de cassation rappelant les termes de sa précédente décision du 2 décembre 2003 : la rupture d'un commun accord d'un contrat de travail pour motif économique peut résulter d'un départ volontaire dans le cadre d'un accord collectif mis en oeuvre après consultation du comité d'entreprise. La solution n'est donc pas surprenante, la Cour confirmant ici son désir de ne pas dissuader les entreprises de recourir au volontariat tout en entourant cette pratique de garanties suffisantes. La Haute juridiction prend, en effet, la peine de rappeler que l'accord amiable avait été conclu dans le cadre d'un accord collectif mis en oeuvre après consultation du comité d'entreprise. En d'autres termes, la préservation des droits des salariés est assurée par la négociation collective de l'accord conclu avec les syndicats et par le comité d'entreprise qui veille, également, à ce que les salariés ne soient pas lésés. 1.2. Le régime de l'accord de rupture amiable pour motif économique
Afin d'éviter que le recours aux accords de rupture amiable ne permette aux entreprises de faire l'économie des règles préservant les droits des salariés dans le cadre de licenciements collectifs, la loi du 29 juillet 1992 (loi n° 92-722 du 29 juillet 1992 portant adaptation de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 relative au revenu minimum d'insertion et relative à la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale et professionnelle N° Lexbase : L7461AI8) a complété l'article L. 321-1 du Code du travail et impose à l'entreprise le respect des dispositions des articles L. 321-1 (N° Lexbase : L8921G7K) à L. 321-17 (N° Lexbase : L8932G7X) du Code du travail. L'application de ces règles garantit ainsi au salarié le respect de droits individuels (obligation de reclassement, d'adaptation, de formation, critères du licenciement, modification du contrat de travail, etc.) et collectifs (mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi imposée y compris lorsque les ruptures envisagées sont qualifiées de départs volontaires, principe maintenu d'ailleurs lors de l'élaboration de la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005).
Parmi ces dispositions qui doivent s'appliquer aux salariés qui quittent "volontairement" l'entreprise, figure également le droit à la priorité de réembauchage de l'article L. 321-14 du Code du travail (N° Lexbase : L9592GQC), directement incluse dans les règles qui doivent s'appliquer, conformément au principe d'assimilation des départs négociés aux licenciements économiques. C'est donc sans surprise que la Chambre sociale de la Cour de cassation confirme sur ce point la cour d'appel qui avait fait d'ailleurs application d'une jurisprudence constante (Cass. soc., 10 mai 1999, n° 96-19.828, Fédération française des syndicats CFDT banques et sociétés c/ Société générale et autre, publié N° Lexbase : A4551AGN, Dr. soc. 1999, p. 736, obs. B. Gauriau). 2. Une solution qui illustre l'incongruité de l'accord de rupture amiable pour motif économique
Il pourrait paraître utile de reprendre ici le débat sur l'admission de l'accord de rupture amiable comme mode de rupture du contrat de travail, notamment dans le cadre d'un vaste plan de suppression d'emplois. Ce débat, essentiellement dogmatique, n'aurait plus d'intérêt dans la mesure où la messe semble, sur ce point, avoir été dite. Par ailleurs, la réforme intervenue le 29 juillet 1992 assimile, dans ses effets, l'accord de rupture amiable au licenciement économique, de telle sorte que l'enjeu de la qualification pourrait finalement sembler minime.
Pourtant, la solution retenue illustre parfaitement, selon nous, la totale incongruité de l'accord de rupture amiable, singulièrement lorsqu'il s'inscrit dans le cadre d'un plan de réduction des effectifs. Comment peut-on parler d'"accord" de rupture lorsque l'entreprise annonce, dans le cadre d'un plan global, qu'elle entend se séparer d'un certain nombre de salariés ? De quelle liberté réelle les salariés disposent-ils ? La situation de l'accord de rupture amiable en matière économique semble d'ailleurs très en retrait par rapport à celle de l'accord conclu "pour un motif personnel". Dans cette dernière hypothèse, on sait que l'employeur ne peut y recourir à la place d'un licenciement ordinaire, c'est-à-dire dès lors qu'il pourrait invoquer contre le salarié une cause réelle et sérieuse justifiant un licenciement ; l'accord est alors requalifié en "transaction" et annulé puisque aucun licenciement n'est préalablement intervenu (Cass. soc., 19 novembre 1996, n° 93-41.745, Mme Duglio c/ Société Angel Boutonnerie lyonnaise, publié N° Lexbase : A4002AAH). Pourquoi, dès lors, interdire le recours à l'accord de rupture amiable lorsque l'employeur pourrait faire valoir une cause réelle et sérieuse "personnelle" et l'admettre alors qu'il pourrait également faire valoir une cause réelle et sérieuse "économique" ? Pourquoi ne pas traiter de manière identique tous les accords de rupture amiable et imposer le respect des règles du licenciement lorsque cet accord s'inscrit dans cette perspective, comme une alternative ? Les zélateurs de l'accord de rupture amiable objecteront que les risques de contournement des règles du licenciement économique sont quasiment nuls, précisément parce que la loi les soumet au même régime que les licenciements économiques. Mais alors, puisque les règles sont les mêmes, à quoi bon continuer à admettre le recours aux accords de rupture amiable dans un contexte où l'entreprise procède par ailleurs à des licenciements économiques ? Pourquoi admettre le recours à une technique qui n'a, finalement, que peu d'intérêt pour l'entreprise, puisqu'elle ne lui épargne pas le respect du Livre III, et qui vient concurrencer le licenciement économique lui-même ? |
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Réf. : CE 9° et 10° s-s, 10 août 2005, n° 259741, M. Sarteur c/ Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie (N° Lexbase : A3775DKZ)
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N8974AI9
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par Daniel Faucher, Consultant au CRIDON de Paris
Le 21 Octobre 2014
L'article 14 de la CESDH interdit toute discrimination dans la jouissance des droits et liberté reconnus par la convention. En effet selon ce texte "la jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation". Pour pouvoir invoquer cette disposition, une personne doit démontrer qu'un droit dont l'existence est reconnue par la convention européenne est affecté par la discrimination prétextée. Cependant, selon la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), le contentieux fiscal échappe au champ des droits et obligations de caractère civil de l'article 6 de la convention (N° Lexbase : L7558AIR) (CEDH, 12 juillet 2001, Req. 44759/98, Ferrazzini c/ Italie N° Lexbase : A7683AWH ; lire Table ronde : libertés fondamentales, non-discrimination, conventions fiscales bilatérales, Lexbase Hebdo n° 78, du 3 juillet 2003 - édition fiscale N° Lexbase : N7973AAK).
1.1 L'avancée initiée par le Conseil d'Etat
Suivant les conclusions rendues par son commissaire du Gouvernement, François Séners, le Conseil d'Etat a posé comme principe que les dispositions combinées de l'article 14 de la convention et 1er du premier protocole additionnel, selon lequel "toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens", peuvent être utilement invoquées pour soutenir que la loi fiscale serait à l'origine de discriminations injustifiées entre contribuables (CE du 12 avril 2002, n° 239693, avis "Financière Labeyrie" N° Lexbase : A6303AY4 ; lire L'intérêt de retard est-il... légal ? : quelques remarques sur une matinée-débats consacrée à l'avis "Financière Labeyrie" du Conseil d'Etat, rendu le 12 avril 2002, Lexbase Hebdo n° 28, du 20 juin 2002 - édition fiscale N° Lexbase : N3232AAX ; lire également Jean-Marc Priol, Taxes foncières : invocabilité de l'article 14 de la CESDH, Lexbase Hebdo n° 76, du 19 juin 2003 - édition fiscale N° Lexbase : N7855AA8). Ainsi, le juge ouvrait une nouvelle possibilité de contester la loi fiscale, puisque le respect du principe d'égalité devant les charges publiques ne peut être revendiqué devant le juge de l'impôt contre des impositions régulièrement établies. On sait que ce contrôle de la constitutionnalité ne peut être effectué que par voie d'action devant le Conseil constitutionnel.
