Le Quotidien du 11 janvier 2023 : Procédure pénale

[Brèves] Précisions sur l’exécution d’une ordonnance de saisie de sommes figurant au crédit d’un compte bancaire à l’étranger

Réf. : Cass. crim., 5 janvier 2023, n° 22-81.155, F-B N° Lexbase : A154287A

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N3895BZB

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par Helena Viana

le 25 Janvier 2023

► Si le JLD, requis pas le procureur de la République financier dans le cadre d’une enquête préliminaire, est compétent pour ordonner une mesure de saisie de sommes figurant au crédit d'un compte bancaire, dont l'exécution doit intervenir sur le territoire d'un État étranger, il doit, pour exiger d’un établissement bancaire domicilié sur le territoire dudit État qu’il se libère des sommes saisies par virement au crédit du compte ouvert à la Caisse des dépôts et consignation au nom de l'AGRASC, agir selon la procédure d’entraide pénale afin d’enjoindre à cet établissement. Méconnaît les règles de compétence territoriale et de souveraineté des États la chambre de l’instruction qui confirme l’ordonnance de saisie pénal d’un JLD français notifiée, hors de toute procédure d’entraide pénale, à une banque domiciliée sur le territoire de la principauté de Monaco et enjoignant à cette dernière de se libérer des sommes saisies par virement sur le compte de l’AGRASC.

Faits et procédure. En septembre 2019 une enquête préliminaire a été ouverte par le parquet financier des chefs de blanchiment de fraude fiscale concernant une ressortissante russe domiciliée à Monaco et gérante associée de deux sociétés ayant leur siège à Monaco. Le 11 mars 2021, une saisie sur les comptes bancaires de l’une de ces deux sociétés auprès de la banque monégasque pour près de 10 millions d’euros a été ordonnée par un juge des libertés et de la détention par voie d’ordonnance, notifiée le jour même au procureur puis six mois plus tard, le 15 septembre 2021, à la société et à l’établissement de crédit. Cette même ordonnance enjoignait l’établissement bancaire à consigner les sommes saisies auprès de l'AGRASC. La société a interjeté appel.

La chambre de l’instruction ayant confirmé l’ordonnance entreprise, la société a porté un pourvoi devant la Cour de cassation.

Moyens du pourvoi. Les moyens soulevés par la société demanderesse sont de deux ordres. D’une part, elle reproche à la chambre de l’instruction de n’avoir pas pu prendre la parole à la suite des réquisitions du procureur. D'autre part elle soulève des arguments relatifs à la procédure de saisie spéciale de l’article 706-154 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L9507IYR.

Décision. Les deux moyens soulevés par le demandeur au pourvoi ont été rejetés par la Chambre criminelle, notamment, pour le premier d’entre eux, au motif que la société n’était que le tiers propriétaire, qualité n’ayant aucune incidence sur l’ordre de parole des parties à l’instance. Est donc sous-entendu que le tiers propriétaire n’a pas la qualité de partie. De plus, elle rappelle que la saisie a été ordonnée sur le fondement de l’article 706-153. Dès lors, le second moyen est inopérant.

En revanche, elle casse l’arrêt sur un moyen qu’elle soulève d’office.

Elle considère, au visa des articles 705 N° Lexbase : L5586LZW et 706-153 N° Lexbase : L7453LPQ du Code de procédure pénale, que si le JLD « requis par le procureur de la République financier dans le cadre d'une enquête préliminaire, est compétent pour ordonner une mesure de saisie de sommes figurant au crédit d'un compte bancaire dont l'exécution doit intervenir sur le territoire d'un État étranger, il ne peut, hors de toute procédure d'entraide pénale, exiger d'un établissement bancaire domicilié sur le territoire dudit État et auquel il a notifié l'ordonnance attaquée, qu'il se libère des sommes saisies par virement au crédit du compte ouvert à la Caisse des dépôts et consignation au nom de l'AGRASC, sans méconnaître les règles de compétence territoriale et de souveraineté des États.»

La Chambre criminelle rejette l’argument de la chambre de l’instruction selon lequel la décision du JLD était le préalable nécessaire à une demande d’entraide pénale et que rien n’indiquait que ladite décision aurait fait l’objet d’une exécution directe sur le territoire monégasque. Les juges du fond ont en effet considéré que la compétence du JLD était établie sur le fondement des articles 706-141 N° Lexbase : L7245IMB et suivants et notamment 706-153 du Code de procédure pénale et qu’il était possible dans un second temps de la rendre exécutoire sur le sol monégasque par le biais d’une demande d’entraide, notamment, sur le fondement des Conventions du Conseil de l'Europe liant Monaco à la France et organisant l'entraide pénale entre ces deux États.

Or, pour la Haute juridiction, cette analyse ne saurait prospérer dans la mesure où l’ordonnance litigieuse avait déjà été notifiée à la banque sise à Monaco et qu’elle lui enjoignait de se libérer des sommes saisies au profit de l’AGRASC.

Ainsi, elle soumet la compétence du JLD à ordonner la saisie sur un compte bancaire d’un établissement domicilié sur le territoire d’un État étranger à la condition que l’ordonnance n’ait pas été notifiée. En pareil cas, il doit, pour l’exécution de son ordonnance, agir selon la procédure d’entraide pénale.

En conséquence elle casse l’arrêt déféré devant elle et dit que la cassation aura lieu par voie de retranchement et sans renvoi.

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