Réf. : CE 4° s-s., 7 mai 2014, n° 359076 (N° Lexbase : A9373MKD)
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par Adeline Gouttenoire, Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux, Directrice de l'Institut des Mineurs de Bordeaux
Le 19 Juin 2014
L'exigence ou non du double consentement parental pour un acte médical accompli sur un mineur est une question complexe qui, en réalité, relève de plusieurs règles comme l'illustre l'arrêt commenté. En effet, outre le fait de savoir si l'acte relevait de la catégorie de ceux qui exigent le consentement des deux parents, il faut se demander si l'on se trouve dans une hypothèse où le médecin peut se passer de ce consentement en raison des circonstances particulières. Enfin, lorsque le mineur concerné est un adolescent, on peut s'interroger sur la possibilité de mettre en oeuvre les règles lui accordant exceptionnellement une certaine autonomie (1), ce que le Conseil d'Etat n'a pas fait dans cette affaire. Dans l'arrêt du 7 mai 2014, le Conseil d'Etat fonde, en effet, son analyse sur le caractère non urgent de la décision (II), après avoir affirmé qu'il ne s'agissait pas d'un acte usuel (I).
I - La qualification l'acte non usuel
Nécessité de la qualification. En réalité la qualification d'acte non usuel n'était pas discutée dans l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt commenté. Il semble que la chambre disciplinaire ne se soit pas placée sur ce terrain, le Conseil d'Etat affirmant que "pour juger que le psychiatre n'avait commis aucun manquement à la déontologie en s'abstenant de prévenir le père du mineur, la chambre disciplinaire nationale ne s'est pas fondée sur le caractère usuel de l'acte litigieux". Ce silence peut sans doute s'interpréter comme une qualification implicite de l'acte en acte non usuel. Il paraît toutefois préférable de s'interroger au préalable sur cette qualification ; s'il s'agit, en effet, d'un acte usuel la question du double consentement est réglée sans difficulté. En effet, à ce type d'acte, s'applique, comme le rappelle le Conseil d'Etat, l'article 372-2 du Code civil (N° Lexbase : L2902AB4) selon lequel, "à l'égard des tiers de bonne foi, chacun des parents est réputé agir avec l'accord de l'autre, quand il fait seul un acte usuel de l'autorité parentale relativement à la personne de l'enfant" ; il précise, en outre, qu'aux termes de l'article 373-2 du même code (N° Lexbase : L2905AB9) "la séparation des parents est sans incidence sur les règles de dévolution de l'exercice de l'autorité parentale". En conséquence, le consentement d'un seul parent aurait été suffisant si l'acte avait été rangé dans la catégorie des actes usuels.
Actes usuels et soins médicaux. Dans l'arrêt du 7 mars 2014, le Conseil d'Etat précise formellement que l'acte en cause, à savoir la délivrance d'un antidépresseur constitue un acte non usuel, ce qui constitue un premier apport non négligeable de l'arrêt. La qualification d'acte usuel est, en effet, parfois difficile en raison du défaut de précision légale et de la rareté de la jurisprudence. En matière médicale, il semble que les soins obligatoires comme certaines vaccinations, les soins courants (blessures légères, soins dentaires, traitement des maladies infantiles courantes) ou les soins habituels pour tel ou tel enfant, entrent dans la catégorie des actes usuels. Ne peut, en revanche, recevoir cette qualification la décision de soumettre l'enfant à un traitement "lourd" ou à une hospitalisation prolongée. En ce sens, une opération chirurgicale telle qu'une opération de l'appendicite, semble nécessiter le consentement des deux parents. L'enfant ne peut être suivi par un médecin que la mère a pris seule l'initiative de consulter alors que cette décision destinée à protéger la santé de l'enfant appartient aux deux parents titulaires de l'autorité parentale (2). Il semble, également, que la mise en place d'un traitement d'orthodontie, nonobstant son caractère courant voire quasi-systématique, nécessite le consentement des deux parents, son suivi relevant ensuite de la catégorie des actes usuels. Certains actes peuvent alternativement appartenir à l'une ou l'autre catégorie selon le contexte dans lequel ils s'inscrivent. La Cour de cassation a ainsi admis qu'une circoncision pouvait être un acte usuel si elle relève de la nécessité médicale mais il n'en va pas de même s'il s'agit d'une circoncision rituelle (3). La cour d'appel de Lyon, dans une décision du 25 juillet 2007, a ainsi affirmé qu'un tel acte supposait le consentement des parents et celui de l'enfant qui était en l'espèce âgé de onze ans (4). La vaccination peut également relever de l'une ou l'autre des catégories selon qu'elle est ou non obligatoire. Ainsi la vaccination contre la grippe A/H1N1 exige sans aucun doute le consentement des deux parents, comme celui contre l'hépatite B ou encore celui destiné à prévenir le cancer du col de l'utérus (5). En matière psychiatrique, une cour d'appel a pu juger qu'était engagée la responsabilité du médecin psychiatre qui avait délivré des soins auxquels le père s'était opposé (6).
Qualification de l'acte en cause. Si l'on reprend la définition donnée par la cour d'appel d'Aix-en-Provence, dans le contexte de l'assistance éducative, dans un arrêt en date du 28 octobre 2011, selon laquelle les actes usuels seraient "des actes de la vie quotidienne, sans gravité, qui n'engagent pas l'avenir de l'enfant, qui ne donnent pas lieu à une appréciation de principe essentielle et ne présentent aucun risque grave apparent pour l'enfant, ou encore, même s'ils revêtent un caractère important, des actes s'inscrivant dans une pratique antérieure non contestée" (7), il semble bien que la prescription d'antidépresseur ne réponde pas à cette définition. Il s'agit, en effet, d'un acte d'une certaine gravité, qui comporte des risques pour l'enfant et qui implique de la part des parents une appréciation, notamment quant au choix thérapeutique. La même réponse pourrait être faite si l'on utilisait la définition de l'acte important contenue par la proposition de loi relative à l'autorité parentale et à l'intérêt de l'enfant, présentée à l'Assemblée nationale notamment par Marie-Anne Chapdelaine en avril 2014, et selon laquelle "constitue un acte important l'acte qui rompt avec le passé et engage l'avenir de l'enfant ou qui touche à ses droits fondamentaux". La prise d'antidépresseur par une adolescente rompt sans nul doute avec le passé si c'est la première fois qu'elle reçoit ce type de traitement, et engage incontestablement l'avenir médical et psychologique de la jeune fille. Toutefois, la qualification d'acte non usuel n'empêchait pas forcément qu'il soit effectué avec le consentement d'un seul parent, compte tenu des pouvoirs accordés par la loi au médecin dans certaines circonstances.
II - Le pouvoir du médecin d'agir sans consentement parental
Autorisation légale. Selon l'article L. 1111-4, alinéa 6, du Code de la santé publique (N° Lexbase : L9876G8B), "dans le cas où un refus de traitement par la personne titulaire de l'autorité parentale ou le tuteur risque d'entraîner des conséquences graves pour la santé du mineur, le médecin délivre les soins indispensables". Ainsi, la cour administrative d'appel de Bordeaux a pu considérer, dans une décision du 4 mars 2003 (8), que les médecins qui avaient pratiqué une transfusion sanguine sur un mineur malgré le refus des parents ne commettaient pas de faute ; il était, en effet, établi que l'enfant présentait des signes cliniques de péril vital imminent. En outre, l'article R. 4127-42 du Code de la santé publique (N° Lexbase : L8324GTH), cité par le Conseil d'Etat dans l'arrêt du 7 mai 2014, dispose que, "sous réserve des dispositions de l'article L. 1111-5, un médecin appelé à donner des soins à un mineur ou à un majeur protégé doit s'efforcer de prévenir ses parents ou son représentant légal et d'obtenir leur consentement. En cas d'urgence, même si ceux-ci ne peuvent être joints, le médecin doit donner les soins nécessaires". Ces deux textes se complètent tout en visant des hypothèses différentes. Le premier concerne plutôt le refus de consentement alors que le second vise l'hypothèse dans laquelle les parents ou l'un d'entre eux n'est pas présent lors de la décision médicale.
Urgence. C'est ce dernier texte que le Conseil d'Etat met en oeuvre en l'espèce, considérant ainsi, à juste titre, qu'il était applicable, comme l'article L. 1111-4, alinéa 6, du même code (N° Lexbase : L9876G8B), aux hypothèses dans lesquelles un seul parent avait donné son consentement alors que l'acte impliquait que les deux titulaires de l'autorité parentale autorisent l'acte. En l'espèce, en effet, le médecin qui a reçu la jeune fille après une aggravation de son état, hors de la présence de son père, n'a pas recherché à recueillir le consentement de ce dernier avant de faire cette prescription. Le Conseil d'Etat déduit de ce texte "qu'un acte médical ne constituant pas un acte usuel ne peut être décidé à l'égard d'un mineur qu'après que le médecin s'est efforcé de prévenir les deux parents et de recueillir leur consentement ; qu'il n'en va autrement qu'en cas d'urgence, lorsque l'état de santé du patient exige l'administration de soins immédiats".
Appréciation en l'espèce. La chambre disciplinaire nationale, pour juger que le psychiatre n'avait commis aucun manquement à la déontologie en s'abstenant de prévenir le père du mineur, a estimé que la jeune fille se trouvait dans une situation d'urgence justifiant la prescription d'un antidépresseur en application des dispositions précitées. C'est justement cette analyse que critique le Conseil d'Etat en constatant que "pour statuer ainsi, la chambre disciplinaire nationale s'est bornée à relever que l'état de la patiente s'était aggravé entre le 10 et le 12 novembre 2008 sans relever les éléments précis qui justifiaient en quoi cette aggravation était de nature à caractériser, à elle seule, une situation d'urgence au sens de l'article R. 4127-42 du Code de la santé publique, autorisant l'absence d'information du père de la jeune fille mineure". La Haute juridiction administrative en déduit que la décision de la chambre disciplinaire est entachée d'erreur de droit. Cette critique permet certes de considérer que la seule aggravation de la santé du mineur ne suffit pas à définir l'urgence mais ne permet pas de définir quels éléments auraient permis de la caractériser, ce que l'on peut regretter. Sans doute pourrait-on exiger que le médecin caractérise la nécessité de prodiguer des soins sans attendre pour éviter des conséquences d'une certaine gravité pour la santé de l'enfant et l'impossibilité de joindre le parent dans un délai suffisant. Il paraîtrait conforme aux exigences légales relatives à l'autorité parentale que le médecin, ou le parent présent, tente au moins de contacter le parent absent pour obtenir son consentement.
Décision
CE 4° s-s., 7 mai 2014, n° 359076 (N° Lexbase : A9373MKD). Lien base : (N° Lexbase : E5812EYW). |
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par Anne-Lise Lonné-Clément, Rédactrice en chef de Lexbase Hebdo - édition privée
Le 05 Juin 2014
I - L'état des lieux du droit positif en matière de performance énergétique
A - Les principes structurant de la réglementation thermique et des normes applicables sous forme de label
Lorsque l'on évoque la performance, il faut distinguer deux notions qui s'opposent : la performance énergétique calculée, et la performance énergétique mesurée. La première désigne la performance entendue comme la qualité " intrinsèque " d'un bâtiment. Il s'agit d'une performance résultant de la prise en compte d'un certain nombre de caractéristiques constatées dans le bâtiment qui, par le biais d'un calcul, permettent de définir la "performance théorique", autrement dit "calculée". Cette notion s'oppose à la performance constatée, mesurée directement sur place.
La réglementation actuelle est fondée sur la notion de performance calculée. Elle repose donc sur un système qui donne l'illusion du réel, mais sans y prétendre vraiment.