1.2 Les limites
En l'espèce, la question posée aux Sages du Palais Royal, à laquelle une réponse négative a été donnée, portait sur l'application du principe de non-discrimination à la différence de traitement en matière d'intérêts de retard, selon que le débiteur est l'Etat ou le contribuable. On sait que le taux de l'intérêt de retard dû par le contribuable qui ne s'acquitte pas dans les délais de sa dette fiscale est fixé à 9 % l'an et que le taux des intérêts dits moratoires lorsqu'ils sont dus, par exemple, par l'Etat à un contribuable qui a obtenu un dégrèvement à la suite d'une procédure contentieuse est fixé à 2,05 % l'an. Le Conseil a donc refusé que l'article 14 puisse concerner une discrimination, qualifiée de "verticale" entre l'Etat et les citoyens et limitait son application à la discrimination qualifiée d'"horizontale" entre contribuables placés dans la même situation. Selon lui, contrairement aux conclusions de son commissaire, les dispositions de l'article 14 de la CESDH et de l'article 1er de son premier protocole additionnel sont sans portée dans les rapports institués entre la puissance publique et un contribuable à l'occasion de l'établissement et du recouvrement de l'impôt.
2. Application concrète des dispositions de l'article 14 de la convention
Avant l'entrée en vigueur de l'article 35 de la loi de finances rectificative pour 1994, l'article L. 209 du LPF prévoyait que les contribuables qui avaient contesté une cotisation d'impôt direct établie à la suite d'un redressement pour laquelle ils avaient obtenu le sursis de paiement, devaient payer des intérêts moratoires à l'Etat, lorsqu'une juridiction rendait une décision qui leur était défavorable. Une interprétation littérale de cette rédaction conduisait à exclure du champ d'application du texte, et donc écarter l'exigibilité d'intérêts en cas de décision défavorable, les contribuables qui, ayant demandé le sursis, ne l'avaient pas obtenu faute d'avoir présenté des garanties suffisantes. Or, dans cette situation le comptable ne pouvait prendre à leur encontre que des mesures conservatoires, sans pouvoir procéder à des mesures d'exécution lui permettant de recouvrer la créance fiscale. La loi de finances rectificative pour 1994 a donc précisé que les intérêts moratoires prévus par l'article L. 209 du LPF s'appliquent, le cas échéant, dès lors que le contribuable avait présenté une demande de sursis de paiement, sans qu'il soit besoin de distinguer selon qu'il a effectivement obtenu ou non ce sursis.
Saisi par un contribuable, le Conseil d'Etat s'est prononcé sur cette différence de traitement induite par l'ancienne rédaction de l'article L. 209. Dans un considérant de principe, le juge énonce "qu'une distinction entre des personnes placées dans une situation analogue est discriminatoire", au sens des dispositions de l'article 14 de la CESDH, "si elle n'est pas assortie de justifications objectives et raisonnables, c'est-à-dire si elle ne poursuit pas un objectif d'utilité publique, ou si elle n'est pas fondée sur des critères rationnels en rapport avec les buts de la loi". Or, comme prend soin de le préciser l'arrêt, les intérêts moratoires prévus à l'article L. 209 du LPF ont pour objet de réparer le préjudice subi par le Trésor du fait du paiement tardif de l'impôt. La différence de traitement existant entre les contribuables ayant constitués des garanties et ceux qui ne l'ont pas fait ne justifie pas, eu égard à cet objet, une telle différence de traitement. Autrement dit, la simple réparation du préjudice financier de l'administration ne justifiait pas que les contribuables soient traités différemment selon qu'ils avaient obtenu ou non le sursis de paiement en raison de la présentation dans les délais de garanties suffisantes.
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Réf. : CE 3° et 8° s-s, 1er juin 2005, n° 260401, Société des Brasseries de Kronenbourg c/ Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie (N° Lexbase : A4977DI8)
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par Valérie Le Quintrec, Université de Bourgogne
Le 07 Octobre 2010
A toutes fins utiles et pour un éclairage total des lecteurs, il convient de préciser la particularité des faits de l'espèce. La société débitrice avait été mise en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Corbeil le 9 août 1990, puis avait fait l'objet d'un plan de cession partielle avant d'être autorisée à poursuivre son activité pour une durée de trois ans. Cette précision est de taille puisque, comme il le sera démontré ultérieurement, la notion d'irrécouvrabilité de la créance litigieuse, a fait l'objet d'âpres discussions dans la décision commentée et a déterminé le sort de l'affaire.
En l'espèce, la cour administrative d'appel de Nancy, se faisant l'écho de la position du tribunal administratif de Strasbourg, a jugé que, faute pour la société redressée d'avoir établi le caractère irrécouvrable de la créance, objet du litige, cette dernière ne pouvait imputer la TVA afférente à ladite créance. Plus précisément, les juges du second degré ont considéré que: "Faute d'apporter des éléments sur la part de ses créances qui devait être abandonnée dans le cadre du plan de cession, la société redressée ne pouvait être regardée comme établissant le caractère devenue irrécouvrable de ces créances".
Toutefois, le Conseil d'Etat a estimé que la cour administrative d'appel, à défaut d'avoir répondu au moyen de la société redressée selon lequel la société débitrice avait vendu ses actifs à une tierce société pour un prix qui n'avait permis d'indemniser aucun de ses créanciers chirographaires, avait insuffisamment motivé son arrêt. Dès lors, l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel était prononcée.
Par ailleurs, la haute Cour administrative, dans cette décision, a jugé que l'administration avait, contrairement aux allégations de la société requérante, légalement pu se fonder, pour refuser la déduction de la TVA litigieuse, sur les dispositions de l'article 272 du CGI prise conformément au second alinéa du 1 de l'article 11-C, 1° de la sixième Directive du 17 mai 1977 (Directive (CE) 77 /388 du Conseil du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme N° Lexbase : L9279AU9).
En outre, la société avait été légitimement redressée étant donné qu'elle n'avait pas justifiée de la situation obérée de la société débitrice pour imputer valablement la TVA.
Dès lors, l'annulation du jugement du tribunal administratif de Strasbourg était rejetée.
A la lecture de cette décision, deux observations s'imposent.
L'irrécouvrabilité de la créance, détenue par une société sur une autre, doit être définitive et certaine pour permettre l'imputation de la TVA au titre de l'article 272 du CGI (1).
Toutefois, en cas de procédure collective de la société débitrice, le caractère définitivement irrécouvrable d'une créance ne saurait résulter de la seule ouverture d'une procédure collective à l'encontre du débiteur (2).
1. La notion de créance définitivement irrécouvrable
Notion de droit général, la "créance irrécouvrable" a des conséquences tant sur le plan juridique (1.1) que sur le plan fiscal (1.2).
1.1 La notion de créance définitivement irrécouvrable au regard du droit des affaires
Le Code de commerce pose le principe selon lequel les comptes annuels doivent être réguliers, sincères et donner une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l'entreprise. Pour être réguliers et sincères, les comptes doivent faire apparaître, non seulement, les créances à recouvrer, mais aussi, les créances irrécouvrables.
Lorsqu'une créance est irrécouvrable, son montant peut être retranché des bénéfices de l'exercice au cours duquel sa perte apparaît certaine et définitive.
La créance qui présente un caractère simplement douteux ou dont la perte et seulement probable, même fortement probable, ne peut justifier que la constitution d'une provision.
Lorsque la perte se réalise effectivement, elle est compensée à due concurrence par la reprise de la provision. Mais cette compensation ne peut être effectuée que si le commerçant apporte la preuve du caractère définitivement irrécouvrable de la créance .
1.2 La notion de créance définitivement irrécouvrable au regard de l'article 272 du CGI
En matière de récupération de la TVA, l'article 272-1 du Code général des impôts exige des "créances définitivement irrécouvrables".
En effet, aux termes des dispositions de l'article susvisé, il est prévu que:
"La taxe sur la valeur ajoutée qui a été perçue à l'occasion de ventes ou de services est imputée ou remboursée dans les conditions prévues à l'article 271 lorsque ces ventes ou services sont par la suite résiliés ou annulés ou lorsque les créances correspondantes sont devenues définitivement irrécouvrables.
Toutefois, l'imputation ou le remboursement de la taxe peuvent être effectués dès la date de la décision de justice qui prononce la liquidation judiciaire.
L'imputation ou la restitution est subordonnée à la justification, auprès de l'administration, de la rectification préalable de la facture initiale".
Dès lors, le commerçant qui n'apporte pas la preuve du caractère définitivement irrécouvrable de la créance perd le droit d'en opérer la déduction de ses résultats. S'il opère cette déduction il passe une écriture inexacte éventuellement constitutive d'une fraude fiscale puisque le calcul de l'impôt sur les bénéfices industriels et commerciaux se fait sur un résultat déterminé par des créances acquises.
