Réf. : Cass. com., 21 juin 2023, deux arrêts, n° 21-19.853, FS-B N° Lexbase : A984193U et n° 21-16.716, FS-B N° Lexbase : A983093H
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par Perrine Cathalo
le 03 Juillet 2023
► Il résulte de la combinaison des articles 2224 du Code civil et L. 110-4 du Code de commerce que les obligations entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ;
Le manquement d'un conseiller en gestion de patrimoine à son obligation d'informer le souscripteur d'un contrat d'assurance-vie libellé en unités de compte sur le risque de pertes présenté par un support d'investissement, ou à son obligation de le conseiller au regard d'un tel risque, prive ce souscripteur d'une chance d'éviter la réalisation de ces pertes. Celles-ci ne se réalisent qu'au rachat du contrat d'assurance-vie, quand bien même le support en cause aurait fait antérieurement l'objet d'un désinvestissement. Le préjudice résultant d'un tel manquement doit être évalué au regard, non de la variation de la valeur de rachat de l'ensemble du contrat, mais de la moins-value constatée sur ce seul support, modulée en considération du rendement que, dûment informé ou conseillé, le souscripteur aurait pu obtenir du placement des sommes initialement investies sur ce support jusqu'à la date du rachat du contrat ;
Il en résulte que le délai de prescription de l'action en indemnisation d'un tel dommage commence à courir, non à la date où l'investissement a lieu, mais à la date du rachat du contrat d'assurance-vie.
Faits et procédure. Dans les deux affaires (Cass. com., 21 juin 2023, deux arrêts, n° 21-19.853, FS-B et n° 21-16.716, FS-B), des personnes physiques ont souscrit un contrat d’assurance-vie en unités de compte et ont investi une certaine somme dans des unités de compte, sur les conseils d’un conseiller en gestion de patrimoine (CGP). En 2014, les fonds ont été désinvestis et réinvestis dans un autre support.
Soutenant avoir subi une forte baisse des capitaux investis, résultant d’un manquement de la société de gestion de patrimoine à ses obligations de conseil, de mise en garde et d’assurer l’adéquation des supports conseillés avec le profil de risque déclaré des investisseurs, les souscripteurs l’ont assignée en responsabilité.
Les deux actions en responsabilité ont été déclarées irrecevables comme prescrites par la cour d’appel de Grenoble (CA Grenoble, 8 juin 2021, n° 19/02177 N° Lexbase : A33964UC et CA Grenoble, 23 mars 2021, n° 19/00852 N° Lexbase : A05994M7).
Les souscripteurs ont chacun formé un pourvoi devant la Cour de cassation.
Décision. Par deux décisions en date du 21 juin 2023, la Haute juridiction censure les arrêts d’appel au visa des articles 2224 du Code civil N° Lexbase : L7184IAC et L. 110-4 du Code de commerce N° Lexbase : L4314IX3.
Énonçant la solution susvisée à deux reprises, la Chambre commerciale rappelle que le délai de prescription de l'action en indemnisation du préjudice résultant du manquement d’un conseiller en gestion de patrimoine à son obligation d’information et de conseil court à compter de la date de rachat du contrat d’assurance-vie litigieux, non pas à compter de celle ou l’investissement a eu lieu, comme l’a pourtant retenu la cour d’appel.
La Cour déduit de ses constatations que le préjudice des investisseurs, tendant aux pertes subies sur les sommes investies, ne s’était pas réalisé à la date de la souscription des différents contrats d’assurance-vie, de sorte que le délai de prescription n'avait pas commencé à courir et que les actions en responsabilité étaient, par conséquent, recevables.
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