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N0943B3C
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par Vincent Vantighem
Le 13 Novembre 2024
Il faut s’imaginer deux personnes qui se parlent, en face-à-face, depuis six semaines. À quelques mètres de distance. À peine séparées par un lutrin. Deux personnes qui tentent de se comprendre. Mais qui ne semblent pas parler la même langue. Mercredi 6 novembre, Bénédicte de Perthuis en a, semble-t-il, eu assez des récriminations perpétuelles de Marine Le Pen. La présidente de la 11e chambre du tribunal judiciaire de Paris a donc sèchement recadré la cheffe de file du Rassemblement national qu’elle juge pour des faits de « détournement de fonds publics », « recel », et « complicité ».
« Ici, on n’est pas en politique, on est devant un tribunal correctionnel », a commencé la magistrate. « J’ai l’impression qu’on est dans un monde parallèle, où vous répétez des choses, qui ne sont pas des réponses aux questions qu’on vous pose. On ne peut pas passer toute l’audience à dire des choses que vous avez déjà dites. »
Interdite une seconde, l’ex-candidate à l’élection présidentielle tente alors de reprendre la main, mais se fait, à nouveau, rabrouer par la juge : « Normalement, dans un procès, on avance, d’une manière ou d’une autre, vers une vérité, vers un socle commun… Avec des désaccords, mais on avance. Là, je ne sais pas quel est votre sentiment, mais il ne s’est absolument pas passé ça. Tant pis. C’est la vie. Mais on ne peut pas vous laisser reprendre la parole pour redire des choses que vous avez déjà dites... »
L’échange pourrait n’être qu’un nouvel épisode de l’inimitié entre une magistrate et un prévenu. Mais non, il illustre le malentendu permanent qui entoure le dossier dit des assistants parlementaires d’eurodéputés du Front national, depuis six semaines maintenant.
« Marine sait tout cela... » : Le mail qui pose question
Depuis le 30 octobre, la 11e chambre tente de déterminer si les anciens eurodéputés du Front national et les anciens cadres du parti se sont rendus coupables de « détournement de fonds publics », en faisant supporter au Parlement européen les salaires d’assistants parlementaires, alors que ceux-ci travaillaient en réalité en France pour le parti.
Chose suffisamment rare pour être soulignée dans cette matière politico-financière, le dossier regorge d’éléments suspects. Ainsi, Catherine Griset, l’une des assistantes parlementaires de Marine Le Pen, n’a passé, selon l’examen de son badge d’entrée, qu’une douzaine d’heures en un an dans les murs du Parlement européen, alors que les règles l’obligeaient à résider à Bruxelles. Julien Odoul, lui, a demandé par mail à pouvoir rencontrer la députée qu’il assistait depuis… quatre mois. Thierry Légier, lui, exerçait le métier de garde du corps, ce qui, toujours selon les règles, n’est pas compatible avec un statut d’assistant parlementaire…
Sans parler d’un échange de mails entre deux cadres du Front national faisant peser une réelle suspicion sur le fait que Marine Le Pen avait conscience d’enfreindre les règles. « Marine sait tout cela », disait ainsi l’échange portant sur le fait que certains emplois d’assistants étaient … fictifs.
Depuis le 30 octobre, donc, à raison de trois après-midi par semaine, la 11e chambre du tribunal écoute, religieusement, les anciens eurodéputés et leurs assistants tenter de s’extirper des accusations avec de tels éléments de charges contre eux. Souvent impavides, les magistrats les écoutent s’empêtrer dans leurs dénégations fumeuses et parfois gênantes.
Le risque d’une condamnation à une peine d’inéligibilité
Assise au premier rang, Marine Le Pen, elle, passe le plus clair de son temps à fulminer, à s’agiter, à s’agacer lorsqu’elle ne réagit pas bruyamment aux échanges auxquels elle assiste. Prévenue la plus assidue dans le prétoire, elle ne compte plus les moments « lunaire » ou « surréaliste » de l’audience qu’elle a tenté de dénoncer.
