La lettre juridique n°162 du 7 avril 2005

La lettre juridique - Édition n°162

Table des matières

Les "35 heures" ou les "plaisirs démodés"

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N2878AIG

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par Charlotte Figerou, Rédactrice en chef de Lexbase Hebdo - édition sociale

Le 07 Octobre 2010


Plus qu'un simple toilettage, c'est, cette fois-ci, un grand ménage de printemps que viennent de subir les "35 heures". D'ailleurs, certains s'interrogent déjà sur la pérennité des "35 heures", au lendemain de la loi du 1er avril 2005, portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise. En effet, si le législateur a souhaité maintenir la durée légale hebdomadaire à 35 heures, on peut tout de même se demander si "le salarié à 35 heures effectives" n'est pas en passe de devenir l'exception. Premier objectif affiché du législateur : le salarié qui désire "travailler plus pour gagner plus" doit pouvoir le faire facilement. Il dispose, désormais, de la faculté d'effectuer des heures "choisies", dispositif qui vient s'ajouter à celui des heures supplémentaires soumises à autorisation de l'inspection du travail. Second objectif : préserver la compétitivité des entreprises, notamment les plus petites. Plusieurs mesures sont prises en ce sens, conférant aux petites entreprises un statut à part. Par ailleurs, on se souvient de la loi "Fillon" du 17 janvier 2003 relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi qui avait déjà assoupli en profondeur les "35 heures". Aujourd'hui, la nouvelle réforme vient encore assouplir ce qui ne l'avait pas déjà été... Cette semaine, Lexbase Hebdo - édition sociale vous propose de retrouver toute l'analyse, sur ce sujet, de Christophe Radé, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV et directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition sociale.

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Social général

[Textes] Que reste-t-il des 35 heures après la loi du 31 mars 2005 portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise ?

Réf. : Loi n° 2005-296, 31 mars 2005, portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise (N° Lexbase : L1144G8U)

Lecture: 8 min

N2842AI4

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par Christophe Radé, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition sociale

Le 07 Octobre 2010


Voulue comme un instrument de lutte contre le chômage, considérée par de nombreux salariés comme un progrès social permettant de dégager plus de temps pour la vie personnelle, la loi sur les 35 heures n'a cessé, depuis son adoption en 1998 (loi n° 98-461 du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail N° Lexbase : L7982AIH), de susciter les foudres du patronat. Sans remettre en cause frontalement la durée légale du travail, les réformes successives ont assoupli sa mise en oeuvre en introduisant de nombreuses dérogations au régime des heures supplémentaires. La loi du 31 mars 2005 (loi n° 2005-296 du 31 mars 2005, portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise N° Lexbase : L1144G8U) en constitue une nouvelle illustration, encore plus caractéristique que les précédentes, à tel point que l'on peut s'interroger aujourd'hui sur l'effectivité des 35 heures comme durée "normale" de travail dans les entreprises. Nous présenterons, successivement, les quatre articles qui composent cette loi nouvelle.
  • Article 1. Dispositions applicables dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle

Depuis le retour des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle dans la République, le Parlement s'est efforcé, au fil des décennies, d'harmoniser les dispositions applicables sur l'ensemble du territoire national, sans toutefois remettre en cause les particularités locales.

Dernièrement, la Cour de cassation avait eu à déterminer si les jours "chômés", selon la tradition locale, devaient ou non être décomptés dans la durée annuelle du travail. Considérant que seul le 1er mai devait légalement être considéré comme chômé (C. trav., art. L. 222-5 N° Lexbase : L5909ACT), la Cour a estimé qu'il convenait de ne pas les déduire de la durée annuelle du travail, à défaut de dispositions conventionnelles en ce sens (Cass. soc., 26 janvier 2005, n° 02-47.569, FS-P+B N° Lexbase : A2968DGZ).

Face aux protestations des parlementaires de ces trois départements, le législateur a donc choisi d'ajouter au 1er mai, conformément à la tradition locale, les 11 novembre, 8 mai et 14 juillet comme jours chômés. Conforme sans doute aux usages locaux, on s'étonnera que la loi vienne consacrer une exception régionale après s'être efforcée, depuis plus de 70 ans, de traiter de manière identique l'ensemble des citoyens français...

  • Article 2. Réforme du compte épargne temps

Selon les termes de l'article L. 227-1 du Code du travail, "le compte épargne-temps a pour objet de permettre au salarié qui le désire d'accumuler des droits à congés rémunérés [...] ou de se constituer une épargne".

Ce compte constituait, jusqu'à la loi du 31 mars 2005, un instrument destiné essentiellement à capitaliser du temps libre. Désormais, sa dimension monétaire est très clairement affirmée, confirmant ainsi la tendance amorcée dès 2003 par la loi "Fillon" du 3 janvier 2003 (loi n° 2003-6 du 3 janvier 2003 portant relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques N° Lexbase : L9374A8P). Le premier alinéa de l'article L. 227-1 du Code du travail, définissant l'objet du compte épargne-temps, a d'ailleurs été réécrit en ce sens et vise, désormais, la possibilité offerte au salarié de "bénéficier d'une rémunération, immédiate ou différée".

