Le Quotidien du 13 septembre 2024

Le Quotidien

Concurrence

[Brèves] Déséquilibre significatif : licéité de la clause permettant à un hébergeur de suspendre l'usage de ses services de référencement pour des raisons légales

Réf. : Cass. com., 4 septembre 2024, n° 22-12.321, FS-B N° Lexbase : A35345X8

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par Vincent Téchené

Le 11 Septembre 2024

► En prévoyant une clause contractuelle lui permettant de suspendre promptement l'usage de ses services de référencement pour des raisons légales, puis en l'appliquant lorsqu'il est informé du caractère trompeur d'un site auquel il donne accès, un hébergeur ne crée pas un déséquilibre significatif.

Faits et procédure. La société Fathi, titulaire des droits sur la plateforme accessible par le nom de domaine « cartegrisefrance.fr », dédiée aux démarches destinées à l'obtention sur internet de certificats d'immatriculation de véhicules automobiles auprès des services de l'État français, a conclu avec Google un contrat pour le référencement payant de son site internet au moyen du service « Google Adwords » devenu « Google Ads ».

Les conditions générales de ce contrat comportaient un article 13 précisant : « Google peut apporter des modifications mineures aux présentes Conditions à tout moment sans préavis ; toutefois, en cas de modifications majeures des présentes Conditions, un préavis sera adressé par Google. Chaque partie peut résilier immédiatement les présentes Conditions à tout moment en notifiant à l'autre partie moyennant un préavis sauf en cas de manquement contractuel répété ou grave, notamment à une politique. Google peut suspendre la participation du client aux programmes à tout moment, par exemple en cas de problème de paiement, de manquements suspectés ou avérés aux politiques ou aux présentes Conditions ou pour raisons légales ».

À la suite de la réception par la société Google France d'un courriel émanant du secrétariat d'État chargé du numérique, la société Google a suspendu le compte de la société Fathi.

Contestant cette suspension et le refus de réactiver son compte, la société Fathi a assigné les sociétés Google. À hauteur d'appel, elle a demandé l'annulation de l'article 13 des conditions générales du contrat. Google lui a opposé que les stipulations de cet article répondaient à une nécessité propre à la qualité d'hébergeur de Google, tenue, conformément à l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique N° Lexbase : L2600DZC, d'agir promptement pour retirer des données ou en rendre l'accès impossible dès le moment où elle a connaissance du caractère illicite des activités ou des informations en cause, ou de faits ou circonstances faisant apparaître ce caractère.

L’arrêt d’appel (CA Paris, 5-11, 17 septembre 2021, n° 19/17158 N° Lexbase : A847644P) a rejeté la demande d'annulation de l'article 13 des conditions générales du contrat.

Décision. En premier lieu, la Cour de cassation énonce qu’il résulte de l'article 6, paragraphe 2, de la LCEN que pèse sur les hébergeurs l'obligation légale d'agir promptement pour retirer des données dont ils connaissent le caractère illicite ou pour en rendre l'accès impossible et qu'ils engagent leur responsabilité en cas de manquement à cette obligation.

Ainsi, selon la Cour, il s'en déduit qu'en prévoyant une clause contractuelle lui permettant de suspendre promptement l'usage de ses services de référencement pour des raisons légales, puis en l'appliquant lorsqu'il est informé du caractère trompeur d'un site auquel il donne accès, un hébergeur ne crée pas un déséquilibre significatif au sens de l'article L. 442-6, I, 2°, devenu l'article L. 442-1, 2° du Code de commerce N° Lexbase : L3427MHE.

En second lieu, la Chambre commerciale relève qu’après avoir énoncé à bon droit que seules les entreprises qui jouissent de l'habilitation prévue à l'article R. 322-1, I, du Code de la route N° Lexbase : L7466MAR ont le droit de collecter les données de leurs clients nécessaires à l'établissement de certificats d'immatriculation et le droit de prélever les taxes prévues par le Code général des impôts au titre de la délivrance des certificats d'immatriculation, l'arrêt relève que la société Fathi ne disposait pas de l'habilitation requise et n'a pas cherché à l'obtenir après la suspension de son compte Google Ads.

Ainsi, la cour d'appel a exactement retenu que l'activité de la société Fathi était illicite, de sorte que la société Google n'avait pas commis d'abus en suspendant puis en refusant de réactiver ledit compte.

La Cour de cassation rejette, en conséquence, le pourvoi.

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Droit des étrangers

[Brèves] Octroi du certificat de résidence d'un an portant la mention « vie privée et familiale » aux ressortissants algériens : calcul de la durée de résidence en France

Réf. : CE, 2°-7° ch. réunies, 30 juillet 2024, n° 473675, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A24225UA

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N0254B3S

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par Yann Le Foll

Le 12 Septembre 2024

► Les périodes durant lesquelles un ressortissant algérien fait l’objet d’une interdiction de retour sur le territoire français (IRTF) assortissant une obligation de quitter le territoire (OQTF), alors même qu’il a continué à séjourner sur le territoire national sans respecter cette interdiction, ne peuvent être prises en compte pour l’appréciation de la durée de résidence mentionnée par l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968.

