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N9631BZQ
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par Vincent Vantighem
Le 17 Juin 2024
La procédure existe depuis plus de quinze ans. Mais c’est la première fois qu’elle aboutit à une sanction. Dans un communiqué publié le 13 juin, le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) a annoncé avoir sanctionné un magistrat après la saisine directe d’un justiciable qui dénonçait le comportement du juge lorsqu’il était chargé d’instruire son dossier entre 2019 et 2022.
Depuis qu’elle existe en 2008, cette procédure n’avait guère fonctionné… Et pour cause, la plupart des saisines des justiciables visaient à critiquer les décisions prises par les juges. Or, il ne s’agit pas ici d’un recours sur le fond mais bien d’une procédure visant à dénoncer le comportement d’un magistrat dans la gestion d’un dossier. Un justiciable l’a bien compris.
Visé par une information judiciaire ouverte en mai 2010 et dans laquelle il était mis en examen, il a saisi le Conseil supérieur de la magistrature pour reprocher au juge d’instruction qui avait repris son affaire en 2019 d’avoir quitté ses fonctions en juin 2022 sans avoir rendu l’ordonnance de règlement. Ceci alors que le réquisitoire définitif avait été signé par le parquet en 2019 et que le juge avait été relancé plusieurs fois à ce sujet…
Des saisines en forte augmentation en 2023
« Pendant les presque trois années où il a exercé en tant que magistrat instructeur, [il] n’a pas réalisé cet acte en dépit de plusieurs alertes de sa hiérarchie et d’engagements oraux et écrits de sa part en ce sens, alors même que son chef de service avait veillé à ce que son cabinet soit moins saisi de nouvelles procédures que ceux de ses collègues », a détaillé le Conseil supérieur de la magistrature.
Finalement, ce magistrat écope d’un blâme avec inscription à son dossier. Une sanction suffisamment grave pour entacher la suite de sa carrière. Lors de l’instruction, le magistrat en question s’est défendu, invoquant notamment le nombre de dossiers qu’il avait à gérer dans son cabinet, des « difficultés personnelles » durant cette période et une vision du dossier différente de celle du parquet qui l’obligeait à consacrer à ce dossier énormément de temps.
Des explications que le Conseil supérieur de la magistrature a entendues sans pour autant être convaincu. Chargé de la discipline des magistrats, l’instance ce contrôle a estimé que le juge d’instruction avait « manqué à son devoir de diligence » et à « son devoir de loyauté » vis-à-vis de certains de ses collègues. Et surtout « à son devoir de délicatesse » vis-à-vis du justiciable qui attendait, depuis bien trop longtemps, de savoir ce que son dossier allait devenir et quel sort la justice lui réserve désormais.
Ces dernières années, les saisines des justiciables devant le Conseil supérieur de la magistrature sont en augmentation. Après avoir enregistré 377 plaintes en 2021 et 352 plaintes en 2022, le Conseil supérieur de la magistrature en a comptabilisé 498 en 2023. Cette procédure est la seule qui permet de saisir le Conseil supérieur de la magistrature disciplinairement du cas d’un magistrat une fois que celui-ci n’est plus saisi de l’affaire, afin d’éviter tout déstabilisation.
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newsid:489631
Réf. : CE, 2e-7e ch. réunies, 7 juin 2024, n° 489404, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A67145GR
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N9598BZI
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par Yann Le Foll
Le 17 Juin 2024
► Est irrégulière la méthode d’évaluation des offres retenue par le pouvoir adjudicateur fondée sur la moyenne pondérée des rangs de classement des offres au regard de chacun des critères d'attribution.
Faits. Par avis d'appel public à la concurrence publié le 8 juillet 2022, la communauté d'agglomération Quimper Bretagne Occidentale a lancé une procédure de consultation en vue du renouvellement de la délégation de service public portant sur la gestion des services de mobilités de la communauté d'agglomération pour la période 2024-2030.
Les sociétés Keolis et Transdev ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Rennes d'annuler les décisions de la communauté d'agglomération rejetant leurs offres et attribuant la délégation de service public à la société RATP Développement, ainsi que l'ensemble de la procédure tendant à la passation de ce contrat. Le juge des référés a fait droit à cette demande (TA Rennes, 31 octobre 2023, n° 2305258 N° Lexbase : A11851T3).
