La lettre juridique n°917 du 22 septembre 2022 : Contrats et obligations

[Brèves] Pouvoir des juges du fond en présence d’une transaction ayant force exécutoire

Réf. : Cass. civ. 1, 14 septembre 2022, n° 17-15.388, FS-B N° Lexbase : A99638HH

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par Claire-Anne Michel, Maître de conférences, Université Grenoble-Alpes, Centre de recherches juridiques (CRJ)

le 21 Septembre 2022

La validité d’une transaction ayant force exécutoire par l’effet d’une décision du président du tribunal de grande instance (CPC, anc. art. 1441-4) peut être contestée devant les juges du fond.

Faits et procédure. En l’espèce un protocole transactionnel avait été conclu, dans lequel l’une des parties s’engageait à rembourser un compte courant d’associé, alors que l’autre partie s’engageait, une fois ce remboursement effectué, à céder des droits sociaux à l’autre moyennant le prix d’un euro. Or, la partie au protocole qui s’était engagée à rembourser le compte courant avait organisé son insolvabilité en donnant à ses enfants et conjoint ses biens immobiliers. Alors qu’une action visait à faire déclarer la donation inopposable au cocontractant, la partie ayant procédé à cette donation invoquait la nullité de la transaction faute de concessions réciproques (pour la sanction v. par exemple Cass. civ. 1, 9 juillet 2003, n° 01-11.963, FS-P N° Lexbase : A1004C93).

Le fait pour le président du tribunal de grande instance d’avoir donné force exécutoire à la transaction sur le fondement de l’ancien article 1441-4 du Code de procédure civile N° Lexbase : L6405H7D (rappr. dorénavant CPC, art. 1541 N° Lexbase : L6772LEK) exclut-il le contrôle par les juges du fond de la validité de la transaction ? Les juges du fond l’avaient admis (CA Versailles, 8 juin 2021, n° 21/00632 N° Lexbase : A31914UQ).

Solution. L’arrêt est cassé au visa des articles (i) 2052 du Code civil N° Lexbase : L2297ABP, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1547, du 18 novembre 2016 N° Lexbase : L1605LB3 (« les transactions ont, entre les parties, l'autorité de la chose jugée en dernier ressort. Elles ne peuvent être attaquées pour cause d'erreur de droit, ni pour cause de lésion »), et (ii) 1441-4 du Code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 98-1231, du 28 décembre 1998 N° Lexbase : L2924AI7 (« le président du tribunal de grande instance, saisi sur requête par une partie à la transaction, confère force exécutoire à l'acte qui lui est présenté »). La première chambre civile précise qu’« il résulte de ces textes que, lorsque le président du tribunal de grande instance statue sur une demande tendant à conférer force exécutoire à une transaction, son contrôle ne porte que sur la nature de la convention qui lui est soumise et sur sa conformité à l'ordre public et aux bonnes mœurs et n'exclut pas celui opéré par le juge du fond saisi d'une contestation de la validité de la transaction ». Ainsi, le fait que la transaction ait force exécutoire n’exclut pas le contrôle des juges du fond quant à la validité de la convention.

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