En effet, tout d'abord, le choix des mots est de nature à induire en erreur, sachant que le système utilise la notion de "performance conventionnelle", laquelle ne correspond absolument pas au sens qu'un juriste pourrait lui donner, qui serait le fruit d'une convention, d'un contrat. En effet, au sens de la réglementation thermique, la performance "conventionnelle" ne correspond pas au fruit d'un accord de volonté, mais à la performance qui s'impose par l'application de textes d'ordre public ; autrement dit, la performance "conventionnelle" est celle qui résulte d'un référentiel théorique.
Ce choix étant donc malheureux, les professionnels ont estimé utile d'apporter une définition. C'est ainsi qu'un arrêté du 11 octobre 2011 est venue définir la performance conventionnelle : "la consommation conventionnelle d'un bâtiment, au sens de la réglementation thermique, est un indicateur exprimé en kilowattheure d'énergie primaire par mètre carré et par an [kWhep/(m2.an)].
Elle prend en compte uniquement les consommations de chauffage, de refroidissement, de production d'eau chaude sanitaire, d'éclairage, des auxiliaires de chauffage, de refroidissement, d'eau chaude sanitaire et de ventilation, déduction faite de la production d'électricité à demeure.
Elle est calculée selon les modalités définies par la méthode de calcul Th-BCE 2012, en utilisant des données climatiques conventionnelles pour chaque zone climatique, et pour des conditions d'utilisation du bâtiment fixées, représentant des comportements moyens et s'appuyant sur des études statistiques. Les valeurs réelles de ces paramètres étant inconnues au moment de la réalisation du calcul réglementaire, il peut apparaître des écarts entre les consommations réelles qui seront observées pendant l'utilisation du bâtiment et la consommation conventionnelle calculée" (nous soulignons).
S'agissant, ensuite, du contenu même de ces textes normatifs, que l'on analyse les dispositions sur le fond (qui concernent le bâtiment dans son ensemble et non les appartements ou les bureaux en tant que tels ; qui ne prennent pas en compte tous les postes de consommation d'énergie ; qui retiennent comme référence une énergie primaire et non finale, etc.), ou les procédures mises en place pour attester du respect de ces normes (cf. CCH, art. L. 111-9-1 N° Lexbase : L9518IMH, dont il en ressort que les architectes et les maîtres d'oeuvre du chantier peuvent attester eux-mêmes du respect des qualités intrinsèques du bâtiment), tout conduit à considérer que l'on ne se situe jamais dans la mesure concrète et effective.
Il faut savoir également qu'un décret du 18 mai 2011 réglemente la mission de ces attestants (décret n° 2011-544 N° Lexbase : L3015IQQ) ; force est de constater qu'ils ne doivent procéder à aucun sondage destructif, ou réaliser aucun test in situ destiné à vérifier le fonctionnement des installations ; de même, un arrêté du 11 octobre 2011 (N° Lexbase : L6374ISU), sur le formalisme de l'attestation, se limite à des rubriques concernant des contrôles visuels.
Tous ces éléments amènent à considérer que la performance doit être entendue comme théorique, et non mesurée sur le terrain.
L'ambiguïté du système est accentuée par la pratique des acteurs qui ont tendance à entendre cette réglementation comme faisant état d'une performance mesurée et vérifiée sur le terrain.
Si les consommateurs eux-mêmes, dans leur expression collective (2), sont bien conscients de cette ambiguïté et ont édité une brochure sur les bâtiments basse consommation (BBC), dans laquelle il est mentionné que "les résultats affichés, calculés selon la réglementation, sont généralement différents de ceux mesurés par les compteurs", les débiteurs de l'obligation de construire, et les pouvoirs publics auteurs de ces textes, semblent afficher une réelle détermination à dépasser la norme pour aboutir à la signature de véritables "contrats de performance énergétique". C'est ainsi qu'un rapport, déposé en mars 2012, évoque les engagements contractuels pouvant aller au-delà de ce que prévoit la loi, sous la forme de garantie de performance énergétique intrinsèque (GPEI), et même de garantie de résultat énergétique (GRE) fondée sur l'usage (http://www.planbatimentdurable.fr/IMG/pdf/rapport_GPE.pdf).
B - La traduction au plan de la responsabilité de la réglementation thermique telle que décrite
La question se pose de savoir comment cette réglementation s'articule avec les régimes de responsabilité.
1. La responsabilité de droit commun
S'agissant de la responsabilité de droit commun, l'engagement de la responsabilité peut être obtenu à deux titres, à savoir, en premier lieu, au titre de la non-conformité pure par rapport à la norme légale : il s'agit alors de l'absence de conformité aux qualités intrinsèques de l'immeuble. En second lieu, la responsabilité de droit commun peut être engagée au titre des dommages intermédiaires ; elle repose alors sur la preuve d'une faute. Il faut alors pouvoir prouver le non-respect d'une performance théorique, donc de la réglementation. Mais il ne semble pas possible de retenir la responsabilité au titre des dommages intermédiaires à propos d'un seul problème de dépassement de surconsommation réelle, mesurée sur le terrain.
2. La responsabilité décennale
S'agissant de la responsabilité décennale, on peut se demander si le non-respect de cette réglementation pourrait déboucher sur l'engagement des garanties obligatoires en matière d'assurance.
La responsabilité décennale est souvent envisagée dans une hypothèse de surconsommation ; mais il ne faut pas oublier les effets collatéraux qui peuvent résulter de cette réglementation. Par exemple, l'un des effets de la réglementation thermique consiste à rendre les immeubles parfaitement étanches, ce qui peut entraîner le risque d'une mauvaise qualité de l'air dans les logements (condensation, moisissure), et donc un risque d'insalubrité, constitutif d'une atteinte à la destination susceptible d'engager la responsabilité décennale. De même, un certain nombre de dispositifs d'installations utilisées pour permettre de respecter ces normes en matière de performance, telles que les installations d'électricité photovoltaïque, génèrent des risques d'incendie et donc de sécurité, là encore constitutifs d'une atteinte à la destination susceptible d'engager la responsabilité décennale.
Mais plus délicate est donc la question de savoir si la responsabilité décennale peut être engagée au titre d'un problème de défaut de performance énergétique. S'agissant de la performance "conventionnelle", autrement dit découlant de la réglementation, l'on pourrait considérer que le non-respect de la réglementation, laquelle est d'ordre public et sanctionnée pénalement, serait susceptible d'entraîner la responsabilité décennale ; mais cette question divise la doctrine, sachant qu'il n'existe pas de lien direct et systématique entre le non-respect d'une disposition d'ordre public et l'atteinte à la destination ou à la solidité. L'on peut toutefois citer un arrêt du 8 juin 1977 (Cass. civ. 3, 8 juin 1977, n° 75-13.014 N° Lexbase : A6118CGP), se référant au risque de "perte juridique de l'ouvrage", constitutif d'une atteinte à la destination (le défaut en cause étant susceptible d'entraîner une atteinte à la destination) ; l'on pourrait alors considérer que le non-respect des dispositions d'ordre public concernant la réglementation thermique entraîne des problèmes de droit à exploiter ou à louer le bien, et donc d'atteinte à la destination.
L'on pourrait encore considérer que le non-respect de la réglementation thermique entraîne une atteinte à la destination à raison des valeurs écologiques protégées par cette réglementation. Autrement dit, la réglementation ferait naître un principe écologique qui s'impose à l'acte de construire, et dont le non-respect entraînerait l'engagement de la responsabilité décennale.
S'agissant du non-respect de la convention des parties, on peut de même imaginer que le non-respect de la performance énergétique définie contractuellement entre les parties pourrait permettre d'engager la responsabilité décennale, la jurisprudence admettant le principe d'une définition contractuelle de la destination (cf. Cass. civ. 3, 27 septembre 2000, n° 98-11.986 N° Lexbase : A9562KIY). Un arrêt rendu par la cour d'appel de Grenoble se prononce en ce sens (CA Grenoble, 25 mars 2008, n° 05/01449 N° Lexbase : A6758MPY).
Sur le simple terrain de la performance "conventionnelle", calculée, théorique, on voit que la jurisprudence, par différentes voies, pourrait être amenée à estimer que le non-respect de la performance théorique engagerait la responsabilité décennale. Mais au-delà, peut-on considérer qu'une atteinte à la destination intègrerait une non-atteinte de la performance réelle, autrement dit une surconsommation mesurée. Il semble qu'une telle évolution soit probable, notamment au regard de la jurisprudence rendue en matière d'isolation phonique (Ass. plén., 27 octobre 2006, n° 05-19.408, P+B+R+I N° Lexbase : A0473DSC considérant que les désordres d'isolation phonique peuvent relever de la garantie décennale alors même que les exigences légales minimales légales ou réglementaires auraient été respectées). La performance énergétique pourrait ainsi tout à fait être considérée comme une valeur sociétale, au même titre que la sécurité. Quelques arrêts commencent à se prononcer sur la question. Ainsi, dans un arrêt du 8 octobre 2013 (Cass. civ. 3, 8 octobre 2013, n° 12-25.370, F-D N° Lexbase : A6843KME), la Cour de cassation a censuré un arrêt qui avait retenu un peu trop radicalement que les problèmes de surconsommation d'énergie n'étaient pas de nature à engendrer une responsabilité décennale, reprochant aux juges d'appel de ne pas avoir recherché si les désordres engendrés par les défauts d'isolation thermique ne rendaient pas la maison impropre à sa destination.
II - Cet état des lieux permet-il de justifier une réforme et quelle réforme ?
A - Une réforme qui affecte les régimes de responsabilité et par ricochet celui de l'assurance construction
S'il était admis par la jurisprudence que la performance énergétique, en tant que telle, abstraite de toute norme, était une valeur intégrant la destination, il suffirait de démontrer une surconsommation pour pouvoir mettre en oeuvre le régime de la responsabilité décennale, laquelle est une responsabilité présumée dont on ne peut s'exonérer que par la preuve positive d'une cause étrangère ; or, en l'occurrence, la cause étrangère évidemment invocable serait le fait de la victime, le comportement des utilisateurs. L'on voit alors immédiatement toute la difficulté de la preuve, qui peut difficilement être rapportée sans porter atteinte à la vie privée, dans la mesure où c'est leur mode de vie, au quotidien qui serait en cause. Par conséquent, faute de pouvoir rapporter la preuve d'une cause étrangère liée au comportement de l'utilisateur, le système aboutirait à une condamnation quasiment systématique des constructeurs et de leurs assureurs, sans possibilité d'exonération, ce qui constitue la problématique du sujet.
C'est ainsi que, dans un premier temps, les assureurs ont affiché une position très stricte en refusant d'assurer au titre de la responsabilité décennale tout défaut de performance, qu'elle soit "conventionnelle" (théorique) ou réelle. Dans un second temps, ils ont fini par admettre une position de compromis, en admettant que le non-respect de la réglementation (entraînant un défaut de performance "conventionnelle", mais en aucun cas réelle) pouvait être considéré comme constituant une atteinte à la destination entrant dans le régime de responsabilité décennale.
C'est dans ce contexte qu'a été présenté, en juin 2013, un projet de réforme constituant un compromis entre tous les acteurs à l'acte de construire et les assureurs. Les propositions qui en découlent (création d'un nouvel article L. 110-5-1 dans le CCH) reposent sur deux grandes idées :
- ouvrir dans la clarté l'application du régime de la responsabilité civile décennale et de l'assurance obligatoire à la réparation des sinistres liés à la performance énergétique des bâtiments ;
- encadrer cette ouverture avec précision pour éviter de fragiliser la pérennité du système.
S'agissant de l'ouverture du régime de la responsabilité décennale à la réparation des dommages liés à la performance énergétique, il a été proposé de définir expressément ce qui n'entre pas dans la destination (CCH, nouv. art. L. 110-5-1, alinéa 1) :
"Nonobstant toute stipulation contractuelle contraire, la destination mentionnée à l'article 1792 du Code civil, reproduit à l'article L. 111-13 du présent code, est définie, en matière de performance énergétique, au regard de la seule consommation "conventionnelle" maximale de l'ouvrage, telle que celle-ci résulte des textes d'application des articles L. 111-9 et L. 111-10 du présent code. La production énergétique à usage externe est prise en compte, uniquement si elle entre dans son calcul" (nous soulignons).
