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Le 07 Octobre 2010
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Réf. : Loi n° 2004-1370 du 20 décembre 2004, de financement de la Sécurité sociale pour 2005 (N° Lexbase : L5021GUI)
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N4174AB9
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par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Haute Alsace
Le 07 Octobre 2010
Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale comprenait initialement 35 articles. Treize articles additionnels ont été introduits par l'Assemblée nationale. Sur ces 48 articles, le Sénat en a adopté 28 conformes et en a ajouté 20 nouveaux. Le Conseil constitutionnel s'est donc interrogé sur la place de certains articles (la plupart d'entre eux introduits par voie d'amendements parlementaires) dans une loi de financement de Sécurité sociale (Cons. const., décision n° 2004-508 DC, du 16 décembre 2004, Loi de financement de la Sécurité sociale pour 2005 N° Lexbase : A3783DET). Or, aux termes du 19ème alinéa de l'article 34 de la Constitution (N° Lexbase : L1294A9S), issu de la révision constitutionnelle de 1996, les lois de financement de la Sécurité sociale déterminent les conditions générales de son équilibre financier et, compte tenu de leurs prévisions de recettes, fixent ses objectifs de dépenses, dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique. En l'espèce, 6 articles ont été censurés comme étrangers au domaine des lois de financement de la Sécurité sociale.
1. Principales dispositions de la loi de financement de la Sécurité sociale 2005
1.1. Branche maladie
Le Gouvernement à présenté une réforme, axée sur le contrôle médicalisé des dépenses, qui s'est traduite par l'adoption de la loi du 13 août 2004 (loi n° 2004-810 du 13 août 2004, relative à l'assurance maladie N° Lexbase : L0836GT7). L'exécution de l'Ondam 2004 se traduit par un dérapage supplémentaire. Le Sénat a, d'ailleurs, relevé que seul le premier Ondam de l'histoire parlementaire, celui de 1997, a été respecté. En effet, non seulement cet objectif a été systématiquement dépassé depuis 1998, mais encore son dépassement est allé croissant sur la période jusqu'en 2002. Ceci a conduit les pouvoirs publics à envisager la mise en en place d'un cadrage financier pluriannuel des dépenses d'assurance maladie.
La mise en place d'un nouveau mode d'allocation des ressources, la tarification à l'activité, a été prévue par la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2004 (loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003, de financement de la Sécurité sociale pour 2004 N° Lexbase : L9699DLS). L'objectif de la tarification à l'activité est de financer tous les établissements selon un même modèle, en fonction de l'activité qu'ils ont effectivement réalisée. Elle concerne, dans un premier temps, la seule activité de court séjour (médecine, chirurgie, obstétrique).
Cette activité sera, désormais, appréciée au travers du classement de chaque séjour hospitalier dans l'un des groupes homogènes de séjour auquel sera rattaché un tarif. La loi organise une montée en charge progressive de ce nouveau mode de financement, qui s'applique depuis le 1er janvier 2004 pour les établissements de santé sous dotation globale, et depuis le 1er octobre 2004 pour les établissements privés sous objectif quantifié national.
1.2. Branche accidents du travail et maladies professionnelles
Pour 2005, l'objectif de dépenses de la branche accidents du travail et maladies professionnelles de l'ensemble des régimes obligatoires de base, comptant plus de 20 000 cotisants, actifs ou retraités titulaires de droits propres, est fixé à 10,5 milliards d'euros (art. 51).
Le montant de la contribution de la branche accidents du travail et maladies professionnelles du régime général de la Sécurité sociale au financement du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (mentionnée au VII de l'article 53 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2001, loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000, de financement de la Sécurité sociale pour 2001 N° Lexbase : L5178AR9) est fixé à 200 millions d'euros au titre de l'année 2005 (art. 45).
Le montant de la contribution de la branche accidents du travail et maladies professionnelles du régime général de la Sécurité sociale au financement du Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (mentionné au III de l'article 41 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 1999, loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, de financement de la Sécurité sociale pour 1999 N° Lexbase : L5411AS9), est fixé à 600 millions d'euros au titre de l'année 2005 (art. 46).
La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2005 a institué, au profit du Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (créé par l'article 41 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 1999 n° 98-1194 du 23 décembre 1998), une contribution, due pour chaque salarié ou ancien salarié à raison de son admission au bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité (art. 47). Cette contribution est à la charge de l'entreprise qui a supporté (ou qui supporte), au titre de ses cotisations pour accidents du travail et maladies professionnelles, la charge des dépenses occasionnées par la maladie professionnelle provoquée par l'amiante dont est atteint le salarié ou ancien salarié. Le montant de la contribution varie en fonction de l'âge du bénéficiaire au moment de son admission au bénéfice de l'allocation.
1.3. Branche famille
Pour 2005, l'objectif de dépenses de la branche famille de l'ensemble des régimes obligatoires de base comptant plus de 20 000 cotisants actifs ou retraités titulaires de droits propres est fixé à 46,2 milliards d'euros (art. 55). Dans un contexte budgétaire sensible, la branche famille a dû arbitrer entre plusieurs priorités, dans le choix de la politique mise en oeuvre en direction des familles. L'accueil de l'enfant et l'aide aux familles défavorisées ont constitué les deux priorités.
Mesure phare de la loi de financement pour 2004, la Paje a pour objectif l'accompagnement financier des familles à la naissance ou l'adoption d'un enfant, puis à sa garde, dans le cadre familial ou par un tiers. La Paje est entrée en vigueur le 1er janvier 2004 pour tous les enfants nés ou adoptés à compter de cette date, en remplaçant l'allocation pour jeune enfant (APJE courte et longue), l'allocation d'adoption, l'allocation parentale d'éducation (APE), l'allocation de garde d'enfant à domicile (Aged) et l'aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée (AFEAMA).
En 1980, moins de 1 000 enfants étrangers, provenant de dix pays d'origine, étaient accueillis en France, soit un nombre équivalent à celui des pupilles de l'Etat confiés à des familles françaises. En 20 ans, le nombre d'adoptions internationales a quadruplé, atteignant, en 2003, le chiffre de 3 995 enfants provenant de 70 pays. Mais ce sont, au mieux, 5 000 enfants qui sont adoptés chaque année. Le Sénat a approuvé la mise en oeuvre d'une réforme d'envergure des procédures d'adoption.
Après l'intégration des enfants adoptés dans le dispositif Paje en 2004, le législateur, dans le cadre du présent PLFSS, a entendu doubler la prime à l'adoption, soit 1 600 euros, pour un coût total de 2 millions d'euros. Compte tenu du coût des démarches effectuées par les familles, cette mesure est largement justifiée.
Les modalités de versement du fonds spécial et sa répartition entre les unions d'associations familiales, les conditions dans lesquelles les fédérations, confédérations ou associations familiales adhérant aux unions peuvent en bénéficier ainsi que les modalités d'évaluation de son utilisation sont fixées par voie réglementaire. Le montant du fonds spécial est fixé pour 2005 à 24,31 millions d'euros.
1.4. Branche vieillesse
Pour 2005, l'objectif de dépenses de la branche vieillesse et veuvage de l'ensemble des régimes obligatoires de base comptant plus de 20 000 cotisants actifs ou retraités titulaires de droits propres est fixé à 156,7 milliards d'euros (art. 59).
La loi de financement de Sécurité sociale pour 2005 a essentiellement porté, en matière d'assurance vieillesse, sur le régime de la retraite des électriciens. En effet, depuis sa création en 1946, le financement des retraites du régime spécial de Sécurité sociale des personnels gaziers et électriciens, reposait sur les salariés et les entreprises de la branche. La libéralisation des marchés du gaz et de l'électricité ont, pourtant, rendu inévitable une modification en profondeur de ces mécanismes. Il est donc apparu indispensable de garantir et d'élargir le mode de financement des retraites d'EDF et de GDF, tout en préservant les spécificités du régime spécial.
La loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières (N° Lexbase : L0813GTB) a mis en oeuvre le principe d'un alignement sur les régimes de droit commun.
2. La loi de financement de la Sécurité sociale, sous le contrôle du Conseil constitutionnel
La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2005, définitivement adoptée le 2 décembre 2004, a été déférée dès le lendemain par plus de soixante députés et par plus de soixante sénateurs de l'opposition. Plus succincts que ceux des années précédentes, ces recours étaient rédigés dans les mêmes termes et mettaient en cause deux articles : l'article 14 (sur les recettes des organismes de Sécurité sociale) et l'article 42, à propos de l'objectif national de dépenses de l'assurance maladie.
2.1. Dépenses
En application du 3° du I de l'article LO 111-3 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L5954ADU), l'article 42 de la loi déférée détermine, pour l'année 2005, l'objectif national de dépenses d'assurance maladie de l'ensemble des régimes obligatoires de base (Ondam) : il est fixé à 134,9 milliards d'euros.