Car, pour elle, le dossier d’accusation ne tient pas. Sa ligne de défense se divise en deux arguments : le premier consiste à dire que c’est aux partis politiques de déterminer le rôle des assistants parlementaires et non pas au Parlement européen, et encore moins à la justice française ; le second argument repose, lui, sur une forme de dénégation permanente. Même quand les éléments semblent indéfendables.
« Sereine » le jour de l’ouverture des débats, la cheffe de file des députés RN apparaît désormais un peu abattue tant les débats lui sont défavorables. Après avoir dénoncé la « partialité » supposée du tribunal dans les colonnes du Point, puis dans les couloirs du tribunal lorsqu’elle se confie, en off, aux journalistes, elle l’a clairement lâché à la barre : « À maintes reprises, votre opinion était déjà faite, nos arguments évacués… Tout cela m’a déstabilisée », lâche-t-elle à Bénédicte de Perthuis qui semble en avoir vu d’autres.
Le problème, c’est que l’enjeu est de taille pour l’ex-finaliste de l’élection présidentielle et les vingt-quatre autres prévenus qui l’accompagnent. Pour « détournement de fonds publics », elle encourt une peine de dix ans de prison, une lourde amende, mais surtout une peine d’inéligibilité qui pourrait contrarier sérieusement ses plans pour 2027.
Le procès entre désormais dans sa dernière ligne droite. Après les réquisitions du parquet, qui étaient attendues hier, mercredi 13 novembre, les avocats de la défense ont désormais plusieurs jours pour plaider. La décision sera ensuite mise en délibéré.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
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Réf. : Cass. soc., 23 octobre 2024, n° 22-21.966, FS-B N° Lexbase : A96426DH
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N0927B3Q
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par Charlotte Moronval
Le 13 Novembre 2024
► Lorsqu'un salarié est placé en position d'activité partielle, les jours fériés ouvrés ouvrent droit à une indemnité horaire, versée par l'employeur, correspondant à une part de leur rémunération antérieure dont le pourcentage est fixé par le décret en Conseil d'État, alors que les jours fériés normalement chômés ne relèvent pas de l'activité partielle, de sorte que l'employeur doit assurer le paiement du salaire habituel aux salariés totalisant au moins trois mois d'ancienneté dans l'entreprise.
Faits et procédure. Les salariés d’une société sont placés en activité partielle pendant la pandémie de Covid-19.
Un syndicat saisit le tribunal judiciaire afin que celui-ci ordonne à la société de maintenir la rémunération habituelle de leurs salariés au titre des jours fériés.
La cour d’appel (CA Versailles, 15 septembre 2022, n° 21/00945 N° Lexbase : A78998IE) accède à la demande du syndicat. Elle constate que les salariés n'ont pas été placés en activité partielle pendant les jours fériés litigieux, qui étaient normalement chômés. Elle en a déduit que la rémunération contractuelle correspondante était due et que la société devait être condamnée à payer au syndicat des dommages-intérêts pour atteinte à l'intérêt collectif de la profession.
La société forme un pourvoi en cassation.
Solution. La Chambre sociale de la Cour de cassation approuve la décision de la cour d’appel.
Elle rappelle que le chômage des jours fériés ne peut entraîner aucune perte de salaire pour les salariés totalisant au moins trois mois d'ancienneté dans l'entreprise ou l'établissement.
Par ailleurs, les jours fériés normalement chômés ne relèvent pas de l’activité partielle, de sorte que l’employeur doit assurer le paiement du salaire habituel aux salariés totalisant au moins trois mois d’ancienneté dans l’entreprise.
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newsid:490927
Réf. : BOFiP, actualité, 23 octobre 2024
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N0893B3H
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par Marie-Claire Sgarra
Le 13 Novembre 2024
► Des précisions sont apportées par rescrit sur la prise en compte des aides à l'embauche versées par les personnes morales de droit public pour la détermination du crédit d'impôt recherche.