La nouvelle rédaction du texte élargit, en premier lieu, les conditions de mise en place du compte, puisque l'exigence d'un accord étendu est abandonnée et que, désormais, un accord de groupe pourra valablement l'instituer. Nous verrons d'ailleurs que l'article 4 de la loi favorise, également, la conclusion d'accords d'entreprises dans les entreprises de 20 salariés et moins (cf infra).

En deuxième lieu, la loi n'impose plus une durée de 5 ans (ou 10 ans selon la situation familiale) pour prendre les congés accumulés ; ce sont les accords qui détermineront ces modalités.

En troisième lieu, la loi élargit la liste des congés ou sommes qui peuvent être versées par le salarié ou l'employeur sur le compte, ainsi que les modalités d'utilisation du compte qui s'ouvre à la formation professionnelle, permet un passage à temps partiel ou une cessation progressive ou totale d'activité, et permet plus facilement au salarié de se constituer des compléments de retraite dans le cadre des plans d'épargne pour la retraite collectifs.

  • Article 3. Création d'une nouvelle catégorie d'heures de travail "choisies"

La durée légale du travail ne constitue nullement une durée obligatoire ou maximum, mais simplement une frontière délimitant l'application de deux régimes juridiques distincts. En-deçà de 35 heures de travail effectif hebdomadaire (ou son équivalent annuel), le salarié relève du régime du temps partiel (C. trav., art. L. 212-4-2 et s. N° Lexbase : L9587GQ7), et au-delà s'appliquera le régime des heures supplémentaires.

Ce régime différait, jusqu'à présent, selon que les heures accomplies l'étaient au sein d'un contingent annuel d'heures dites "libres", ou au-delà dans le cadre d'heures supplémentaires dites "autorisées" par l'inspection du travail (C. trav., art. L. 212-7 N° Lexbase : L5854ACS). Par ailleurs, et selon la durée du travail effectivement accomplie et l'effectif de l'entreprise, le salarié pouvait passer du régime de majoration ordinaire (C. trav., art. L. 212-5 N° Lexbase : L9589GQ9) à un régime imposant l'attribution d'un repos compensateur supplémentaire obligatoire (C. trav., art. L. 212-5-1 N° Lexbase : L5851ACP).

Les réformes intervenues depuis 1998 n'ont eu de cesse de majorer le contingent annuel, aujourd'hui fixé à 220 heures par salarié et par an (C. trav., art. D. 212-25 N° Lexbase : L8863G7E ; décret n° 2004-1381 du 21 décembre 2004, relatif à la fixation du contingent annuel d'heures supplémentaires prévu aux articles L. 212-6 du Code du travail et L. 713-11 du Code rural N° Lexbase : L5030GUT), et d'assouplir le régime de la rémunération des heures supplémentaires afin de diminuer le surcoût pour l'entreprise.

La loi du 31 mars 2005 permet, désormais, à l'employeur et au salarié de faire réaliser à ce dernier des heures "choisies" au-delà du contingent annuel des heures libres sans que ces dernières n'aient à être autorisées par l'inspection du travail. L'accord du salarié suffira, alors que dans le cadre des heures autorisées, non seulement le salarié devait donner son accord, mais encore l'employeur devait obtenir l'autorisation de l'inspection du travail. A défaut d'accord le prévoyant, les heures accomplies au-delà du contingent annuel demeureront soumises aux dispositions de l'article L. 212-7.

Ces heures ne pourront être mises en oeuvre dans l'entreprise que sur une base conventionnelle, sans que la loi n'exige toutefois d'accord étendu. Les accords collectifs instituant ces heures choisies fixeront, par ailleurs, le montant de la majoration de salaire due au salarié, sans pouvoir toutefois abaisser cette majoration en deçà de 10 %, la loi reprenant ici le minimum légal prévu pour la rémunération des heures supplémentaires. Lorsque l'accord ne le prévoira pas, les taux applicables en vertu de l'article L. 212-5, I du Code du travail (N° Lexbase : L9589GQ9), qui ont d'ailleurs été modifiés dans les entreprises de 20 salariés et moins (cf infra), s'appliqueront.

La loi prévoit, également, la possibilité d'accorder aux salariés des compensations sous forme de repos compensateur, mais sans imposer de règles impératives ; il s'agit là d'une différence majeure avec le régime des heures autorisées qui donnent obligatoirement lieu à l'attribution d'un repos compensateur (C. trav., art. L. 212-5-1). La seule règle qui s'imposera sera le respect des durées maximum hebdomadaires prévues par l'article L. 212-7 (N° Lexbase : L5854ACS).