En principe, la récupération de la TVA ne peut se faire qu'après avoir envoyé au client défaillant un duplicata de la facture initiale avec la mention suivante : "Facture demeurée impayée pour la somme de... euros (prix net) et pour la somme de... euros (TVA) qui ne peut faire l'objet d'une déduction (article 272 du CGI)".
La question qui se pose est de savoir comment établir qu'une créance est irrécouvrable. Il s'agit là d'une question de fait. La décision commentée en atteste.
A titre d'exemple, le Conseil d'Etat a admis que le caractère irrécouvrable pouvait être démontré par des attestations d'huissier (CE Contentieux, 12 mars 1980, n° 7475, Société à responsabilité limitée "société xxxxx" N° Lexbase : A7966AIU).
Il en est de même lorsque le créancier établit que son débiteur a disparu sans laisser d'adresse.
On ne peut en revanche se borner à évoquer l'ancienneté des créances demeurées impayées.
Le créancier doit fournir toutes les indications nécessaires sur ses diligences et sur les circonstances propres qui établissent l'insolvabilité du débiteur (CE Contentieux, 14 mai 1986, n° 45826, Etablissements Bussoz N° Lexbase : A3872AMD).
Le commerçant est donc contraint d'engager une véritable procédure de recouvrement en s'adressant à un avocat, un huissier ou un organisme de recouvrement.
Au cas particulier, il appartenait à la société redressée de rapporter la preuve de l'irrécouvrabilité de sa créance.
Dans ses observations, cette dernière avait évoqué la circonstance selon laquelle la société débitrice avait fait l'objet d'un plan de cession partielle à la suite de son redressement judiciaire et avait donc vendu ses actifs à une tierce société pour un prix qui n'avait permis d'indemniser aucun de ses créanciers chirographaires.
Le Conseil d'Etat a estimé que les juges du second degré auraient dû statuer sur ce moyen et qu'à défaut de l'avoir fait et par conséquent en ayant insuffisamment l'arrêt, la demande d'annulation de ladite décision avait été acceptée.
On notera toutefois que la Haute cour a probablement considéré, à l'instar des premiers juges, que la société n'avait pas apporté des éléments sur la part de ses créances qui devait être abandonnée dans le cadre du plan de cession.
Cependant, il convenait à la cour de vérifier les allégations de la société requérante selon lesquelles la cession des actifs n'avait pas permis de l'indemniser, sa créance étant par conséquent irrécouvrable.
Par ailleurs, le deuxième problème dans l'affaire commentée concernait l'interprétation de la notion de "créances définitivement irrécouvrables " au regard de l'article 272 du CGI en cas de procédure collective de la société débitrice.
2. La notion de créance définitivement irrécouvrable en cas de procédure collective : conséquences en matière d'imputation de TVA
La société strasbourgeoise, pour contester les impositions mises à sa charge, avait notamment, d'une part, remis en cause le fondement juridique pris par l'administration fiscale pour opérer le redressement savoir l'utilisation de l'article 272 du CGI (2.1) et, d'autre part, considéré que le caractère irrécouvrable de sa créance au moment de l'imputation avait bien été acquis (2.2).
2.1. La notion de créance définitivement irrécouvrable en cas de procédure collective au regard de la 6ème Directive TVA
Il convient de rappeler dans un premier temps que l'interprétation de toute disposition du CGI se fait au regard des directives communautaires.
C'est ainsi que l'article 272 du CGI applicable aux faits de l'espèce devait être interprété au regard de la 6ème Directive TVA et plus particulièrement au regard des dispositions du 1 de l'article 11-C 1° de ladite Directive.
Aussi, le Conseil d'Etat, appliquant ce principe, avait statué en ces termes :
"Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 11-C 1° de la sixième Directive du 17 mai 1977 du Conseil des Communautés européennes : 'En cas d'annulation, de résiliation, de résolution, de non-paiement total ou partiel ou de réduction de prix après le moment où s'effectue l'opération, la base d'imposition est réduite à due concurrence dans les conditions déterminées par les Etats membres. Toutefois, en cas de non-paiement total ou partiel, les Etats membres peuvent déroger à cette règle' ; qu'il résulte des dispositions de ce second alinéa, telles qu'interprétées par la Cour de justice des Communautés européennes dans l'affaire C-330/95 du 3 juillet 1997 (CJCE, 3 juillet 1997, aff. C-330/95, Goldsmiths (Jewellers) Ltd c/ Commissioners of Customs & Excise N° Lexbase : A0301AW3), que la faculté de dérogation ainsi ouverte aux Etats membres est strictement limitée aux cas où le non-paiement total ou partiel est provisoire ou difficilement vérifiable; qu'aux termes du 1 de l'article 272 du Code général des impôts, pris pour l'adaptation de la législation nationale aux dispositions précitées, dans sa rédaction applicable au litige issue de l'article 16 de la loi de finances rectificative pour 1988 (loi n° 88-1193 du 29 décembre 1988):'la taxe sur la valeur ajoutée qui a été perçue à l'occasion de ventes ou de services est imputée ou remboursée dans les conditions prévues à l'article 271 lorsque ces ventes ou services sont par la suite résiliés ou annulés ou lorsque les créances correspondantes sont devenues définitivement irrécouvrables. Toutefois, l'imputation ou le remboursement de la taxe peuvent être effectués dès la date de la décision de justice qui prononce la liquidation judiciaire. L'imputation ou la restitution est subordonnée à la justification, auprès de l'administration, de la rectification préalable de la facture initiale' ; que ces dispositions, qui limitent la possibilité d'imputation ou de remboursement, en cas de non-paiement total ou partiel, aux créances qui, à la date de l'imputation ou de la demande de restitution, étaient devenues définitivement irrécouvrables ou étaient détenues sur un débiteur placé en situation de liquidation judiciaire, font application de la faculté de dérogation ouverte aux Etats membres par le second alinéa du 1 précité de l'article 11 C-1° conformément aux objectifs de la sixième Directive".
Dès lors, le Conseil d'Etat a probablement considéré de façon implicite que, dans la mesure où les créances de la société redressée n'étaient pas devenues irrécouvrables et la société débitrice n'avait pas fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire, mais de redressement judiciaire, le redressement de la société en cause au titre de l'article 272 du CGI était parfaitement justifié.
Par ailleurs, la Haute Cour a apporté une précision importante en soulignant que la procédure collective subie par la société débitrice n'entraîne pas automatiquement l'irrécouvrabilité de la créance litigieuse.
2.2. Une créance n'est pas nécessairement "définitivement irrécouvrable" en cas de procédure collective
Le Conseil d'Etat, dans l'arrêt commenté, rappelle de manière expresse que le caractère définitivement irrécouvrable d'une créance ne saurait résulter de la seule ouverture d'une procédure collective à l'encontre du débiteur.
Toutefois, il précise que les dispositions de l'article 272 du CGI, qui autorisent le créancier à imputer la taxe afférente à sa créance dès le prononcé de la liquidation judiciaire de son débiteur, ne font pas pour autant obstacle à ce qu'à tout moment et par tout moyen, dès avant ce prononcé, le créancier établisse le caractère définitivement irrécouvrable de cette créance, notamment, dans les cas où il ne l'aurait pas déclarée en temps utile, ou en aurait fait totalement ou partiellement abandon.
Dès lors, le Conseil d'Etat, après avoir constaté que la société requérante n'a fait état d'aucun élément justifiant que la créance qu'elle détenait sur la société débitrice, alors autorisée à poursuivre son exploitation, aurait, en tout ou partie, acquis ce caractère lorsqu'elle a procédé, en septembre 1991, à l'imputation litigieuse et qu'en tout état de cause, elle n'a pas démontré davantage que ce caractère aurait été acquis avant la fin de la période couverte par la vérification, terme de son éventuel droit à compensation et qu'enfin, postérieurement à la déduction de la taxe litigieuse à laquelle a procédé ladite société, une partie de la créance initialement déduite aurait été acquittée par la société débitrice, a considéré que l'administration fiscale avait à bon droit refusé la déduction, au titre du mois de septembre 1991, de la TVA en litige.
L'annulation du jugement du tribunal administratif de Strasbourg était donc rejetée.
Au vu de ce qui précède, il apparaît de cette décision, que l'irrécouvrabilité d'une créance n'est pas définitivement acquise, notamment, lorsque la société débitrice mise initialement en redressement judiciaire fait l'objet par la suite d'un plan de continuation.
Il faut donc faire table rase des idées préconçues selon lesquelles une société en redressement judiciaire est dans l'incapacité de redresser sa situation.
