Réf. : Cass. com., 21 juin 2023, n° 21-24.691, F-B N° Lexbase : A982593B
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par Vincent Téchené
le 29 Juin 2023
► La cession par un associé des droits qu'il détient dans le capital d'une société ou le remboursement des avances qu'il a consenties à la société ne caractérisent pas en eux-mêmes l'exercice d'une activité professionnelle, même si le cédant a été le gérant de la société cédée.
Faits et procédure. Un actionnaire a cédé les actions qu'il détenait dans le capital d’une société. Le prix de cession était payable à hauteur de 300 000 euros dans les trois jours ouvrés à compter de la date de la cession, puis en 24 mensualités de 50 000 euros, à compter du 1er avril 2015.
Par le même acte, le dirigeant de la société cessionnaire s'est rendu caution solidaire en garantie du paiement du prix de cession.
Alléguant l'existence d'un dol, la société cessionnaire et le dirigeant caution ont assigné le cédant aux fins de le voir condamner à leur payer des dommages et intérêts. Ce dernier a demandé reconventionnellement la condamnation de la caution à lui payer, en sa qualité de caution, le solde du prix de cession des actions.
Arrêt d’appel. La cour d’appel de Bourges a rejeté la demande de l’associé cédant (CA Bourges, 5 août 2021, n° 17/01652 N° Lexbase : A64174ZP).
Pour ce faire, elle a considéré que les dispositions de l'ancien article L. 341-4 du Code de la consommation N° Lexbase : L8753A7C étaient applicables au cautionnement litigieux. Selon la cour, le cédant, bénéficiaire du cautionnement, était associé et dirigeant de la société. Ainsi, en cédant les parts sociales de sa société en consentant un crédit-vendeur garanti par le cautionnement, il doit être considéré comme un créancier professionnel. Ce dernier a donc formé un pourvoi en cassation.
Décision. La Cour de cassation rappelle qu’il résulte l’article L. 341-4 du Code de la consommation que le créancier professionnel s'entend de celui dont la créance est née dans l'exercice de sa profession ou se trouve en rapport direct avec l'une de ses activités professionnelles, même si celle-ci n'est pas principale (v. déjà, Cass. civ. 1, 9 juillet 2009, n° 08-15.910, FS-P+B+I N° Lexbase : A7351EI4).
Or, selon elle, la cession par un associé des droits qu'il détient dans le capital d'une société ou le remboursement des avances qu'il a consenties à la société ne caractérisent pas en eux-mêmes l'exercice d'une activité professionnelle, même si le cédant a été le gérant de la société cédée.
La Cour en conclut qu’en statuant comme elle l'a fait, alors que la créance du cédant n'était pas née dans l'exercice de sa profession ni ne se trouvait en rapport direct avec l'une de ses activités professionnelles, même accessoire, de sorte que les règles du Code de la consommation relatives à la disproportion manifeste ne lui étaient pas applicables, la cour d'appel a violé l’article L. 341-4 du Code de la consommation.
Observations. L’ordonnance de réforme du droit des sûretés (ordonnance n° 2021-1192, du 15 septembre 2021 N° Lexbase : L8997L7D) a inséré dans le Code civil, à l’article 2300 N° Lexbase : L0174L8X, l’exigence de proportionnalité qui prévoit toujours son application aux seuls créanciers professionnels. Ainsi, la précision donnée par l’arrêt du 21 juin 2023 est-elle transposable aux cautionnements conclus après le 1er janvier 2022.
On rappellera à toutes fins utiles que la sanction du cautionnement disproportionné a néanmoins été modifiée : il s’agit désormais de la réduction du cautionnement au montant à hauteur duquel la caution pouvait s'engager. Le pouvoir d’appréciation du juge est en quelque sorte doublé. Sous l’ancien texte, il devait déterminer si le cautionnement était ou non manifestement disproportionné. Désormais, il doit en plus déterminer ce qu’est un cautionnement qui n’est pas manifestement disproportionné, avec le risque de contestations que cela engendrera à coup sûr.
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