Selon les requérants, cet objectif est manifestement fixé à un niveau trop bas. Ils ont fait valoir que cette sous-estimation appellera des mesures de redressement portant nécessairement atteinte aux exigences du onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 (N° Lexbase : L6815BHU) relatives à la protection de la santé. En effet, la tendance spontanée de croissance des dépenses de santé étant très supérieure à l'Ondam, les diverses autorités de régulation prévues par la loi sur l'assurance maladie du 13 août 2004 devraient prendre des mesures correctrices si draconiennes que les exigences du Préambule de la Constitution de 1946 relatives à la santé seront inévitablement méconnues.
Sur le premier point, comme l'admettaient eux-mêmes les requérants, seule une erreur manifeste d'appréciation pourrait être sanctionnée en la matière par le Conseil constitutionnel. L'Ondam est non une prévision, mais un objectif. Compte tenu des aléas affectant toute estimation de cette sorte, accentués en 2005 par les impondérables inhérents au calendrier de mise en oeuvre de la réforme d'août 2004, l'Ondam fixé pour 2005 n'est entaché d'aucune erreur manifeste.
Selon le Conseil constitutionnel, l'objectif de dépenses fixé pour l'année 2005 correspond à une progression de 3,2 % par rapport à l'objectif révisé pour l'année 2004. Il a été déterminé en tenant compte de l'évolution spontanée des dépenses de santé, ainsi que des mesures de rétablissement financier et de réorganisation prévues, notamment, par la loi du 13 août 2004 susvisée. Au regard des aléas qui lui sont inhérents, l'évaluation contestée n'est entachée d'aucune erreur manifeste (Cons. const., décision n° 2004-508 DC, du 16 décembre 2004, loi de financement de la Sécurité sociale pour 2005 N° Lexbase : A3783DET).
Le second point présupposait que la tendance spontanée de croissance des dépenses de soins exprime des besoins constitutionnellement incompressibles en matière de santé. En droit constitutionnel de la Sécurité sociale, il existe une zone très large de mesures qui, tout en présentant un caractère restrictif, ne sont pas d'une nature ou d'une ampleur telle que se trouveraient nécessairement sacrifiées les garanties légales des exigences constitutionnelles en matière de santé.
Les réserves d'interprétation contenues dans les considérants 13 et 19 de la décision n° 2004-504 DC du Conseil constitutionnel du 12 août 2004 (Cons. const., décision n° 2004-504 DC, du 12 août 2004, loi relative à l'assurance maladie N° Lexbase : A1527DDW), invoquées par les requérants, ne seront donc pas nécessairement méconnues du seul fait d'un dépassement de l'Ondam, à supposer que celui-ci ait été fixé à un niveau trop optimiste.
Ces réserves, émises dans la décision du 12 août 2004 sur la réforme de l'assurance maladie, invitent les autorités compétentes à faire preuve de mesure et de discernement dans les décisions correctrices qu'elles seraient conduites à prendre. Mais, la décision du 12 août 2004 n'interdit pas aux pouvoirs publics de concilier les différentes exigences constitutionnelles en cause, exigences au nombre desquelles figure la sauvegarde de l'équilibre financier de l'assurance maladie. La loi du 13 août 2004 n'a entendu déclencher aucun plan de restrictions automatiques en instituant, par son article 40, un comité d'alerte sur l'évolution des dépenses d'assurance maladie.
C'est pourquoi le Conseil constitutionnel a décidé que, conformément aux dispositions du Code de la Sécurité sociale résultant de la loi du 13 août 2004, des mesures de redressement doivent intervenir lorsque il existe un risque sérieux que les dépenses d'assurance maladie dépassent l'objectif de plus de 0,75 %. Mais, il ne ressort pas des éléments soumis au Conseil constitutionnel que, si cette hypothèse se réalisait en 2005, les mesures mises en oeuvre remettraient en cause, par leur nature et leur ampleur, les exigences du onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 relatives à la protection de la santé (décision du Conseil constitutionnel n° 2004-508 DC du 16 déc. 2004, prec.).
2.2. Recettes
Conformément aux prescriptions de l'article LO. 111-3 du Code de la Sécurité sociale (2° du I) (N° Lexbase : L5954ADU), l'article 14 de la loi de financement de la Sécurité sociale arrête, pour 2005, les prévisions de recettes, par catégorie, de l'ensemble des régimes obligatoires de base et des organismes créés pour concourir à leur financement. Les requérants reprochaient à ces prévisions de manquer de sincérité, le Parlement ayant été maintenu dans le doute, pendant toute une partie de la procédure législative, sur les conséquences financières pour la Sécurité sociale de l'institution, par un autre texte en cours de discussion (loi de programmation pour la cohésion sociale : Christophe Willmann, La réforme du service public de l'emploi et de l'insertion professionnelle des jeunes dans la tourmente du projet de loi de cohésion sociale, Lexbase Hebdo n° 141 du 3 novembre 2004 - édition sociale N° Lexbase : N3352ABR et Projet de loi de cohésion sociale : pour une réforme des contrats de travail aidés et de certaines aides à l'emploi, Lexbase Hebdo n° 142 du 10 novembre 2004 - édition sociale N° Lexbase : N3441AB3), d'un nouveau type de contrat de travail aidé au titre des politiques publiques de l'emploi, appelé le contrat d'avenir.
Selon les requérants, la façon dont ces prévisions ont été établies remet en cause la sincérité de la loi dans son ensemble. Ils ont fait valoir que le Gouvernement aurait dissimulé au Parlement, jusqu'au dernier moment, ses intentions en ce qui concerne la prise en charge des exonérations de cotisations de Sécurité sociale dont est assorti le contrat d'avenir, institué par l'article 29 du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale (devenu les articles 48 à 50 de la loi de programmation pour la cohésion sociale du 20 décembre 2004). Ils observent que, jusqu'au 1er décembre 2004, ce projet ne comportait aucune dérogation à l'article L. 131-7 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L1575GUU), en vertu duquel de telles exonérations doivent être compensées par le budget de l'Etat, alors que les crédits correspondants ne figuraient pas parmi les prévisions de recettes de la Sécurité sociale.
Cette compensation n'a été expressément écartée, par amendement au projet de loi de programmation pour la cohésion sociale, que la veille de l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur la loi de financement de la Sécurité sociale, soit trop tardivement, selon eux, pour que le défaut de sincérité de celle-ci puisse être considéré comme corrigé.
Le Conseil constitutionnel n'a pas suivi les requérants dans leurs conclusions. Il a relevé que les prévisions mentionnées au 2° du I de l'article LO. 111-3 du Code de la Sécurité sociale doivent être initialement établies par le Gouvernement au regard des informations disponibles à la date du dépôt du projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Il lui appartient d'informer le Parlement, au cours de l'examen de ce projet de loi, lorsque surviennent des circonstances de droit ou de fait de nature à remettre en cause les conditions générales de l'équilibre financier des régimes obligatoires de base de la Sécurité sociale et, en pareille hypothèse, de corriger les prévisions initiales.
Le Conseil constitutionnel a ensuite souligné qu'il appartient au législateur, lorsqu'il arrête ces prévisions, de prendre en compte l'ensemble des données dont il a connaissance et qui ont une incidence sur le montant des recettes des régimes obligatoires de base et des organismes créés pour concourir à leur financement. Mais, ces prévisions sont, inévitablement, affectées des aléas inhérents à de telles estimations.
C'est donc au regard de ces différents éléments que doit être appréciée la sincérité de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2005, s'agissant des modalités de prise en charge des mesures d'exonération de cotisations de Sécurité sociale dont font l'objet les contrats d'avenir. Or, en l'absence de disposition expresse contraire, l'article L. 131-7 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L1575GUU) impose que les mesures d'exonération de cotisations sociales soient intégralement compensées par l'Etat aux régimes concernés et que le législateur en tire les conséquences dans la loi de finances et dans la loi de financement de la Sécurité sociale.
Mais, en l'espèce, le législateur a expressément écarté l'application aux contrats d'avenir des dispositions de l'article L. 131-7. Cette volonté ne s'est, pour la première fois, traduite dans un texte soumis au Parlement que le 1er décembre 2004, alors même que la commission mixte paritaire avait déjà été réunie sur la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2005. Mais, selon le Conseil constitutionnel, cette circonstance n'est pas critiquable. En effet, la loi déférée n'avait pas encore été définitivement adoptée. En outre, l'intention du Gouvernement de ne pas compenser les exonérations de cotisations sociales accompagnant les contrats d'avenir avait été formulée avant que ne débute l'examen en première lecture tant de la loi de programmation pour la cohésion sociale que de la loi de financement de la Sécurité sociale (décision du Conseil constitutionnel n° 2004-508 DC du 16 décembre 2004, prec.).