L'imputation de la TVA afférente aux créances dont est redevable la société débitrice ne s'opère donc pas de plein droit.
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Réf. : Loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises (N° Lexbase : L0750HBE)
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Le 07 Octobre 2010
Quinze ans plus tard, ladite loi, après qu'une réforme en ait renforcé la portée en 2001, s'avère avoir dépassé ses objectifs initiaux (1) et ce, au point de susciter -dans l'intérêt-même de la profession- l'instauration de limitations en matière de droit des sociétés (2), notamment, s'agissant des groupes de sociétés d'exercice libéral.
1. L'évolution de l'encadrement juridique de l'exercice des activités libérales
A la suite de l'introduction de la Société d'exercice libéral (SEL) en 1990, cette forme sociale a été réformée dans le sens d'une adaptation aux nécessités économiques (1.1). Toutefois, l'application uniformisée de règles issues du droit des sociétés a débouché sur la mise en oeuvre de mécanismes, parfois, inadaptés à la situation de certaines professions. C'est ainsi que la loi du 2 août 2005 a instauré des limitations quant à la possibilité de prendre des participations dans certaines SEL (1.2).
1.1 De l'introduction de la SEL à la loi Murcef
Le régime contemporain de l'encadrement sociétaire des professions réglementées est d'origine récente puisqu'il résulte de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 qui en a autorisé l'exercice sous forme de société d'exercice libéral. En effet, lesdites professions ne pouvaient, auparavant, être exercées en commun que sous forme de société civile, l'association ayant été reconnue en 1954 et la société civile professionnelle (SCP) instituée en 1966 par la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles professionnelles (N° Lexbase : L3146AID). Depuis 1990, les possibilités offertes aux professions libérales ont été sensiblement élargies puisque leurs membres peuvent, désormais, recourir à quatre formes de sociétés de capitaux, appelées sociétés d'exercice libéral. Elles comprennent respectivement : la société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) inspirée de la société à responsabilité limitée ; la société d'exercice libéral à forme anonyme (SELAFA) qui reprend, sous des modalités particulières, les caractéristiques de la société anonyme et, enfin, la société d'exercice libéral en commandite par actions (SELCA).
L'ensemble des professions libérales reconnues, c'est-à-dire soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé peuvent prétendre au bénéfice de cet encadrement juridique. Les professions médicales sont concernées au premier chef, y compris les pharmaciens d'officine, mais également, les professions juridiques et judiciaires ainsi que les activités traditionnellement rattachées à un exercice libéral : architectes, géomètres-expert.... et plus généralement tous les métiers indépendants qui ne relèvent pas du domaine artisanal ou commercial stricto sensu.
Il demeure que, dans cette logique sociétaire, la constitution de personnes morales dont le capital est composé de parts sociales ou d'actions s'accompagne, nécessairement, de la transposition de mécanismes propres à la détention capitalistique des sociétés.
Prises de participation, cessions de contrôle, auraient ainsi dû, en particulier, être autorisées pour l'hypothèse où le régime des SEL aurait été assimilé à celui des sociétés commerciales. Pourtant, c'était là un point que le législateur ne souhaitait pas franchir en 1990 ; ayant, au contraire, apporté une dérogation majeure à la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales (N° Lexbase : L6202AGS). S'agissant, en effet, des règles relatives à la détention du capital social, la loi sur les SEL devait poser, en principe, que plus de la moitié du capital social et des droits de vote devait être détenu par des professionnels en exercice au sein de la société.
Cette règle, justifiée au demeurant par les exigences particulières propres aux activités libérales -au rang desquelles le respect de règles déontologiques apparaît fondamental-, n'en était pas moins pénalisante pour certaines activités. C'était le cas, notamment, de celles qui faisaient l'objet d'une concurrence internationale particulièrement intense. Les professions juridiques, par exemple, notoirement exposées à la compétition économique, se sont plaintes à cette époque des difficultés à opérer des concentrations sous l'égide du régime de la loi de 1990. C'est pourquoi une dérogation au principe de fermeture du capital a été introduite en 2001 à l'occasion du vote de la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes à caractère économique et financier, dite loi "MURCEF" (N° Lexbase : L0256AWE).
L'analyse des travaux parlementaires démontre, d'ailleurs, que les justifications à cette dérogation trouvaient, pratiquement, exclusivement leur fondement dans certains problèmes rencontrés par les professions juridiques. Il suffit, pour s'en convaincre, d'en référer aux propos de M. le sénateur Marini qui plaidait, à l'époque, pour : "un développement aisé, notamment par apports financiers extérieurs, des cabinets d'avocats français, [en référence aux...] cabinets anglo-saxons qui disposent bien souvent d'une puissance financière, commerciale, logistique bien supérieure" (Rapport n° 336, Sénat, 2000-2001).
Depuis 2001, les sociétés de participations financières de professions libérales peuvent, donc, détenir plus de la moitié du capital social de SEL, la loi MURCEF ayant ajouté à la loi du 31 décembre 1990 un article 5-1, qui a permis d'ouvrir à des personnes extérieures la détention majoritaire de son capital. L'actionnariat majoritaire a, de la sorte, été ouvert à deux catégories de personnes : celles physiques ou morales -telles qu'une SEL ou une SCP exerçant la profession constituant l'objet social- et les sociétés de participations financières de professions libérales (SPFPL). Ce dernier type de société ne peut, toutefois, être aujourd'hui constitué que par les avocats, certains officiers publics et ministériels et les conseils en propriété industrielle (sur la publication des décrets d'application concernant ces professions, voir N° Lexbase : N2658AB3).
1.2 La limitation des prises de participation
A la suite de la loi MURCEF, les acteurs des professions juridiques ont, dans leur ensemble, exprimé leur satisfaction quant aux possibilités que leur offrait cette dérogation pour accéder au marché. Les membres du barreau, notamment, se trouvaient (avant 2001) enserrés dans des rigidités statutaires. De plus, le caractère transitoire de certaines mesures d'accompagnement fiscal destinées à favoriser les regroupements était mis en avant par ces professionnels pour expliquer les difficultés à réaliser des regroupements (1).
Mais, si la réforme paraissait satisfaisante au plan des principes, il s'est toutefois avéré qu'en imposant un régime uniforme, la loi MURCEF avait eu pour conséquence de permettre la concentration de certaines entreprises dans des domaines ou l'intérêt général supposait, a priori, l'indépendance des activités libérales et, partant, le maintien d'un certain degré d'atomisation du secteur.
Dans certaines professions on a, en effet, constaté la constitution de sociétés de participations constituant des entités économiques parfois difficiles à identifier pour les instances ordinales. Or, les professions visées par les textes précités sont encadrées, pour la plupart d'entre elles, par des ordres professionnels qui sont chargés institutionnellement du contrôle des membres de leur profession, et par extension, des sociétés d'exercice libéral concernées.
L'entrée en vigueur de l'article 5-1 de la loi du 31 décembre 1990 a, ainsi, suscité l'inquiétude des instances d'encadrement de certaines professions de santé, arguant de dérives capitalistiques susceptibles de porter atteinte à leur indépendance. Les travaux parlementaires ont, donc, permis de prendre en considération les risques pesant sur certaines activités, et en particulier celles de pharmacien d'officine et d'analyse de biologie médicale. Ces dernières, en effet, lorsqu'elles ont été constituées sous forme sociétaire, ont très souvent fait l'objet de prise de contrôle par des actionnaires extérieurs, contrôle pris à des fins purement financières ou stratégiques. Les professionnels ont, ainsi, fait valoir le danger pesant sur leur liberté d'exercice, censée être menacée par cette évolution.
Nombre de montages (2), résultant de la latitude donnée par la loi MURCEF -et de l'imagination fertile de certains praticiens du droit-, ont, ainsi, permis de masquer l'origine des capitaux des sociétés auteurs des prises de participation. Les ordres professionnels se sont, de la sorte, trouvés confrontés à des difficultés pour contrôler la conformité des statuts des SEL aux obligations inscrites dans la loi du 31 décembre 1990. Au surplus, ces phénomènes juridiques se sont avérés d'autant plus complexes à appréhender et à sanctionner, que les instances ordinales ont, à la base, une compétence territoriale restreinte, sans commune mesure avec la dimension géographique que sont susceptibles de prendre les montages évoqués plus avant.