Question. Les aides à l’embauche versées par des personnes morales de droit public, notamment les aides forfaitaires pour l’embauche en alternance et les aides pour l’embauche d’un demandeur d’emploi, d’un travailleur handicapé ou dans des zones en difficulté, constituent-elles des subventions publiques au sens du III de l’article 244 quater B du CGI, qui doivent être déduites de l’assiette servant à la détermination du crédit d’impôt recherche (CIR) ?
Réponse de l’administration fiscale. En application de l’article 244 quater B du Code général des impôts N° Lexbase : L7453MAB, les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles relevant d’un régime réel d’imposition, ou exonérées en application de certaines dispositions légales, peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt au titre des dépenses qu’elles exposent au cours de l’année pour la réalisation d’opérations de recherche scientifique ou technique.
Afin de ne pas financer une même opération de recherche par le biais de plusieurs aides publiques, le III de l’article 244 quater B du Code général des impôts dispose que les subventions publiques reçues par les entreprises à raison des opérations ouvrant droit au crédit d’impôt sont déduites des bases de calcul de ce crédit d’impôt, qu’elles soient définitivement acquises par elles ou remboursables.
Par conséquent, seules les subventions publiques, remboursables ou non, afférentes à des opérations ouvrant droit au crédit d’impôt, doivent être déduites. Aussi, dans l’hypothèse où une entreprise recevrait une subvention afférente à un projet comportant des opérations ouvrant droit au crédit d’impôt et des opérations n’y ouvrant pas droit, seule la fraction de cette subvention afférente aux opérations ouvrant droit à crédit d’impôt devrait être déduite. Cette fraction est déterminée au prorata du montant des opérations ouvrant droit au CIR (I-A § 10 du BOI-BIC-RICI-10-10-30-20 N° Lexbase : X4473ALA).
En revanche, toutes conditions étant par ailleurs remplies, les aides à l’embauche accordées par les personnes morales de droit public qui ne sont pas conditionnées à l’affectation du personnel recruté à la réalisation d’opérations de recherche n’ont pas à être déduites de l’assiette du CIR, y compris dans l’hypothèse où le personnel embauché serait amené en pratique à participer à des opérations de recherche éligibles.
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newsid:490893
Réf. : Cass. crim., 6 novembre 2024, n° 24-82.023, F-B N° Lexbase : A96386DC
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N0929B3S
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par Pauline Le Guen
Le 26 Novembre 2024
► La Chambre criminelle indique qu’au cours d’une garde à vue sur commission rogatoire, les questions posées concernant un fait antérieur à la prévention sont irrégulières ; si le juge d’instruction acquiert la connaissance de faits nouveaux, il doit en informer le procureur de la République.
Rappel des faits et de la procédure. À la suite d’une plainte de la CPAM à l’encontre d’une femme, une information a été ouverte des chefs d’escroquerie, exécution de travail dissimulé et blanchiment aggravé. Après que des investigations financières aient été diligentées, l’intéressée a été placée en garde à vue et son domicile perquisitionné. La saisine du juge d’instruction a ensuite été étendue à des faits de blanchiment en bande organisée et la femme a été mise en examen de ce chef. Elle a alors saisi la chambre de l’instruction d’une demande d’annulation de pièces.
En cause d’appel. La chambre de l’instruction a rejeté la requête en annulation et la requérante a formé un pourvoi contre cet arrêt.
Moyens du pourvoi. Par un premier moyen, la demanderesse reprochait à la chambre de l’instruction d’avoir rejeté sa requête et renvoyé le dossier pour poursuite de l’information, alors que des investigations ont été menées sur un virement qui n’était pas compris dans la saisine initiale du juge d’instruction.
Le second moyen reprochait quant à lui à l’arrêt de déclarer justifié le placement en garde à vue de la demanderesse par l’exécution d’une commission rogatoire se rapportant à des faits non visés dans la saisine du juge d’instruction, la garde à vue, l’audition et la perquisition étant intervenues antérieurement au réquisitoire supplétif, de sorte que l’intéressée a été auditionnée sur des faits non compris dans la saisine du magistrat instructeur.
