Le Quotidien du 13 septembre 2023 : Aide juridictionnelle

[Brèves] Demande d'AJ à l'occasion d'un pourvoi en cassation et constitution d'avocat

Réf. : Cass. crim., 6 septembre 2023, n° 22-86.049, FP-B N° Lexbase : A77771ER

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N6701BZ9

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par Marie Le Guerroué

le 20 Septembre 2023

► Le demandeur en cassation, s'il souhaite bénéficier de l'aide juridictionnelle à l'occasion de son pourvoi, doit déposer une demande d'aide juridictionnelle dans le mois qui suit la date à laquelle il forme son pourvoi en cassation ; sa demande interrompt le délai pour constituer un avocat à la Cour de cassation et suspend ce délai jusqu'à ce qu'il soit définitivement statué sur la demande d'aide juridictionnelle

► Si la demande est déposée après le délai d'un mois suivant la date du pourvoi, même si l'aide juridictionnelle est accordée, le mémoire déposé par l'avocat est irrecevable

► Cette solution ne s'applique pas lorsque, par l'effet de la loi, la Cour de cassation doit statuer dans un délai déterminé.

Faits et procédure. Le demandeur au pourvoi avait été renvoyé devant la cour d'assises sous l'accusation de tentative d'assassinat en récidive. Il forme un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'assises du Bas-Rhin qui l'avait condamné de ce chef, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la cour avait prononcé sur les intérêts civils.

Réponse de la Cour. La Haute juridiction rappelle que l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'Homme N° Lexbase : L7558AIR garantit à chacun un droit d'accès à un tribunal.

Selon la Cour européenne des droits de l'Homme, ce droit doit être effectif et concret (CEDH, 9 octobre 2007, Req. 9375/02, Saoud c/ France N° Lexbase : A6901DYA). Cela implique, pour le demandeur en cassation, la possibilité d'être assisté, en matière pénale, d'un avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation. Ce droit n'est pas absolu et se prête aux limitations qui poursuivent un but légitime, notamment répondre aux exigences conventionnelles relatives aux délais de jugement des affaires ou garantir une bonne administration de la justice. Ces limitations ne doivent pas restreindre l'accès au juge au point qu'il s'en trouve atteint dans sa substance même. En droit interne, le droit à bénéficier de l'assistance effective d'un avocat constitue une garantie légale du respect des droits de la défense. Devant la Chambre Criminelle de la Cour de cassation, le Code de procédure pénale prévoit que le demandeur au pourvoi peut faire le choix, soit de se défendre seul, soit d'être assisté par un avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation. La loi n° 91-647, du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique N° Lexbase : L0627ATE organise les modalités de la prise en charge financière par l'État de l'intervention d'un avocat pour les justiciables qui remplissent les conditions qu'elle exige, sauf si aucun moyen de cassation sérieux ne peut être relevé. Cette assistance est mise en œuvre par le bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation auquel la loi n'impartit pas de délai pour traiter les demandes, pas plus qu'elle ne confère de caractère suspensif au dépôt de celles-ci.

Or, il résulte de l'article 585-1 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L3972AZ7, qui répond à la nécessité de mettre en état les procédures dans un délai raisonnable et d'assurer une bonne administration de la justice, que la déclaration par laquelle l'avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation se constitue au nom du demandeur au pourvoi doit parvenir, à peine d'irrecevabilité, au greffe de la Cour de cassation un mois au plus tard après la date du pourvoi.

Il s'en déduit que, pour que le droit garanti par l'article 6, § 1 N° Lexbase : L7558AIR, précité, ne soit pas atteint dans sa substance même, il doit être jugé que, lorsque la demande d'aide juridictionnelle est formée par le demandeur au pourvoi dans le délai d'un mois à compter de celui-ci, elle a pour effet d'interrompre le délai fixé pour la constitution d'avocat et de le suspendre jusqu'à ce qu'il ait été statué définitivement sur cette demande. En revanche, lorsque la demande n'a pas été déposée dans le délai d'un mois du pourvoi, mais que l'aide juridictionnelle a été néanmoins accordée au demandeur au pourvoi, la constitution d'avocat faisant suite à l'octroi de l'aide juridictionnelle est tardive et le mémoire déposé par l'avocat désigné est irrecevable.

De même, tout effet interruptif ou suspensif de la demande d'aide juridictionnelle doit être écarté lorsque la Cour doit statuer dans un délai fixé par la loi, ce qui impose que le dépôt du mémoire et, donc, la constitution d'avocat qui le précède, soient effectués dans un délai également fixé par la loi, notamment en matière de détention provisoire ou de mandat d'arrêt européen. Dans un tel cas, il appartient à la Cour de cassation de s'assurer que les délais d'examen de la demande d'aide juridictionnelle n'ont pas eu pour conséquence de porter atteinte dans sa substance même au droit à être assisté d'un avocat.

Espèce/recevabilité. En l'espèce, le demandeur au pourvoi qui s'était pourvu en cassation le 23 septembre 2022 a déposé une demande d'aide juridictionnelle le 24 novembre suivant, soit après l'expiration du délai prévu par l'article 585-1 précité. Le mémoire qui a été déposé par l'avocat qui lui a été désigné au titre de l'aide juridictionnelle ne serait dès lors pas recevable. Toutefois, en l'absence de disposition législative relative aux effets du dépôt de la demande d'aide juridictionnelle en matière pénale devant la Cour de cassation, ces principes ne résultaient pas de façon évidente du droit applicable, de sorte que le mémoire ampliatif déposé pour le demandeur au pourvoi sera déclaré recevable. Toutefois, la Cour constatant que le moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L7791HNU, elle déclare le pourvoi non admis.

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