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Réf. : Cass. com., 23 novembre 2004, n° 03-17.141, M. Franck Michel c/ Société Creuset et autres F-P+B (N° Lexbase : A0396DEE)
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par Pierre-Michel Le Corre, Professeur des Universités, Directeur du Master Droit de la Banque de la Faculté de Toulon et du Var
Le 07 Octobre 2010
Nous avions, pour notre part, relevé que l'action n'était pas ouverte par le texte au commissaire à l'exécution du plan, alors, pourtant, que cette institution a qualité pour engager une action en nullité de la période suspecte (Dalloz Action, Droit et pratique des procédures collectives, n° 65-81). Poursuivant l'institution de cet organe en défenseur de l'intérêt collectif des créanciers, la Chambre de la Cour de cassation considère, ici, que l'absence de visa du commissaire à l'exécution du plan dans la liste des personnes ayant qualité pour agir en rapport ne fait pas obstacle à ce que pareille qualité lui soit reconnue. La solution, dont l'opportunité au demeurant n'est pas discutable, ne nous semble cependant pas pouvoir être pleinement approuvée.
D'une part, la lettre du texte nous semblait limitativement attribuer la qualité à agir et la Cour de cassation ne manque pas, en d'autres domaines, de rappeler l'importance du caractère limitatif des listes qu'établit le législateur, lorsqu'il réglemente la saisine d'actions attitrées. Il est à rappeler, par exemple, que la Cour de cassation a dénié au commissaire à l'exécution du plan qualité pour demander l'application de la faillite personnelle au motif qu'il n'était pas visé par la loi au rang des personnes pouvant mettre en oeuvre cette action (Cass. com., 24 septembre 2003, n° 00-11.010, FS-P+B N° Lexbase : A6149C9M, D. 2003, AJ p. 2438 ; JCP éd E 2004 chron. 151, p. 174, n° 5, obs. Ph. Pétel).
D'autre part, la solution posée résulte, à notre sens, d'un sophisme. La majeure du syllogisme est que le commissaire à l'exécution du plan est un organe de défense de l'intérêt collectif des créanciers et qu'il tient le pouvoir d'engager des actions. Pourtant, il n'est prévu (C. com., art. L. 621-68, al. 2 N° Lexbase : L6920AI7) que la possibilité de continuer les actions engagées par le représentant des créanciers ou l'administrateur judiciaire. Le commissaire à l'exécution du plan est, comme l'énonce l'article L. 621-68, alinéa 1er, du Code de commerce, "chargé de veiller à l'exécution du plan". C'est sa mission de principe. Toute autre mission à lui confiée est spéciale, telle celle de continuer les actions engagées par l'administrateur ou le représentant des créanciers. La législation des procédures collectives n'énonce nullement que le commissaire à l'exécution du plan serait un organe de défense de l'intérêt collectif des créanciers. Nous ne pouvons donc approuver cette nouvelle avancée de la Cour de cassation, qui, à partir d'un postulat qui nous semble erroné, en parvient à la conclusion du syllogisme : puisque le commissaire à l'exécution du plan a qualité pour engager les actions tendant à la défense de l'intérêt collectif des créanciers, il a qualité pour agir en rapport.
La logique formelle est impeccable. Il n'empêche : il y a bien là oeuvre créatrice d'un droit qui n'est pas inscrit dans le Code de commerce, même si ce faisant la Cour de cassation répare peut-être, sans doute même, une malfaçon législative. Le projet de réforme a, d'ailleurs, pris acte de que les textes devaient être revus, et prévoit, en ce sens, la possibilité pour le commissaire à l'exécution du plan d'engager les actions contre les tiers, dès lors qu'elles tendent à la défense de l'intérêt collectif des créanciers.
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Réf. : Conclusions de M. F. G. Jacobs à propos de l'affaire C-39/04
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par Jean-Marc Priol, Avocat au Barreau de Paris, Landwell & Associés
Le 07 Octobre 2010
Il est rappelé qu'aux termes de l'article 49 du Traité CE "les restrictions à la libre prestation des services à l'intérieur de la Communauté sont interdites à l'égard des ressortissants des Etats membres établis dans un pays de la Communauté autre que celui du destinataire de la prestation".
Quant à l'article 244 quater B du CGI, celui-ci prévoit que "les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt égal à 50 % de l'excédent des dépenses de recherche exposées au cours d'une année par rapport à la moyenne des dépenses de même nature, revalorisées de la hausse des prix à la consommation, exposées au cours des deux années précédentes" et correspondant à des opérations réalisées en France .
Ainsi, la législation française critiquée comporte une différence de traitement entre les contribuables, selon le lieu d'exécution de la prestation du service jouant au détriment des prestataires de services d'autres Etats membres.
A la question ainsi posée, à titre préjudiciel, par le tribunal administratif de Dijon, l'Avocat général, M. F.G. Jacobs, propose à la Cour de dire pour droit (point 21) que les dispositions françaises, en ce qu'elles réservent le bénéfice du crédit d'impôt recherche aux seules recherches réalisées en France, s'opposent aux dispositions de l'article 49 du Traité CE dans la mesure elles ne sauraient échapper au champ d'application dudit article (points 15 à 20) en vertu du principe de la territorialité fiscale et en l'absence de toute justification (points 22 à 35), conduisant le législateur à anticiper la réforme des dispositions de l'article 244 quater B du CGI par voie d'amendement dans le cadre des discussions sur la loi de finances rectificative pour 2004 (LFR 2004).
1. La France a tenté de justifier que la différence de traitement découlait du principe de territorialité de l'impôt se référant ainsi à la jurisprudence "Futura" de la Cour, à propos de la liberté d'établissement visée à l'article 43 du Traité CE (CJCE 15 mai 1997, aff. C-250/95, Futura Participations SA et Singer c/ Administration des contributions, point 22 N° Lexbase : A0119AWC).
L'Avocat général, au cas d'espèce, écarte l'application de cette jurisprudence en faisant observer que le postulat essentiel sur lequel reposait cette dernière "était que les contribuables résidents ne fassent pas l'objet d'un traitement plus favorable que les non résidents".
Or, il se trouve que les dispositions françaises permettent "à des contribuables qui font appel à des centres de recherche nationaux bénéficient d'un traitement plus favorable que ceux qui recourent à des centres de recherche établis dans d'autres Etats membres" (CJCE, 28 avril 1998, aff. C-118/96, Jessica Safir c/ Skattemyndigheten i Dalarnas län, anciennement Skattemyndigheten i Kopparbergs län N° Lexbase : A0371AWN, points 20 à 25 des conclusions).
La législation française serait donc contraire à l'article 49 du Traité CE en ce qu'elle conduirait à créer "une barrière fiscale qui, en dissuadant les entreprises établies en France de recourir aux centres de recherche situés dans d'autres Etats membres, entrave la prestation transfrontalière de services".
Cette situation présente une très grande similitude avec l'arrêt "Baxter" à propos, toujours, de la liberté d'établissement visée à l'article 43 du Traité CE (CJCE, 8 juillet 1999, aff. C-254/97, Société Baxter, B. Braun Médical SA, Société Fresenius France et Laboratoires Bristol-Myers-Squibb SA c/ Premier Ministre, Ministère du Travail et des Affaires sociales, Ministère de l'Economie et des Finances et Ministère de l'Agriculture, de la Pêche et de l'Alimentation N° Lexbase : A0511AWT).
Il est rappelé que, dans cette affaire, la législation française, imposant une taxe aux entreprises du secteur pharmaceutique tout en admettant la déduction des dépenses afférentes aux seules opérations de recherche réalisées en France, a été considéré comme incompatible avec la liberté d'établissement inscrite à l'article 43 du Traité CE, dans la mesure où cette législation introduisait une discrimination entre, d'une part, les laboratoires français dont l'essentiel de la recherche est effectué en France, et, d'autre part, les laboratoires étrangers dont les principales unités de recherche étaient situées hors du territoire français.
La Cour constatant que la législation fiscale française constituerait un obstacle pour les entreprises ayant leur siège principal dans d'autres Etats membres et opérant en France par le biais d'un établissement secondaire, a jugé que cette législation était contraire à la liberté d'établissement (CJCE, 8 juillet 1999, aff. C-254/97, Société Baxter, B. Braun Médical SA, Société Fresenius France et Laboratoires Bristol -Myers-Squibb SA c/ Premier Ministre, Ministère du Travail et des Affaires sociales, Ministère de l'Economie et des Finances et Ministère de l'Agriculture, de la Pêche et de l'Alimentation, points 10, 13 et 21 ; CJCE, 13 juillet 1993, aff. C-330/91, The Queen c/ Inland Revenue Commissioners, ex parte Commerzbank AG, point 14 N° Lexbase : A9483AUR), aux motifs que "les règles d'égalité de traitement inscrites à l'article 43 CE prohibent non seulement les discriminations ostensibles fondées sur la nationalité (ou le siège en ce qui concerne les sociétés), mais encore toutes formes dissimulées de discrimination, qui, par application d'autres critères de distinction, aboutissent en fait au même résultat".