La contrepartie de cette ouverture consiste en un encadrement très strict de l'office du juge et de son pouvoir d'appréciation quant à l'impropriété à la destination ainsi définie (CCH, nouv. art. L. 110-5-1, alinéas 2, 3 et 4), tout en prévoyant un seuil de tolérance, et en la limitant aux seuls dommages affectant matériellement l'ouvrage :
"l'impropriété à la destination ne peut être retenue que dans le cas d'une différence de consommation conventionnelle supérieure à un seuil, en présence de dommages affectant matériellement l'ouvrage ou ses éléments d'équipement.
Elle est appréciée globalement pour l'ensemble de l'ouvrage construit ou modifié, y compris ses éléments d'équipement, en tenant compte des conditions de son entretien après la réception, et sur la base des éléments techniques, du référentiel et du mode calcul réglementaire ayant permis la délivrance de l'attestation de la prise en compte de la réglementation thermique.
Un décret en Conseil d'état détermine le seuil mentionné à l'alinéa précédent ainsi que les modalités d'appréciation de la consommation conventionnelle dans le cadre des expertises".
La présentation de ce texte dans les ministères depuis juillet 2013 a toutefois suscité de nombreuses critiques et il n'est pas certain que cette réforme aboutisse, ce qui serait fort regrettable pour tout le système, qui se retrouverait alors fragilisé.
B - Une réforme qui affecte le marché de l'assurance : le marché doit-il proposer de nouveaux produits ?
Un état des lieux de l'offre actuelle met en évidence l'existence de deux types de couverture : en premier lieu, la couverture du risque constitué par le fait de ne pas obtenir l'attestation de conformité à la réglementation BBC et/ou le label BBC ; en second lieu la couverture des dommages de nature décennale liés au fait que la performance énergétique "conventionnelle" ne se maintient pas durant les dix années suivant la réception ou que la sobriété énergétique soit considérée comme faisant partie de la destination d'un ouvrage.
Une évolution de l'offre pourrait se traduire par la proposition de nouveau produits tels que :
- la couverture de la non-atteinte de la performance énergétique réelle, résultant cette fois d'un engagement contractuel (totalement utopique...) ;
- l'adaptation des produits actuels couvrant la responsabilité civile de droit commun ("RC travaux" et "RC promoteur" ;
- la création d'un produit spécifique pour prendre en charge les frais d'expertise liés à des réclamations sur la performance réelle, une garantie dite "de recherche des causes".
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Le 05 Juin 2014
Matin - Présidence G. Chantepie - L'intuitus personae dans la copropriété : tentation illicite ou orientation légitime
8h45 Accueil des participants
9h15 Propos introductifs
Y. Trémorin, Professeur à l'Université de Tours
9h30 Rapports de l'individuel et du collectif dans la copropriété du Code civil
M. Boudot, Maître de conférences à l'Université de Poitiers
1. Techniques de "l'entre-soi" au sein du règlement de copropriété des immeubles bâtis
10h00 La police des activités et des comportements
F. Chenot, Magistrat, VP Tours
10h30 Les restrictions au droit de disposer et le contrôle des accédants
Ph. Simler, Professeur à l'Université de Strasbourg
11h00 Pause
2. Techniques de "l'entre-soi" par éviction partielle ou totale de la copropriété des immeubles bâtis
11h30 La division en volumes au service de l'intuitus personae
N. Le Rudulier, Maître de conférences à l'Université d'Angers
12h00 Les copropriétés gérées par des syndicats de forme coopérative
S. Laporte-Leconte, Docteur en droit, directrice de l'ICH Ouest
12h30 Pause déjeuner
Après-midi - Présidence Ph. Simler - La privatisation des biens et des services au sein de l'immeuble en copropriété : formes et portée du renouvellement des rapports entre l'individuel et le collectif ?
14h00 La privatisation des parties communes et des droits accessoires aux parties communes : la question du droit de construire au sein de la copropriété
G. Beaussonie, Maître de conférences à l'Université de Tours
14h30 Antennes-relais, panneaux photovoltaïques, publicités lumineuses : quelle place pour une propriété en marge de la copropriété ?
A. Vignon-Barrault, Maître de conférences à l'Université de Tours
15h00 Les travaux sur les lots privatifs : quelle liberté ? quelles sanctions ?
E. Botrel, Maître de conférences à l'ESGT
15h30 Pause
16h00 Le développement des services "à la carte" au sein de l'immeuble en copropriété
C. Dreveau, Maître de conférences à l'Université de Tours
16h30 Groupements restreints et collaborations renforcées
G. Chantepie, Professeur à l'Université de Lille
Colloque validé pour la formation continue des avocats et des notaires
Organisation : Y. Trémorin, G. Beaussonie, A. Vignon-Barrault, et C. Dreveau
Contact et inscription :
Mme Picard Véronique
Responsable administrative du LERAP
Tél.: 02 47 36 11 70
Mail : veronique.picard@univ-tours.fr
Frais d'inscription : 30 euros pour les professionnels
Lieu :
Faculté de Droit, Economie et des Sciences Sociales
Amphithéâtre E
50, avenue Jean-Portalis
Quartiers des 2 Lions
BP 0607
37206 Tours Cedex 3
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Réf. : CA Bordeaux, 14 mai 2014, n° 13/04479 (N° Lexbase : A0572MLR)
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N2557BUA
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Le 19 Juin 2014
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N2458BUL
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par Marjorie Brusorio-Aillaud, Maître de conférences à l'Université de Toulon
Le 05 Juin 2014
Aux termes de l'article 271 du Code civil (N° Lexbase : L3212INB), "la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible". Dans deux affaires, jugées il y a quelques semaines, la Cour de cassation a précisé que le moment où le divorce prend force de chose jugée est, en cas d'appel limité à la prestation compensatoire, le jour où l'intimé a acquiescé le jugement (pourvoi n° 13-16.247) ou au jour où, en l'absence d'appel incident, il a déposé ses conclusions (pourvoi n° 13-16.140).
Première affaire. Un jugement de novembre 2011 a prononcé un divorce aux torts exclusifs du mari et a débouté l'épouse de sa demande de prestation compensatoire. L'époux a acquiescé au jugement le 9 décembre 2011 et l'épouse a interjeté appel le 27 décembre 2011.
Pour condamner l'époux à payer une prestation compensatoire à l'épouse, l'arrêt d'appel a retenu que si celui-là avait acquiescé au divorce le 9 décembre 2011, l'appel formé par celle-ci n'était pas limité, de sorte que la cour d'appel était saisie de l'entier litige, par l'effet dévolutif de l'appel, et qu'il devait être tenu compte de la situation actuelle des époux, pour apprécier la disparité dans leurs conditions de vie pouvant résulter de la rupture du mariage (CA Aix-en-Provence, 24 janvier 2013, n° 11/22047 N° Lexbase : A7650I3Q).
A l'appui de son pourvoi, le mari faisait valoir, entre autres arguments, que la décision qui prononce le divorce dissout le mariage à la date à laquelle elle prend force de chose jugée et que la prestation compensatoire est fixée, selon les besoin et les ressources des époux, en tenant compte de la situation au moment du divorce. Si, en cas d'appel général d'un jugement de divorce fondé sur l'article 242 du Code civil (N° Lexbase : L2795DZK), la décision quant au divorce ne peut passer en force de chose jugée avant le prononcé de l'arrêt, il en va autrement en cas d'acquiescement ou de désistement. En ayant tenu compte de la situation des époux à la date de sa décision, en janvier 2013, alors que, dans ses conclusions du 2 avril 2012, l'épouse avait limité son appel à la prestation compensatoire et à des mesures accessoires, à l'exclusion du divorce, la cour d'appel a violé les articles 260 (N° Lexbase : L2639ABD) et 271 du Code civil.
La Haute juridiction a approuvé ce raisonnement. Pour apprécier la demande de prestation compensatoire, le juge se place à la date à laquelle la décision prononçant le divorce prend force de chose jugée. En l'espèce, le prononcé du divorce avait acquis force de chose jugée le jour où l'époux y avait acquiescé. L'épouse qui, sur ce point, avait obtenu gain de cause, n'était plus recevable à le contester. La Cour de cassation a cassé l'arrêt, en ce qu'il avait condamné l'époux à payer une prestation compensatoire de 35 000 euros, et a renvoyé les parties devant une autre cour d'appel.
D'un point de vue juridique, la solution est parfaitement logique. La prestation compensatoire doit compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux (C. civ., art. 270). Un an après un jugement prononçant un divorce, la disparité dans les conditions de vie des époux peut résulter de cette séparation, certes, mais aussi des choix et événements effectués et survenus pendant ce temps.
D'un point de vue pratique, cela signifie en l'espèce que :
- d'une part, les époux s'étant mariés le 8 septembre 1990 et l'ordonnance de non-conciliation ayant été rendue le 1er avril 2008, la cour d'appel ne devait pas considérer que le mariage avait duré 22 ans dont 18 ans de vie commune mais 21 ans dont 18 ans de vie commune ;
- d'autre part, et cela est plus significatif, pour apprécier la disparité dans les conditions de vie respective des époux, les magistrats devaient prendre en considération les ressources des époux en 2011 et non en 2012, soit un salaire de 1 621 euros et non de 1 901,97 euros pour l'épouse.
Plus le temps passe, plus l'écart risque d'être important. L'époux condamné au versement de la prestation peut avoir intérêt à acquiescer au jugement prononçant son divorce, plus ou moins rapidement. La cour d'appel de renvoi, qui statuera probablement en 2015, devra être vigilante. Notons que l'épouse, qui a été condamnée aux dépens, n'est pas assurée que les prochains magistrats, souverains dans leur décision, lui accordent une prestation compensatoire, même s'ils "se placent au bon moment"...
Seconde affaire. Dans la seconde affaire retenue, relative à la date à laquelle le divorce prend force de chose jugée, un homme avait demandé un divorce pour altération définitive du lien conjugal et son épouse avait sollicité une prestation compensatoire.
Pour condamner l'époux au paiement d'une prestation d'un montant de 85 000 euros, la cour d'appel avait retenu que l'appel, formé le 26 juillet 2011 par l'époux à l'encontre du jugement en date du 29 juin 2011, étant expressément limité à la prestation compensatoire, le divorce était devenu définitif le 29 août 2011, de sorte qu'il convenait d'analyser les revenus et les charges des parties à ce moment-là.
A l'appui de son pourvoi, l'époux faisait valoir, qu'en l'absence d'appel incident, le prononcé du divorce n'était passé en force de chose jugée qu'à la date du dépôt des conclusions de l'intimée.
Dans un arrêt rendu le 30 avril 2014, la Cour de cassation a rappelé que, pour apprécier la demande de prestation compensatoire, le juge se place à la date à laquelle la décision prononçant le divorce prend force de chose jugée. Or, en cas d'appel, le divorce n'acquiert pas force de chose jugée au moment du jugement mais à la date du dépôt des conclusions de l'intimé, lorsqu'il est certain que celui-ci ne remet pas en cause le divorce lui-même. La Haute juridiction a donc cassé et annulé l'arrêt d'appel de février 2013, en ce qu'il avait condamné l'époux à payer une prestation compensatoire à l'épouse en se plaçant au 29 août 2011.