On le comprend aussitôt, les garanties légales accordées au salarié dans le cadre de ces heures choisies sont inférieures à celles dont il bénéficie dans le cadre du régime des heures autorisées, et il appartiendra aux partenaires sociaux et, singulièrement, aux syndicats de salariés, de veiller à ce que les droits des salariés soient préservés, notamment s'agissant de la rémunération supplémentaire et surtout du repos compensateur qui n'est plus légalement obligatoire. Toutefois, lorsque les salariés jugeront les majorations ou compensations insuffisantes, ils auront toujours la possibilité de refuser de les accomplir.

Ces dispositions sont également applicables aux salariés ayant conclu des conventions de forfait. Les salariés en forfait heure année pourront ainsi accepter de dépasser le volume contractuellement prévu. La convention devra préciser "notamment les conditions dans lesquelles ces heures sont effectuées, [fixer] la majoration de salaire à laquelle elles donnent lieu ainsi que les conditions dans lesquelles le salarié fait connaître son choix". Le texte n'impose toutefois pas ici de minimum pour la majoration de rémunération due aux salariés.

De nouvelles dispositions sont également prévues pour les salariés en forfait jour. Ces derniers pourront désormais renoncer à "une partie" de leurs jours de repos en contrepartie d'une majoration de salaire dont le montant sera également fixé par l'accord, sans que la loi n'impose ici de minimum ou ne détermine le nombre des jours auxquels le salarié pourra renoncer, contrairement aux dispositions qui figurent dans l'article 4 de la loi (cf infra).

  • Article 4. Prolongation du régime transitoire applicable aux entreprises de 20 salariés et moins

Afin de permettre aux entreprises de 20 salariés et moins de mettre en place progressivement les 35 heures, la loi Aubry II (loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail N° Lexbase : L0988AH3) avait mis en place des dispositions transitoires assouplissant notamment le régime des heures supplémentaires. C'est ce régime transitoire qui se trouve ici conforté et prolongé jusqu'au 31 décembre 2008. Passée cette date, et sauf nouvelle prorogation, le régime commun s'appliquera dans toutes les entreprises.

- Majoration des heures supplémentaires

La loi du 31 mars 2005 prévoit, tout d'abord, des dispositions applicables au paiement des heures supplémentaires dans les entreprises qui ne sont pas soumises à l'accord étendu ou à l'accord d'entreprise, visé par l'article L. 212-5 du Code du travail. Le taux légal applicable, à défaut, est réduit de 25 % à 10 % pour les quatre premières heures supplémentaires.

Par ailleurs, le seuil de calcul du contingent annuel de 220 heures est fixé de manière transitoire à 36 heures.

- Compte épargne temps et RTT

La loi du 31 mars 2005 organise, également, un régime transitoire pour les entreprises qui ne pourraient mettre en oeuvre le compte épargne-temps, à défaut d'accord directement applicable dans l'entreprise.

La loi permet aux salariés (à l'exception des femmes enceintes) de renoncer aux jours de RTT accordés au titre de l'article L. 212-9 (N° Lexbase : L9575GQP) ou aux cadres en forfait jour dans la limite de 10 jours par an, ou aux cadres en forfait heure de travailler au-delà de leur forfait dans la limite de 70 heures par an. La loi fixe ici un seuil minimum de rémunération supplémentaire à 10 %. Ces heures, demi-journées ou journées ne s'imputeront pas sur le contingent annuel des heures supplémentaires.

Afin de favoriser la conclusion de l'accord instituant le compte épargne-temps, la loi autorise la conclusion d'un accord d'établissement avec un salarié mandaté en l'absence de délégué syndical, ou de délégué du personnel faisant fonction de délégué syndical. Ce régime particulier s'ajoute aux dispositions de l'article L. 132-26 du Code du travail (N° Lexbase : L4700DZ4) issues de la loi du 4 mai 2004 (N° Lexbase : L1877DY8) et permet donc cette négociation en l'absence des accords de méthode (étendus) conclus dans les branches ou les professions.

Par ailleurs, la loi du 31 mars 2005 ne prévoit pas la conclusion avec des représentants élus du personnel, comme c'est le cas dans le régime de droit commun des accords d'entreprise, et n'exige donc pas non plus la preuve d'une carence des institutions représentatives élues du personnel.

newsid:72842

Consommation

[Jurisprudence] Domaine d'application de la protection contre les clauses abusives : la Cour de cassation résiste à la "communautarisation" du droit français

Réf. : Cass. civ. 1, 15 mars 2005, n° 02-13.285, Syndicat départemental de contrôle laitier de la Mayenne c/ Société Europe computer systèmes (ECS), FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A2950DHQ)

Lecture: 4 min

N2754AIT

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par David Bakouche, Professeur agrégé des Facultés de droit

Le 07 Octobre 2010


La première chambre civile de la Cour de cassation, le 15 mars dernier, a incontestablement rendu un arrêt important, comme en témoigne, au demeurant, la très large diffusion qu'elle a entendu en faire puisque l'arrêt, à paraître au Bulletin, figurera dans le prochain Rapport annuel de la Cour et est, d'ores et déjà, reproduit sur son site Internet. La question à laquelle la Haute juridiction avait à répondre est, certes, classique, mais demeure, en dépit des années, toujours aussi discutée : portant sur la délimitation du domaine d'application de la législation consumériste de lutte contre les clauses abusives (C. consom., art. L. 132-1 N° Lexbase : L3302DAK), l'interrogation consistait à savoir si peuvent ou non bénéficier de la protection légale les personnes morales ?