Faits. Un ressortissant algérien, né en 1983, a sollicité son admission au séjour au titre de la vie privée et familiale. Par un arrêté du 13 octobre 2021, le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et a prononcé à son encontre une IRTF d'une durée de deux ans.

Rappel. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : « (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) ».

En outre, en vertu de dispositions aujourd'hui codifiées à l'article L. 611-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile N° Lexbase : L3601LZE, l'autorité administrative « peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) / 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivré ou s'est vu retirer un de ces documents (...) ». 

L'autorité administrative peut également, en vertu de dispositions aujourd'hui codifiées à l'article L. 612-8 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile N° Lexbase : L4104MLL, « assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français ».

Position CE. L’intéressé, qui soutient qu'il réside en France depuis plus de dix ans, a fait l'objet de cinq OQTF les 29 septembre 2009, 22 septembre 2011, 29 novembre 2013, 29 avril 2016 et 12 mars 2019, les deux dernières étant assorties d'une IRTF de deux ans. 

Décision. En jugeant que les périodes durant lesquelles l'intéressé faisait l'objet d'une interdiction de retour en France, alors même qu'il a continué à séjourner sur le territoire national sans respecter cette interdiction, ne peuvent être prises en compte pour l'appréciation de la durée de résidence mentionnée au 1° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, le président de la 1ère chambre de la cour administrative d'appel de Marseille (CAA Marseille, 13 juin 2022, n° 22MA01038 N° Lexbase : A6272798), qui n'a pas dénaturé les pièces du dossier, n'a pas commis d'erreur de droit.

Rappel bis. Il avait déjà été jugé que les éventuelles périodes d'incarcération en France des étrangers résidant habituellement en France depuis au plus 13 ans ne peuvent être prises en compte dans le calcul d'une durée de résidence (CE, 2°-7° ch. réunies, 8 avril 2021, n° 446427, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A25494P4).

À ce sujet. Lire A. Laurent, Le Conseil d’État précise le régime des interdictions de retour sur le territoire français quant au cumul de leur durée, Lexbase Public n° 748, 2024 N° Lexbase : N9548BZN.

newsid:490254

Santé et sécurité au travail

[Brèves] Réparation en cas de non-respect du temps de pause quotidien et de fourniture de travail pendant l’arrêt maladie du salarié

Réf. : Cass. soc., 4 septembre 2024, n° 23-15.944, FS-B N° Lexbase : A35415XG

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N0228B3T

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par Laïla Bedja

Le 11 Septembre 2024

► Le seul constat du non-respect du temps de pause de quotidien ouvre droit à réparation au regard des articles L. 3121-33, alinéa 1, du Code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, interprété à la lumière de l'article 4 de la Directive n° 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 ;

Le seul constat du manquement de l'employeur en ce qu'il a fait travailler un salarié pendant son arrêt de travail pour maladie ouvre droit à réparation (C. trav., art. L. 4121-1, L. 4121-2 et L. 4121-4) ;

lorsqu'une cour d'appel infirme le jugement ayant prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail et déboute le salarié de cette demande, le respect de la clause de non-concurrence par le salarié à compter du jugement fait obstacle à la restitution par l'intéressé de la contrepartie financière, de sorte que l'employeur doit, pour obtenir la restitution, démontrer que le salarié n'a pas respecté la clause pendant la période durant laquelle elle s'est effectivement appliquée.

Faits et procédure. Une salariée a saisi la juridiction prud’homale d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail le 10 juillet 2017. Plusieurs demandes ont été formulées.

Non-respect du temps de pause quotidien

Dans le premier moyen, la salariée fait grief à l’arrêt de la débouter de sa demande de dommages-intérêts pour manquement à la réglementation du travail relatif au temps de pause quotidien. La cour d’appel (CA Poitiers, 2 février 2023, n° 18/03033 N° Lexbase : A90049B4) relevait que la salariée ne s’était jamais plainte, tout au long de la relation contractuelle, de ne pas avoir pu bénéficier de sa pause de vingt minutes le lundi, et qu’il résulte des récapitulatifs d’heures supplémentaires et des bulletins de salaire que toutes les heures réalisées ont été payées.

Décision. Sur ce point, la Haute juridiction casse l’arrêt rendu par la cour d’appel. Elle rappelle que le salarié doit bénéficier d’un temps de pause quotidien d’une durée minimale de vingt minutes dès que le temps de travail atteint six heures. Le seul constat d’un non-respect ouvre droit à réparation (C. trav., art. L. 3121-33, al. 1 N° Lexbase : L7662LQT).