Comme pour la première affaire, cette solution n'est pas nouvelle (cf. Cass. civ. 1, 15 décembre 2010, n° 09-15.235, F-P+B+I N° Lexbase : A2426GN8 : "viole les articles 260 et 270, la cour d'appel qui énonce, l'appel étant limité à la prestation compensatoire, qu'elle évalue la situation des parties au jour du jugement, alors que le prononcé du divorce n'est passé en force de chose jugée qu'à la date du dépôt des conclusions de l'intimé") et est parfaitement logique, d'un point de vue juridique. Selon l'article 909 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L0163IPQ), "l'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de deux mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant prévues à l'article 908 (N° Lexbase : L0162IPP) pour conclure et former, le cas échéant, appel incident". Il fallait donc attendre que l'épouse, intimée, dépose ses conclusions pour être sûr qu'elle ne formait pas un appel incident et que le divorce n'était pas remis en cause et prenait force de chose jugée.
D'un point de vue pratique, la solution peut donner un sentiment de "perte de temps", comme souvent lorsque la cassation porte sur un point de procédure, pourtant fondamentale. Le divorce prononcé par le jugement du 29 juin 2011 n'est pas devenu définitif le 29 août 2011 mais, étant donné l'appel de l'époux limité à la prestation compensatoire le 26 juillet 2011, avec des conclusions le 10 octobre 2011, à la date du dépôt des dernières conclusions par l'épouse, soit le 16 février 2012... selon l'arrêt d'appel (CA Metz, 19 février 2013, n° 11/02473 N° Lexbase : A8562I8M).
Il ressort des moyens annexes que ce couple est séparé de corps depuis 2003 et que la demande en divorce a été introduite en 2007. L'épouse, qui a été condamnée aux dépens par la Cour de cassation, comme dans la première affaire, attend désormais un nouvel arrêt de la cour d'appel de renvoi. Même si ce n'est pas certain, puisque cela relève de l'appréciation souveraine des juges du fond, il est probable que la cour d'appel de renvoi conclut que le divorce a créé une disparité dans les conditions de vie respectives des époux, en février 2012, comme la première cour d'appel l'avait estimé en se plaçant en juin 2011. Nous serons alors probablement en 2015 !
II - Fixation de la prestation compensatoire : éléments pris en considération (Cass. civ. 1, 14 mai 2014, n° 13-12.602, F-D N° Lexbase : A5456MLN ; Cass. civ. 1, 14 mai 2014, n° 13-16.506, F-D N° Lexbase : A5605ML8 ; cf. l’Ouvrage "Droit du divorce" N° Lexbase : E7554ETX et N° Lexbase : E7558ET4)
Selon l'alinéa 2 de l'article 271 du Code civil, le juge prend notamment en considération, pour la fixation de la prestation compensatoire : la durée du mariage, l'âge et l'état de santé des époux, leur qualification et leur situation professionnelles, les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial, leurs droits existants et prévisibles, leur situation respective en matière de pensions de retraite en ayant estimé, autant qu'il est possible... La jurisprudence précise régulièrement quels éléments peuvent ou ne peuvent pas être ajoutés à cette liste. Pourtant, dans deux arrêts rendus le 14 mai 2014, la Cour de cassation a encore dû rappeler ces précisions.
Première affaire. Dans la première affaire (pourvoi n° 13-12.602), un couple marié sous le régime de la séparation de bien divorçait. La cour d'appel avait condamné l'époux au paiement d'une prestation compensatoire après avoir constaté que les revenus salariaux des deux parties étaient à présent équivalents (entre 2 000 et 2 500 euros par mois, en moyenne) et relevé que l'époux avait, dans les années passées, mieux gagné sa vie, bien que ses profits fussent aléatoires (CA Poitiers, 28 novembre 2012, n° 12/00980 N° Lexbase : A8523IXX).
Visant les articles 270 et 271 du Code civil, la Cour de cassation a jugé qu'en statuant ainsi, par un motif inopérant, fondé sur des circonstances antérieures au prononcé du divorce, la cour d'appel avait violé les textes susvisés. Elle a cassé et annulé l'arrêt en ce que, infirmant le jugement entrepris, il avait condamné l'époux à payer à l'épouse la somme de 35 000 euros à titre de prestation compensatoire.
La solution est parfaitement logique. Le fait que les époux aient des revenus équivalents après le divorce, alors qu'ils avaient des revenus différents lors du mariage, ne signifie pas obligatoirement que la séparation a créé une disparité dans les conditions de vie des époux. Le train de vie de l'épouse, créancière de la prestation, peut ne pas avoir changé. S'il y a une disparité dans les conditions de vie des ex-époux, celle-ci a pu exister antérieurement à l'union et être maintenue lors de celle-ci, notamment du fait de l'adoption du régime de séparation de biens.
Seconde affaire. Dans la seconde affaire jugée par la Cour de cassation le 14 mai 2014, relative aux éléments pris en considération pour la fixation de la prestation compensatoire (pourvoi n° 13-16.506), une cour d'appel avait retenu, pour condamner l'époux à payer une prestation compensatoire d'un montant de 38 400 euros, parmi les ressources perçues par l'épouse, la pension versée au titre du devoir de secours et la contribution du père à l'entretien et à l'éducation de l'enfant. La Cour de cassation a cassé cet arrêt, estimant que la cour d'appel avait violé les articles 270 et 271 du Code civil.
La solution est connue. Il a déjà été jugé que, dans l'appréciation d'une éventuelle disparité dans les conditions de vie respectives des époux, les sommes versées au titre de la contribution d'un époux à l'entretien et à l'éducation des enfants du couple constituent des charges venant en déduction des ressources de l'époux débiteur (Cass. civ. 2, 10 mai 2001, n° 99-17.255 N° Lexbase : A4303ATK, Bull. civ. II, n° 93) et que, pour apprécier les ressources du conjoint ayant la garde des enfants, le juge ne peut prendre en considération les sommes versées par l'autre conjoint au titre de la contribution à l'entretien des enfants (Cass. civ. 1, 25 mai 2004, n° 02-12.922, FS-P+B N° Lexbase : A2708DCB, Bull. civ. I, n° 148).
Et cela est parfaitement logique. Ni la pension alimentaire accordée à l'épouse au titre du devoir de secours pendant la durée de l'instance, ni la pension alimentaire versée par l'époux pour l'entretien et l'éducation de l'enfant du couple ne doivent être prise en considération pour la fixation de la prestation compensatoire. La première est temporaire et résulte de la séparation tandis que la seconde, certes parfois plus pérenne, ne bénéficie pas à l'époux créancier.
Dans ces deux affaires aussi, les épouses (et les époux) attendent, après plusieurs années de procédure, de savoir si elles vont pouvoir obtenir (et s'ils vont devoir verser) une prestation compensatoire. Les solutions étant connues et logiques, on peut se demander si les avocats et magistrats connaissaient la jurisprudence ou s'ils espéraient un revirement !
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Réf. : Cass. civ. 1, 28 mai 2014, n° 13-15.760, F-P+B+I (N° Lexbase : A8067MN4)
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Le 06 Juin 2014
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Réf. : Cons. const., décision n° 2014-398 QPC du 2 juin 2014 (N° Lexbase : A6403MPT)
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Le 05 Juin 2014
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Réf. : Rapport de la Commission européenne sur l'application du Règlement "Bruxelles II bis", communiqué du 15 avril 2014, COM (2014) 225 final
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par Guillaume Payan, Maître de conférences à l'Université de Toulon, Membre du CDPC-JCE (UMR CNRS 7318)
Le 10 Juin 2014
Tous les principaux Règlements en vigueur dans le domaine de la coopération judiciaire civile (4) prévoient leur réexamen. La prévision de ce réexamen, qui peut conduire à l'abrogation de l'instrument législatif examiné et à son remplacement par un nouvel instrument (5), témoigne de la volonté du législateur de l'Union européenne (6) d'apporter une réponse adaptée, adaptable et non figée à la problématique de la construction d'un véritable Espace judiciaire européen.
Concrètement, chaque Règlement européen contient un article dans lequel il est demandé à la Commission européenne de rédiger, à plus ou moins brève échéance, un rapport sur l'application qui en a été fait dans les différents Etats membres de l'Union européenne. Le rapport du 15 avril 2014 donne une nouvelle illustration de l'interprétation faite, par la Commission européenne, de ce type de dispositions. A la vérité, ce rapport confirme et étaye les deux principaux enseignements que l'on peut tirer de l'analyse des rapports publiés à ce jour dans le domaine considéré : d'une part, le non-respect de la date butoir imposée par le législateur de l'Union européenne (A) et, d'autre part, le manque de lisibilité du processus suivi par la Commission européenne (B).
A - Le non-respect de la date butoir fixée par le législateur de l'Union européenne
Le rapport sur l'application du Règlement "Bruxelles II bis" aurait dû être rédigé "au plus tard le 1er janvier 2012" (7). Un retard de plus de deux ans est donc à déplorer. Il ne s'agit pas là d'une exception. On constate que la Commission européenne ne respecte généralement pas les délais imposés par le législateur de l'Union européenne pour élaborer ces rapports. Ces retards oscillent entre 6 mois (8) (ce qui est peu) et deux ans et demi (9) (ce qui est plus contestable).
Dans le même ordre d'idées, on constate que la Commission européenne ne suit pas la chronologie de l'adoption des Règlements. C'est ainsi que le rapport d'application du Règlement (CE) n° 861/2007 du 11 juillet 2007 sur le règlement des petits litiges (N° Lexbase : L1110HYR) a été communiqué en novembre 2013 (10), alors que celui sur l'application du Règlement (CE) n° 1896/2006 du 12 décembre 2006, instituant une procédure d'injonction de payer européenne (N° Lexbase : L1426IRA), se fait attendre.
Ces retards sont problématiques. Outre les interrogations qu'ils suscitent quant aux relations entre le législateur de l'Union européenne et la Commission européenne, l'accumulation de ces retards nuit à la qualité de l'action de l'Union européenne tendant à l'élaboration d'un véritable Espace judiciaire européen. En effet, parvenir à la création d'un tel espace ne suppose pas forcément de multiplier les Règlements européens. Il faut, en revanche, veiller à l'efficacité et à la bonne application, dans les Etats membres, des procédures instituées par ces Règlements. D'où l'importance d'être rigoureux dans l'élaboration de ces rapports d'étapes qui permettent de diagnostiquer les difficultés et besoins révélés par la pratique.
B - Le manque de lisibilité du processus suivi par la Commission européenne
Aux côtés des retards systématiques, l'analyse de l'action de la Commission européenne révèle que le processus de réexamen utilisé varie grandement en fonction du Règlement concerné, sans que de telles différences ne soient expliquées et, a fortiori, justifiées. Ces différences concernent aussi bien les travaux préalables, que les conséquences immédiates de la rédaction de ces rapports. A titre d'exemple, le même jour, ont été diffusés le rapport sur l'application du Règlement (CE) n° 44/2001 dit "Bruxelles I" (11) et un livre vert (12) concernant la révision de ce Règlement. En revanche, s'agissant du Règlement (CE) n° 861/2007 dit "Règlement petits litiges", à la même date, ont été adoptés un rapport sur son application (13), une analyse d'impact (14) et une proposition de Règlement modificatrice (15). Il en va encore différemment pour le Règlement (CE) n° 2201/2003 dit "Bruxelles II bis". La rédaction du rapport sur l'application de ce dernier Règlement est seulement conçue comme la première (16) étape d'un processus conduisant à une éventuelle (17) réforme (souhaitée par la Commission européenne). En effet, à la suite de l'adoption de ce rapport, la Commission européenne a lancé une consultation publique (18) devant se dérouler du 15 avril 2014 au 18 juillet de cette même année. A cette fin, un questionnaire, accessible -seulement en anglais- sur le site internet de la Commission européenne, a été mis à la disposition de toutes personnes intéressées (19). Sur la base des réponses fournies dans le cadre de cette consultation, la Commission rédigera un nouveau rapport accompagné, le cas échéant, d'une proposition de Règlement portant modification du Règlement "Bruxelles II bis".