En l'espèce, en effet, un syndicat professionnel constitué entre éleveurs, dont l'objet social est d'effectuer les opérations de contrôle de performance, d'état civil et d'identification des animaux, faisait valoir que le contrat de location de matériel informatique avec option d'achat qu'il avait conclu avec une société contenait une clause abusive au sens de l'article L. 132-1, alinéa 1er, du Code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi du 1er février 1995, loi qui, on le sait, a transposé en droit interne la directive du 5 avril 1993 (directive (CE) 93/13 du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs N° Lexbase : L7468AU7). Or, précisément, l'arrêt énonce que "si, par un arrêt du 22 novembre 2001 (1), la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit : 'la notion de consommateur, telle que définie à l'article 2, sous b), de la directive n° 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doit être interprétée en ce sens qu'elle vise exclusivement des personnes physiques', la notion distincte de non professionnel, utilisée par le législateur français, n'exclut pas les personnes morales de la protection contre les clauses abusives".

Pour toutefois, ici, priver le syndicat du bénéfice de la législation consumériste, l'arrêt poursuit en indiquant "que cependant, dès lors qu'en l'espèce le contrat litigieux entre la [société] et le [syndicat] n'avait pu être conclu par ce dernier qu'en qualité de professionnel, les dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 95-96 du 1er février 1995, ne sauraient trouver application".

Aussi bien, "par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués", la Cour approuve-t-elle les premiers juges d'avoir déclaré le contrat conclu entre les parties entièrement applicable.

On rappellera ici que, en effet, la Cour de justice de Communautés européennes s'était, par un arrêt remarqué en date du 22 novembre 2001 (2), montrée fidèle à l'article 2 de la directive européenne du 5 avril 1993 (N° Lexbase : L7468AU7), dont le point b) définit le consommateur comme "toute personne physique qui, dans les contrats relevant de la présente directive, agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle", tandis d'ailleurs que le point c) envisage, lui, la notion de professionnel en se référant tant aux personnes physiques qu'aux personnes morales. Comme on l'avait justement fait alors observer, l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes ne retirait pas pour autant aux Etats membres la liberté d'aller au-delà du domaine harmonisé par une directive minimale, mais à la condition que cette extension de protection résulte, comme l'exigent les clauses minimales insérées dans ce type de directive, de dispositions législatives, réglementaires ou administratives maintenues ou adoptées lors de la transposition en droit interne de la dite directive (3).

Or, précisément, parce que l'article L. 132-1 du Code de la consommation, dans son alinéa 1er, réserve le bénéfice de la protection légale au "consommateur ou non-professionnel", la première chambre civile de la Cour de cassation, par l'arrêt rapporté, et prenant appui sur cette dernière notion de "non-professionnel", "distincte" de celle de consommateur, admet l'extension de la protection légale aux personnes morales (4).

On se permettra tout de même, pour finir, de se demander si l'extension ainsi consacrée du domaine de la protection légale est bien réelle, ou seulement apparente. Dès lors, en effet, que, bien souvent, la personne morale est celle qui agit dans le cadre ou pour les besoins de son activité professionnelle, elle sera considérée par la Cour de cassation comme ayant conclu un contrat ayant un "rapport direct " avec son activité professionnelle, et donc, en fait, exclue d'office du bénéfice de la protection légale contre les clauses abusives (5). La formulation de l'arrêt du 15 mars dernier est au reste à cet égard très révélatrice : la Haute juridiction ne prend même plus la peine de répondre à la question de savoir si le contrat avait ici ou non un rapport direct avec l'activité professionnelle du co-contractant, et se contente, procédant par affirmation, de relever, pour exclure l'application des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, qu'il n'avait pu agir "qu'en qualité de professionnel".


