Aux termes d'un arrêt rendu le 12 décembre 2013, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) retient que la loi qui raccourcit un délai de prescription, voire supprime une voie de recours, rétroactivement est contraire au droit de l'Union si elle ne prévoit pas de régime transitoire destiné à permettre aux contribuables de faire valoir leurs droits acquis à la date d'entrée en vigueur de la loi (CJUE, 12 décembre 2013, aff. C-362/12
N° Lexbase : A2602KRS). En l'espèce, une société de droit anglais se voit privée de tout recours contre l'imposition mise à sa charge et déclarée par la suite contraire au droit de l'Union européenne (CJUE, 8 mars 2001, aff. C-397/98 et C-410/98
N° Lexbase : A8088AY9). En effet, le droit anglais prévoit deux voies de recours possibles : l'"
action Woolwich", qui se prescrit par un délai de six ans à compter de la date de paiement de l'impôt, et l'"
action Kleinwort Benson", qui se prescrit par six ans à compter de la date à laquelle le demandeur découvre l'erreur de droit ou aurait pu la découvrir avec une diligence raisonnable. Or, par une loi adoptée le 24 juin 2004, le législateur national a décidé que le délai de prescription de cette dernière action ne s'appliquait pas s'agissant d'une erreur de droit liée à une question fiscale relevant de la compétence des "
Commissioners of Inland Revenue". Cette nouvelle règle s'applique de manière rétroactive aux actions introduites à compter du 8 septembre 2003, date à laquelle le Gouvernement du Royaume-Uni a annoncé sa proposition d'adoption de cette loi. La société, qui disposait en principe de quatre années pour déposer son recours, s'en voit privée. Le juge anglais saisit la Cour de justice de la question de savoir si les principes d'effectivité, de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime prévus par le droit de l'Union s'opposent à la suppression sans préavis et de manière rétroactive de l'"
action Kleinwort Benson". Le juge de l'Union répond que l'application rétroactive d'un nouveau délai d'action plus court que le délai précédemment applicable est conforme au droit de l'UE, dans la mesure où une telle application concerne des actions en restitution d'impôts non encore engagées au moment de l'entrée en vigueur du nouveau délai, mais portant sur des sommes versées alors que l'ancien délai était d'application. Elle considère pourtant que la loi anglaise est contraire au principe d'effectivité, car elle ne comporte pas de régime transitoire permettant aux justiciables de disposer d'un délai suffisant, après l'adoption de celles-ci, afin de pouvoir introduire les demandes de remboursement qu'ils étaient en droit de présenter sous l'empire de l'ancienne législation.
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