On peut, là encore, regretter l'attitude de la Commission européenne. Le processus de réexamen des différents Règlements européens adoptés dans le domaine de la coopération judiciaire civile devrait être standardisé. Du moins, le respect d'une démarche plus cohérente apparaît-il grandement souhaitable. Il convient, à ce sujet, de distinguer la démarche employée pour réexaminer les Règlements européens et les suites à donner à ce réexamen. Ces dernières doivent, par définition, être propres à chaque Règlement européen et dépendre des résultats des études menées. Il apparaît que la rédaction d'un rapport sur l'application d'un Règlement ne devrait pas avoir seulement pour objet de lancer -ou d'orienter ?- le débat subséquent. La tenue d'une consultation publique devrait, au contraire, précéder la rédaction du rapport afin d'en enrichir le contenu et d'étayer les suggestions de réforme avancées par la Commission européenne. Il est vrai que, dans le rapport du 15 avril 2014 (20), la Commission indique avoir tenu compte "des courriers, des plaintes et des pétitions transmis par les citoyens européens" et s'être basée sur les informations recueillies auprès des membres du Réseau judiciaire européen en matière civile et commerciale. Cependant, elle n'apporte aucune précision supplémentaire sur ce point (21). De même, la Commission européenne affirme prendre appui sur "les études disponibles" (22). Toutefois, sans aucunement mettre en doute la grande qualité de ces études, on peut remarquer qu'elles sont déjà "anciennes". Sept études sur les huit citées datent d'au moins quatre ans ; la huitième est plus récente (2012) mais ne concerne pas spécifiquement l'application du Règlement (CE) n° 2201/2003.
II - Le contenu du rapport : les pistes de réformes avancées par la Commission européenne
Si le processus de réexamen suivi par la Commission européenne prête le flanc à la critique, l'analyse du contenu du rapport du 15 avril 2014 n'en est pas moins intéressante. La Commission européenne y avance certaines pistes de réformes qui pourraient être intégrées dans une prochaine proposition législative portant modification du Règlement (CE) n° 2201/2003. Suivant la structure dudit Règlement, le rapport contient des suggestions concernant la compétence internationale des juridictions (A), la reconnaissance et l'exécution des décisions prononcées (B) ainsi que la coopération transfrontière des autorités centrales mises en place pour le bon fonctionnement du Règlement (C).
A - La compétence internationale des juridictions
En ce qui concerne les règles relatives à la compétence juridictionnelle, les suggestions de la Commission européenne s'articulent principalement autour de deux axes : l'intégration de la jurisprudence pertinente de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) et un certain alignement sur des solutions retenues dans des Règlements européens plus récents.
L'intégration de la jurisprudence de la CJUE. Le Règlement "Bruxelles II bis" est applicable, depuis le 1er mars 2005, dans un domaine où le contentieux est abondant (23). Il a donné lieu à de très nombreuses décisions tant des juridictions internes, que de la CJUE. Saisie essentiellement de demandes de décisions préjudicielles formées par les juridictions des Etats membres de l'Union européenne, la CJUE a dû préciser le sens qu'il convenait de donner aux notions utilisées et interpréter plusieurs dispositions du Règlement, dont celles ayant trait à la compétence internationale des juridictions (24). Cette jurisprudence favorise l'application uniforme du Règlement dans les Etats membres et pourrait opportunément être "codifiée", c'est-à-dire intégrée dans une nouvelle version du Règlement. C'est du moins l'une des suggestions émises par la Commission européenne.
En matière matrimoniale (25), la Commission européenne mentionne notamment l'arrêt "Hadadi" du 16 juillet 2009 (26) dans lequel la CJUE précise le sens à donner à la règle de compétence "fondée sur la nationalité des deux époux" (Règl., art. 3, § 1, point b)) dans le cas où chacun des époux possède la nationalité des deux mêmes Etats membres. On pourrait ainsi imaginer que le futur règlement européen "Bruxelles II ter" contienne une disposition supplémentaire régissant cette situation sur la base de la jurisprudence de la CJUE et retenant le principe suivant lequel les époux peuvent saisir, selon leur choix, la juridiction de l'Etat membre devant laquelle le litige sera porté.
En matière de responsabilité parentale, la Commission européenne rappelle notamment les précisions apportées dans la jurisprudence de la CJUE (27) sur la notion centrale de "résidence habituelle", autour de laquelle gravitent les dispositions du Règlement intéressant la compétence juridictionnelle. On pourrait tout à fait concevoir que la définition jurisprudentielle de cette notion soit incluse dans la liste figurant actuellement dans l'article 2 du Règlement. Par hypothèse, cette liste serait enrichie de la définition suivante : aux fins du présent Règlement, on entend par "résidence habituelle d'un enfant", "l'endroit où est situé le centre des intérêts de l'enfant, compte tenu de l'ensemble des circonstances de fait pertinentes, notamment de la durée et de la régularité du séjour, ainsi que de son intégration familiale et sociale". Il ne s'agit là que d'un exemple. La Commission européenne met aussi l'accent sur les arrêts de la CJUE interprétant l'article 19 (jurisprudence sur l'application de la règle de litispendance (28)) ou l'article 20 (jurisprudence relative aux mesures conservatoires pouvant être prises par une juridiction en cas d'enlèvement d'enfant (29)) du Règlement.
L'alignement sur les Règlements européens plus récents. L'intensification de la coopération judiciaire dans les matières du droit de la famille lato sensu fait l'objet d'une attention croissante de la part du législateur de l'Union européenne. Il y a encore cinq ans, le Règlement "Bruxelles II bis" était le seul instrument en vigueur dans ce domaine. Depuis, on le sait, ont été adoptés le Règlement (CE) n° 4/2009 du 18 décembre 2008, relatif aux obligations alimentaires (30) et le Règlement (UE) n° 1259/2010 du 20 décembre 2010 concernant la loi applicable au divorce et à la séparation de corps (dit "Rome III") (31). Outre le Règlement (UE) n° 650/2012 du 4 juillet 2012, qui concerne les successions transfrontières (32), on compte également deux propositions de Règlement, datant du 16 mars 2011 et s'inscrivant en droit de la famille : la proposition de Règlement du Conseil relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière d'effets patrimoniaux des partenariats enregistrés (33) et la proposition de Règlement du Conseil relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière de régimes matrimoniaux (34). L'ensemble de ces textes forme le contexte dans lequel s'inscrit désormais le Règlement "Bruxelles II bis". Avec raison, la Commission européenne souhaite que le réexamen de ce dernier se fasse à la lumière des solutions qui sont retenues dans cet environnement législatif (35). Cela doit être approuvé. Le réexamen d'un Règlement européen doit être l'occasion d'adopter les solutions pertinentes privilégiées dans d'autres Règlements plus récents et de favoriser ainsi la cohérence et la lisibilité de l'action de l'Union européenne. Il est à souligner que la Commission européenne entend également s'inspirer des solutions, relatives à la compétence juridictionnelle, contenues dans une première proposition législative visant à modifier le règlement "Bruxelles II bis", qui avait été adoptée en 2006 (36) et "retirée" en 2013 (37).
A titre d'exemple, concernant la matière matrimoniale, la Commission européenne rappelle que le Règlement (CE) n° 2201/2003 n'"offre pas aux époux la possibilité de désigner le tribunal compétent d'un commun accord", alors que les instruments plus récents (dont le Règlement (CE) n°4/2009 et le Règlement (UE) n° 650/2012) "accordent généralement une certaine autonomie aux parties" (38). Elle se déclare ainsi favorable à introduire, dans le Règlement "Bruxelles II bis" modifié, "une autonomie limitée des parties permettant aux époux de convenir du tribunal compétent, [ce qui] pourrait être particulièrement utile dans les divorces par consentement mutuel, d'autant plus que les époux ont la possibilité, en vertu du Règlement "Rome III", de convenir de la loi applicable à leur litige matrimonial".
Dans le même sens, la Commission (39) déplore que, contrairement à des Règlements européens plus récents, le Règlement "Bruxelles II bis" ne prévoit pas de forum necessitatis (ou compétence de "nécessité" qui permet, exceptionnellement de faire connaître à une juridiction d'un Etat membre un litige qui présente un lien avec un Etat tiers, dans le but de remédier notamment à des situations de déni de justice) ou, inversement, des dispositions apportant de plus amples précisions sur les cas où les juridictions des Etats membres ont la possibilité de décliner leur compétence en faveur d'une juridiction d'un Etat tiers.
B - La reconnaissance et l'exécution des décisions judiciaires
On le sait, l'objectif de la Commission européenne est de parvenir à la suppression généralisée de l'exequatur dans le domaine de la coopération judiciaire civile et, par voie de conséquence, dans l'ensemble des matières couvertes par le Règlement "Bruxelles II bis" (40). Néanmoins, la réalisation de cet objectif suppose de prévoir des garanties de nature à accroître le niveau de confiance mutuelle entre les Etats membres. A ce titre, de façon assez classique, la Commission suggère notamment (41) la création prochaine de "normes de procédure minimales communes".
La poursuite de la suppression de l'exequatur. Le Règlement "Bruxelles II bis" offre la première illustration de la suppression de la procédure d'exequatur en matière civile. Cette suppression concerne certaines décisions, à savoir les décisions certifiées relatives au droit de visite et au retour de l'enfant en cas d'enlèvement. Cela est d'autant plus remarquable que, dans le domaine du "droit de la famille", les instruments législatifs européens -Directives et Règlements- sont adoptés suivant une procédure législative spéciale qui se caractérise principalement par un vote à l'unanimité au sein du Conseil de l'Union européenne (42).
Pour la Commission européenne (43), le fait que la suppression de l'exequatur soit actuellement limitée à certains types de décisions constitue une source de complication, par exemple, dans des affaires où il est non seulement question de la reconnaissance transfrontière d'un droit de visite, mais également d'un droit de garde (ces deux questions étant soumises à des régimes juridiques différents). La Commission justifie également l'extension de la suppression de l'exequatur à d'autres catégories de décisions judiciaires en soulignant les interprétations juridictionnelles divergentes dont font l'objet les motifs de refus de reconnaissance transfrontalière et, singulièrement, le motif de l'"ordre public".
Ayant sans doute retenu les enseignements du processus de révision du Règlement (CE) n° 44/2001 dit "Bruxelles I", la Commission européenne reconnaît toutefois que la suppression généralisée de l'exequatur ne peut se concevoir sans "garanties". A ce titre, elle évoque l'introduction de "normes de procédure minimales communes".
La perspective de "normes de procédure minimales communes". La solution d'élaborer des "normes de procédure minimales communes" n'est pas nouvelle. Loin s'en faut. Elle a été concrétisée -de façon plus ou moins heureuse- dans les Règlements (CE) n° 805/2004 "Titre exécutoire européen", (CE) n° 1896/2006 "Injonction de payer européenne" et (CE) n° 861/2007 "Règlement petits litiges". C'est également cette solution qui a récemment été suggérée, par la Commission européenne, dans le domaine de la notification transfrontière des actes judiciaires et extrajudiciaires (44).
La question se pose alors de savoir quel sera l'objet de ces normes minimales. Un début de réponse est avancé dans le rapport du 15 avril 2014. Il apparaît que ces normes devraient notamment concerner l'audition de l'enfant dans les procédures visées par le Règlement "Bruxelles II bis" (45). De même, des normes minimales communes pourraient porter sur les procédures d'exécution des décisions de justice -particulièrement, les décisions de retour en cas d'enlèvements d'enfants- dans les Etats membres (46). Par hypothèse, ces normes auraient pour objet de garantir une exécution effective et rapide des décisions prononcées dans les domaines couverts par le règlement. Cette dernière piste de réflexion confirme la volonté de la Commission d'étendre l'emprise de l'Union européenne dans le domaine de l'exécution forcée (ou exécution proprement dite) des titres exécutoires (47).