Position CE. La méthode d'évaluation mise en œuvre en l'espèce par l'autorité concédante a consisté, conformément aux dispositions du règlement de la consultation, à classer les offres au regard de chacun des critères d'appréciation puis à attribuer à chaque offre une note correspondant à la moyenne des rangs de classement obtenus sur chaque critère, pondérée par le coefficient associé à chaque critère.
L'offre retenue est celle ayant obtenu, en application de cette méthode, la note la plus basse.
En faisant ainsi le choix, alors même qu'elle n'était en rien tenue de traduire en notes chiffrées l'appréciation qu'elle portait sur la valeur respective des offres, d'un mode d'attribution de la concession litigieuse fondé sur la moyenne pondérée des rangs de classement des offres au regard de chacun des critères d'attribution, alors que le classement ne reflète que très imparfaitement les écarts de valeur entre les offres.
Ainsi, l'autorité concédante a retenu une méthode d'évaluation susceptible de conduire à ce que, au regard de l'ensemble des critères, l'offre présentant le meilleur avantage économique global ne soit pas choisie (principe déjà énoncé dans CE 2e-7e ch. réunies, 3 mai 2022, n° 459678, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A94167UB).
Décision. Dans ces conditions, les sociétés Keolis et Transdev sont fondées à soutenir que la méthode d'évaluation mise en œuvre par l'autorité concédante est entachée d'irrégularité.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE, La passation d’un marché public, Le choix de l'offre économiquement la plus avantageuse, in Droit de la commande publique (dir. P. Tifine), Lexbase N° Lexbase : E2817ZLW. |
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newsid:489598
Réf. : Cons. const., décision n° 2024-1096 QPC, du 12 juin 2024 N° Lexbase : A79855H9
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N9625BZI
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par Marie-Claire Sgarra
Le 17 Juin 2024
► Les dispositions du 4 de l’article 459 du Code des douanes, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2020-1342, du 4 novembre 2020, renforçant le dispositif de gel des avoirs et d’interdiction de mise à disposition, est contraire à la Constitution.
La Cour de cassation a transmis au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité portant sur le 4° de l’article 459 du Code des douanes N° Lexbase : L6024MM3 qui prévoit que les personnes condamnées pour infractions en matière de relations financières avec l’étranger subissent une peine obligatoire d’incapacité professionnelle et élective (Cass. QPC, 13 mars 2024, n° 23-90.027, F-D N° Lexbase : A46562WD).
La Cour a relevé que si le juge peut dispenser le condamné de cette peine ou l’assortir du sursis, il ne peut en moduler la durée, laquelle est perpétuelle en l’absence d’un relèvement.
Il ressort des travaux préparatoires de la loi du 24 décembre 1969, dont sont issues ces dispositions, qu’elles instituent une sanction ayant le caractère d’une punition. Il résulte de la jurisprudence constante de la Cour de cassation, telle qu’elle ressort de l’arrêt de renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité, que la peine complémentaire d’incapacité prévue par ces dispositions doit obligatoirement être prononcée par le juge pénal en cas de condamnation.
Si, en vertu du f de l’article 369 du Code des douanes N° Lexbase : L1699IZX, le juge peut dispenser le coupable de cette peine complémentaire ou l’assortir du sursis, cette faculté ne saurait, à elle seule, permettre que soit assuré le respect des exigences qui découlent du principe d’individualisation des peines, dès lors qu’il ne peut en moduler la durée pour tenir compte des circonstances propres à chaque espèce.
Par conséquent, les dispositions contestées méconnaissent le principe d’individualisation des peines et doivent donc être déclarées contraires à la Constitution.
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newsid:489625
Réf. : ESMA, communiqué (en anglais), du 30 mai 2024
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N9617BZ9
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par Perrine Cathalo
Le 14 Juin 2024
► Dans un contexte technologique en permanente évolution, l’ESMA revient, dans un document consacré aux services d’investissement à destination des particuliers, sur les opportunités potentielles de l’intelligence artificielle (IA), mais aussi sur les risques. Elle énumère les règles applicables et rappelle leur importance.
