Réf. : Cass. com., 19 avril 2023, n° 21-19.743, F-B N° Lexbase : A02249QD
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N5192BZC
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par Vincent Téchené
le 28 Avril 2023
► Une dette n'est susceptible d'être effacée par la clôture de la procédure de rétablissement professionnel qu'à concurrence du montant indiqué dans l'état chiffré des créances.
Faits et procédure. Une SCI a consenti un bail portant sur un local commercial moyennant le paiement d'un loyer, payable mensuellement et d'avance par termes égaux de 4 000,00 francs (702,33 euros). Le 8 novembre 2019, la SCI a fait délivrer à sa locataire un commandement de payer la somme de 36 429,40 euros en principal, cet acte reproduisant la clause résolutoire incluse au contrat de bail.
Par un jugement du 3 décembre 2019, la locataire a bénéficié d'une procédure de rétablissement professionnel. Le 9 mars 2020, la SCI a assigné en référé la débitrice en constatation de l'acquisition de la clause résolutoire du bail et en paiement d'une somme provisionnelle égale aux loyers impayés.
Entre-temps, un jugement du 21 juillet 2020 a ordonné la clôture de la procédure de rétablissement professionnel et dit que cette clôture entraînait l'effacement des dettes figurant sur la liste des créances déclarées annexée au jugement.
La cour d’appel (CA Fort-de-France, 18 mai 2021, n° 20/00389 N° Lexbase : A04714TM) ayant rejeté les demandes de la SCI de résiliation du bail et de paiement d'un arriéré de loyers ainsi que d'une indemnité d'occupation, cette dernière a formé un pourvoi en cassation.
Décision. La Cour de cassation rappelle que selon l’article L. 645-11 N° Lexbase : L3701MBP, la clôture de la procédure de rétablissement professionnel entraîne effacement des dettes à l'égard des créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure, a été portée à la connaissance du juge commis par le débiteur et a fait l'objet de l'information prévue à l'article L. 645-8 du Code de commerce N° Lexbase : L4163K8P.
En outre, selon l’article R. 645-17 du Code de commerce N° Lexbase : L6225I3X, le jugement de clôture comprend l'état chiffré des créances effacées avec l'indication, selon le cas, du nom ou de la dénomination et du domicile ou siège des créanciers.
Il en résulte, selon la Haute juridiction, qu'une dette n'est susceptible d'être effacée par la clôture de la procédure qu'à concurrence du montant indiqué dans cet état chiffré des créances.
Or qu’avait jugé la cour d’appel en l’espèce ? L'arrêt d’appel avait retenu que la dette de loyer de la locataire existait avant le 8 novembre 2019, date du commandement de payer, que, par une lettre du 6 avril 2020, le mandataire au rétablissement professionnel a invité la SCI à lui adresser sa déclaration de créance dans les délais légaux, lui exposant que la débitrice avait indiqué lui devoir la somme de 18 330,58 euros, et que la créance de loyers ne fait pas partie des créances exclues de l'effacement.
La Cour de cassation, appliquant ici le principe dégagé, retient qu’en statuant ainsi, alors que la créance portée à la connaissance du juge commis et faisant l'objet du jugement de clôture de la procédure de rétablissement professionnel, emportant son effacement, était de 18 330,58 euros, tandis que la SCI se prévalait d'un commandement de payer portant sur un arriéré de loyers d'un montant supérieur, de 36 429,40 euros en principal, la cour d'appel, en retenant l'effacement intégral de la dette du débiteur, a violé les textes précités.
Observations. Cette solution est logique. D’ailleurs, lors de la publication de l’ordonnance de réforme instituant le rétablissement professionnel (ordonnance n° 2014-326, du 12 mars 2014 N° Lexbase : L7194IZH), un éminent auteur avait pu écrire que « l'effacement ne vient pas ici sanctionner la défaillance du créancier dans la déclaration de sa créance. En effet, il n'y pas place à véritable déclaration de créance. L'effacement est strictement contrôlé. On comprend l'idée du législateur : seuls des créanciers clairement identifiés doivent subir l'effacement de leur créance. Il faut que la créance soit clairement identifiée non seulement quant à son titulaire, mais aussi quant à son montant » (P.-M. Le Corre, La simplification du traitement des situations irrémédiablement compromises : la création de la procédure de rétablissement professionnel, Lexbase Affaires, septembre 2014, n° 393 N° Lexbase : N3567BUN).
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