C - La coopération entre les autorités centrales
Tout comme cela est le cas pour les règles de compétences juridictionnelles et celles relatives à la reconnaissance et à l'exécution des titres, le Règlement "Bruxelles II bis" consacre un chapitre à la "coopération entre les autorités centrales en matière de responsabilité parentale" (48). Nul n'est besoin d'insister sur la grande importance de ce type de coopération pour une application optimale des Règlements européens, en général, et du Règlement "Bruxelles II bis", en particulier. Outre leurs fonctions générales (telles que l'échange d'informations sur les législations et procédures nationales (49)), le Règlement "Bruxelles II bis" confie à ces autorités d'importantes fonctions dans des affaires en cours (ex. échanger des informations sur la situation de l'enfant ; fournir une assistance aux titulaires de l'autorité parentale ; faciliter la conclusion d'accords entre les titulaires de l'autorité parentale (50)).
La Commission européenne, qui souligne le précieux apport du Réseau judiciaire européen pour faciliter le dialogue entre les autorités centrales, souhaite optimiser leur coopération.
Le précieux apport du Réseau judiciaire européen. Le Réseau judiciaire européen en matière civile et commerciale (51) constitue une structure de dialogue et d'échanges entre les principaux acteurs de l'Espace judiciaire européen. Ces échanges portent principalement sur des questions générales tenant à l'application des Directives et Règlements européens. Toutefois, ils peuvent également concerner des affaires en cours. Cela est particulièrement vrai en matière de responsabilité parentale ou dans les cas d'enlèvements transfrontières d'enfants. A ce sujet, la Commission européenne constate que, depuis 2010, 155 affaires ont été discutées dans le cadre de réunions bilatérales (52).
Optimisation de la coopération entre les autorités centrales. Pour améliorer la coopération entre les autorités centrales, la Commission européenne suggère d'apporter différentes précisions concernant l'exercice concret des missions qui leurs sont conférées. A titre d'exemples, des éclaircissements seraient bienvenus en ce qui concerne l'étendue de leur obligation de recueillir et d'échanger des informations sur la situation de l'enfant, la célérité dans le traitement des demandes ou encore la traduction des informations transmises. La rédaction de guides pratiques est également évoquée (53).
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Réf. : Cass. civ. 3, 7 mai 2014, n° 13-14.152, FS-P+B (N° Lexbase : A5521ML3)
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N2545BUS
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par Christine Lebel, Maître de conférences HDR à la Faculté de Droit de Nancy (Université de Lorraine, Institut François Gény, EA 7301, Nancy), Président de l'AFDR Section Lorraine
Le 29 Juillet 2017
I - L'insertion d'une clause de reprise sexennale
En principe, la reprise des terres louées pour les exploiter en faire-valoir direct par le propriétaire s'exerce principalement en fin de bail (2). Elle provoque un contentieux relativement important, notamment à propos du congé délivré en fin de bail, destiné à avertir le preneur que le bailleur souhaite reprendre les terres pour les exploiter directement, ou par l'intermédiaire d'un membre de sa famille. Toutefois, l'exploitation en faire-valoir direct étant l'un des principaux objectifs du statut du fermage, le législateur a permis au bailleur la possibilité de reprendre les biens loués, au cours du bail renouvelé, au moyen d'une clause de reprise, trois ans avant l'échéance du bail renouvelé, autrement dit six ans après le renouvellement du bail, d'où son nom de clause de reprise sexennale. Initialement (3), ce dispositif devait permettre aux descendants du bailleur, mineurs lors de la conclusion du bail initial, de pouvoir reprendre les parcelles pour les exploiter personnellement, après avoir atteint l'âge de la majorité, fixée avant 1974, à 21 ans. La loi n° 88-1202 du 30 décembre 1988 (N° Lexbase : L9121AGW) a étendu le bénéfice de ce dispositif au conjoint, puis plus récemment au partenaire d'un pacte civil de solidarité (4).
Contrairement au droit de reprise en fin de bail, les conditions de mise en oeuvre de la clause sexennale sont beaucoup plus souples. Ainsi, l'article L. 411-6 du Code rural et de la pêche maritime dispose que le preneur ne peut s'opposer à l'insertion de cette clause lors du renouvellement du bail. Par conséquent, il n'est pas obligatoire que la clause figure, dès l'origine, dans la convention régissant la relation entre les parties. Ainsi, le bailleur dispose, en quelque sorte, du "droit de modifier la règle du jeu" sans que le preneur ne puisse s'y opposer d'une quelconque façon. En effet, la jurisprudence considère que la clause de reprise sexennale peut figurer soit dans le bail initial, soit dans le bail renouvelé (5). En outre, le bénéfice d'un plan de continuation ne permet pas de s'opposer à l'insertion d'une telle clause (6). Sur ce point, le caractère d'ordre public du statut du fermage prime le droit des entreprises en difficulté.
Par ailleurs, le législateur n'impose aucune condition de délai pour insérer la clause de reprise sexennale. En effet, l'article L. 411-6 précité dispose que le preneur ne peut s'opposer à l'insertion de cette clause au moment du renouvellement du bail. Par conséquent, il suffit que le bail soit renouvelé pour que le bailleur puisse imposer l'insertion de cette clause dans le bail, alors que dans le bail initial, cette clause doit être acceptée par les deux parties au contrat.
Depuis plusieurs décennies, la Cour de cassation a jugé que l'insertion n'était pas limitée à la seule époque du renouvellement du bail, mais pouvait intervenir à tout moment (7). Pour cette raison, le preneur à bail ne pouvait s'opposer à l'insertion d'une telle clause deux ans après le renouvellement du bail (8). Il ne pouvait pas invoquer le fait qu'en application d'une telle clause au cours du bail renouvelé, les prévisions de son activité économique se trouvaient sensiblement modifiées, dès lors qu'il devait restituer les parcelles louées dans un délai de quatre ans, et non à l'issue d'une période de sept ans. Toutefois, ces solutions ont été rendues à propos de contrats de bail écrits, pour lesquels la notion de clause ne soulève pas de difficultés particulières. Peuvent-elles être transposées au bail verbal, c'est-à-dire à un contrat dont l'essentiel, au moins, n'est pas formalisé dans un document écrit comportant des clauses ?
II - Bail verbal et clause de reprise sexennale
En l'espèce, les parties ont des opinions discordantes sur ce point de droit. Ainsi, et logiquement, les bailleurs prétendent qu'au motif que la loi ne distinguant pas entre bail écrit et bail verbal, l'article L. 411-6 du Code rural et de la pêche maritime trouverait "naturellement" à s'appliquer à ce dernier. Afin de renforcer leur argumentation, ils invoquent le bail-type départemental qui régit le contrat verbal et, en l'occurrence, qui renvoie expressément à la clause de reprise sexennale. Enfin, le statut des baux ruraux étant d'ordre public, le preneur ne pouvait pas s'opposer à l'insertion de cette clause dans le bail verbal. De l'autre côté, le preneur prétend qu'une clause ne peut être insérée dans un contrat verbal. Tout simplement, il est difficile de matérialiser une clause dans une relation contractuelle immatérielle !
La cour d'appel a été sensible à l'argumentation du locataire, en considérant que le bail verbal, censé fait aux conditions fixées par le contrat-type départemental, ne permet pas d'en déduire qu'une clause sexennale est automatiquement incluse dans le bail. En effet, le contrat-type se borne à renvoyer en des termes généraux aux dispositions du statut et précise seulement que la faculté est laissée aux parties de reconnaître au bailleur la faculté de reprise prévue par l'article L. 411-6 du Code rural et de la pêche maritime. En raison de l'absence de possibilité accordée sans ambigüité d'inclure la clause litigieuse, la cour d'appel considère que l'insertion d'une telle clause n'est pas possible dans un bail verbal. En outre, le jugement de conciliation rendu en 2001 ne pouvait avoir pour effet de transformer le bail verbal en bail écrit.
La Cour de cassation censure cette analyse sur le visa de l'article L. 411-6 précité, pour violation de la loi. En effet, en dépit de la lettre de l'article L. 411-4 du même code qui dispose que les contrats de baux doivent être écrits, la validité du bail verbal est reconnue en jurisprudence (9) et par la doctrine (10). En outre, dans chaque département, la commission consultative des baux ruraux rédige un contrat-type de bail soumis au statut du fermage qui est destiné à régir la relation contractuelle en l'absence de stipulations explicités du bail, ainsi que pour palier la carence d'écrit du bail verbal (11). Jusqu'à présent, la jurisprudence n'avait donné que peu de solution sur l'application de la clause sexennale au bail verbal. Une cour d'appel avait considéré que sa mise en oeuvre était possible dès lors que le contrat-type y faisait référence (12). En l'espèce, le contrat-type n'y faisait pas directement référence, mais très indirectement pas le biais d'une mention dans une annexe. Au final, la Cour de cassation devait trancher entre la possibilité d'insérer la clause et la faculté de le faire. Elle décide en faveur de la première solution au motif que le contrat-type renvoie au statut du fermage, qui est d'ordre public. Par conséquent, la faculté de reprise sexennale est objectivement conférée au propriétaire en cas de bail verbal. Par l'arrêt du 7 mai 2014, la Cour de cassation précise le régime de la clause sexennale et clarifie cette question.
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Réf. : CA Bordeaux, 15 mai 2014, n° 13/04787 (N° Lexbase : A1673MLK)
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N2559BUC
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Le 05 Juin 2014
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Réf. : Cass. crim., 28 mai 2014, n° 13-83.197, F-P+B+I (N° Lexbase : A6311MPG)
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N2470BUZ
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Le 05 Juin 2014
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Réf. : CE 5° s-s-r, 28 mai 2014, n° 361396, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A6348MPS)
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N2472BU4
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Le 12 Juin 2014
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Réf. : CA Poitiers, 30 mai 2014, n° 13/04346 (N° Lexbase : A5961MPH)
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N2475BU9
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Le 22 Juin 2016
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Réf. : CA Versailles, 28 mai 2014, n° 13/07354 (N° Lexbase : A9155MNE)
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N2476BUA
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Le 05 Juin 2014
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Réf. : Loi n° 2014-535 du 27 mai 2014 (N° Lexbase : L2680I3N)
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N2590BUH
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par Romain Ollard, Professeur à l'Université de La Réunion
Le 11 Juin 2014
I - Le droit à l'information des personnes suspectes au cours de l'enquête
Si, dans la réforme, certains droits doivent faire l'objet d'une information systématique dès lors qu'une personne est suspectée -droit à un avocat, droit d'être informé de l'accusation, droit à un interprète, droit de garder le silence-, le contenu du droit à l'information varie toutefois selon le statut du suspect, suivant qu'il est libre (A) ou privé de liberté (B).
A - Le droit à l'information du "suspect libre"
Droit à l'information du "suspect libre". La loi du 27 mai 2014 consacre pour la première fois le statut du "suspect libre" au profit des personnes suspectées lors de l'enquête (9), en encadrant les modalités selon lesquelles elles pourront être entendues librement sans être placées en garde à vue. A cette fin, la loi insère dans le Code de procédure pénale un nouvel article 61-1 (N° Lexbase : L2752I3C) qui prévoit que "la personne à l'égard de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction ne peut être entendue librement sur ces faits qu'après avoir été informée" de l'accusation dont elle fait l'objet, de son droit de quitter les locaux d'enquête, de son droit à un interprète, de son droit au silence ainsi que de son droit à des conseils juridiques. Sur ces points, la loi nouvelle ne fait pas vraiment oeuvre créatrice dans la mesure où ces différents chefs d'information étaient déjà dus même si, il est vrai, le droit au silence et le droit à un interprète n'avaient pas jusqu'alors à être notifiés au suspect entendu librement (10). La réforme se veut, en revanche, plus novatrice lorsqu'elle décide que, s'il est entendu pour un crime ou un délit puni d'une peine d'emprisonnement, le suspect libre devra se faire notifier son droit d'être assisté par un avocat au cours de son audition, la chancellerie anticipant sur ce point les exigences posées par la Directive C du 22 octobre 2013, relative au droit d'accès à un avocat.