Le 30 mai dernier, l’Autorité européenne des marchés financiers (ESMA) a publié un communiqué sur l’usage de l’intelligence artificielle dans la finance. L’occasion pour le superviseur européen de rappeler que son usage doit être supervisé et se faire en toute transparence pour les clients.
L’ESMA souligne que l’IA a le potentiel de transformer le paysage des services d’investissement aux particuliers en offrant des opportunités majeures en matière d’efficacité, d’innovation et d’amélioration des prises de décisions. Pour autant, le régulateur européen explique également que l’IA présente un certain nombre de risques, notamment des biais algorithmiques, des enjeux sur la qualité des données et un certain manque de transparence.
Pour s’assurer que les acteurs financiers restent en conformité avec la réglementation européenne tout en utilisant l’IA, l’ESMA rappelle donc que les obligations générales d’organisation et de conduite s’appliquent de la même façon. Ainsi, l’obligation d’agir dans le meilleur intérêt des clients doit rester centrale et être intégrée aux systèmes d’IA utilisés.
Enfin, et compte tenu des récents développements en la matière, l’ESMA souligne la nécessité pour les sociétés d’investissement de mettre en place des mesures appropriées pour contrôler l’utilisation des systèmes d'IA par leurs employés sous quelque forme que ce soit. Ce rappel est valable y compris pour les technologies d'IA de tiers, qu'elles soient spécifiquement envisagées ou déjà adoptées par l'entreprise elle-même, avec ou sans la connaissance et l'approbation directe de la direction générale.
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newsid:489617
Réf. : Loi n° 2024-536, du 13 juin 2024, renforçant l’ordonnance de protection et créant l’ordonnance provisoire de protection immédiate N° Lexbase : L5924MMD
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N9618BZA
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par Pauline Le Guen
Le 26 Juin 2024
► Le 13 juin 2024 était promulguée la loi n° 2024-536, visant à renforcer le dispositif déjà existant de l’ordonnance de protection pour les victimes de violences conjugales ;
La loi vient également créer une ordonnance provisoire de protection immédiate, permettant une prise en charge plus rapide des victimes ;
Enfin, elle durcit les peines prévues pour la violation des obligations et interdictions attachées à ces ordonnances.
Déposée au Parlement le 5 décembre 2023, la proposition de loi tendait à renforcer la protection des victimes de violences conjugales et intrafamiliales. Elle vient alors renforcer le dispositif d’ordonnance de protection et créer une ordonnance provisoire de protection immédiate.
Ordonnance de protection renforcée. Créée initialement par la loi n° 2010-769, du 9 juillet 2010, relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants N° Lexbase : L7042IMR, l’ordonnance de protection est un dispositif permettant d’accorder aux victimes de violences conjugales ainsi qu’aux enfants du couple des mesures de protection judiciaires, comme le prévoit l’article 515-9 du Code civil N° Lexbase : L2997LUK.
Jusqu’à présent, l’ordonnance était prévue pour une durée de six mois. Une prolongation était possible, à la condition qu’entre-temps une demande en divorce ou en séparation de corps ait été déposée, ou que le JAF ait été saisi d’une demande relative à l’exercice de l’autorité parentale. Désormais, la loi du 13 juin 2024 prévoit une durée de douze mois.
Par ailleurs, des mesures peuvent être attachées à cette ordonnance, et la nouvelle loi prévoit désormais que le JAF peut autoriser la victime à dissimuler son adresse à l’auteur des violences, adresse qui sera également masquée sur les listes électorales, afin qu’il ne puisse la trouver. De même, le juge pourra accorder à la victime la garde des animaux de compagnie, qui peuvent servir comme moyen de chantage.
Néanmoins, pour que ces mesures puissent être mises en place, un délai de six jours est nécessaire au JAF pour se prononcer sur la demande d’ordonnance, période durant laquelle les victimes ne sont pas protégées. Pour pallier cette difficulté, la loi de juin 2024 est venue créer une ordonnance provisoire de protection immédiate.