Trouvant ainsi, en l'espèce, une analogie avec l'arrêt "Baxter", l'Avocat général considère donc que la législation française sur le crédit impôt recherche "favorise les entreprises établies en France qui effectuent des recherches en France et dissuade ces entreprises de faire appel à des centres de recherche situés dans d'autres Etats membres "instituant ainsi une différence de traitement fiscal ayant "pour conséquence directe d'entraver la prestation transfrontalière de services à de telles entreprises par des établissements de recherche situés dans d'autres Etats membres".
Or, selon toujours l'Avocat général, la jurisprudence constante de la Cour sur l'application des dispositions de l'article 49 du Traité CE "exige non seulement l'élimination de toute discrimination à l'encontre du prestataire de services établi dans un autre Etat membre en raison de sa nationalité, mais également la suppression de toute restriction lorsqu'elle est de nature à rendre moins attrayantes les activités du prestataire établi dans un autre Etat membre, dans lequel il fournit légalement des services analogues" (CJCE, 9 juillet 1997, aff. C-222/95, Société civile immobilière Parodi c/ Banque H. Albert de Bary et Cie, point 18 N° Lexbase : A0099AWL).
Il s'ensuit que toute différence de traitement fondée sur le lieu d'exécution d'une prestation de services est interdite par l'article 49 du Traité CE (CJCE, 28 avril 1998, aff. C-118/96, Jessica Safir c/ Skattemyndigheten i Dalarnas län, anciennement Skattemyndigheten i Kopparbergs län ; CJCE, 28 octobre 1999, aff. C-55/98, Skatteministeriet c/ Bent Vestergaard N° Lexbase : A0580AWE).
2. Ce traitement différencié ne serait, selon l'Avocat général, se trouver, en premier lieu, justifié par la "préservation de la cohérence du système de l'impôt sur les sociétés en France" (CJCE, 28 janvier 1992, aff. C-204/90, Hanns-Martin Bachmann c/ Etat belge N° Lexbase : A9890AUT) ; CJCE, 28 janvier 1992, aff. C-300/90, Commission des Communautés européennes c/ Royaume de Belgique N° Lexbase : A9599AU3) ou encore par des "raisons impérieuses d'intérêt général propres à garantir la réalisation de l'objectif qu'elles poursuivent, sans aller au-delà de ce qui est nécessaire pour qu'il soit atteint" (CJCE, 23 novembre 1999, aff. C-369/96, Procédures pénales c / Jean-Claude Arblade et Arblade & Fils SARL et Bernard Leloup, points 34 et 35 N° Lexbase : A5884AYL).
L'Avocat général souligne que, pour la Cour, pour qu'une telle justification puisse prospérer "il faut que soit établie l'existence d'un lien direct entre l'avantage fiscal concerné et la compensation de cet avantage par un prélèvement fiscal déterminé" (CJCE, 7 septembre 2004, aff. C-319/02, Petri Manninen, point 42 N° Lexbase : A2692DD3 et points 51 à 80 des conclusions de l'Avocat général Kokott ; CJCE, 14 février 1995, aff. C-279/93, Finanzamt Köln-Altstadt c/ Roland Schumacker, point 42 N° Lexbase : A1803AWP)
En effet, selon lui et en l'espèce, il n'y a aucun lien direct entre la déduction visée par l'article 244 quater B du CGI et l'impôt français sur les sociétés par référence à la jurisprudence précitée, dans la mesure où "les entreprises pharmaceutiques assujetties à l'impôt français sur les sociétés ont le droit de déduire les frais afférents à des opérations de recherche réalisées en France".
En second lieu, toujours selon l'Avocat général, la différence de traitement ne se trouverait pas plus justifiée par "la promotion de la recherche et du développement" dont la Cour a déjà jugé ce moyen irrecevable (CJCE, 5 juin 1997, aff. C-398/95, Syndesmos ton en Elladi Touristikon kai Taxidiotikon Grafeion c/ Ypourgos Ergasias, point 23 N° Lexbase : A0323AWU ; CJCE, 28 avril 1998, aff. C-158/96, Raymond Kohll c/ Union des caisses de maladie, point 41 N° Lexbase : A0384AW7 ; CJCE, 23 novembre 1999, aff. C-369/96, Procédures pénales c/ Jean-Claude Arblade et Arblade & Fils SARL, points 34 et 35 et point 59 des conclusions de l'Avocat général Ruiz-Jarabo Colomer), étant observé en outre que la législation française serait contraire aux objectifs exprimés dans la troisième partie du traité, au titre XVIII intitulé "Recherche et développement technologique", qui mentionne "notamment la nécessité pour les entreprises d'être capables d'exploiter pleinement les potentialités du marché intérieur à la faveur, notamment, de [...] l'élimination des obstacles [...] fiscaux à [la coopération entre entreprises et centres de recherche]" .
Enfin, toujours selon l'Avocat général, la différence de traitement ne saurait être justifiée par l'invocation de "l'efficacité des contrôles fiscaux" et, notamment, par la difficulté de vérifier le montant des frais déductibles dans l'Etat membre au titre des dépenses de recherche, conduisant à la restriction à l'exercice d'une liberté fondamentale garantie par le Traité, dans le sens où la France ne saurait "par sa réglementation nationale empêcher de manière absolue le contribuable de rapporter la preuve que les dépenses afférentes aux activités de recherche réalisées dans d'autres Etats membres ont réellement été engagées" (CJCE, 8 juillet 1999, aff. C-254 /97, Société Baxter, B. Braun Médical SA, Société Fresenius France et Laboratoires Bristol-Myers-Squibb SA c/ Premier Ministre, Ministère du Travail et des Affaires sociales, Ministère de l'Economie et des Finances et Ministère de l'Agriculture, de la Pêche et de l'Alimentation, points 18, 19 et 20 ; CJCE, 15 mai 1997, aff. C-250 /95, Futura Participations SA et Singer c/ Administration des contributions, point 3).
3. Anticipant l'arrêt à venir de la Cour dans cette affaire, le Gouvernement a proposé, par voie d'amendement, dans le cadre des discussions sur la loi de finances rectificative pour 2004 (LFR 2004, n° 2004-1485 N° Lexbase : L5204GUB), de modifier les a, d et d bis du II de l'article 244 quater du CGI, pour permettre aux entreprises d'externaliser une part de leurs opérations de recherche auprès d'établissements agréés situés dans d'autres Etats membres de la Communauté européenne ou dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale contenant une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude fiscale ou l'évasion fiscale.
Pour qu'une entreprise soit éligible au dispositif du crédit impôt recherche, il ne sera donc plus nécessaire que les opérations de recherche qu'elle effectue soient réalisées uniquement en France.
Toutefois, ces opérations devront toujours correspondre à des dépenses retenues pour la détermination du résultat imposable dans les conditions de droit commun qu'elles soient réalisées en France ou dans l'espace économique européen.
La sous-traitance d'opérations de recherche auprès d'établissements publics ou privés agréés implantés en France ou dans l'espace économique européen ne saura autorisée que dans la limite d'un plafond global de 2 000 000 euros par an (CGI, art. 244 quater-II d ter).
L'extension des dépenses de sous-traitance à l'ensemble de la Communauté européenne devrait conduire à supprimer dans la loi, la référence aux centres techniques exerçant une mission d'intérêt général au regard du crédit d'impôt recherche lesquels devraient être assimilés, par voie d'instruction administrative, aux organismes de recherche publics et des universités.
Ces nouvelles dispositions ont été définitivement adoptées par le Parlement et s'appliquent au crédit d'impôt calculé au titre des dépenses de recherche exposées à compter du 1er janvier 2005.
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Le 07 Octobre 2010
Selon l'article L. 123-8 du Code de commerce (N° Lexbase : L5566AIY), la personne assujettie à immatriculation au registre du commerce et des sociétés, en vertu de l'article L. 123-1 du Code de commerce (N° Lexbase : L5559AIQ), ne peut se prévaloir, jusqu'à son immatriculation, de la qualité de commerçant, tant à l'égard des tiers que des administrations publiques ; par conséquent, la femme d'un commerçant, mentionnée au registre du commerce et des sociétés (RCS) en qualité de conjoint collaborateur, ne peut se prévaloir de la qualité de commerçant afin d'être admise au bénéfice de la liquidation judiciaire de son mari.
Les liquidités fournies par le dirigeant social de la société débitrice peuvent permettre d'écarter la caractérisation de l'état de cessation des paiements.