Droit à l'assistance d'un avocat du "suspect libre". Cette disposition, qui n'entrera en vigueur que le 1er janvier 2015, rompt avec les solutions qui prévalaient jusqu'alors en matière d'audition libre qui permettaient d'interroger un suspect en dehors du régime de garde à vue, pour une durée maximale de 4 heures, sans la présence d'un avocat (11). Dans deux décisions QPC du 18 novembre 2011 et du 18 juin 2012 (12), le Conseil constitutionnel avait validé un tel système en décidant qu'aucune exigence constitutionnelle n'impose que la personne auditionnée bénéficie de l'assistance effective d'un avocat dès lors qu'elle consent librement à être entendue. Le Conseil avait toutefois émis une double réserve d'interprétation -expressément consacrée par la présente loi- en estimant que, lorsque des soupçons pèsent sur la personne auditionnée, celle-ci doit être informée non seulement de la nature de l'infraction reprochée, mais encore de la possibilité de quitter les locaux de police à tout moment. La solution était contestable dans la mesure où l'assistance de l'avocat était alors liée, non à l'existence de soupçons pesant sur la personne auditionnée, mais à l'existence d'une mesure de contrainte. Or, dès l'instant que la personne auditionnée est suspectée, elle doit pouvoir bénéficier de l'assistance d'un avocat car la nécessité de se défendre devient impérieuse. Désormais, dès lors qu'elles sont suspectées, toutes les personnes auditionnées, qu'elles soient entendues librement ou placées en garde à vue, seront soumises à un traitement identique.
Réserves tenant aux dispositions techniques du régime. Si la réforme comporte ainsi de notables avancées, elle pourrait cependant apparaître insuffisante. D'abord, il est regrettable que la loi restreigne le droit à l'assistance d'un avocat aux seules auditions de personnes suspectées d'avoir commis un crime ou un délit puni d'une peine d'emprisonnement (13), comme si la nécessité de se défendre n'apparaissait que pour les infractions les plus graves. Ensuite, la loi nouvelle ne limite la durée de l'audition que dans le cas où la personne est auditionnée sous contrainte (14). A l'inverse, aucune durée maximale n'est prévue pour l'audition libre, que la personne auditionnée soit suspectée (15) ou non (16), ce qui peut faire craindre certaines dérives, les enquêteurs pouvant interroger une personne suspecte sans aucune limite de temps dès lors qu'elle y consent.
Réserve tenant au critère du soupçon. Enfin et peut-être surtout, le nouveau régime mis en place pourrait constituer le terreau de détournements de procédure, consistant pour les policiers à entendre librement en tant que simple témoin un individu qui est en réalité soupçonné sans qu'il bénéficie en conséquence des garanties afférentes à la qualité de suspect, notamment du droit à l'assistance d'un avocat. Techniquement en effet, le pivot de l'application du régime nouveau repose tout entier sur l'existence de soupçons à l'encontre de la personne auditionnée. Or, un tel critère paraît pour le moins incertain, notamment lorsque les soupçons résultent, non d'éléments objectifs, comme en cas de dénonciation ou d'indices matériels, mais d'éléments subjectifs, lorsque les soupçons des enquêteurs sont plus diffus, résultant d'impressions vagues et indéterminées. Outre qu'un tel critère pourrait se révéler être un nid à contentieux, comme peut l'être le critère de l'indice apparent en matière d'enquête de flagrance (17), les OPJ n'auront-ils pas beau jeu, dans ces conditions, de prétendre que les personnes auditionnées n'étaient pas soupçonnées afin de contourner le droit à l'assistance d'un avocat ? Dès lors, le seul moyen de parer à ce risque ne serait-il pas d'admettre le droit à un avocat pour toute personne auditionnée, même non (officiellement) soupçonnée, dès l'instant qu'elle en fait la demande ?
B - Le droit à l'information du suspect soumis à une mesure privative de liberté
Principe général du droit à l'information en cas de mesure privative de liberté. La loi nouvelle consacre un droit général à l'information au bénéfice de toute personne suspectée, soumise à une mesure privative de liberté en application du Code de procédure pénale. Par delà la diversité des mesures privatives de liberté, toute personne retenue recevra en effet une déclaration écrite énonçant "les droits dont elle bénéficie au cours de la procédure" (18) et qu'elle sera "autorisée à conserver [...] pendant toute la durée de sa privation de liberté" (19), qu'il s'agisse de la garde à vue, d'une mesure de détention provisoire ou d'un mandat d'arrêt, national ou européen. Toutefois, ce principe de transmission d'une déclaration écrite des droits n'est peut-être pas si général qu'il pourrait y paraître puisque le nouvel article 803-6 restreint son champ d'application aux seules mesures privatives de liberté prononcées "en application du Code de procédure pénale". Si la loi nouvelle prévoit d'étendre la mesure aux retenues douanières (20) et à la garde à vue des mineurs (21), toutes les autres mesures privatives de liberté hors code -comme la retenue des étrangers- sont donc exclues du dispositif, mesures pour lesquelles la déclaration des droits aurait pourtant pu se révéler particulièrement utile.
Règles spécifiques à la garde à vue : accès restreint au dossier. S'agissant plus spécifiquement de la garde à vue, la loi améliore sensiblement les droits des personnes gardées à vue dès lors, notamment, qu'elles seront plus précisément informées de l'infraction dont elles sont soupçonnées et des motifs de leur garde à vue (22 ). Toutefois, ces avancées ne sauraient masquer l'essentiel, à savoir que, comme hier, elles n'auront qu'un accès restreint au dossier pénal. Certes, les personnes placées en garde à vue bénéficieront désormais d'un droit de consultation direct aux mêmes pièces du dossier que l'avocat, sans avoir nécessairement besoin de son intermédiaire (23). Mais, dès lors que l'article 63-4-1 du Code pénal (N° Lexbase : L3162I3I) demeure inchangé, la personne gardée à vue et son avocat pourront consulter, non point l'ensemble du dossier comme le proposait un amendement écologiste finalement rejeté, mais seulement un dossier restreint au procès-verbal de placement en garde à vue et de notification des droits, au certificat médical et aux procès verbaux d'audition de la personne placée en garde à vue (24), à l'exclusion donc de toutes autres pièces qui pourraient pourtant constituer des éléments à charge (audition des témoins, preuves matérielles, etc.). Cet accès restreint au dossier, on le sait, a été validé au plan interne tant par le Conseil constitutionnel (25) que par la Chambre criminelle de la Cour de cassation ayant décidé que l'absence de communication de l'ensemble des pièces du dossier, à ce stade de la procédure, n'est pas de nature à priver la personne d'un droit à un procès équitable dès lors que l'accès à ces pièces est garanti devant les juridictions d'instruction et de jugement. L'accès restreint au dossier à ce stade de la procédure serait conforme à l'article 6 de la CESDH dès lors qu'un plein accès est possible à un stade ultérieur, aux termes donc d'une appréciation in globo du droit à un procès équitable (27). Il apparaît ainsi que, dans l'esprit des juges internes, le rôle de l'avocat au cours de la garde à vue est moins celui d'un défenseur que celui d'un observateur de la légalité et du bon déroulement de la mesure, comme si la nécessité de se défendre n'apparaissait qu'à un stade ultérieur de la procédure. Il n'est pas certain que cette lecture du rôle de l'avocat au cours de la garde à vue soit conforme à celle prônée par la Cour européenne qui exige que la personne placée en garde à vue puisse bénéficier de "l'assistance effective d'un avocat" pendant toute la durée de la mesure, l'intéressé devant pouvoir bénéficier de toute la gamme d'intervention du conseil, qu'il s'agisse du "contrôle des conditions de détention" ou de "l'organisation de la défense" (28). Or, comment l'avocat pourrait-il organiser correctement la défense de son client sans avoir accès aux différents éléments de preuve collectés à son encontre ? Peut-être la transposition de la Directive C relative au droit d'accès à un avocat en cas d'arrestation sera-t-elle l'occasion de corriger cette divergence de vue.
II - Le droit à l'information des personnes poursuivies au cours du procès pénal
Non limité au seul bénéfice du suspect, au stade de l'enquête, le renforcement des droits procéduraux s'opère également au bénéfice de la personne poursuivie, lorsque le procès pénal est déclenché, non seulement au cours de l'instruction préparatoire (A) mais encore au cours ou en vue du jugement (B), au sein duquel le renforcement du droit à l'information se double d'un renforcement du principe du contradictoire.
A - Le renforcement des droits procéduraux au cours de l'instruction préparatoire
Renforcement de l'information des personnes poursuivies. Renforçant les droits des personnes poursuivies au cours de l'instruction, la loi nouvelle prévoit que les personnes mises en examen (29) et celles bénéficiant du statut de témoin assisté (30) devront désormais être informées de leur droit à un interprète et à la traduction des pièces essentielles du dossier, de leur droit au silence ainsi que des autres droits dont ils bénéficiaient déjà, à savoir le droit à l'assistance d'un avocat et le droit d'accès au dossier.
Accès direct des parties au dossier d'instruction. Si, contrairement au suspect au stade de l'enquête, les parties privées -personne mise en examen et partie civile- avaient accès au dossier d'instruction complet, cet accès se faisait indirectement, par l'intermédiaire de leur avocat. La jurisprudence décidait, en effet, que les articles 114 (N° Lexbase : L3172I3U) et 197 (N° Lexbase : L1754IPN) du Code de procédure pénale n'autorisent la communication du dossier qu'aux avocats des parties (31), cette règle n'apparaissant pas contraire à l'article 6 § 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme (N° Lexbase : L7558AIR) qui n'impose pas la remise du dossier de procédure à la personne poursuivie avant la saisine de la juridiction de jugement (32). Bien plus, si l'avocat, autorisé à se faire délivrer des copies du dossier d'instruction, pouvait les consulter avec son client pour les besoins de la défense, il lui était en revanche interdit de remettre à son client ces copies, couvertes par le secret de l'instruction (33). La loi nouvelle rompt avec ces solutions en insérant un quatrième alinéa à l'article 114 du Code de procédure pénale qui dispose que, "après la première comparution ou la première audition, les avocats des parties ou, si elles n'ont pas d'avocat, les parties peuvent se faire délivrer copie de tout ou partie des pièces et actes du dossier [...] dans le mois qui suit la demande" (34). Toutefois, afin de garantir de secret de l'instruction, il est prévu que les parties ayant obtenu une copie du dossier doivent attester par écrit avoir pris connaissance de l'article 114-1 qui punit d'une d'amende contraventionnelle (35), le fait pour une partie de diffuser des pièces ou des éléments de l'instruction dont elle a reçu copie.
B - Le renforcement des droits procéduraux au cours ou en vue du jugement
Renforcement du droit à l'information. Comme au cours de l'instruction, les personnes prévenues devant le tribunal correctionnel (36) ou accusées devant la cour d'assises (37) se verront désormais expressément informées (38) non seulement de leur droit d'être assisté par un interprète mais encore de leur droit, "au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire". Par ailleurs, un nouvel article 388-4 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2767I3U) prévoit que, en cas de poursuite par citation directe ou convocation par officier de police judiciaire (COPJ) (39), les avocats des parties pourront "consulter le dossier de la procédure au greffe du tribunal de grande instance dès la délivrance de la citation ou au plus tard deux mois après la notification de la convocation", les parties ou leurs avocats pouvant obtenir gratuitement la copie du dossier dans un délai d'un mois à compter de la demande. Afin de renforcer ces dispositions, un nouvel article 390-2 du Code de procédure pénale ([LXB=L2769I3X ]) énonce que, si le prévenu ou son avocat n'ont pas pu obtenir la copie du dossier avant l'audience, "le tribunal est tenu d'ordonner, si le prévenu en fait la demande, le renvoi de l'affaire à une date fixée à au moins deux mois à compter de la délivrance de la citation ou de la notification de la convocation". Ces dispositions, dépassant le seul droit à l'information des personnes poursuivies, sont également tournées vers les droits de la défense des personnes poursuivies puisque, en prévoyant ainsi un délai minimal d'"audiencement" devant le tribunal correctionnel, la loi nouvelle favorise un accès "en temps utile" au dossier de la procédure, ce qui facilitera d'autant la préparation de la défense du prévenu et permettra donc de garantir un exercice effectif des droits de la défense.
