Réf. : Cass. soc., 15 février 2023, n° 21-23.919, F-D
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N4582BZQ
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par Lisa Poinsot
le 10 Mars 2023
► Pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement sexuel, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments présentés par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ;
Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Sous réserve d'exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et si l'employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement.
Faits et procédure. Soutenant avoir subi un harcèlement sexuel, une salariée saisit la juridiction prud’homale de demandes tendant à prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail, dire que celle-ci produit les effets d’un licenciement nul et condamner l’employeur au paiement de diverses sommes. Elle est par la suite licenciée pour faute grave.
La cour d’appel (CA Angers, 9 septembre 2021, n° 18/00282) a, dans un premier temps, constaté que les éléments de fait invoqués par la salariée comme susceptibles de constituer un harcèlement sexuel étaient établis. À cet égard, elle considère que le fait pour le supérieur de ne pas avoir fixé de limites entre vie privée et vie professionnelle est un marqueur fort de l’existence d’un harcèlement sexuel. Elle déduit de la situation que le supérieur a pu se rapprocher de la salariée grâce à cette atmosphère et ainsi obtenir de la salariée des faveurs sexuelles.
Elle estime, dans un second temps, que l’employeur ne justifiait pas d’éléments objectifs étrangers à tout harcèlement sexuel.
Elle retient alors que la gravité des faits justifiait la résiliation judiciaire du contrat de travail, laquelle produisait les effets d’un licenciement nul.
L’employeur forme dès lors un pouvoir en cassation en soutenant que ne sauraient caractériser un harcèlement sexuel les comportements ou relations intimes intervenus entre deux personnes lorsqu'ils s'inscrivent dans une relation privée instituée de manière consentante par ces dernières, peu important que ces personnes appartiennent à la même entreprise ou qu'elles aient un lien de subordination entre elles ; que dans le cadre d'une telle relation les comportements ou propos à caractère intime ou sexuel des protagonistes relèvent de la sphère privée et sauraient influer sur leur sphère professionnelle.
La solution. Énonçant les solutions susvisées, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi sur le fondement des articles L. 1153-1 N° Lexbase : L4433L7C et L. 1154-1 N° Lexbase : L6799K9P du Code du travail.
La Haute juridiction rappelle que le juge détermine souverainement l’existence de harcèlement sur la base des éléments qui lui sont soumis.
Elle affirme également qu’avoir des relations sexuelles consenties avec son supérieur hiérarchique n’empêche pas de caractériser un harcèlement sexuel. Autrement dit, le consentement n’exclut pas le harcèlement sexuel.
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