II - Rémunération des intervenants à la procédure collective
Ce texte a modifié sur plusieurs points les décrets du 27 décembre 1985. Tant pour le décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985, relatif au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises (N° Lexbase : L9117AGR), que pour le décret n° 85-1390 du 27 décembre 1985, fixant le tarif des administrateurs judiciaires en matière commerciale et des mandataires liquidateurs (N° Lexbase : L0005A93), les références à la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises ont été remplacées par les références aux dispositions correspondantes du Code de commerce. Le décret n° 85-1390, qui prévoit les différents modes de rémunérations des organes de la procédure, a également subi quelques modifications, la plus notable étant la suppression du droit proportionnel de 5 %.
Ce texte apporte certaines précisions quant aux modalités d'application du décret n° 2004-518 du 10 juin 2004 précité.
La demande de taxe, faite oralement ou par écrit, au secrétaire du tribunal de grande instance, en application de l'article 29 du décret n° 85-1390 du 27 décembre 1985 (N° Lexbase : L2672A8H), doit être motivée. Le défaut de motivation constitue une fin de non-recevoir qui doit être relevée d'office par le juge.
Cette disposition n'ayant pas été modifiée par le décret du 10 juin 2004 précité, cette solution est toujours d'actualité.
Le droit proportionnel alloué à l'administrateur judiciaire en cas de cession, effectuée en application de l'article L. 621-83 du Code de commerce (N° Lexbase : L6935AIP), ne lui est dû que sous la condition de la signature des actes de cession permettant la mise en oeuvre du plan.
Seules les rémunérations des techniciens désignés par le juge-commissaire, en application de l'article L. 621-12 du Code de commerce (N° Lexbase : L6864AI3), celles des personnes qualifiées désignées en application de l'article 164 du décret du 27 décembre 1985 (N° Lexbase : L5278A4A) ou celles des techniciens désignés pour exécuter des mesures d'instruction en application des articles 232 et suivants du Nouveau Code de procédure civile (N° Lexbase : L2436ADL), peuvent donner lieu à une avance du Trésor public dans les conditions fixées par l'article L. 627-3 du Code de commerce (N° Lexbase : L7078AIY).
Les honoraires d'un cabinet comptable, désigné pour assister le liquidateur judiciaire, afin, notamment, de mener des investigations sur les responsabilités encourues par les dirigeants et de procéder à la révision du compte client dans le cadre de l'article 37 de la loi n° 85-99 du 25 janvier 1985 (N° Lexbase : L6771AHA) et de l'article 31 du troisième décret du 27 décembre 1985 (N° Lexbase : L2645A8H), qui ne sont pas applicables en pareil cas, ne peuvent donner lieu à une avance par le Trésor public.
III - Distinction entre créances antérieures et créances postérieures
Lorsque la nullité de la vente est prononcée après l'ouverture de la procédure collective, la créance de restitution du prix née de l'annulation de la vente n'est pas une créance ayant son origine antérieurement à l'ouverture de la procédure collective, dont le paiement pourrait être exigé en application du droit de rétention prévu à l'article L. 622-21 du Code de commerce. Il s'agit là d'une solution constante.
(Sur ce sujet, lire : P.-M. Le Corre, La nature de la créance de restitution née de l'annulation d'une vente et le droit des procédures collectives, Lexbase Hebdo n° 142 du 10 novembre 2004 - édition affaires N° Lexbase : N3489ABT).
Il ressort de cet arrêt, rendu au visa de l'article L. 621-32 du Code de commerce (N° Lexbase : L6884AIS), que la créance de la caution qui a payé la dette et qui agit contre son cofidéjusseur, sur le fondement de l'article 2033 du Code civil ([LXB=L1037ABZ ]), prend naissance à la date de l'engagement de caution.
(Sur ce sujet, lire : P.-M. Le Corre, Du fait générateur de la créance de remboursement détenue par la caution, Lexbase Hebdo n° 129 du 14 juillet 2004 - édition affaires N° Lexbase : N2336AB7).
Par quatre arrêts diffusés du même jour, la Chambre commerciale de la Cour de cassation a affirmé que la créance de dommages-intérêts pour procédure abusive, mise à la charge du débiteur, trouve son origine dans la décision qui prononce la condamnation et entre dans les prévisions de l'article L. 621-32 du Code de commerce ([LXB=L6884AIS ]), lorsque cette décision est postérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective.
(Sur ce sujet, lire : Cécile Petitjean, La date de naissance des créances de dommages-intérêts pour procédure abusive et des créances de frais et dépens, Lexbase Hebdo n° 129 du 14 juillet 2004 - édition affaires N° Lexbase : N2333ABZ).
Au visa de l'article L. 621-43 du Code de commerce (N° Lexbase : L6895AI9), la Haute cour a énoncé que la créance de remboursement d'un crédit immobilier, dont l'offre a été acceptée antérieurement à l'ouverture de la procédure collective, a son origine antérieurement au jugement d'ouverture et doit, dès lors, être déclarée.
(Sur ce sujet, lire : A. Ecuyer, Le crédit immobilier, un contrat consensuel, Lexbase Hebdo n° 111 du 10 mars 2004 - édition affaires N° Lexbase : N0825AB8).
IV - La déclaration de créance
1) Les créances devant être déclarées et admises
La créance alléguée par un partenaire commercial au titre d'un protocole d'accord, aux termes duquel le débiteur a accordé à celui-ci, qui avait pris en charge une contribution globale de 1 085 400 francs TTC (soit 165 482 euros), une clause de retour à meilleure fortune constatée par l'existence de fonds propres d'un montant supérieur à 9 000 000 francs (soit 1 372 160 euros), doit être admise au passif, l'obligation de paiement contractée avant le jugement d'ouverture étant affectée d'un terme indéterminé et non d'une condition.
Lorsqu'à l'occasion d'un acte de vente, l'acquéreur s'engage à payer à un créancier du vendeur la dette dont ce dernier est redevable, cette opération s'analyse en une délégation, au sens de l'article 1275 du Code civil (N° Lexbase : L1385ABW). Par conséquent, le délégataire ne peut opposer au créancier délégué l'extinction de sa créance, faute d'avoir été déclarée à la procédure collective prononcée à l'encontre du délégant.
2) L'auteur de la déclaration de créance
Le conseil d'administration a le pouvoir de nommer un préposé de la société pour déclarer les créances, avec ou sans faculté de délégation.
Aux termes de l'article L. 621-43, alinéa 2, du Code de commerce ([LXB=L6895AI9 ]), "la déclaration des créances peut être faite par le créancier ou par tout préposé ou mandataire de son choix". Cette déclaration de créance peut, ainsi, être effectuée par le liquidateur amiable d'une société en nom collectif, désigné par l'assemblée générale des associés. Une telle déclaration est régulière même si la nomination du liquidateur n'a pas encore été publiée.
La déclaration est valable, lorsqu'elle a été effectuée par le président du conseil d'administration de la société créancière, quand bien même la nomination de ce dernier n'aurait pas encore fait l'objet d'une publication au registre du commerce et des sociétés.
En cas de délégations de pouvoir successives, il y a lieu de vérifier si chacune d'elles justifiait du pouvoir de déclarer les créances, dont bénéficie le subdélégué.
3) Délai de déclaration
Il résulte des articles L. 621-28, alinéa 1er, du Code de commerce ([LXB=L6880AIN ]) et 66, alinéa 2, du décret du 27 décembre 1985 (N° Lexbase : L5358A49), que lorsque l'administrateur judiciaire décide de ne pas poursuivre un contrat en cours, sans avoir au préalable été mis en demeure, le délai supplémentaire d'un mois pour déclarer la créance résultant de la résiliation de la convention court à compter de la date de notification de la décision prononçant cette résiliation.
4) Modalités de la déclaration
L'irrégularité de la déclaration de créance tenant à la présentation des sommes déclarées comme échues, alors qu'elles étaient à échoir n'est pas sanctionnée par l'extinction de la créance. Lorsque la somme restant due en capital, ainsi que les intérêts conventionnels avec précision du taux, figurent dans la déclaration de créance, la banque créancière exprime de façon non équivoque sa volonté de réclamer des sommes échues et à échoir, outre les intérêts conventionnels.
V - L'admission des créances
Le juge-commissaire, dès lors qu'il a signé la liste des créances déclarées établie par le représentant des créanciers et contenant ses propositions d'admission des créances non contestées, a décidé d'admettre ces créances.
Conformément à l'article L. 621-104 du Code de commerce (N° Lexbase : L6956AIH), la Cour de cassation considère que le juge-commissaire est seul compétent pour statuer sur l'admission d'une créance au passif du débiteur principal.
Le juge-commissaire est seul compétent pour vérifier l'existence des conditions d'admission d'une créance fiscale.