Ordonnance provisoire de protection immédiate créée. L’ordonnance provisoire de protection immédiate est un apport majeur de cette loi. En effet, elle vient accorder une protection plus rapide aux victimes, en prévoyant que cette ordonnance puisse être délivrée au cours de la période de six jours susvisée, en attendant que le JAF se prononce sur la demande d’ordonnance de protection. Elle sera décidée dans les vingt-quatre heures de la signalisation en cas de danger grave ou imminent pour la victime.
Des mesures pourront être décidées à l’encontre de l’auteur dans le cadre de cette ordonnance provisoire, telle que l’interdiction d’entrer en contact, de paraître ou l’interdiction du droit de visite ou d’hébergement. Un téléphone grave danger pourra également être remis à la victime, comme le prévoit l’article 41-3-1 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L8668IYP.
Durcissement des peines en cas de violation des ordonnances. Jusqu’à présent, une peine de deux ans d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende était prévue pour la personne qui ne respectait pas les obligations et interdictions imposées par l’ordonnance de protection. Désormais, l’article 227-4-2 du Code pénal N° Lexbase : L7574LP9 porte cette peine à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende, que ce soit pour la violation des mesures de l’ordonnance de protection ou celles de l’ordonnance provisoire. Le juge pourra également ordonner la mise en place d’un bracelet antirapprochement.
Pour aller plus loin :
Pour vous former : formation Lexlearning, Les violences conjugales : comprendre et agir (LXBEL140) (dir. M. Dayan et S. Giraud). |
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newsid:489618
Réf. : Cass. com., 5 juin 2024, n° 23-15.380, F-B N° Lexbase : A14565GZ
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N9579BZS
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par Vincent Téchené
Le 17 Juin 2024
► Le titulaire d'une marque jouissant d'une renommée qui a toléré en France pendant une période de cinq années consécutives l'usage d'une marque postérieure enregistrée, en connaissance de cet usage, ne peut plus demander la nullité de la marque postérieure, ni s'opposer à son usage pour les produits ou les services pour lesquels la marque postérieure a été utilisée, ni demander réparation du préjudice que lui aurait causé cet usage, à moins que son dépôt n'ait été effectué de mauvaise foi ;
La preuve de la connaissance par le titulaire de la marque antérieure de l'usage de la marque postérieure après son enregistrement peut résulter d'une connaissance générale, dans le secteur économique concerné, d'une telle utilisation, cette connaissance pouvant être déduite, notamment, de la durée de l'utilisation.
Faits et procédure. La société Holdham, holding du groupe Hamelin, leader européen de la papeterie scolaire, est titulaire de la marque verbale française « Oxford » et semi-figurative française « Oxford », déposées respectivement le 7 décembre 1971 et le 7 mai 2002 pour désigner notamment, en classe 9, les agendas et, en classe 16, les articles de papeterie.
Par un contrat du 8 avril 2002, l'usage de la marque verbale française « Oxford » (la marque n° 270), enregistrée le 9 octobre 1986 pour désigner, en classe 18, les « bagages ; valises et sacs de voyage », a été concédé à la société Modling, filiale du groupe Hamelin. Par une lettre du 24 février 2005, la société Holdham a mis un terme à cet accord de licence.
Par contrats des 30 août 2008, 30 août 2011 et 30 août 2014, la titulaire de la marque n° 270 en a concédé l'usage à la société School Pack. Par contrat du 19 septembre 2016, inscrit au registre national des marques, elle lui a cédé cette marque.
Le 17 mai 2018, reprochant à la société School Pack de proposer à la vente, en particulier sur un site internet, des trousses et cartables revêtus du signe « Oxford », la société Holdham a assigné ces sociétés en contrefaçon de ses marques et atteinte à leur renommée.
C’est dans ces conditions que par deux arrêts des 11 janvier 2023 (CA Paris, 5-1, 11 janvier 2023, n° 21/05478 N° Lexbase : A34809DA) et 31 mai 2023 (CA Paris, 5-1, 31 mai 2023, n° 23/03835 N° Lexbase : A08639YM), la cour d’appel de Paris a constaté que la société Holdham a toléré l'usage par la société School Pack de la marque « Oxford » n° 270 depuis 2009 pour des produits de bagagerie scolaire, et a déclaré irrecevable son action en atteinte à la renommée de ses marques « Oxford ». La société Holdham a formé un pourvoi en cassation.