Décision. La Cour de cassation rejette le premier moyen en rappelant que le juge d’instruction peut procéder spontanément à des investigations, la seule limite étant qu’il ne puisse faire usage de mesures coercitives, exigeant la mise en mouvement de l’action publique. Par ailleurs, elle souligne que la jurisprudence admet que doivent être effectuées les vérifications sommaires visant à obtenir la confirmation de la vraisemblance objective de la commission du délit constitutif d’un fait nouveau. En l’espèce, les investigations concernaient un virement qui présentait un caractère similaire à une précédente opération dont le juge était saisi, et la Chambre criminelle indique qu’une réquisition adressée à un établissement bancaire est dépourvue de tout caractère coercitif, de sorte que le juge d’instruction n’a pas excédé ses pouvoirs.
Néanmoins, la Haute juridiction fait droit au second moyen au visa de l’article 80 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L1322MA9. Selon ce texte, le juge d’instruction ne peut informer que sur les faits dont il est régulièrement saisi. S’il acquiert la connaissance de faits nouveaux, il doit en informer le procureur de la République. En l’espèce, lors de sa garde à vue, la requérante a été auditionnée sur des faits dépassant la saisine initiale du juge d’instruction. Si les juges du fond, pour écarter la nullité de ces actes, ont relevé que les enquêteurs pouvaient procéder à des vérifications sommaires sur des faits nouveaux constatés, et que les éléments recueillis ont été portés à la connaissance du procureur qui a pu délivrer un réquisitoire supplétif par la suite, la Haute juridiction indique néanmoins que dès lors que le virement litigieux découvert avait, préalablement à la garde à vue, fait l’objet d’investigations constitutives de vérifications sommaires, les questions posées à la requérante lors de l’audition – donc dans un cadre coercitif – sur ledit virement, excédaient nécessairement le cadre de telles vérifications. La cassation est par conséquent encourue.
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Réf. : CE, 5e-6e ch. réunies, 7 novembre 2024, n° 465886, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A38956EY
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N0918B3E
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par Yann Le Foll
Le 13 Novembre 2024
► Le refus illégal de reconnaître le caractère prioritaire et urgent d'une demande de relogement constitue un préjudice indemnisable au titre des troubles dans les conditions d'existence.
Principe. Il appartient au juge, saisi d'une demande tendant à l'indemnisation des préjudices ayant résultés d'une décision ayant illégalement refusé de reconnaître le caractère prioritaire et urgent d'une demande de relogement, de tirer les conséquences de l'illégalité de cette décision.
Il doit ainsi retenir la responsabilité de l'État au titre des troubles dans les conditions d'existence résultant pour le demandeur du maintien de sa situation d'absence de relogement à compter de l'expiration du délai de six mois imparti au préfet pour le reloger.
Rappel. Ces troubles doivent être appréciés en fonction des conditions de logement qui ont perduré du fait de la carence de l'État, de la durée de cette carence et du nombre de personnes composant le foyer du demandeur pendant la période de responsabilité de l'État (CE, 16 décembre 2016, n° 383111, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A2375SXA).
Faits. Une personne a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'État à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait, d'une part, de l'illégalité de la décision du 14 juin 2018, par laquelle la commission de médiation de Paris a refusé de le reconnaitre comme prioritaire et devant être logé en urgence sur le fondement de l'article L. 441-2-3 du Code de la construction et de l'habitation N° Lexbase : L4905MBB et, d'autre part, de la carence fautive de l'État à le reloger.
Position TA. Par un jugement n°2105646/3-2, du 19 mai 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a condamné l'État à verser à l’intéressée la somme de 3 500 euros au titre de l'absence de relogement.
Il a aussi rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à l'indemnisation des préjudices ayant résultés pour lui de la décision du 14 juin 2018 ayant illégalement refusé de reconnaître le caractère prioritaire et urgent de sa demande de relogement.
Pour ceci, il a retenu que l’intéressé ne démontrait pas l'existence d'un préjudice moral distinct du préjudice moral indemnisé au titre de la carence à assurer son relogement en exécution de la décision du 9 mai 2019, ni d'une perte de chance d'accéder à un logement social et d'éviter son expulsion.
