Réf. : Cass. crim., 22 mars 2023, n° 23-80.213, F-B N° Lexbase : A39489KG
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par Adélaïde Léon
le 26 Avril 2023
► Il se déduit de l’article 145-2 du Code de procédure pénale que, lorsqu’une personne a déjà été placée sous mandat de dépôt délictuel et qu’elle est, dans la même information, mise en examen supplétivement pour de nouveaux faits, antérieurs à son placement en détention et entraînant une qualification criminelle, le délai d’un an commence à courir à compter de la date du mandat de dépôt initial.
Rappel des faits et de la procédure. Une femme est mise en examen des chefs de non-empêchement d’un crime ou d’un délit contre l’intégrité physique et non-dénonciation de crime et placée en détention provisoire du 23 juillet au 22 novembre 2021.
Le 29 mars 2022, l’intéressée est mise en examen de manière supplétive du chef de tentative de vol avec violence ayant entraîné la mort et placée à nouveau en détention par un mandat de dépôt criminel.
Elle forme une demande de mise en liberté qui est rejetée le 15 décembre 2022 par le juge des libertés et de la détention (JLD). L’intéressée relève alors appel de cette décision.
En cause d’appel. La chambre de l’instruction a confirmé l’ordonnance du JLD au motif que, s’agissant d’une mise en examen supplétive sur le fondement de faits nouveaux, il n’y avait pas lieu de tenir compte, pour la computation du délai de l’article 145-2 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L3506AZU, des autres mois de détention exécutés, dans la même information, sur le fondement d’un mandat de dépôt délictuel.
Le mandat de dépôt criminel ayant été prononcé pour une durée d’un an, il court jusqu’au 28 mars 2023 et la détention de la personne concernée avait pu se poursuivre au-delà du 29 novembre 2022 sans être arbitraire.
L’intéressée a formé un pourvoi contre l’arrêt de la chambre de l’instruction.
Moyens du pourvoi. Il était fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir confirmé l’ordonnance ayant rejeté la demande de mise en examen aux motifs que le premier mandat devait, à raison du caractère supplétif de la mise en examen du 29 mars 2022 être considéré comme un mandat de dépôt criminel et que la prolongation de la détention devait être calculée en tenant compte de la détention provisoire déjà effectuée de ce chef, donc à compter de la délivrance du premier mandat délictuel.
Selon le pourvoi, la chambre de l’instruction avait prolongé la détention de l’intéressée au-delà de la durée maximale à laquelle elle pouvait être soumise.
Décision. La Chambre criminelle casse et annule l’arrêt de la chambre de l’instruction au visa de l’article 145-2 du Code de procédure pénale et ordonne la mise en liberté de l’intéressée ainsi que son placement sous contrôle judiciaire.
Selon ces dispositions, en matière criminelle, la personne mise en examen ne peut être maintenue en détention au-delà d’un an. Cet article prévoit par ailleurs les modalités et circonstances d’éventuelles prolongations.
La Haute juridiction affirme qu’il se déduit de l’article 145-2 du Code de procédure pénale que, lorsqu’une personne a déjà été placée sous mandat de dépôt délictuel, et qu’elle est, dans la même information, mise en examen supplétivement pour de nouveaux faits, antérieurs à son placement en détention et entraînant une qualification criminelle, le délai d’un an commence à courir à compter de la date du mandat de dépôt initial.
La Chambre criminelle confirme ici une solution qu’elle avait retenue dès 1991 (Cass. crim., 29 octobre 1991, n° 91-84.772, publié au bulletin N° Lexbase : A0331ABU) : « en cas de changement de qualification des faits ou de notification d'une nouvelle inculpation, le titre initial de détention demeure valable, la détention se trouvant alors soumise aux règles qui découlent de la nouvelle qualification ou inculpation ; qu'il s'ensuit que le délai de un an prévu par l'article 145-2 du Code de procédure pénale et résultant de la nouvelle inculpation a commencé à courir à compter [de la] date du mandat de dépôt initial ».
Estimant que la chambre de l’instruction a méconnu les dispositions précitées, la Cour de cassation ordonne la remise en liberté de l’intéressée. Toutefois, considérant qu’il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblables que cette personne ait pu participer, comme auteur ou comme complice, à la commission des infractions dont le juge d’instruction est saisi, la Haute juridiction juge le placement de celle-ci sous contrôle judiciaire indispensable afin d’assurer plusieurs objectifs de l’article 144 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L9485IEZ. La Chambre criminelle ordonne donc qu’elle soit placée sous contrôle judiciaire et soumise à plusieurs obligations énumérées dans le dispositif.
Pour aller plus loin : N. Catelan, ÉTUDE : Les mesures de contrainte au cours de l’instruction : contrôle judiciaire, assignation à résidence et détention provisoire, La durée de la détention provisoire, in Procédure pénale, (dir. J.-B. Perrier), Lexbase N° Lexbase : E4789Z9A. |
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