Décision. En premier lieu, selon la Haute Cour, les articles L. 713-5 N° Lexbase : L2200ICH et L. 716-5 N° Lexbase : L7085IZG du Code de la propriété intellectuelle doivent être interprétées, dans toute la mesure du possible, à la lumière de la Directive n° 89/104/CEE, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques N° Lexbase : L9827AUI, puis des Directives n° 2008/95/CE, du 22 octobre 2008 N° Lexbase : L7556IBH et n° 2015/2436, du 16 décembre 2015 N° Lexbase : L6109KW8, qui ont repris, en substance, ses dispositions.
Or, l'article 9 de la Directive n° 2008/95/CE puis l'article 9 de la Directive n° 2015/2436, dont la transposition était assurée en droit français par l'article L. 716-5, alinéa 4, du Code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2019-1169, du 13 novembre 2019 N° Lexbase : L5296LTC, n'opèrent aucune distinction selon que la marque antérieure est ou non une marque renommée. Il s'ensuit que le droit de l'Union accorde une protection identique au titulaire de la marque postérieure tolérée, que la marque antérieure soit ou non renommée.
Ainsi, une interprétation des articles L. 713-5 et L. 716-5, alinéa 4, du Code de la propriété intellectuelle, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2019-1169, du 13 novembre 2019, selon laquelle, même après avoir toléré pendant cinq ans l'usage de la marque postérieure, le titulaire de la marque antérieure renommée pourrait agir, sur le fondement du premier de ces articles, aux fins de voir annuler la marque postérieure ou interdire à son titulaire d'en poursuivre l'usage, méconnaîtrait donc l'article 9 des Directives précitées.
Il y a donc lieu, selon la Cour, d'interpréter ces articles en ce sens que le titulaire d'une marque jouissant d'une renommée qui a toléré en France pendant une période de cinq années consécutives l'usage d'une marque postérieure enregistrée, en connaissance de cet usage, ne peut plus demander la nullité de la marque postérieure, ni s'opposer à son usage pour les produits ou les services pour lesquels la marque postérieure a été utilisée, ni demander réparation du préjudice que lui aurait causé cet usage, à moins que son dépôt n'ait été effectué de mauvaise foi.
En second lieu, la Cour de cassation rappelle qu’est irrecevable toute action en contrefaçon d'une marque postérieure enregistrée dont l'usage a été toléré pendant cinq ans, à moins que son dépôt n'ait été effectué de mauvaise foi. Toutefois, l'irrecevabilité est limitée aux seuls produits et services pour lesquels l'usage a été toléré.
Or, les conditions nécessaires pour faire courir le délai de forclusion par tolérance, qu'il incombe au juge national de vérifier, sont, premièrement, l'enregistrement de la marque postérieure dans l'État membre concerné, deuxièmement, le fait que le dépôt de cette marque a été effectué de bonne foi, troisièmement, l'usage de la marque postérieure par le titulaire de celle-ci dans l'État membre où elle a été enregistrée et, quatrièmement, la connaissance par le titulaire de la marque antérieure de l'enregistrement de la marque postérieure et de l'usage de celle-ci après son enregistrement (CJUE, 22 septembre 2011, aff. C-482/09 N° Lexbase : A9470HXZ).
En outre, la preuve de la connaissance par le titulaire de la marque antérieure de l'usage de la marque postérieure après son enregistrement peut résulter d'une connaissance générale, dans le secteur économique concerné, d'une telle utilisation, cette connaissance pouvant être déduite, notamment, de la durée de l'utilisation (v., par analogie, CJUE, 11 juin 2009, aff. C-529/07, point 39 N° Lexbase : A1889EIS).