Le législateur a, donc, décidé d'écarter la dérogation à la fermeture du capital introduite par la loi MURCEF à certaines professions, des décrets en Conseil d'Etat précisant les secteurs susceptibles d'être exclus de son bénéfice. Pour ces professions, le contrôle d'une SEL sera exclusivement réservé aux professionnels en exercice dans cette structure. Cette règle, en revanche, ne concerne pas les professions juridiques et judiciaires, dont nous avons souligné qu'elles ont trouvé, au contraire, de nombreux avantages à la mise en oeuvre de la loi MURCEF.
Enfin, un nouvel alinéa a été ajouté à l'article 6 de la loi du 31 décembre 1990 autorisant, dans l'hypothèse où le contrôle majoritaire d'une SEL par des personnes extérieures à cette société serait autorisé, une limitation des prises de participations croisées ou en cascade entre plusieurs associés. Cette disposition a vocation à limiter le nombre de SEL dans lesquelles une même personne morale pourrait détenir directement ou indirectement des parts sociales.
2. Réflexions sur l'évolution de l'encadrement des professions libérales par le droit des sociétés
Il apparaît, ainsi, que l'évolution de l'encadrement juridique des professions libérales s'inscrit dans un mouvement paradoxal. Alors que l'exercice de ces profession nécessite de plus en plus de capitaux et une organisation, tant matérielle qu'humaine, qui impose dans la plupart des cas la constitution de sociétés ; la nature-même des activités appelle, au contraire, la mise en oeuvre d'une protection particulière. Cela tient, à notre sens, à leur caractère dual : individuelles dans l'exercice (2.1) mais contraintes, pour des motifs économiques, d'être encadrées au plan juridique par des structures qui relèvent indirectement du droit des sociétés (2.2).
2.1 Le caractère individuel et personnel de l'exercice libéral
La dualité que nous venons d'évoquer trouve une illustration particulière dans les différentes orientations que le législateur a données à l'encadrement sociétaire de l'exercice des professions libérales. C'est, en effet, la compétitivité des entreprises libérales au regard de la concurrence étrangère qui a d'abord été mise en avant dès 1990, puis la modernisation de leur financement et de leurs structures d'exercice, notamment, en 2001. Toutefois, il a fallu concilier ces impératifs avec des exigences qui touchaient, elles, à l'intérêt général. Elles relèvent encore de deux ordres : l'équilibre de l'implantation des activités libérales sur le territoire et la protection de l'indépendance des professionnels dans leur exercice.
Sur ce dernier point, l'indépendance technique semble, dans l'esprit du législateur, constituer une garantie (notamment dans les professions de santé) de la préservation d'une qualité de soin. Mais, au-delà des politiques publiques, il s'avère qu'on constate, au plan juridique, la difficulté à concilier les exigences des règles déontologiques avec celles qui gouvernent le fonctionnement des sociétés. Or, traditionnellement, la déontologie est présentée comme constituant un corps de règles instituant une loi de la profession. C'est, cependant, une loi particulière, entendue comme un précepte de conduite particulier destiné à prévenir l'action du législateur en soumettant ceux qui y sont assujettis à des principes et des sanctions disciplinaires, et ce, afin d'éviter l'application du droit étatique.
La déontologie, ainsi, poursuit des objectifs d'autodiscipline de la profession qui, s'agissant de sa nature et de son contenu, sont incompatibles avec les règles qui gouvernent le droit des sociétés. Règle attachée aux professionnels, analysés comme autant de sujets d'un droit disciplinaire, elle ne saurait entrer en conflit avec le droit car elle est à l'origine de prescriptions qui relèvent d'une autre nature.
Un autre point, tenant également à la spécificité des professionnels libéraux, avait, par ailleurs, été souligné lors de l'édiction de la loi du 31 décembre 1990 sur la SEL. A cette époque, le législateur avait déjà souligné -à l'occasion des travaux préparatoires- que l'organisation sous forme de sociétés devait faciliter l'introduction du salariat dans la profession d'avocat et la mobilité des professionnels.
Le rapprochement du statut libéral avec le statut salarié ne pouvait, néanmoins, ne pas tenir compte de certaines particularités. On le mesure d'autant mieux que les parlementaires avaient raisonné, à l'origine, en considération de la spécificité de la profession d'avocat tout en tentant de bâtir un cadre juridique adaptable aux exigences des autres professions. C'est, en effet, à partir du régime applicable aux avocats collaborateurs ressortant de la loi du 31 décembre 1971 (loi n° 71-1130 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques N° Lexbase : L6343AGZ) qu'un nouveau statut, celui de "collaborateur libéral", a été établi par l'article 18 de la loi du 26 juillet 2005 .
Ce statut devrait permettre à des jeunes professionnels libéraux d'exercer à titre indépendant, sans qu'il leur soit besoin de créer leur propre entreprise. Il devrait, également, favoriser, dans un autre registre, la transmission de l'activité libérale. Il n'a, toutefois, pas été étendu à l'ensemble des professions, les officiers public ou ministériels, ainsi que les commissaires aux comptes et administrateurs judiciaires et mandataires ayant été expressément exclus du champ d'application du texte (3).
Le statut de collaborateur libéral a, de la sorte, été renforcé et, qui plus est, clairement distingué de celui de salarié. L'exercice de l'activité libérale se fera, en effet, en toute indépendance, c'est-à-dire sans lien de subordination, la faculté étant ouverte au professionnel de se constituer une clientèle personnelle. Corollaire de ces dispositions, le texte énonce distinctement la responsabilité du collaborateur libéral en ce qui concerne ses actes, ce qui exclut l'application de l'article 1384, alinéa 5, du Code civil (N° Lexbase : L1490ABS).
Quant au contenu du contrat de collaboration, il sera soumis aux règles régissant la profession et, notamment, aux règles déontologiques. Rédigé par écrit, le contrat mentionnera en particulier la durée de la collaboration, les modalités de la rémunération, les conditions d'exercice de l'activité et, surtout, les conditions dans lesquelles le collaborateur peut satisfaire aux besoins de sa clientèle personnelle ainsi que rompre le contrat.
On comprend que, sous ce régime particulier, de nombreuses interrogations ont pu se faire jour quant à l'introduction de clauses de non-concurrence. Si les règles gouvernant les avocats prévoient que de telles clauses sont réputées non écrites, il est apparu que d'autres professions ne souhaitaient pas que la loi généralise cette solution. Le législateur a, donc, choisi de ne pas imposer de règles en ce domaine et le texte ne comporte pas de disposition encadrant l'établissement de l'ex-collaborateur, laissant à chaque profession le soin de s'organiser librement.
2.1 L'exploitation au sein de structure relevant du droit des sociétés
La tendance à l'absorption de l'activité des professions libérales par le droit commun des affaires ne saurait, en contrepoint, être ignorée. En effet, l'extension des formes sociales permettant d'encadrer l'activité libérale traduit, et cela a été souligné plus avant, un véritable besoin pour certaines professions qui sont confrontées à un niveau de concurrence élevé au plan international. Ces mêmes professions sont, par ailleurs, placées devant la nécessité de restructurer l'exercice de leur activité dans le sens d'une concentration toujours plus poussée, et ce, pour des raisons financières liées aux économies résultant de la mise en commun de leurs moyens.
Enfin, il est incontestable -et la remarque vaut pour la plupart des activités libérales- que les structures sociétales sont particulièrement à même de permettre à des praticiens de fédérer leur spécialités réciproques afin d'offrir des garanties de compétence à leurs clients.
Est-il possible, pour autant, de considérer que les activités libérales peuvent être exercées dans les mêmes conditions que les activités commerciales ? Le législateur a répondu par la négative, la loi du 26 juillet dernier ayant pris en compte les perturbations apportées au régime des valeurs mobilières par l'ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004 (N° Lexbase : L5052DZ7).
Le texte est d'abord intervenu à propos des actions à dividende prioritaire sans droit de vote (ADPSV). A ce titre, l'article 9 de la loi sur la SEL, tel que modifié par la loi du 2 août 2005, dispose que les ADPSV existantes au jour de l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 24 juin 2004 ne peuvent être détenues par des professionnels exerçant leur activité au sein de la société. Il prévoit également que les droits particuliers attachés aux actions de préférence mentionnées à l'article L. 228-11 du Code de commerce (4) (N° Lexbase : L8368GQY) ne peuvent faire obstacle ni à l'application des règles de répartition du capital et des droits de vote, ni aux dispositions de l'article 12 (5) de la loi sur la SEL qui donnent aux professionnels le pouvoir de contrôler leur société.