Renforcement du contradictoire à l'issue de la garde à vue. Dans ce prolongement, la loi nouvelle prévoit en premier lieu que, à l'issue de la garde à vue, les personnes déférées devant le procureur de la République en vue d'une comparution immédiate ou d'une convocation par procès-verbal pourront être, lors de leur présentation devant ce magistrat, assistées par un avocat, lequel pourra formuler des observations portant notamment sur la régularité de la procédure, sur la qualification retenue, sur le caractère éventuellement insuffisant de l'enquête et sur la nécessité de procéder à de nouveaux actes. Au vu de ces observations, le procureur de la République pourra éventuellement donner une nouvelle orientation à la procédure, par exemple en requérant l'ouverture d'une information ou en ordonnant la poursuite de l'enquête. L'effectivité de cette disposition nouvelle, qui contribue assurément à rétablir l'équilibre entre le procureur de la République et la personne mise en cause par l'introduction d'un débat contradictoire, est toutefois dépendante non seulement d'un accès effectif au dossier mais encore d'un laps de temps suffisant laissé à l'avocat pour préparer la défense de son client. Or, à défaut d'un accès au complet dossier pendant la durée de la garde à vue, cette disposition risque fort de rester largement théorique (40).
Renforcement du contradictoire avant jugement correctionnel. En second lieu, la loi nouvelle énonce que les personnes poursuivies par citation directe ou par COPJ peuvent, "avant toute défense au fond ou à tout moment au cours des débats, demander, par conclusions écrites, qu'il soit procédé à tout acte" supplémentaire qu'elles estimeraient nécessaire à la manifestation de la vérité (41). Le juge saisi de la requête devra alors motiver spécialement sa décision en cas de refus, et pourra, dans le cas contraire, soit confier le supplément d'information à un juge d'instruction, si les actes demandés n'ont pas été ordonnés avant l'audience, soit ordonner l'exécution des actes demandés selon les règles de l'enquête préliminaire lorsqu'il est possible de les exécuter avant l'audience. Si, d'une manière générale, l'on peut se réjouir d'une telle introduction du principe du contradictoire, qui faisait jusqu'alors défaut puisque, à défaut d'instruction, aucune demande d'actes ne pouvait être formulée, il ne s'agit là, au fond, que de palliatifs au défaut de caractère juridictionnel et contradictoire de l'enquête policière. Dès lors, la vraie question n'est-elle pas celle, en définitive, de l'introduction du contradictoire dès le stade de l'enquête (42) ? A cet égard, on suivra avec attention les propositions, attendues dans le courant du mois de juin, de la mission, confiée à des personnalités du monde judiciaire, sur la procédure d'enquête pénale ayant précisément pour objectif de réfléchir à l'introduction du contradictoire dans les enquêtes de flagrance ou préliminaires (43).
(1) JORF n° 123, 28 mai 2014.
(2) Conseil de l'Union européenne du 2 décembre 2009, Programme de Stockholm, Journal officiel de l'Union européenne C 115 du 4 mai 2010.
(3) Voir également, la Directive 2012/29/UE du 25 octobre 2012, non encore transposée, relative à la protection des victimes (N° Lexbase : L5485IUP). V. également propositions de Directives du 27 novembre 2013, concernant les droits procéduraux des personnes vulnérables, l'aide juridictionnelle provisoire et le renforcement de la présomption d'innocence pour les personnes suspectées ou poursuivies.
(4) Directive 2010/64/UE du 20 octobre 2010 (N° Lexbase : L2124INY).
(5) Directive 2012/13/UE du 22 mai 2012.
(6) Directive 2013/48/UE du 22 octobre 2013 (N° Lexbase : L5328IYY).
(7) A cette fin, la Garde des Sceaux a pu confier une mission à des personnalités du monde judiciaire sur la procédure d'enquête pénale dont les propositions sont attendues dans le courant du mois de juin prochain (mission présidée par M. Jacques Beaume, Procureur général près la cour d'appel de Lyon).
(8) Pour les dispositions relatives à l'aide juridictionnelle, v. art. 13 de la loi n° 2014-535 du 27 mai 2014, modifiant la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique (N° Lexbase : L8607BBE).
(9) Il est à noter que ce régime est également applicable dans le cadre de l'instruction lorsque l'enquête est diligentée sur commission rogatoire (C. pr. pén., art. 154 N° Lexbase : L9762IPA, modifié par l'article 4 II).
(10) Cass. crim., 27 avril 2013, D., 2013, Actu,1005, à propos de la notification du droit au silence.
(11) C. pr. pén., art 62 (N° Lexbase : L3155I3A) (enquête de flagrance) et 78 (N° Lexbase : L9758IP4) (enquête préliminaire) a contrario.
(12) Cons. const., décision n° 2011-191/194/195/196/197 QPC, du 18 novembre 2011 (N° Lexbase : A9214HZB) ; Cons. const., décision n° 2012-257 QPC du 18 juin 2012 (N° Lexbase : A8706INR), D.P., 2012, Etude 4, J. Leroy.
(13) C. pr. pén., art. 61-1, 5° (N° Lexbase : L2752I3C).
(14) L'audition ne peut alors durer que le temps nécessaire à l'audition, sans que cette durée ne puisse excéder quatre heures (C. pr. pén., art. 62, al. 2 N° Lexbase : L3155I3A).
(15) C. pr. pén., art. 61-1.
(16) C. pr. pén., art. 62, al. 1er.
(17) C. pr. pén., art. 53, al. 1er (N° Lexbase : L5572DYZ).
(18) C. pr. pén., art. 803-6 (N° Lexbase : L2753I3D) (accusation portée contre elle, droit de se taire, du droit à l'assistance d'un avocat, droit d'accès aux pièces du dossier, droit de connaître les modalités de contestation de la légalité de l'arrestation, d'obtenir un réexamen de sa privation de liberté ou de demander sa mise en liberté).
(19) C. pr. pén., art. 803-6, al. 2.
(20) Article 12 de la loi n° 2014-535 du 27 mai 2014 (N° Lexbase : L2680I3N), modifiant l'article 323-6 du Code des douanes (N° Lexbase : L3190I3K) et créant un article 67 F (N° Lexbase : L3127I39).
(21) Article 4, VI, de la loi n° 2014-535 du 27 mai 2014, modifiant l'article 4 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945, relative à l'enfance délinquante (N° Lexbase : L4662AGR).
(22) Article 63-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3163I3K), tel que modifié par l'article 4 de la loi n° 2014-535 du 27 mai 2014. Ce régime est également applicable dans le cadre de l'instruction lorsque la garde à vue est ouverte sur commission rogatoire (C. pr. pén., art.154 N° Lexbase : L9762IPA).
(23) C. pr. pén., art. 63-1, al. 6.
(24) C. pr. pén., art. 63-4-1.
(25) Cons. const., décision n° 2011-191/194/195/196/197 QPC, du 18 novembre 2011, D. 2011, 3034, note H. Matsopoulou.
(26) Cass. crim.,19 septembre 2012, n° 12-83.997, FS-P+B (N° Lexbase : A7536ISW).
(27) V. également, dans le même sens, CE 1° et 6° s-s-r., 11 juillet 2012, n° 349752 (N° Lexbase : A8418IQT).
(28) CEDH, 13 octobre 2009, n° 7377/03, Dayanan c/ Turquie (N° Lexbase : A3221EPY), précité.
(29) Article 6, I, de la loi n° 2014-535 du 27 mai 2014, modifiant l'article 113-3 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3174I3X).
(30) Article 6, IV, de la loi n° 2014-535 du 27 mai 2014, modifiant l'article 116 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3171I3T).
(31) Cass. crim., 22 janvier 2002, n° 00-82.215 (N° Lexbase : A4542CYU).
(32) Cass. crim., 16 décembre 2009, n° 09-86.298, F-D (N° Lexbase : A4849EQN).
(33) Ass. plén., 30 juin 1995, n° 94-16.982 (N° Lexbase : A8581ABG) (1er arrêt), D., 1995, 97, note J. Pradel.
(34) L'alinéa 5 vient d'ailleurs ajouter que "lorsque la copie a été demandée par les avocats, ceux-ci peuvent en transmettre une reproduction à leur client".
(35) Dont le montant a d'ailleurs été augmenté, de 3 750 à 10 000 euros (article 7 modifiant l'article 114-1 du Code de procédure pénale).
(36) Article 8, I, de la loi n° 2014-535 du 27 mai 2014, modifiant l'article 406 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3177I33).
(37) Article 8, X, de loi n° 2014-535 du 27 mai 2014, modifiant l'article 273 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3184I3C).
(38) Ces mêmes informations sont encore dues, en matière correctionnelle, par le procureur de la République à la personne que celui-ci envisage de poursuivre en application des articles 394 (N° Lexbase : L3178I34) et 395 (N° Lexbase : L3802AZT) (convocation par procès-verbal et comparution immédiate) : article 8, VII, de la loi n° 2014-535 du 27 mai 2014, modifiant l'article 393 du Code de procédure pénale.
(39) C. pr. pén., art. 390 (N° Lexbase : L3182I3A) et 390-1 (N° Lexbase : L3181I39).
(40) En ce sens, Rapport Assemblée nationale n° 1895, n° 24.
(41) C. pr. pén., art. 388-5 (N° Lexbase : L2768I3W).
(42) Sur la question, v. J. Alix, D., 2011, 1699.
(43) Mission présidée par M. Jacques Beaume, Procureur général près la cour d'appel de Lyon.
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Réf. : Loi n° 2014-535 du 27 mai 2014 (N° Lexbase : L2680I3N), portant transposition de la Directive relative au droit à l'information dans le cadre des procédures pénales (N° Lexbase : L3181ITY)
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N2436BUR
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Le 05 Juin 2014
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Réf. : Décret n° 2014-558 du 30 mai 2014, portant création d'un traitement de données à caractère personnel relatif à la gestion nationale des personnes détenues en établissement pénitentiaire (N° Lexbase : L3582I33)
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N2449BUA
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Le 10 Juin 2014
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Réf. : Cass. crim., 9 avril 2014, n° 14-80.833, F-P+B (N° Lexbase : A6160MPT)
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Le 05 Juin 2014
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Réf. : Cass. crim., 27 mai 2014, n° 13-87.095, F-P+B (N° Lexbase : A6151MPI)
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Le 05 Juin 2014
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Réf. : Cass. crim., 27 mai 2014, n° 13-83.262, F-P+B+I N° Lexbase : A6105MPS)
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Le 05 Juin 2014
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Réf. : Cass. civ. 1, 28 mai 2014, n° 13-14.884, F-P+B (N° Lexbase : A6208MPM)
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Le 07 Juin 2014
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Réf. : Cass. civ. 1, 28 mai 2014, n° 13-14.884, F-P+B (N° Lexbase : A6208MPM)
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Le 05 Juin 2014
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Réf. : Cass. crim., 27 mai 2014, n° 13-80.849, F-P+B+I (N° Lexbase : A6227MPC)
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Le 05 Juin 2014
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Réf. : Cass. crim., 27 mai 2014, n° 13-82.116, F-P+B+I (N° Lexbase : A6295MPT)
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Le 05 Juin 2014
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Réf. : Décret n° 2014-545 du 26 mai 2014 (N° Lexbase : L2689I3Y)
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Le 31 Mai 2014
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Réf. : Cass. civ. 1, 28 mai 2014, n° 13-16.340, FS-P+B+I (N° Lexbase : A8068MN7)
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Le 11 Juin 2014
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