Ainsi, la cour d’appel a pu retenir que la société Holdham avait nécessairement connaissance à la fois de l'enregistrement de la marque n° 270 et, dès le mois de septembre 2009, de son exploitation par la société School Pack pour désigner des trousses et des sacs pour écoliers, et qu'elle en avait sciemment toléré l'usage depuis cette date. Son action en contrefaçon sur le fondement de ses marques était donc bien irrecevable.
La Cour de cassation rejette en conséquence le pourvoi.
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newsid:489579
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N9535BZ8
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par Lisa Poinsot
Le 18 Juin 2024
Mots-clés : ressources humaines • entreprises • employeurs • salariés • réglementation
Chaque mois, Lexbase Social vous propose de faire un point sur les changements à prendre en compte dans l’entreprise.
► Formation professionnelle (décret n° 2024-444, du 17 mai 2024, portant application de l'article 3 de la loi n° 2023-479 du 21 juin 2023, visant à faciliter le passage et l'obtention de l'examen du permis de conduire N° Lexbase : L3666MMQ)
Entré en vigueur le 19 mai 2024, le décret n° 2024-444 est pris en application de l'article 3 de la loi n° 2023-479, du 21 juin 2023, visant à faciliter le passage et l'obtention de l'examen du permis de conduire N° Lexbase : L9323MHR.
Il précise que, désormais, la mobilisation des droits inscrits sur CPF est subordonnée à la condition que le titulaire du compte ne dispose pas d’un permis de conduire en cours de validité sur le territoire national.
► Jurisprudences
Admission d'un enregistrement déloyal (Cass. civ. 2, 6 juin 2024, n° 22-11.736, FS-B+R
Pour aller plus loin : lire L. Bedja, Admission d’un enregistrement déloyal fait à l’insu de l’employeur pour la reconnaissance d’un accident du travail et reconnaissance d’une faute inexcusable, Lexbase Social, juin 2024, n° 987 |
Faute inexcusable (Cass. civ. 2, 16 mai 2024, n° 22-17.217, F-B N° Lexbase : A62755BZ) : si l'action en reconnaissance de la faute inexcusable ne peut être dirigée que contre l'employeur de la victime, quel que soit l'auteur de la faute et en présence de la caisse, l'instance en indemnisation des conséquences de la faute inexcusable ne peut avoir pour objet, à l'issue de sa reconnaissance, que la fixation des indemnités complémentaires et non la condamnation de l'employeur ou de la caisse, qui est seulement chargée de faire l'avance des prestations et indemnités et dispose d'un recours contre l'employeur.
Pour aller plus loin :
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Dossier de maladie professionnelle (Cass. civ. 2, 16 mai 2024, n° 22-15.499, FS-B
Pour aller plus loin :
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La signature d'un contrat de travail à durée déterminée a le caractère d'une prescription d'ordre public dont l'omission entraîne, à la demande du salarié, la requalification en contrat à durée indéterminée, qu'il n'en va autrement que lorsque le salarié a délibérément refusé de signer le contrat de travail de mauvaise foi ou dans une intention frauduleuse.
Lorsqu'une clause de non-concurrence est annulée, le salarié qui a respecté une clause de non-concurrence illicite peut prétendre au paiement d'une indemnité en réparation du fait que l'employeur lui a imposé une clause nulle portant atteinte à sa liberté d'exercer une activité professionnelle de sorte que l'employeur n'est pas fondé à solliciter la restitution des sommes versées au titre de la contrepartie financière de l'obligation qui a été respectée. Toutefois, l'employeur, qui prouve que le salarié a violé la clause de non-concurrence pendant la période au cours de laquelle elle s'est effectivement appliquée, est fondé à solliciter le remboursement de la contrepartie financière indûment versée à compter de la date à laquelle la violation est établie.
Rétroactivité d’un accord de substitution (Cass. soc., 15 mai 2024, n° 22-17.195, FS-B N° Lexbase : A49295B8) : l'accord de substitution peut prévoir des dispositions rétroactives à la date de la mise en cause de la convention ou de l’accord antérieur dès lors que ces dispositions ne privent pas un salarié des droits qu’il tient de la loi ou du principe d’égalité de traitement pour une période antérieure à l’entrée en vigueur de l’accord de substitution.