On mesure, ainsi, qu'en dépit d'une évolution statutaire des professionnels libéraux, l'encadrement juridique de droit commun, qu'il s'agisse du droit des sociétés ou du droit social, est encore un cadre inadapté pour permettre l'adoption d'une structure sécurisante pour les activités libérales.
Jean-Baptiste Lenhof
Maître de conférences à L'ENS Cachan, antenne de Bretagne
Membre du Centre de recherche en droit privé de l'université de Caen
Membre du Centre de recherche en droit financier de l'Université Paris I Panthéon-Sorbonne
(1) Rapport d'information n° 345 (2001-2002) sur l'évolution des métiers de la justice, par M. le Sénateur Cointat.
(2) Sur la question, voir : J.-P. Dom, Les montages en droit des sociétés, Joly, Pratique des affaires, 2000.
(3) Les professions d'officiers publics ou ministériels, c'est-à-dire les avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation, les avoués près les cours d'appel, les huissiers de justice, les notaires, les commissaires-priseurs judiciaires et les greffiers des tribunaux de commerce jouissent de prérogatives de puissance publique attachées à l'exercice de leur mission. Les commissaires aux comptes sont soumis à des règles professionnelles fixées, notamment, par la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 de sécurité financière (N° Lexbase : L3556BLB), en particulier la règle de rotation des mandats prévue par l'article L. 822-14 du Code de commerce (N° Lexbase : L2647DHI), et à un régime de nomination et de responsabilité particulier. Les administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires doivent satisfaire aux dispositions du livre VIII du Code de commerce et à des principes régissant leur statut qui imposent l'exercice à titre personnel du mandat, l'absence de clientèle personnelle et la rémunération personnelle sous forme d'émoluments strictement tarifés.
(4) L'article L. 228-11 du Code de commerce permet l'émission par les sociétés commerciales d'actions "avec ou sans droit de vote, assorties de droits particuliers de toute nature, à titre temporaire ou permanent". La société émettrice peut, donc, désormais décliner ses titres selon ses propres besoins, au cas par cas.
(5) Cet article prévoit, notamment, que les gérants, le président et les dirigeants de la société par actions simplifiée, le président du conseil d'administration, les membres du directoire, le président du conseil de surveillance et les directeurs généraux ainsi que les deux tiers au moins des membres du conseil d'administration ou du conseil de surveillance dans la société anonyme doivent être des associés exerçant leur profession au sein de la société. Il dispose, également, que seuls les professionnels exerçant au sein de la société peuvent prendre part aux délibérations prévues par ces textes lorsque les conventions en cause portent sur les conditions dans lesquelles ils y exercent leur profession.
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Le 07 Octobre 2010
En principe, en France, l'action en justice appartient personnellement à celui qui a intérêt à agir. Ainsi, "nul ne plaide par procureur". A contrario, cette règle signifie, en fait, que le nom de toutes les parties doit être indiqué dans le cas d'une action par procureur (cf. action en représentation conjointe ci-dessous).
Les actions collectives sont donc des exceptions à ce principe, exceptions qui prennent, néanmoins, de l'importance.
1.1 L'action d'intérêt collectif (droit de la consommation, droit financier, droit de la santé)
L'action est exercée par un groupement au nom des intérêts collectifs qu'il représente.
Une association ou un syndicat peuvent défendre l'intérêt collectif pour lequel ils se sont constitués. L'intérêt en jeu n'est pas général puisqu'il concerne un groupe défini, mais n'est pas non plus une somme d'intérêts individuels.
Ainsi, une association agréée de consommateurs ou encore d'actionnaires et investisseurs en valeurs mobilières et produits financiers peut demander en justice une réparation pour un préjudice causé à l'intérêt collectif, par exemple, par une publicité mensongère, ou de faire cesser des agissements illicites dans le but d'éviter que des membres n'en deviennent victimes.
En matière de droit de la santé, un des buts de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé (loi n° 2002-303 N° Lexbase : L1457AXA) est de parvenir à instaurer une véritable démocratie sanitaire en France. Une des applications de cet objectif a été de permettre aux associations d'intervenir dans les établissements de santé, mais aussi, dans les procès pénaux.
L'article L. 1114-2 du Code de la santé publique (N° Lexbase : L4507DLI) permet, également, dans certaines conditions plus restreintes, l'intervention des associations d'usagers du système de la santé agréées au niveau national. Celles-ci peuvent exercer des droits reconnus à la partie civile dans un procès pénal concernant les infractions d'homicide involontaire et d'atteintes involontaires à l'intégrité physique de la personne et celles prévues par le Code de la santé publique qui portent un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des usagers du système de santé.
Mais cette action collective ne permet pas d'agir en justice pour défendre des intérêts particuliers. De plus, la preuve du préjudice collectif est admise difficilement par les tribunaux.
1.2 L'action en représentation conjointe (droit de la consommation)
L'action en représentation conjointe est exercée par un groupement au nom de ses membres ou par un individu au nom d'un groupe organisé de personnes se trouvant dans une situation similaire.
Cette action est ouverte à des associations agréées et reconnues représentatives sur le plan national et mandatées par des consommateurs, et à des syndicats, dans le but de défendre les intérêts individuels des salariés. Les actionnaires d'une société ont, aussi, la possibilité de désigner, parmi eux, un représentant par mandat exprès afin qu'il exerce une action en responsabilité contre les administrateurs de la société.
Les associations agissent en réparation au nom des consommateurs.
Cependant, la mise en oeuvre de cette action n'est pas sans poser des difficultés de par ses conditions. Le mandat doit être donné expressément (par écrit) par chaque consommateur. Et les consommateurs concernés ne peuvent être recherchés par publicité ou par appel à témoins. Les victimes doivent, donc, se manifester d'elles-mêmes et prendre l'initiative d'aller trouver les associations. En pratique, il y a très peu d'exemples d'application de ce dispositif.
1.3 Le soutien des associations dans le cadre des litiges de masse
Les associations jouent donc un rôle essentiel, aujourd'hui, dans les litiges de masse, même si elles n'interviennent qu'indirectement dans le procès, en se portant partie civile. Elles sont, pourtant, très présentes en amont, à savoir, dans le soutien aux victimes, par une éventuelle négociation avec le responsable afin de trouver un accord amiable ou dans le cadre du procès.
Une victime seule, sans aucun soutien, peut se trouver démunie face à la procédure à initier. Elle doit faire la démarche de prendre un avocat, qui, lui-même, pourra éprouver des difficultés pour défendre au mieux son client du fait de sa méconnaissance de la question. Les affaires peuvent en effet être très complexes et nécessiter du temps pour les avocats avant d'appréhender entièrement les problèmes factuels et juridiques, ce qui se répercute sur les honoraires à payer par la victime.
C'est pourquoi certaines associations, aidées par des avocats, expriment une réelle volonté d'organiser les poursuites de personnes victimes d'un préjudice spécifique. Elles ne peuvent regrouper les victimes mais cherchent, néanmoins, à les aider dans leur action, en leur donnant tous les éléments pour la mener à bien.
Tel est, encore, le cas de l'association Réseau D.E.S. France qui a pour objet de regrouper les personnes victimes du médicament Distilbène (1). Elle a, notamment, un rôle d'information, de soutien des victimes et de coopération avec les professionnels (2).
D'autres associations vont plus loin : le Comité National contre le Tabagisme (CNTC), par exemple, se voit allouer des subventions pour financer, d'une part, ses campagnes d'information et de prévention et, d'autre part, ses actions judiciaires pour le respect de la loi "Evin" (loi n° 91-32 du 10 janvier 1991 relative à la lutte contre le tabagisme et l'alcoolisme N° Lexbase : L3377A9X), notamment, en terme d'information sanitaire. Celui-ci invoque régulièrement, dans le cadre de procès pénaux de victimes, une atteinte à l'intérêt collectif qu'il défend et demande la réparation du préjudice causé résultant de la mise en échec de son activité de prévention.
C'est aussi le cas l'Association de défense des actionnaires minoritaires (ADAM) dirigée par Me Colette Neuville qui n'hésite pas à mettre en cause la responsabilité de dirigeants de grandes sociétés dans le cadre de litiges financiers.
Mais, les indemnités allouées à ces associations le sont le plus généralement allouées au titre d'un préjudice moral et restent symboliques et celles-ci ont, souvent, peu de moyens pour faire face à des entreprises bien davantage structurées et organisées dans leur stratégie judiciaire.