Pour aller plus loin : ÉTUDE : Le temps de travail effectif et le décompte, La durée du temps de pause et de restauration, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E0282ETM.

Manquement de l’employeur en ce qu’il a fait travailler un salarié pendant son arrêt de travail

Dans un premier moyen, la salariée reproche à la cour d’appel de l’avoir déboutée de sa demande. En effet, l’employeur l’a fait venir à plusieurs reprises sur son lieu de travail alors qu’elle se trouvait en arrêt de travail pour maladie.

Décision. Il résulte des articles L. 4121-1 N° Lexbase : L8043LGY, L. 4121-2 N° Lexbase : L6801K9R et L. 4121-4 N° Lexbase : L1454H9Q du Code du travail que l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité envers les salariés, doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Lorsqu'il confie des tâches à un travailleur, l'employeur doit prendre en considération les capacités de ce travailleur en matière de sécurité et de santé. S’appuyant sur cette obligation de sécurité envers les salariés, la Haute juridiction casse et annule l’arrêt rendu par la cour d’appel sur ce point.

Sort de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence

Au cours d’un cinquième moyen, la salariée fait grief à l’arrêt de la condamner à restituer à l’employeur la contrepartie financière de la clause de non-concurrence. La cour d’appel avait en effet retenu que la contrepartie financière de la clause de non-concurrence ne peut pas être payée avant la rupture du contrat de travail.

Décision. La Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la cour d’appel au visa des articles L. 1221-1 du Code du travail N° Lexbase : L0767H9B et 1134 du Code civil N° Lexbase : L0857KZR et du principe fondamental de libre exercice d’une activité professionnelle.

Pour aller plus loin : ÉTUDE : La clause de non-concurrence, L’exigence d’une contrepartie financière, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E078803L, | LE VERSEMENT DE LA CONTREPARTIE EN CAS DE RESPECT DE SON ENGAGEMENT PAR LE SALARIÉ

newsid:490228

Soins psychiatriques sans consentement

[Brèves] Isolement et contention : appréciation du juge au moment où il statue et non-lieu à statuer en cas de mainlevée de la décision

Réf. : Cass. avis, 5 septembre 2024, n° 24-70.003, FS N° Lexbase : A53385YD

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N0277B3N

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par Laïla Bedja

Le 12 Septembre 2024

► Selon l’article L. 3222-5-1, I, du Code de la santé publique, déterminant les conditions de l’isolement et de la contention, il appartient au juge de déterminer si les conditions d’un maintien de la personne en isolement sont ou non toujours réunies et d’ordonner en conséquence un tel maintien de la mesure d’isolement ou sa mainlevée ; il s’en déduit qu’il doit apprécier le bien-fondé de la mesure en cours au jour où il statue, afin de mettre un terme si besoin, à une privation de liberté injustifiée ;

Si la mainlevée d'une mesure d'isolement est intervenue avant que le juge ne se prononce, il n'y a plus lieu de statuer à son égard.

Demande d’avis. Le 6 juin 2024, la Cour de cassation a été saisie d’une demande d’avis du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Quimper. La demande était la suivante :

« 1 - Le juge saisi d'une demande de maintien d'une mesure d'isolement doit-il apprécier si les conditions de fond de la validité de la mesure sont réunies au moment de la saisine, ou bien au moment où il statue ?
2 - Pour le cas où son appréciation doive se porter au moment où il statue, le juge confronté à une situation d'isolement levée antérieurement ou postérieurement à la saisine, mais antérieurement à sa décision, doit-il déclarer sa saisine en prolongation sans objet, ordonner la mainlevée de la mesure ou examiner au fond si les conditions de maintien de l'isolement sont remplies ? »

Avis. Pour la Cour de cassation, le juge saisi d'une demande de maintien d'une mesure d'isolement apprécie le bien-fondé de la mesure d'isolement au moment où il statue. Aussi, comme elle l’avait déjà précisé dans un avis du 8 juillet 2021, n° 21-70.010 N° Lexbase : A311044X), si la mainlevée de la mesure d'isolement est intervenue avant que le juge ne se prononce, il n'y a plus lieu de statuer à son égard.

Elle ajoute que le fait qu'un contrôle obligatoire du juge ait été instauré et que l'établissement de santé ait la possibilité de prendre une nouvelle mesure moins de quarante-huit heures après la fin de la précédente, dont la durée se cumulera avec cette dernière, ne modifie pas l'objet de l'intervention du juge judiciaire, garant de la liberté individuelle.

Pour aller plus loin :

  • ÉTUDE : Les soins psychiatriques sans consentement, Le régime de l’isolement et de la contention, in Droit médical, Lexbase N° Lexbase : E3341037 ;
  • Infographie : INFO749, Procédure devant le JLD en matière d'isolement et contention, Droit médical N° Lexbase : X2953CQG.

 

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