Pour aller plus loin :
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Dénonciation de l’accord collectif (Cass. soc., 29 mai 2024, n° 22-23.415, F-B N° Lexbase : A84215DA) : une décision unilatérale de l’employeur ne peut emporter dénonciation implicite d’un accord collectif portant sur le même objet.
Pour aller plus loin :
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Changement d’horaires de travail et contraintes familiales (Cass. soc., 29 mai 2024, n° 22-21.814, F-B N° Lexbase : A84165D3) : le refus du salarié d’accepter un changement de ses horaires de travail en raison de contraintes familiales ne peut pas être constitutif d’une faute rendant son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Pour aller plus loin :
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Travailleur étranger ayant un statut d’étudiant (Cass. soc., 22 mai 2024, n° 22-11.623, FS-B N° Lexbase : A72585CS) : le respect d’une durée minimale de 24 heures par semaine pour les contrats de travail à temps partiel devant être combiné avec le respect de la limite annuelle de 924 heures pour garantir que l’activité salariée reste accessoire, s’applique au travailleur étranger titulaire d'un titre de séjour ou d'un visa de séjour d'une durée supérieure à trois mois portant la mention étudiant.
Pour aller plus loin :
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La Haute juridiction opère une distinction entre ce qui relève du droit de l’inaptitude et de l’obligation de sécurité, de sorte que le manquement de l’employeur à son obligation de reclassement emporte l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement et du droit de la discrimination entraînant la nullité du licenciement.
Pour aller plus loin :
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Un salarié occupant des fonctions de direction et chargé notamment de la gestion des ressources humaines, peut être licencié pour avoir caché à son employeur la liaison qu'il entretient avec une autre salariée, exerçant des mandats de représentation syndicale et de représentation du personnel.
Pour aller plus loin :
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Avis du médecin (Cass. soc., 22 mai 2024, n° 22-22.321, FS-B+R N° Lexbase : A72525CL) : à l'occasion d'une mesure d'instruction ordonnée sur le fondement de l'article L. 4624-7 du Code du travail N° Lexbase : L4459L7B (procédure accélérée au fond), le juge qui constate qu'aucun médecin inspecteur du travail n'est disponible pour réaliser la mesure d'instruction peut désigner un autre médecin pour permettre son exécution.
Pour aller plus loin :
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Licenciement pour inaptitude ayant une origine professionnelle (Cass. soc., 7 mai 2024, n° 22-10.905, F-B N° Lexbase : A61005A8) : la méconnaissance par l'employeur de l'obligation de notifier par écrit au salarié les motifs qui s'opposent au reclassement n'expose pas celui-ci aux sanctions prévues par l'article L. 1226-15 du Code du travail N° Lexbase : L8065LGS, mais le rend redevable d'une indemnité en réparation du préjudice subi (troisième moyen, cassation).
Pour aller plus loin : v. L. Bedja, Licenciement pour inaptitude ayant une origine professionnelle : la Cour de cassation rappelle des principes sur les conséquences, Lexbase Social, mai 2024, n° 984 N° Lexbase : N9328BZI. |
Pour aller plus loin :
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Actionnariat salarié (Cass. soc., 22 mai 2024, n° 22-18.182, FS-B N° Lexbase : A72565CQ) : les actions attribuées gratuitement aux salariés dite « AGA », n’entrent pas dans l’assiette conventionnelle définie comme tous les éléments du salaire qui, par leur nature, sont soumis aux cotisations de Sécurité sociale, soit l’assiette de l’indemnité conventionnelle de licenciement.