Dès lors que le créancier a été convoqué devant le juge-commissaire dans le délai de trente jours ouvert par l'article L. 621-47 du Code de commerce (N° Lexbase : L6899AID), et a comparu devant lui, la sanction prévue par cette même disposition ne lui est pas applicable, et ce, peu important l'absence de réponse de sa part à la lettre de contestation du représentant des créanciers.
Aux termes de l'article 1844-7, 7°, du Code civil (N° Lexbase : L2027ABP), la société prend fin par l'effet du jugement ordonnant la liquidation judiciaire ou la cession totale de ses actifs. La société doit, donc, être représentée par un liquidateur amiable ou un mandataire ad hoc. Par conséquent, elle ne peut faire appel, par son gérant, contre la décision du juge-commissaire admettant les créances déclarées.
Il ressort de cet arrêt, rendu au visa de l'article L. 621-46 Code de commerce (N° Lexbase : L6898AIC), que lorsque le juge-commissaire statue sur la demande en inopposabilité de la forclusion du créancier titulaire d'une sûreté ou d'un contrat de crédit-bail publiés qui n'a pas été avisé personnellement, l'appel de sa décision est porté devant la cour d'appel.
(Sur ce sujet, lire : E. Le Corre-Broly, La voie de recours sur l'ordonnance statuant en matière d'inopposabilité de la forclusion, Lexbase Hebdo n° 112 du 17 mars 2004 - édition affaires N° Lexbase : N0873ABX).
VI - Contrats en cours et résiliation
En l'absence de mise en demeure par le cocontractant, la renonciation de l'administrateur à la poursuite du contrat n'entraîne pas la résiliation de plein droit de la convention à son initiative, mais confère au seul cocontractant le droit de la faire prononcer en justice et une telle demande n'entre pas dans les attributions du juge-commissaire.
(Sur ce sujet, lire : P.-M. Le Corre, L'absence d'équivalence de la non-continuation du contrat et de sa résiliation en l'absence de mise en demeure, Lexbase Hebdo n° 129 du 14 juillet 2004 - édition affaires N° Lexbase : N2356ABU).
L'article L. 621-28 du Code de commerce (N° Lexbase : L6880AIN) permet la continuation des contrats en cours à la date d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire. Cette disposition n'est pas applicable au contrat de vente de biens mobiliers dont la propriété est réservée et dont le prix n'est pas payé lors de l'ouverture de la procédure collective.
Le bail commercial renouvelé après délivrance d'un congé est un nouveau bail, le précédent cessant par l'effet du congé. Il en résulte qu'il ne constitue pas un contrat en cours dont l'administrateur du redressement judiciaire du preneur peut exiger l'exécution. L'Assemblée plénière rend sa décision au triple visa des articles L. 145-9 du Code de commerce (N° Lexbase : L5737AIC), L. 145-12 du même code (N° Lexbase : L5740AIG) et de l'article 37 de la loi du 25 janvier 1985 dans sa rédaction (N° Lexbase : L6667AHE) applicable aux faits de l'espèce.
(Sur ce sujet, lire : P.-M. Le Corre, Selon l'Assemblée plénière, le bail renouvelé est un contrat qui n'est plus en cours, Lexbase Hebdo n° 120 du 12 mai 2004 - édition affaires N° Lexbase : N1574ABW).
VII - Réserve de propriété et revendication
Suivant une solution classique, la Haute cour a rappelé que le délai d'un mois pour saisir le juge-commissaire court à compter de l'expiration du délai imparti au mandataire de justice pour répondre à la demande en revendication qu'il a reçue. En outre, elle a précisé que l'augmentation du délai prévu par l'article 643 du Nouveau Code de procédure civile (N° Lexbase : L2909AD4) - pour les créanciers résidant à l'étranger - ne s'applique pas à l'action en revendication portée devant le juge-commissaire, celle-ci n'étant pas considérée comme un recours.
L'article L. 621-28 du Code de commerce (N° Lexbase : L6880AIN) permet la continuation des contrats en cours à la date d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire. Cette disposition n'est pas applicable au contrat de vente de biens mobiliers dont la propriété est réservée et dont le prix n'est pas payé lors de l'ouverture de la procédure collective.
Le jugement arrêtant le plan de continuation a mis fin à la procédure collective, le débiteur ayant été remis à la tête de ses affaires ; le propriétaire des matériels peut, donc, dès lors, en obtenir la restitution par l'effet de la résiliation irrévocable du bail.
(Sur ce sujet, lire : E. Le Corre, Les conséquences de l'inopposabilité du droit de propriété résultant de l'absence de revendication du propriétaire, Lexbase Hebdo n° 121 du 19 mai 2004 - édition affaires N° Lexbase : N1628ABW).
L'existence du privilège de vendeur d'immeuble n'exclut pas le droit pour le vendeur d'invoquer la clause de réserve de propriété stipulée dans l'acte de vente, même si ce privilège a été publié.
VIII - Le plan de redressement
Le tribunal détermine la durée de la mission du commissaire l'exécution du plan (C. com., art. L. 621-68, al. 1 N° Lexbase : L6920AI7). A défaut d'indication, la mission du commissaire à l'exécution du plan durera jusqu'à la clôture de la procédure, cette durée étant toutefois limitée à 10 ans - durée maximale du plan - portée à 15 ans pour les agriculteurs, depuis la loi du 10 juin 1994.
Aux termes de l'article L. 621-96, alinéa 3, du Code de commerce (N° Lexbase : L6948AI8), en cas de cession de l'entreprise à la suite de l'adoption d'un plan de redressement, la charge des sûretés immobilières et mobilières spéciales, garantissant le remboursement d'un crédit consenti à l'entreprise pour lui permettre le financement d'un bien sur lequel portent ces sûretés, est transmise au cessionnaire. La Chambre commerciale de la Cour de cassation a estimé "qu'il en résulte que le crédit devant être affecté, l'acte par lequel il est accordé doit préciser sa destination et prévoir la sûreté qui en garantira le remboursement".
Selon l'article L. 621-88, alinéa 4, du Code de commerce (N° Lexbase : L6940AIU), en cas de cession d'un contrat de crédit-bail, l'option d'achat ne peut être levée qu'en cas de paiement des sommes restant dues dans la limite de la valeur du bien fixée d'un commun accord entre les parties ou, à défaut, par le tribunal à la date de la cession. La Chambre commerciale de la Cour de cassation a, récemment, précisé que "le plafonnement ainsi prévu ne s'applique qu'aux sommes demeurées impayées du chef du précédent crédit-preneur en procédure collective, le cessionnaire n'étant pas dispensé du paiement de l'intégralité des sommes qui lui incombent personnellement au titre du contrat cédé".
Par application a contrario de l'article L. 621-85 du Code de commerce (N° Lexbase : L6937AIR), la caution non solidaire peut se prévaloir des dispositions du plan. Elle peut également se prévaloir des remises de dette accordées dans le cadre de ce plan.
Le jugement arrêtant le plan de cession de l'entreprise met fin, dès son prononcé, à la période d'observation et le débiteur retrouve alors la totalité de ses pouvoirs, sous réserve de ceux qui sont attribués à l'administrateur, pour la mise en oeuvre du plan, et au commissaire au plan, pour veiller à son exécution et vendre les biens non compris dans le plan de cession. Dès lors, le débiteur ne peut, s'agissant d 'une société dissoute en application de l'article 1844-7, 7°, du Code civil (N° Lexbase : L2027ABP) et dont le dirigeant est privé de ses pouvoirs à compter de la décision arrêtant le plan de cession totale des actifs, exercer ses droits et actions que par l'intermédiaire de son liquidateur amiable ou d'un mandataire de justice spécialement désigné à cet effet.
L'ancien représentant légal de la société dissoute par l'effet d'un plan de cession totale a qualité, comme tout intéressé, pour demander la désignation d'un mandataire ad hoc chargé de représenter cette société pour l'exercice de ses droits propres.
IX - Le dessaisissement du débiteur en liquidation judiciaire
Il résulte de la combinaison des articles 1166 du Code civil (N° Lexbase : L1268ABL), L. 511-1 du Code du travail (N° Lexbase : L6558ACU) et L. 622-9 du Code de commerce (N° Lexbase : L7004AIA), que la reconnaissance de l'existence d'un contrat de travail est un droit exclusivement attaché à la personne de celui qui se prétend salarié, et que ce droit ne peut être exercé, ni par les créanciers, ni par les organes de procédure collective.
L'action tendant à être autorisé à disposer du bien donné avec clause d'inaliénabilité (C. civ., art. 900-1 N° Lexbase : L3542ABS), subordonnée à des considérations personnelles d'ordre moral ou familial, est exclusivement attachée à la personne du donataire. Elle ne peut donc être exercée par le liquidateur judiciaire (C. com., art. L. 622 -9 N° Lexbase : L7004AIA).
