Le Quotidien du 14 juillet 2023 : Procédure pénale

[Brèves] Renvoi d’audience par la cour d’assises : la durée de la détention provisoire doit être contrôlée lors de l’examen des demandes de mise en liberté

Réf. : Cons. const., décision n° 2023-1056 QPC, du 7 juillet 2023 N° Lexbase : A1490993

Lecture: 5 min

N6307BZM

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

[Brèves] Renvoi d’audience par la cour d’assises : la durée de la détention provisoire doit être contrôlée lors de l’examen des demandes de mise en liberté. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/97817088-0
Copier

par Adélaïde Léon

le 13 Juillet 2023

► Sous réserve qu’à l’occasion des demandes de mise en liberté formulées par les accusés renvoyées devant les cours d’assises, l’autorité judiciaire contrôle la durée de la détention et fasse droit à ladite demande lorsque la durée totale cette détention excède un délai raisonnable, l’article 181 du Code de procédure pénale, qui ne prévoit pas de durée maximale de détention en cas de renvoi d’audience par la cour, est conforme à la Constitution.

Le 12 mai 2023, le Conseil constitutionnel était saisi par la Cour de cassation (Cass. crim., 11 mai 2023, n° 23-80.877, F-D N° Lexbase : A83939UE) d’une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des huitième et neuvième alinéas de l’article 181 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L3576MAP et de l’article 343 du même code N° Lexbase : L1479MAZ.

Dispositions en cause. L’article 181 du Code de procédure pénale prévoit que lorsqu’une personne renvoyée devant la cour d’assises et placée en détention provisoire n’a pas comparu à l’expiration d’un délai d’un an à compter :

  • de la date à laquelle la décision de mise en accusation est devenue définitive si elle était alors détenu ;
  • de la date à laquelle elle a été ultérieurement placé en détention provisoire.

L’article 343 du Code de procédure pénale prévoit quant à lui qu’en tout état de cause, la cour d’assises peut ordonner le renvoi de l’affaire à la prochaine session.

Motifs de la QPC. Le requérant reproche aux dispositions en cause de méconnaître la liberté individuelle au motif que, dans le cas où la cour ordonne le renvoi de l’affaire à une prochaine session d’assises, elles permettent que l’accusé soit maintenu en détention provisoire sans qu’une durée maximale ni un contrôle systématique du juge ne soient prévus.

Il est également fait grief à ces dispositions de méconnaître le principe d’égalité devant la loi en ce qu’elles instituent une différence de traitement injustifiée entre :

  • les accusés détenus qui n’ont pas en encore comparu devant la cour d’assises. La durée de leur détention provisoire est strictement encadrée ;
  • les accusés ayant déjà comparu mais dont l’audience a été renvoyée à une prochaine session. La durée de leur détention est uniquement soumise à l’exigence d’une durée raisonnable.

Pour les mêmes motifs, le requérant soutient que les dispositions seraient entachées d’incompétence négative dans des conditions affectant ces mêmes exigences constitutionnelles.

La question prioritaire de constitutionnalité porte dès lors sur les mots « s’il n’a pas comparu devant celle-ci » figurant au huitième alinéa de l’article 181 du Code de procédure pénale.

Décision. Le Conseil constitutionnel rappelle tout d’abord que la liberté individuelle (Constitution, art. 16 N° Lexbase : L1273A9Z), dont la protection est confiée à l’autorité judiciaire, ne doit pas être entravée par une rigueur non nécessaire. Dès lors, les atteintes portées à l’exercice de cette liberté doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées aux objectifs poursuivis.

Après avoir rappelé les termes de l’article 181 du Code de procédure pénale, le Conseil précise que lorsque la cour d’assises prononce un renvoi conformément à l’article 343 du même code, la détention de l’accusée peut se poursuivre jusqu’au jugement qu’une disposition législative ne prévoit de durée maximale à cette détention. En outre, les sages ajoutent qu’aucun réexamen périodique du bien-fondé de la détention par un juge n’est prévu.

Le Conseil constitutionnel se réfère alors à la jurisprudence constante de la Cour de cassation laquelle prévoit qu’il appartient à la cour, lorsqu’elle ordonne un tel renvoi, de se prononcer sur le maintien en détention provisoire de l’accusé. Selon le Conseil, elle doit alors s’assurer que les conditions de l’article 144 du Code de procédure pénale – qui détermine les conditions dans lesquelles peut être ordonnée ou prolongée la détention provisoire – demeurent réunies et que la durée de la détention ne dépasse pas la limite du raisonnable.

Par ailleurs, le Conseil rappelle qu’en application de l’article 148-1 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L1744IPB, l’accusé placé en détention provisoire peut à tout moment former une demande de mise en liberté. C’est à ce stade que le Conseil constitutionne pose une réserve puisqu’il affirme que la liberté individuelle ne saurait être regardée comme sauvegardée si à l’occasion des demandes de mise en liberté, l’autorité judiciaire ne contrôlait pas la durée de la détention et ne fasse pas droit à la demande lorsque la durée totale de la détention excède un délai raisonnable.

Sous cette réserve, le Conseil constitutionnel décide que les dispositions contestées qui ne sont pas entachées d’incompétence négative et qui ne méconnaissent pas non plus le principe d’égalité, ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit sont conformes à celle-ci.

newsid:486307

Utilisation des cookies sur Lexbase

Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.

En savoir plus

Parcours utilisateur

Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

Nous intégrons à Lexbase.fr du contenu créé par Lexbase et diffusé via la plateforme de streaming Youtube. Ces intégrations impliquent des cookies de navigation lorsque l’utilisateur souhaite accéder à la vidéo. En les acceptant, les vidéos éditoriales de Lexbase vous seront accessibles.

Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.