1.4 Les autres acteurs concernés par les actions collectives
D'autres structures pourraient, aussi, chercher à faire valoir leurs intérêts telles que les compagnies d'assurance ou encore les sociétés de protection juridique. Ces dernières interviennent pour le compte de personnes qui s'étaient assurées auprès d'elles pour la prise en charge des frais juridiques en cas de litige. Ces sociétés sont tentées, bien évidemment, de regrouper les plaintes ou les litiges et de chercher à aboutir à des transactions pour de nombreuses raisons.
Toutefois, le rôle de l'avocat organisateur ou maître d'oeuvre rôdé par sa connaissance et sa pratique quotidienne à ces questions de responsabilité et d'indemnisation apparaît indispensable. Qui pourrait, en effet, prétendre mieux que lui maîtriser la chaîne de la solution juridique, du conseil juridique au judiciaire et, par là-même, proposer la stratégie procédurale la plus adaptée au cas d'espèce ou encore l'issue transactionnelle la plus satisfaisante, du fait de son indépendance et de ses compétences?
Seuls un travail de collaboration étroit et une coordination entre les différents acteurs concernés pourront, donc, donner sens à cette nouvelle dimension procédurale.
2. La mise en oeuvre d'une action de groupe
L'action de groupe ("class action") permet de regrouper des victimes d'un même préjudice, sans que celles-ci se trouvent dans un groupe déjà constitué.
Deux systèmes sont concevables pour s'assurer de l'appartenance au groupe des personnes qui le composent : l'"opt in" et l'"opt out".
Dans l'"opt in", ne deviennent membres du groupe que les personnes qui en ont manifesté la volonté avant une date fixée par le jugement autorisant l'action.
Dans l'"opt out", toutes les personnes entrant dans la définition du groupe feront partie de celui-ci dès lors qu'elles n'ont pas exprimé la volonté de s'en exclure avant la date fixée dans le jugement autorisant l'action.
L'introduction dans le droit français de la "class action" n'est pas une idée neuve. Depuis plus de vingt ans, cette idée est discutée âprement par les acteurs concernés par ce projet.
L'intérêt de l'instauration de la "class action" se manifeste lors d'événements qui ont une ampleur telle qu'une organisation des victimes est nécessaire.
Malgré l'absence de législation la permettant, elle peut être envisageable en France dans des situations exceptionnelles. Tel était le cas en 1978, lors du naufrage du pétrolier Amoco Cadiz sur la côte nord-ouest du Finistère qui avait provoqué une marée noire (3).
L'instauration de la "class action" est, cependant, rendue plus difficile par certaines règles ou concepts juridiques ou culturels.
Les "class actions" aux Etats-Unis se sont développées au cours du XXème siècle dans des affaires de droit de sociétés dans lesquelles les détenteurs d'actions menaient une action commune contre les dirigeants d'une société.
Puis, en 1966, elles sont étendues à tout le contentieux civil : droit de la consommation sous la banière de l'avocat Ralph Nader, droit du travail, droit de l'environnement, responsabilité civile des professionnels (dont les médecins) et des fabricants, droit des produits défectueux et droit de la santé...
Au Québec, une loi du 25 janvier 1979, modifiée par le 1er janvier 2003, a instauré à son tour les class actions.
2.1 Sur quoi repose le succès des "class actions" ?
Aux Etats-Unis, le succès des "class actions" est favorisé par certains éléments, dont le recours à la publicité pour rechercher les victimes avant le procès. Des sites internet américains publient des listes de médicaments contre lesquels une plainte et le recours à une class action sont seulement à l'étude à la suite de faits pouvant la justifier et proposent un contact gratuit avec un avocat. Cette pratique peut mettre en péril la réputation du laboratoire concerné, alors qu'aucun jugement n'a été prononcé et que les faits ne sont pas vérifiés ou la causalité n'est pas établie.
2.2 A quelles conditions ?
Il est peu probable que le législateur français admette ce type de publicité préalable, d'"appel à témoins".
De plus, la class action représente un coût phénoménal pour celui qui veut l'intenter. Aux Etats-Unis, des cabinets d'avocats spécialisés prennent le plus souvent en charge les frais et sont payés au pourcentage (25 à 35 %) sur la somme totale obtenue par la décision des juges. Au Canada, un Fonds d'aide aux recours collectifs a été institué afin d'attribuer une aide financière aux requérants (remboursable en cas de succès).
En France, les victimes ne peuvent qu'agir individuellement. Pour prendre l'exemple du Distilbène, il y aurait 160 000 victimes selon l'association D.E.S.-France. Pour que toutes les victimes soient indemnisées, il faudrait autant de procès. Or, toutes les victimes n'engagent pas d'action en justice, comme le montrent le nombre restreint de décisions rendues et le nombre de dossiers judiciaires en cours : une cinquantaine. Elles doivent, notamment, supporter entièrement tous les frais de la procédure (honoraires d'avocats, frais de justice), ce qui peut en décourager certaines.
Si la France suit le modèle américain, les procédures de class action développeront sûrement la pratique des honoraires de résultat. Elle est limitée en France car elle ne peut excéder un certain pourcentage et la remise d'une somme provisionnelle du client est obligatoire. Dans ce cas, il faut s'interroger sur le succès de cette action si les avocats doivent engager trop de frais sans pouvoir être rémunérés.
Les avocats américains prennent le risque de prendre entièrement à leur charge les frais du procès avant le jugement car les dommages-intérêts peuvent atteindre des sommes qui ne sont pas envisageables en France. En effet, les dommages-intérêts ne portent pas seulement sur la réparation à hauteur du préjudice mais ils comportent aussi les "punitives damages" correspondant à une amende civile (4).
Si la France crée, comme le Canada, un fonds d'aides pour les recours collectifs, les associations auraient, sans doute, une plus grande place, mais il pourrait aussi permettre aux cabinets d'avocats d'initier une procédure avec un minimum de fonds.
Conclusion
La "class action" permet aux victimes de voir leurs forces rassemblées peser un poids véritable face aux grandes sociétés. Mais il n'en reste pas moins que cette procédure doit être bien encadrée. Le projet de loi rencontrera certainement, de ce fait, des résistances de la part des industries qui verront leur responsabilité engagée plus fréquemment par des adversaires plus imposants. Les dispositions qui seront prévues pour l'action de groupe seront, cependant, indispensables pour éviter les dérives liées à une judiciarisation croissante et qui pourraient consister, notamment, en des mises en cause trop rapides, voire abusives, de certaines entreprises. Une procédure abusive et publique d'une industrie pourrait mettre en péril sa réputation, ce qui peut avoir des conséquences très graves par la suite (baisse significative du chiffre d'affaire, licenciements...). C'est pourquoi des adaptations du doit français seront nécessaires pour bien accueillir cette réforme. La médiation qui connaît un succès grandissant devra être encouragée afin d'améliorer le règlement des litiges de masse initiés par les "class actions". Reste la question non élucidée du personnel et des instruments nécessaires qui devront être mis à la disposition du pouvoir judiciaire pour pouvoir gérer de telles actions.
Soliman Le Bigot
LBM avocats
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par Propos recueillis par Fabien Girard de Barros, Directeur de la rédaction
Le 07 Octobre 2010
1. Biens communs et contenus libres : une question juridique nouvelle ?
"Le dessein de l'art est de lutter contre les obligations" clamait Amedeo Modigliani ; c'est en suivant ce précepte que le projet Creative Commons s'est développé. Ainsi, Creative Commons propose des contrats-type pour la mise à disposition d'oeuvres en ligne. Inspirés par les licences libres, les mouvements open source et open access, ces contrats facilitent l'utilisation, la diffusion, la réutilisation et la modification d'oeuvres (textes, photos, musique, vidéos, sites web...). Les contrats Creative Commons permettent d'autoriser à l'avance le public à effectuer certaines utilisations selon les conditions exprimées par l'auteur. C'est donc bien la recherche d'une simplification des relations auteur/utilisateur-exploitant qui motive ce projet.
Malgré les prescriptions de la loi "Toubon", la terminologie anglaise a été conservée -aucune traduction française ne rendant compte de l'ensemble sémantique de l'expression-. Pour l'anecdote, elle trouve son origine dans un article de Garret Hardin, The tragedy of commons, publié en 1968 dans la revue Science, qui pour traduire l'idée d'une nécessité de correctement gérer les ressources communes qui tendent à se raréfier, empruntait cette expression au conflit biens individuels/biens communs né lorsque les pâturages collectifs furent clôs dans l'Angleterre du XVIème siècle.