Décision CE. En se fondant sur de tels motifs, alors qu'il lui appartenait de tirer les conséquences de l'illégalité de la décision du 14 juin 2018 en retenant la responsabilité de l'État au titre des troubles dans les conditions d'existence résultant pour le demandeur du maintien de sa situation d'absence de relogement à compter de l'expiration du délai de six mois imparti au préfet pour le reloger, le tribunal administratif a commis une erreur de droit.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE, La responsabilité administrative sans faute, L'impossibilité de faire cesser une situation illégale, in Responsabilité administrative (dir. P. Tifine), Lexbase N° Lexbase : E3797EU8. |
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Réf. : Cass. com., 6 novembre 2024, n° 22-24.543, F-D N° Lexbase : A68606ES
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N0942B3B
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par Vincent Téchené
Le 13 Novembre 2024
► Ne donne pas de base légale à sa décision la cour d’appel qui refuse de décharger les cautions, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, en s'abstenant d'exercer en temps utile ses droits de créancier nanti sur le fonds de commerce, la créancière n'avait pas fait perdre aux cautions un droit qui aurait pu leur bénéficier par subrogation.
Faits et procédure. Le 30 décembre 2013, une banque a consenti à une société un prêt de 280 000 euros, garanti par le nantissement du fonds de commerce exploité par la société, ainsi que par des cautionnements solidaires dans la limite de 80 500 euros chacun. Le 7 juillet 2015, la banque a résilié ses concours accordés à la société, laquelle a été mise en liquidation judiciaire le 13 avril 2016.
Le 9 octobre 2017, la banque a assigné en paiement deux cautions qui ont demandé à être déchargées de leurs engagements de caution sur le fondement de l'article 2314 du Code civil N° Lexbase : L1373HIP. Les cautions ayant été condamnées à payer une certaine somme (CA Paris, 5-6, 21 septembre 2022, n° 19/10286 N° Lexbase : A97838KK), elles ont formé un pourvoi en cassation.
Décision. La Cour de cassation rappelle que selon l’article 2314, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2021-1192, du 15 septembre 2021 N° Lexbase : L8997L7D, la caution est déchargée, lorsque la subrogation aux droits, hypothèques et privilèges du créancier, ne peut plus, par le fait de ce créancier, s'opérer en faveur de la caution. On rappellera que l’ordonnance de réforme n’a pas modifié le sens de cette disposition (v. C. civ., art. 2314 N° Lexbase : L0178L84). La seule nouveauté de l’ordonnance concernant le bénéfice de subrogation est que la caution ne peut plus reprocher au créancier son choix du mode de réalisation d'une sûreté. Il s’agit ici d’une condamnation de la jurisprudence antérieure (Cass. com., 8 mars 2017, n° 14-29.819, F-D N° Lexbase : A4600T3R).
Dans l’affaire qui nous occupe, pour refuser de décharger les cautions, l'arrêt retient que, dès lors que le nantissement prévu au contrat de prêt a effectivement été inscrit le 10 janvier 2014, c'est vainement que les cautions reprochent à la banque le défaut de poursuites diverses, non prévues, qu'il est loisible au créancier d'exercer ou non.
Pour la Haute juridiction, en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, en s'abstenant d'exercer en temps utile ses droits de créancier nanti sur le fonds de commerce, la banque n'avait pas fait perdre aux cautions un droit qui aurait pu leur bénéficier par subrogation, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
En outre, la Cour rappelle qu’il incombe au créancier de prouver que la perte du droit préférentiel invoquée par la caution n'a causé aucun préjudice à celle-ci (v. déjà en ce sens, Cass. com., 13 décembre 2017, n° 16-14 672, F-D N° Lexbase : A1191W8M).
Ainsi l’arrêt d’appel est également censuré pour avoir inversé la charge de la preuve en refusant de décharger les cautions au motif que les cautions ne démontrent pas l'effectivité potentielle des mesures qu'ils reprochent à la banque de ne pas avoir mises en œuvre.
Pour aller plus loin :
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