(1) CJCE, 22 novembre 2001, aff. C-541/99, Cape Snc (N° Lexbase : A5814AXM).
(2) JCP éd. G, 2002, II, 10047, note G. Paisant, D. 2002, Somm. p. 2929, obs. J.-P. Pizzio, RTDCiv. 2002, p. 291, obs. J. Mestre et B. Fages.
(3) Voir, en ce sens, J.-P. Pizzio, obs. préc.
(4) Voir déjà, implicitement sans doute, Cass. civ. 1, 5 mars 2002, n° 00-18.202, Commune de Bayonne c/ Société atlantique d'assainissement et de dégazage (SAADEG), FS-P (N° Lexbase : A1820AY3), RTDCiv. 2002, p. 291, obs. J. Mestre et B. Fages.
(5) Voir notamment, Cass. civ. 1, 24 janvier 1995, n° 92-18.227, Société Héliogravure Jean Didier c/ Electricité de France (EDF) (N° Lexbase : A7947AGG), Bull. civ. I, n° 54 ; addendum, récemment, Cass. civ. 2, 18 mars 2004, n° 03-10.327, Caisse nationale de prévoyance assurances c/ M. Jean Fourcade, F-P+B (N° Lexbase : A6082DBU), JCP éd. G, 2004, II, 10106, note D. Bakouche ; D. Bakouche, La protection légale contre les clauses abusives n'est pas applicable au contrat d'assurance accessoire à des prêts professionnels, Lexbase Hebdo n° 116 du 15 avril 2004 - édition affaires (N° Lexbase : N1224ABX).

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Baux commerciaux

[Jurisprudence] Rappels sur les modalités de la cessation d'un bail commercial

Réf. : Cass. civ. 3, 9 mars 2005, n° 03-15.734, Société Résid'Hôtel Savoie c/ M. Rémi Chatel, FS-D (N° Lexbase : A2578DHX)

Lecture: 6 min

N2696AIP

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par Julien Prigent, Avocat à la cour d'appel de Paris

Le 07 Octobre 2010

Le bailleur qui s'abstient de procéder par acte extrajudiciaire ne donne pas valablement congé. Tel est l'enseignement d'un arrêt du 9 mars 2005 qui rappelle une règle solidement établie, mais encore parfois méconnue. Cette décision est, également, l'occasion de revenir sur les modalités de cessation d'un bail commercial sur initiative de l'une des parties. En l'espèce, par acte sous seing privé du 2 mai 1991, un locataire avait pris à bail un appartement en vue d'une exploitation para-hôtelière. Ce bail, soumis au statut des baux commerciaux, avait été conclu pour une durée de neuf ans et devait se terminer le 31 décembre 2000. Par lettre recommandée avec avis de réception du 10 juillet 1999, le bailleur avait informé le locataire de son intention de ne pas renouveler le bail à son échéance. Par acte du 18 octobre 2000, le locataire avait sollicité le renouvellement de son bail. Le bailleur ayant conservé les clés de l'appartement après l'avoir occupé à la fin du mois de décembre 2000, le locataire l'a assigné en restitution et en paiement, à titre provisionnel, d'une indemnité d'occupation. Le bailleur s'est opposé à ces prétentions, et a demandé que le locataire soit condamné sous astreinte à lui communiquer certaines pièces.

I - L'exigence d'un congé : principe et exceptions

Selon le droit commun, un bail cesse à l'expiration du terme contractuel sans qu'il soit nécessaire de donner congé (C. civ., art. 1737 N° Lexbase : L1859ABH). La règle est différente en matière de bail commercial, où l'une des parties devra délivrer un congé pour qu'il y soit mis fin (C. com., L. 145-9, al. 1er N° Lexbase : L5737AIC). A défaut de congé, le bail se poursuivra par tacite prorogation, et non par tacite reconduction, selon le terme maladroitement utilisé par l'article L. 145-9 du Code de commerce, dans la mesure où c'est le même bail, et non un nouveau bail, qui se poursuivra à l'expiration du terme contractuel. Le bail qui se poursuit sera à durée indéterminée et il y sera mis fin, là encore, par la délivrance d'un congé donné suivant les usages locaux et au moins six mois à l'avance (Cass. civ. 3, 7 décembre 2004, n° 03-19.226, Société La Belle Bleue c/ Société civile immobilière (SCI) Billancourt, F-P+B N° Lexbase : A3705DEX).

Cette règle, selon laquelle un bail commercial ne cesse que par l'effet d'un congé, connaît, cependant, deux exceptions et un tempérament. Tout d'abord, il a toujours été admis que les parties puissent valablement mettre fin au contrat les liant en concluant une convention de résiliation amiable ou un nouveau bail (Cass. civ. 3, 10 octobre 2001, n° 00-10.807, M. Tixier c/ M. Lecaudey N° Lexbase : A2026AWX, AJDI 2002, p. 373, obs. J.-P. Blatter) ou en prévoyant, dès la conclusion du bail initial, que ce dernier sera automatiquement renouvelé à son expiration (Cass. civ. 3, 27 octobre 2004, n° 03-15.769, FS-P+B N° Lexbase : A7412DDU, Rev. loyers, 2005, note J. Prigent), le renouvellement d'un bail impliquant in fine sa cessation. Ensuite, il doit également être relevé qu'à défaut de congé, le preneur peut former une demande de renouvellement (C. com., art. L. 145-10, al. 1er N° Lexbase : L5738AID), dont les effets sont assimilables à ceux d'un congé. Il sera mis fin au bail initial qui se trouvera renouvelé, si le bailleur garde le silence dans les trois mois de cette demande ou l'accepte expressément. Il sera simplement mis fin au bail initial sans renouvellement s'il refuse, ce refus devant, à l'instar du congé et de la demande, être donné par acte extrajudiciaire.