(Sur ce sujet, lire: F. Labasque, L'autorisation de disposer d'un bien avec clause d'inaliénabilité : action exclusivement attachée à la personne du débiteur en liquidation judiciaire..., Lexbase Hebdo n° 148 du 22 décembre 2004 - édition affaires ([LXB=N4026ABQ ]).
En application des dispositions de l'article L. 622-9 du Code de commerce (N° Lexbase : L7004AIA), les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur. L'action en responsabilité dirigée par le débiteur contre l'Etat ne vise pas à sanctionner une atteinte personnelle à ses droits mais tend à obtenir la réparation d'un préjudice résultant d'une faute lourde qu'aurait commise l'Etat sur le fondement de l'article L. 781-1 Code de l'organisation judiciaire (N° Lexbase : L3351AM3). Revêtant un caractère patrimonial susceptible d'affecter les droits des créanciers, cette action entre dans les prévisions de l'article L. 622-9 du Code de commerce et ne peut donc être exercée par le débiteur.
L'arrêt retient que le liquidateur, avec l'autorisation du juge-commissaire, a vendu l'immeuble litigieux faisant partie du patrimoine du débiteur qui comprend, outre les biens qu'il possède lors de l'ouverture de la procédure, ceux qu'il a acquis au cours de la procédure en infraction avec la règle du dessaisissement, et fait ressortir que la réalisation d'un actif en vue de permettre le paiement des créanciers dont les droits sont reconnus n'implique ni la ratification par le liquidateur de l'acquisition faite par le débiteur, ni celle du prêt assorti d'une sûreté ayant permis cette acquisition.
(Sur ce sujet, lire : P.-M. Le Corre, Acquisition au moyen d'un prêt et dessaisissement du débiteur en liquidation judiciaire, Lexbase Hebdo n° 129 du 14 juillet 2004 - édition affaires N° Lexbase : N2335AB4).
X - Compétences du liquidateur judiciaire
Le liquidateur désigné dans la nouvelle procédure collective trouve, dans les pouvoirs qui lui sont dévolus par la loi, en vue de la défense de l'intérêt collectif des créanciers, qualité pour poursuivre les actions reprises ou engagées aux mêmes fins, avant la résolution du plan, par le commissaire à l'exécution du plan.
(Sur ce sujet, lire : P.-M. Le Corre, Poursuite par le liquidateur des actions introduites par le commissaire à l'exécution du plan après résolution du plan, Lexbase Hebdo n° 121 du 19 mai 2004 - édition affaires N° Lexbase : N1624ABR).
XI - Vente des actifs dans le cadre de la liquidation judiciaire
La reprise de certains contrats de travail ne saurait se substituer à l'exigence d'un prix réel dans le cadre d'une cession d'actifs d'une entreprise en liquidation.
En l'espèce, un juge-commissaire, au visa des articles L. 622-16 (N° Lexbase : L7011AII) et L. 622-18 (N° Lexbase : L7013AIL) du Code de commerce, avait autorisé un liquidateur à organiser la mise à disposition de l'outil d'exploitation d'une société et la réalisation de certains actifs au profit d'une société à créer. Le liquidateur avait, alors, procédé à la cession, pour un prix de 5 francs (soit 70 centimes d'euro), de trois aéronefs, d'un matériel d'exploitation, d'un stock, de deux créances dont l'une pouvant atteindre 1 000 000 francs (soit 152 530 euros) et de la billetterie dans la limite de 5 000 000 francs (soit 762 660 euros). Les juges d'appel, à la demande de l'Assedic et de l'AGS, avaient annulé l'ordonnance et le jugement la confirmant, au motif que le juge-commissaire était sorti des limites de ses attributions. En effet, l'engagement pris par le cessionnaire de reprendre certains contrats de travail n'ayant pas été considéré par les juges d'appel comme une contrepartie des biens cédés, ces cessions ne pouvaient constituer des ventes faute de prix réel, au regard de la définition de la vente donnée par l'article 1582 du Code civil (N° Lexbase : L1668ABE). Approuvant, pour les mêmes motifs, la position des juges du fond, les juges de la Chambre commerciale de la Cour de cassation ont rejeté le pourvoi formé par le liquidateur.
La vente des immeubles d'un débiteur en liquidation judiciaire par le liquidateur, fût-elle de gré à gré, est une vente qui, d'après l'article L. 622-16, alinéas 1 et 3, du Code de commerce (N° Lexbase : L7011AII), ne peut être faite que d'autorité de justice et n'est, en conséquence, pas susceptible de rescision pour lésion.
XII - Les poursuites individuelles
Faute d'avoir obtenu le titre exigé par les articles L. 622-32 du Code de commerce (N° Lexbase : L7027AI4) et 154 du décret du 27 décembre 1985 (N° Lexbase : L5266A4S), la caution ne peut exercer son droit de poursuite individuelle.
Par deux importants arrêts du même jour, la Cour de cassation a affirmé, au visa de l'article L. 621-40 du Code de commerce, que le principe d'ordre public de l'arrêt des poursuites individuelles interdit, après l'ouverture de la procédure collective, la saisine du tribunal arbitral par un créancier dont la créance a son origine antérieurement au jugement d'ouverture sans qu'il soit soumis au préalable à la procédure de vérification des créances.
(Sur ce sujet, lire : C. Petitjean, L'influence de la clause compromissoire dans les procédures collectives, Lexbase Hebdo n° 124 du 9 juin 2004 - édition affaires N° Lexbase : N1849AB4).
L'instance arbitrale est en cours au jour du jugement d'ouverture si, à cette date, le tribunal arbitral est définitivement constitué et peut donc être saisi du litige, c'est-à-dire à partir de l'acceptation par tous les arbitres de leur mission.
Au visa de l'article L. 622-32 IV du Code de commerce et de l'article 154 du décret du 27 décembre 1985, la Haute cour a expressément affirmé que les créanciers qui recouvrent leur droit de poursuite individuelle, après la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, ne peuvent l'exercer qu'en obtenant un titre exécutoire délivré par le président du tribunal de la procédure collective.
(Sur ce sujet, lire : P.-M. Le Corre, Les modalités de reprise des poursuites du créancier après clôture de la procédure collective du débiteur pour insuffisance d'actif, Lexbase Hebdo n° 112 du 17 mars 2004 - édition affaires N° Lexbase : N0875ABZ).
Il ressort de cet arrêt, rendu au visa de l'article L. 621-40 du Code de commerce (N° Lexbase : L6892AI4), que la suspension des poursuites individuelles, intervenue pendant une procédure d'appel, ne fait pas obstacle à la constatation, par les juges du fond, de la résiliation d'un contrat de bail à construction par application d'une clause résolutoire de plein droit qui a produit ses effets antérieurement au jugement d'ouverture du redressement judiciaire du preneur.
XIII - Nullités de la période suspecte
Une société mise en liquidation judiciaire par extension de la procédure de liquidation judiciaire d'une autre société ne se trouve dessaisie qu'à compter du jour du jugement prononçant sa propre procédure de liquidation judiciaire. Par conséquent, ne tombent pas sous le coup de la période suspecte les actes accomplis avant cette date, quand bien même ils ont été accomplis après l'ouverture de la procédure collective de l'autre société.
La période suspecte débute la première heure du jour fixé pour la date de cessation des paiements.
Après l'adoption du plan de cession, le représentant des créanciers ne demeure en fonction que pour vérifier le passif et n'a plus qualité pour agir en rapport du montant d'un chèque. Au contraire, le commissaire à l'exécution du plan trouve dans les pouvoirs qui lui sont conférés par l'article L. 621-68, alinéa 2, du Code de commerce (N° Lexbase : L6920AI7), en vue de poursuivre les actions exercées avant le jugement arrêtant le plan, par le représentant des créanciers, pour la défense de l'intérêt collectif, qualité pour engager l'action en rapport prévue par l'article L. 621-109 du Code de commerce (N° Lexbase : L6961AIN).
XIV - Sanctions à l'encontre des dirigeants
Aux termes de l'article L. 624-3, alinéa 1er du Code de commerce (N° Lexbase : L7042AIN), lorsque le redressement judiciaire ou la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que les dettes de la personne morale seront supportées, en tout ou partie, avec ou sans solidarité, par tous les dirigeants de droit ou de fait, rémunérés ou non, ou par certains d'entre eux. L'action en paiement des dettes sociales, "qui trouve son fondement dans l'existence de fautes de gestion imputables au dirigeant est indissociable de la procédure collective de la personne morale" et "relève de la compétence du tribunal qui a ouvert la procédure collective, même à l'égard du dirigeant de nationalité étrangère et dont le domicile est à l'étranger".