Pour aller plus loin : lire G. Auzero, Les plus-values réalisées en matière de stock-options ne doivent pas être prises en compte pour calculer l'indemnité pour licenciement injustifié, Lexbase Social, avril 2011, n° 436 N° Lexbase : N9636BRC. |
Retenue sur salaire et droit de retrait (Cass. soc., 22 mai 2024, n° 22-19.849, FS-B N° Lexbase : A72555CP) : lorsque les conditions de l’exercice du droit de retrait ne sont pas réunies, le salarié s’expose à une retenue sur salaire, sans que l’employeur soit tenu de saisir au préalable le juge du bien-fondé de l’exercice de ce droit par le salarié.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les dispositions relatives à la protection des salariés, L’exercice illégitime du droit de retrait, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E3450ETX. |
Pour aller plus loin : lire L. Bedja, Activité physique et sportive durant un arrêt de travail : l’accord du médecin prescripteur doit être préalable et exprès !, Lexbase Social, mai 2024, n° 985 N° Lexbase : N9359BZN. |
Pour aller plus loin :
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► Protection sociale
Tous les employeurs privés ou publics, qui emploient onze salariés et plus dans une zone où est institué le versement mobilité, sont redevables de cette contribution (et de celle du versement mobilité additionnel quand il est instauré).
À compter du 1er juillet 2024, les taux ou les périmètres de versement mobilité (VM) évoluent sur le territoire de certaines autorités organisatrices de mobilité.
Afin d’enrichir le bloc relatif aux allègements et exonérations, le Boss publie deux rubriques relatives à l’exonération applicable aux contrats d’apprentissage et au régime social applicable aux rémunérations des stagiaires.
Depuis le 1er juin 2024, les conditions spécifiques pour bénéficier du régime des jeunes entreprises de croissances sont précisées.
En plus des conditions communes au régime des jeunes entreprises innovantes et jeunes entreprises universitaires, l’entreprise créée depuis moins de huit ans doit :
La Direction de la Sécurité sociale (DSS) confirme qu’un prochain décret supprimera les dispositions dites cibles, actuellement prévues au 8e de l’article 1 du décret n° 2021-428, du 12 avril 2021, relatif au calcul des indemnités journalières maladie et maternité N° Lexbase : L1427L4M. Les dispositions prévues à l’article 5 (dispositions dites transitoires) sont donc pérennisées au-delà du 1er juin prochain.
Depuis le 1er avril 2024, le montant forfaitaire mensuel de la prime d’activité mentionné à l’article L. 842-3 du Code de la Sécurité sociale applicable à un foyer composé d’une seule personne est fixé à 622,63 euros.
► Salaire (loi n° 2023-1107, du 29 novembre 2023, portant transposition de l'accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise N° Lexbase : L4230MKU)
Afin de prévoir un meilleur partage des bénéfices exceptionnels, les entreprises de plus de cinquante salariés, dans lesquelles un accord d'intéressement ou de participation est applicable au 30 novembre 2023 et qui disposent d’un ou plusieurs délégués syndicaux, n’ont plus que quelques semaines (avant le 30 juin 2024) pour engager la négociation portant sur la définition d'une augmentation exceptionnelle de leur bénéfice et sur les modalités de mise en œuvre de partage de la valeur avec les salariés.
Le 30 juin 2024 est également la date limite d’ouverture des négociations de branche pour la mise en place d'un régime de participation dérogatoire proposant une formule de calcul moins favorable que la formule légale pour les entreprises non tenues de mettre en application un régime de participation de manière obligatoire.
Enfin, le 1er juillet 2024 est la date d’entrée en vigueur de l’obligation de proposer, au sein des plans d'épargne, un fonds satisfaisant des critères de financement de la transition énergétique et écologique ou d'investissements socialement responsables.
► Santé et sécurité au travail (décret n° 2024-307, du 4 avril 2024, fixant des valeurs limites d'exposition professionnelle contraignantes pour certains agents chimiques et complétant la traçabilité de l'exposition des travailleurs aux agents chimiques concérogènes, mutagènes, ou toxiques pour la reproduction
Jusqu'au 5 juillet 2024, chaque employeur doit :
► Transports (pass-jeux.gouv.fr)
Pour la période des Jeux olympiques, un QR code sera indispensable pour accéder à plusieurs zones de Paris intégrées dans le périmètre de sécurité intérieure et lutte contre le terrorisme, pour la période du 18 au 26 juillet 2024. Il est désormais possible de vous inscrire pour demander ce QR code.
Pour aller plus loin : lire D. Duchet, Gérer et anticiper les contraintes en droit du travail des Jeux olympiques et paralympiques 2024, Lexbase Social, avril 2024, n° 982 |
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