II - La forme du congé

Aux termes de l'article L. 145-9, alinéa 5, du Code de commerce, le congé doit être donné par acte extrajudiciaire. La Cour de cassation veille scrupuleusement au respect de cette règle, qu'elle a érigé en règle impérative insusceptible d'être mise à l'écart par la volonté des parties (voir, par exemple, Cass. civ. 3, 24 janvier 1996, n° 94-13.095, Société Les Produits franco-helléniques c/ Société du 206-208, rue de Noisy-le-Sec à Bagnolet N° Lexbase : A9726ABT), même lorsque le statut des baux commerciaux est applicable en raison de son extension conventionnelle (Ass. plén., 17 mai 2002, n° 00-11.664, M. Caporal c/ Société Groupe Ribourel, P N° Lexbase : A6534AYN, Précisions sur la liberté des parties de procéder à une extension conventionnelle du statut des baux commerciaux, J. Prigent, Lexbase Hebdo n° 26 du 6 juin 2002 - édition affaires N° Lexbase : N3027AAD). Seul un accord des parties postérieur à cette délivrance pourra couvrir la nullité des formalités préalables à la convention (voir, par exemple, Cass. civ. 3, 15 mai 1996, n° 94-16.407, Société Agence Z c/ Société Financière Générale d'Investissements N° Lexbase : A9919ABY et CA Paris, 16ème ch., sect. A, 13 octobre 2004, n° 03/04330, SARL Edex Val de Seine c/ Compagnie Financière Savoy N° Lexbase : A8071DDB).

Le congé qui n'a pas été délivré par acte extrajudiciaire est nul, sans que celui qui invoque cette nullité soit contraint de prouver qu'il a subi un grief du fait de ce vice de forme (voir, par exemple, Cass. civ. 3, 8 juin 1982, n° 81-10.365, Amblard c/ SARL Sodasem, Fiorino N° Lexbase : A8820AH7 et Cass. civ. 3, 13 décembre 2000, n° 99-14.878, Société CAPIM et autre c/ Société Erca Gec N° Lexbase : A1161AIT), l'article 114 du Nouveau Code de procédure civile (N° Lexbase : L1950ADL) ne trouvant pas à s'appliquer. L'arrêt rapporté censure les juges du fond, qui avaient décidé que le bail avait effectivement pris fin par l'effet du congé délivré par le bailleur, alors que ce congé avait été donné par simple lettre recommandée avec accusé de réception.

Il convient de relever, par ailleurs, que la nullité sanctionnant le non-respect de cette formalité est une nullité relative qui ne peut être invoquée que par le destinataire du congé (Cass. civ. 3, 20 décembre 1982, n° 81-13.495, SARL Télé Rapid c/ Consorts Bricard N° Lexbase : A7585AGZ, Bull. civ. III, n° 257; Cass. civ. 3, 19 mai 1993, n° 91-16.254, Mlle Marie-José Soyez c/ Société générale N° Lexbase : A8443AGS; Cass. civ. 3, 18 mai 1994, n° 92-17.028, Société Astrid c/ Société Chassialu N° Lexbase : A7140AB3, Bull. civ. III, n° 103). Le bailleur ne saura, ainsi, être admis à contester la validité d'un congé qu'il a délivré par lettre simple. Le preneur, en revanche, pourra, soit se prévaloir de ce congé, soit lui dénier tout effet. Il a, également, été jugé que le bailleur professionnel de l'immobilier qui recevait un congé par lettre recommandée avec accusé de réception, conformément aux stipulations du bail, devait informer son locataire de la nullité du congé. A défaut, le bailleur engage sa responsabilité (Cass. civ. 3, 5 novembre 2003, n° 01-17.530, FS-P+B N° Lexbase : A0655DAI).

Enfin, lorsque le preneur forme une demande de renouvellement, cette dernière doit également être effectuée sous forme d'acte extrajudiciaire. A défaut, elle ne produit aucun effet, sans que le bailleur n'ait, également, à apporter la preuve d'un grief (Cass. civ. 3, 11 février 1987, n° 85-16.162, M Bouayad c/ Mme Naret N° Lexbase : A6607AAX; Cass. civ. 3, 10 juillet 1996, n° 94-18.249, Consorts Bourse c/ Société Caprigem N° Lexbase : A9989ABL; CA Paris, 16ème ch. B, 21 décembre 1994, SCI 28, Bd Poissonière c/ Société International Language School for adults).