(Sur ce sujet, lire : C. Petitjean, Action en comblement de passif et personne morale de droit étranger, Lexbase Hebdo n° 124 du 9 juin 2004 - édition affaires N° Lexbase : N1851AB8).
Florence Labasque
SGR - Droit des entreprises en difficultés
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Réf. : Cass. civ. 2, 14 décembre 2004, n° 03-30.451, Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Calvados c/ Société Valéo, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A4888DER)
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par Olivier Pujolar, Maître de conférences à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV
Le 07 Octobre 2010
Décision
Cass. civ. 2, 14 décembre 2004, n° 03-30.451, Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Calvados c/ Société Valéo, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A4888DER) Rejet du pourvoi (CA Caen, 6 juin 2003, 3ème chambre, section sociale 2). Mots-clés : faute inexcusable ; majoration de la rente et du capital ; évolution du montant de la majoration ; incapacité permanente partielle. Texte concerné : CSS, art. L. 452-2 alinéas 2 et 3 (N° Lexbase : L5301ADP) Lien base : |
Faits
M. Blanchard a été reconnu atteint de la maladie professionnelle n° 30 (affections consécutives à l'inhalation des poussières d'amiante) et a saisi la juridiction de Sécurité sociale en vue de la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur (la société Ferodo devenue Valéo, puis la société Allied signal devenue Honeywell matériaux de friction-HMF). La cour d'appel de Caen a, d'une part, considéré que la maladie professionnelle dont M. Blanchard était atteint résultait d'une faute inexcusable de ses employeurs et a, d'autre part, fixé au maximum le montant de la majoration en capital. Enfin, elle a précisé que la majoration de rente ou de capital serait toujours fixée au maximum légal, quel que soit le taux d'incapacité permanente partielle (IPP) dont elle suivrait l'évolution. |
Problème juridique
Le montant de la majoration de rente ou de capital alloué à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle consécutifs à la faute inexcusable de l'employeur est-il déterminé définitivement au moment de la décision qui le fixe ou doit-il suivre l'évolution du taux d'incapacité de la victime ? |
Solution
1. Rejet du pourvoi. 2. "La majoration de la rente et du capital alloué à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle consécutifs à la faute inexcusable de l'employeur est calculée en fonction de l'incapacité dont celle-ci reste atteinte [...] cette majoration devait suivre l'évolution du taux d'incapacité de la victime". |
Commentaire
1. Le principe de la majoration de la rente et du capital alloué à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle en cas de faute inexcusable de l'employeur Sans qu'il soit nécessaire d'insister ici, il suffit de rappeler que la jurisprudence considère la faute inexcusable de l'employeur comme caractérisée, au sens de l'article L. 452-1 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L5300ADN), lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver (Cass. soc., 28 février 2002, 7 espèces ; voir, par exemple, Cass. soc., 28 février 2002, n° 00-10.051, Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Grenoble c/ Société Ascométal, FP-P+B+R+I N° Lexbase : A0806AYI). En l'espèce, la cour d'appel a accueilli la demande du salarié, en décidant que la maladie dont il est atteint était due à la faute inexcusable de ses employeurs. Dès lors, le régime d'indemnisation des victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles consécutifs à une faute inexcusable de l'employeur ou de celui qui s'est substitué à lui dans la direction devait s'appliquer (CSS, art. L. 452-1 et s. N° Lexbase : L5300ADN). Ainsi, M. Blanchard a, logiquement, bénéficié d'une indemnisation majorée, tant en ce qui concerne le capital que la rente qui lui ont été alloués et a eu la possibilité de demander la réparation de divers préjudices légalement déterminés (CSS, art. L. 452-3 N° Lexbase : L5302ADQ). Les majorations du capital et de la rente ont été fixées au maximum par la cour d'appel. Selon l'alinéa 2 de l'article L. 452-2 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L5301ADP), le montant de la majoration de l'indemnité en capital ne peut dépasser le montant de ladite indemnité. En ce qui concerne le montant de la majoration de la rente en cas d'incapacité permanente partielle, l'alinéa 3 du même texte dispose que la rente majorée ne peut excéder la fraction du salaire annuel correspondant à la réduction de capacité (lorsque l'incapacité permanente est totale, la rente majorée ne pourra excéder le montant du salaire annuel). Cependant, la loi ne détermine que le montant maximum de la majoration et ne fixe pas de critère permettant aux juges de fixer le montant de la majoration. Face à ce silence, la jurisprudence a longtemps décidé que la majoration devait être proportionnelle à la gravité de la faute inexcusable (v., notamment, Cass. soc., 17 janvier 1962, n° 61-10.846, Société à responsabilité limitée des ateliers électriques de Pierrefite c/ Dame veuve Eugénie Quilghini et autre N° Lexbase : A6560AYM, "pour la fixation de la majoration de la rente, seul peut être pris en considération le degré de gravité de la faute inexcusable", D., 1962, p. 197 et obs. A. Brun). Mais, l'application de cette solution était assez difficile et la Cour de cassation a, récemment, décidé de l'abandonner (Cass. soc., 31 mars 2003, n° 01-20.901, Société nationale des chemins de fer français (SNCF) c/ Mme Denise Crumière, FS-P+B N° Lexbase : A6358A7M, confirmé par Cass. civ. 2, 27 janvier 2004, n° 02-30.693, M. Pierre Szczepaniak c/ M. Georges Favrat, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A8868DAP, voir Stéphanie Martin-Cuenot, Les éléments constitutifs de la faute inexcusable du salarié, Lexbase Hebdo n° 106 du 4 février 2004 - édition sociale N° Lexbase : N0409ABR). Désormais, "la majoration de la rente prévue lorsque l'accident est dû à la faute inexcusable de l'employeur au sens de l'article L. 452-1 du Code de la Sécurité sociale ne peut être réduite en fonction de la gravité de cette faute mais seulement lorsque le salarié victime a lui-même commis une faute inexcusable au sens de l'article L. 453-1 du même code". Ainsi, la majoration est, en principe, fixée au maximum et ne peut être minorée qu'en cas de faute inexcusable du salarié ou de faute d'un tiers (Cass. soc., 11 avril 2002, n° 00-22.604, Mme Marie-France Gatel, épouse Dreano c/ Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) d'Ille-et-Vilaine, F-D N° Lexbase : A4864AYS). Cette solution facilite indéniablement la tâche des juges du fond, qui n'ont plus à apprécier la gravité de la faute inexcusable, et permet de maintenir une certaine unité au sein des décisions des tribunaux. Néanmoins, la réduction de la marge d'appréciation des juges du fond par l'application quasi-systématique de la majoration maximale n'est pas sans s'éloigner de l'esprit du texte, qui ne fixait qu'une limite à ne pas dépasser. 2. L'évolution du montant de la majoration Si les modalités de la détermination du montant de la majoration de la rente ne vont pas sans soulever des difficultés, la question de l'évolution du montant de la majoration n'est pas moins épineuse. En effet, il convient de se demander si ce montant est révisable. C'est sur ce point que l'arrêt sous étude apporte des précisions novatrices. L'arrêt du 14 décembre 2004 précise que la majoration devra suivre l'évolution du taux d'incapacité de la victime. Il s'agit d'un revirement. En effet, la Chambre sociale avait décidé, en 1985, que "la gravité est déterminée une seule fois lorsqu'il est statué quant au caractère inexcusable de la faute commise ; peu importe donc l'amélioration ultérieure de l'état de santé de la victime" (Cass. soc., 18 mars 1985, n° 83-13.566, Mugnerot c/ Caisse primaire d'assurance maladie de Saint-Etienne, publié N° Lexbase : A3722ABH). Cette évolution s'explique par le changement des critères de détermination de la majoration de la rente. Lorsque le montant de la majoration était fixé par référence à la gravité de la faute inexcusable, en tenant compte de la limite maximale imposée par la loi (CSS, art. L. 452-2, al. 2 et 3 N° Lexbase : L5301ADP), il était logique que ce montant soit déterminé définitivement (solution de 1985) et subisse, seulement, les revalorisations prévues par l'article L. 434-17 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L5271ADL), comme le précise l'article L. 452-2 alinéa 5 du même code (N° Lexbase : L5301ADP). La gravité de la faute inexcusable commise ne pouvant évoluer avec le temps, le montant de la majoration ne pouvait varier. Désormais, le montant de la majoration est le montant maximum, sauf faute inexcusable de la victime ou faute d'un tiers, et a donc pour seul critère le taux d'incapacité de la victime. Le montant de la majoration doit, alors, naturellement, pouvoir suivre celui du taux d'incapacité. L'arrêt du 14 décembre 2004 apparaît donc comme la confirmation des choix opérés par la Chambre sociale en 2003 (Cass. soc., 31 mars 2003, voir supra). Le montant de la majoration de la rente est fonction du taux d'incapacité partielle permanente de la victime, et doit donc suivre l'évolution de ce taux. |
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