Pour une illustration plus moderne de la nécessité de réguler l'exploitation d'une oeuvre au-delà du simple cadre des droits d'auteur, pensons au film Twelve monkeys retiré des salles après quelques semaines d'exploitation, car un créateur refusait que son dessin apparaisse de manière, même anodine, sur un fauteuil, dans le film. Quelles eurent été les conséquences, si l'auteur du dessin avait pu, par avance, expliciter clairement son choix pour l'utilisation de son oeuvre ?
Le projet Creative Commons est un projet d'attribution explicite de droits et de réserves par un auteur sur son oeuvre. Ainsi, le contenu d'une oeuvre fait l'objet d'une ré-appropriation par son auteur. Par l'intermédiaire de la licence Creative Commons, ce dernier décide de quelle manière il entend que son oeuvre circule (quel que soit le média), de quelle manière il entend que son oeuvre soit exploitée.
Cette attribution est génératrice de licence. Si cette licence peut prévaloir pour une utilisation papier ou internet de l'oeuvre, c'est sur internet que l'auteur affectera les droits et réserves optionnels qu'il entend attribuer à son oeuvre.
Ce système de licence induit un système de recherche d'oeuvre. Cette licence confère un tag, un logo Creative Commons qui permettra à une interrogation sur méta-données, à partir d'un moteur de recherche (comme celui de Yahoo, par exemple), de retrouver l'ensemble des oeuvres placées sous Creative Commons.
Enfin, cette licence est le témoignage explicite d'une communauté d'esprit et de pratiques. En effet, ce projet revêt une dimension internationale, puisque 75 pays travaillent actuellement à une transposition nationale du contrat de licence élaboré par l'International Commons. La France est en quatrième position des pays les plus dynamiques sur le sujet.
Creative Commons intéresse donc l'ensemble des oeuvres, à l'exception des logiciels ; ces derniers disposant déjà d'un contrat équivalent (licence open source) qui s'est développé depuis plus d'une vingtaine d'année. Mais, à la différence des logiciels, la transposition des contrats Creative Commons, en France, se fait en accord, sous le contrôle et la validation de l'autorité de tutelle, l'International Commons.
L'économie numérique oblige à penser autrement l'exercice des droits d'auteur tout en permettant le développement de la création et de la connaissance. Comment faire pour que biens communs et biens individuels soient non rivaux, non exclusifs, cumulatifs ? C'est à cette question que tente de répondre l'adaptation des licences Creative Commons en droit français.
2. L'adaptation des licences Creative Commons au droit français : état de la discussion
Existe-t'il un système qui permette à l'avance et simplement, à un auteur, de choisir les conditions d'utilisation d'une oeuvre ? Existe-t'il un moyen de connaître les conditions d'utilisation d'une oeuvre pour un utilisateur potentiel ? La licence Creative Commons permet d'obérer la négociation entre utilisateur et auteur. Ces licences contribuent à diminuer les coûts de transaction : distribution, recherche automatique d'oeuvres, information sur le régime des droits, négociation en cas d'utilisation commerciale après l'option "Pas d'Utilisation Commerciale", rédaction d'autorisations d'utilisation ou de remix, procédure...
Le projet Creative Commons, en France, est la traduction et l'acceptation de contrats de licence établis par l'International Commons, en droit national. Initié à Standford, ce projet vise à la fois l'homologation des contrats de licence par l'organe international et le droit national, par le truchement d'un organisme centralisateur : en France, le CERSA (CNRS-Paris 2). En décembre 2003, le CERSA proposait une traduction littérale de ces contrats ; en novembre 2004, était publiée la traduction applicable en France. Cette traduction tient compte de deux contraintes fondamentales : le droit moral (ordre public - droit inaliénable) et le droit de la responsabilité (pas de clauses de garantie pour une jouissance paisible -rien ne prémunit un utilisateur contre une contrefaçon à l'origine de l'oeuvre-. On a pu recenser 53 millions de liens vers les licences Creative Commons dans le monde (750 000 en France). D'où l'intérêt croissant des auteurs et des utilisateurs, et donc a fortiori des juristes chargés de déterminer le cadre juridique de l'exploitation d'une oeuvre, pour cette transposition.
Le contrat Creative Commons est un complément au droit d'auteur tel qu'issu de la propriété littéraire et artistique en droit français. Il ne s'agit, en aucun cas, d'une substitution. Il s'appuie sur la notion de copyright ou sur le Code de propriété intellectuelle. Ce contrat organise les conditions de circulation de la "littérature grise" : à défaut, c'est le droit commun/droit d'auteur qui s'applique. L'objectif est de ne pas réserver de droit exclusif d'exploitation ; de signaler que certains droits d'exploitation, même non commerciale, sont ouverts et d'autres conditionnels.
En fait, cette licence s'adresse essentiellement aux auteurs qui désirent plus de liberté pour l'exploitation de leur oeuvre que les droits d'auteur traditionnels.
Le lecteur est invité à visiter le site http://fr.creativecommons.org/, afin de visualiser l'ensemble des conditions attachées à ce type de contrat.
Actuellement, six licences sont disponibles à partir de l'interface Creative Commons. Elles sont désignées par leur nom et les icônes représentant les différentes options choisies par l'auteur qui souhaite accorder plus de libertés que le régime minimum du droit d'auteur en informant le public que certaines utilisations sont autorisées à l'avance.
Paternité |
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Paternité
Pas de Modification |
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Paternité
Pas d'Utilisation Commerciale Pas de Modification |
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Paternité
Pas d'Utilisation Commerciale |
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Paternité
Pas d'Utilisation Commerciale Partage des Conditions Initiales à l'Identique |
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Paternité
Partage des Conditions Initiales à l'Identique |
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Signification de chaque option :
D'autres options sont disponibles en anglais et n'ont pas encore été traduites en droit français. Elles sont adaptées aux besoins du sampling, des pays en voie de développement, du partage de la musique, dédiées au domaine public...
Tous les contrats revêtent des conditions communes à :
Les licences sont modulables et existent sous trois formes :
Comment faire pour placer une oeuvre sous l'une des licences Creative Commons ? Toute copie ou communication de l'oeuvre au public doit être accompagnée du contrat selon lequel elle est mise à la disposition du public, ou d'un lien vers ce contrat. Le contrat Creative Commons qui a été sélectionné par l'auteur lui apparaît sous la forme d'un morceau de code html/rdf qui peut être inséré facilement sur la page web de l'oeuvre. Ce code reproduira sur le site le logo Creative Commons avec un lien vers la version résumée du contrat sélectionné. L'auteur peut insérer à côté de ce logo une phrase pour expliquer que les oeuvres placées sur son site sont sous l'une des licences Creative Commons.
Exemples sites placés sous Creative Commons:
Le contrat Creative Commons est une licence modulable en fonction des intérêts du titulaire des droits d'auteur sur une oeuvre. Il organise une licence ouverte et promeut un langage d'expression des droits. Ce projet tente ainsi de mettre en place des mesures techniques d'information sur les droits. Ces licences permettent une plus large diffusion de l'oeuvre avec une diminution des coûts de transaction d'exploitation numérique. Elles favorisent l'accès au droit en encourageant une conduite légale vis-à-vis des droits d'auteur. Elles promeuvent l'expérimentation de nouveaux modèles économiques. Elles mettent en place une syndication et un partage de l'information ainsi facilité.
Quid de la controverse sur la non-exploitation commerciale de l'oeuvre : l'idée n'existe pas en droit français. La propriété littéraire et artistique distingue entre exploitation publique ou privée. La nature commerciale d'une exploitation n'est pas un critère restrictif, en France. Il est difficile de savoir à l'avance ce qui va faire ou fait ou non l'objet d'une exploitation commerciale (le site Creative Commons propose faisceau d'indices, mais c'est le juge qui aura, bien évidemment, le dernier mot).
Quid de la compatibilité de cette licence avec le fonctionnement des sociétés de gestion collective (SGC). L'utilisation d'une oeuvre par une SGC est prise en compte par Creative Commons. Mais, contrairement aux Etats-Unis, il n'y pas de possibilité statutaire de fragmenter les conditions d'utilisation d'une oeuvre.
"Les productions de l'art ont leur valeur en elles-mêmes" (Aristote, Ethique à Nicomaque), reste à internet de permettre sa diffusion et sa connaissance dans le respect des choix d'utilisation de l'auteur.
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