Faute de congé régulier, le bail se poursuit. Dans l'espèce rapportée, le preneur avait donc pu valablement, après la délivrance d'un congé par lettre recommandée, former une demande de renouvellement auprès du bailleur. Les juges du fond avaient, toutefois, relevé que cette demande avait été formée à une mauvaise date et qu'aucun effet ne pouvait y être accordé. La Cour de cassation ne s'est pas prononcée directement sur cette question. Or, il semble qu'en ce qui concerne la date à laquelle elle a été formée, la demande soit régulière. En effet, la demande de renouvellement doit intervenir dans les six mois précédents le terme contractuel ou, en cas de tacite prorogation, à tout moment (C. com. art. L. 145-10). Or, en l'espèce, le bail expirait le 31 décembre 2000 et le renouvellement du bail avait été sollicité par le preneur le 18 octobre 2000. Il appartiendra à la cour d'appel de renvoi, après avoir constaté que le bail s'était poursuivi faute de congé régulier, de confirmer ce point et de tirer les conséquences de cette demande.

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Procédures fiscales

[Jurisprudence] Administration des impôts et commission des infractions fiscales : à chacune ses compétences !

Réf. : Cass. crim., 9 mars 2005, n° 04-87.507, Procureur général près la cour d'appel de Douai c/ Patrick Jartel, F-P+F+I (N° Lexbase : A4297DHM)

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par Valérie Le Quintrec, Université de Bourgogne

Le 07 Octobre 2010

Dans un arrêt en date du 9 mars 2005, la Chambre criminelle de la Cour de cassation précise la procédure à suivre en cas de délit de fraude fiscale, ainsi que les rôles respectifs de l'administration des impôts et de la commission des infractions fiscales. Faisant une interprétation stricte des textes applicables en la matière, la Haute assemblée rappelle que les compétences de l'administration fiscale ne sauraient empiéter sur celles de la commission et inversement.

En l'espèce, un gérant de deux sociétés civiles immobilières avait soustrait ces dernières à l'établissement et au paiement de la TVA, en constituant des crédits fictifs de taxe et en minorant le chiffre d'affaires imposable. Relevant un délit de fraude fiscale, l'administration avait, alors, saisi la commission des infractions fiscales, cette dernière rendant ultérieurement un avis conforme. Par la suite, l'administration avait déposé plainte et envoyé au gérant deux lettres recommandées avec accusé de réception correspondant à l'avis de la commission. Il est à noter que ces lettres n'ont jamais été retirées par son destinataire. Ce dernier, pour sa défense, avait soulevé l'exception de nullité des poursuites.

La Cour de cassation, dans cette affaire, censure l'arrêt des juges administratifs d'appel, aux motifs que, d'une part, il appartient au demandeur à l'exception de rapporter la preuve des irrégularités qu'il invoque et, d'autre part, aucun texte n'impose à l'administration des impôts, partie civile, de produire des documents provenant d'un organisme administratif indépendant.

De prime abord, il convient de souligner qu'à la différence des autres délits de droit commun,  celui de fraude fiscale n'est pas poursuivi d'office par l'autorité normalement compétente, à savoir le procureur de la République. Ce dernier, ne peut, en effet, mettre en mouvement  l'action publique que dans la mesure où l'administration a, préalablement, déposé une plainte. Ce dépôt constitue une formalité substantielle, dont l'observation est d'ordre public. Ainsi, une fois la décision d'engager les poursuites adoptée, l'administration doit prendre l'avis de la commission des infractions fiscales, sous peine d'irrecevabilité  de la plainte, et cela, quelle que soit la nature de l'infraction (Cass. crim., 15 décembre 1987, n° 87-83.475, André Defretin et Dominique Morlinghem c/ Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie N° Lexbase : A9212AAG).

En l'espèce, la solution donnée par la Chambre criminelle repose sur une lecture minutieuse des articles L. 228 (N° Lexbase : L8327AE7) et R. 228-2 du LPF (N° Lexbase : L4042AEG), qui fixe la procédure suivie devant la commission.

Ainsi, aux termes de l'article L. 228 du LPF, les plaintes tendant à l'application de sanctions pénales en matière d'impôts directs, de taxe sur la valeur ajoutée et autres taxes sur le chiffre d'affaires, de droits d'enregistrement, de taxe de publicité foncière et de droits de timbre sont, sous peine d'irrecevabilité, déposées par l'administration sur avis conforme de la commission des infractions fiscales. La commission est, alors, invitée à donner un avis simple sur la proposition du ministre chargé des Finances de renvoyer le dossier au pénal. Le ministre est lié par cet avis, ainsi, rendu. A cet égard, il convient de souligner que la commission des infractions fiscales ne constitue pas un premier degré de juridiction. En conséquence, les séances de la commission et de ses sections ne sont pas publiques. Aussi, l'autorité compétente qui les a saisies et le contribuable ne peuvent assister à leurs délibérations. Néanmoins, la Cour européenne des droits de l'Homme a considéré, dans une décision en date du 26 septembre 1996, que l'article 6 § 1 de la CEDSH (N° Lexbase : L7558AIR) est applicable à cette procédure (CEDH, 26 septembre 1996, n° 47/1995/553/639, Miaihe c/ France N° Lexbase : A3186AUK). La Cour de cassation n'a, cependant, pas suivi cette position, dans la mesure où la commission n'est qu'un organisme destiné à donner son avis au ministre chargé des Finances sur l'opportunité des poursuites (Cass. crim., 16 mai 2001, n° 00-82.649, Gaydamak Arcadi c/ Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie N° Lexbase : A5692ATY).

Par ailleurs, l'article R. 228-2 du LPF précise que, lorsque la commission est saisie, le secrétariat en informe le contribuable par lettre recommandée avec avis de réception. Il lui communique l'essentiel des griefs qui motivent cette saisine et l'invite, en même temps, à faire parvenir à la commission, dans un délai de trente jours, les informations qu'il estimerait nécessaires.

De l'analyse de ces deux articles, on peut en conclure que l'administration et la commission des infractions fiscales ont des rôles bien distincts.

En effet, la première a pour mission de déposer plainte après avoir rempli son unique obligation légale, consistant à soumettre à la commission l'affaire qui semble pouvoir donner lieu à l'établissant d'une plainte. Quant à la commission des infractions fiscales, elle rend un avis concernant l'affaire et en informe le contribuable par lettre recommandée avec accusé de réception.

Force est, donc, de constater que seule la commission informe le contribuable, sous forme de LRAR, des griefs qui lui sont reprochés.

La jurisprudence ne manque, d'ailleurs, pas de le rappeler.

Ainsi, dans un arrêt de la Chambre criminelle de la cour de cassation en date du 14 mars 1996, il a été précisé qu'en application de l'article L. 228 du LPF, la commission des infractions fiscales n'a pas d'autre obligation que d'informer le contribuable de sa saisine, par lettre recommandée avec avis de réception, expédiée à sa dernière adresse connue de l'administration, la réception effective de ladite lettre ne dépendant pas de cette commission (Cass. crim., 14 mars 1996, n° 94-83.565, Administration des impôts c/ Charles Petit N° Lexbase : A8876ABD).

Or, en l'espèce, le défaut de production des lettres par l'administration lié au fait que le destinataire ne soit pas venu les retirer, engendrait, pour la cour d'appel de Douai, l'irrecevabilité des plaintes déposées par les services fiscaux.

En d'autres termes, les juges du second degré jugeaient que "le défaut de production de ces lettres empêchait toute vérification sur l'objet et l'étendue de la saisine de la commission et ne permettait pas davantage de vérifier la régularité de la procédure suivie".

Se faisant l'écho de la décision de la cour d'appel, le gérant poursuivi soulevait, en outre, l'exception de nullité des poursuites aux moyens que "n'étaient jointes au dossier de la procédure pénale ni la lettre visée par l'article R. 228-2 du LPF, par laquelle la CIF informe le contribuable de sa saisine, des griefs essentiels la motivant et l'invite à lui faire parvenir dans le délai de 30 jours les informations qu'il estimerait utiles, ni la justification de sa notification régulière au contribuable".

Au cas particulier, la Chambre criminelle de la Cour de cassation casse et annule l'arrêt de la cour d'appel de Douai.

Il convient de constater qu'elle ne se prononce aucunement sur les conséquences du délit de fraude fiscale pour le prévenu. En revanche, elle se borne à faire une interprétation littérale des articles L. 228 et R. 228-2 du LPF et, se faisant, rappelle très explicitement aux juges du second degré qu'aucun texte n'impose à l'administration des impôts, partie civile, de produire des documents provenant d'un organisme administratif indépendant, à savoir en l'espèce la commission des infractions fiscales.

En conséquence, l'irrecevabilité des plaintes déposées par l'administration ne pouvait être soulevée, la production ou non des lettres provenant de la commission des infractions fiscales n'étant pas une obligation pour les services fiscaux.

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Social général

[Manifestations à venir] Réforme des licenciements économiques : ce que vous devez savoir !

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Le 07 Octobre 2010

Elegia organise une journée d'actualité, le 14 avril 2005, à Paris, pour mesurer l'impact de la réforme des licenciements économiques.
  • Public concerné

Directeurs des RH, directeurs des relations sociales, responsables RH, responsable Administration du Personnel, directeurs Généraux, juristes, avocats.

  • Thèmes abordés

- La Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences : une nouvelle obligation de négocier pour l'entreprise
- L'accord de méthode : vers des licenciements économiques négociés ?
- La remise en cause de la jurisprudence Framatome-Majorette : modification du seuil déclencheur d'un plan de sauvegarde de l'emploi
- Le risque d'annulation des licenciements économiques : la nouvelle donne
- La consultation et l'information du CE : les nouveautés apportées par la réforme
- La création des conventions de reclassement personnalisé : une obligation pour l'employeur

  • Date et lieu du stage

Le 14 avril 2005, à Paris

  • Inscriptions

Elégia Formation
80 avenue de la Marne
92546 Montrouge
Tel : 01.40.92.37.37 - 01.40.92.69.20

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