Le Quotidien du 21 septembre 2022 : Droit international privé

[Brèves] Demande d’exequatur : action fondée sur « Bruxelles I » et action fondée sur le droit commun

Réf. : Cass. civ. 1, 7 septembre 2022, n° 21-12.263, FS-B N° Lexbase : A18888HE

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N2573BZC

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par Laure Florent et Silya Harkouken

le 20 Septembre 2022

► La cour d'appel, saisie d'un recours formé en application de l'article 43 du Règlement Bruxelles I contre une déclaration constatant la force exécutoire de la décision d’un État membre, ne peut que soit le rejeter, soit refuser de déclarer exécutoire la décision, soit révoquer la déclaration, son office étant limité à la vérification de l'applicabilité au litige du Règlement et à l'examen des critères définis aux articles 34 et 35 de celui-ci ;
aucun autre moyen ne pouvait donc être soulevé, et notamment le demandeur ne pouvait invoquer le droit commun de l’exequatur, sur lequel il pouvait fonder en revanche une seconde action tendant à ce que la décision soit déclarée exécutoire en France, sans atteinte à l’autorité de la chose jugée.

Faits et procédure. Par décision du 8 juillet 2015, le greffier en chef du tribunal de grande instance de Strasbourg, saisi à la requête de la Commission européenne sur le fondement de l’article 41 du Règlement (CE) n° 44/2001, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale N° Lexbase : L7541A8S, dit « Bruxelles I », a déclaré exécutoire en France un jugement d’une juridiction croate, qui a condamné le demandeur au pourvoi à payer une certaine somme à la Commission européenne.

Ce dernier a formé un recours contre la déclaration constatant la force exécutoire du jugement croate.

La cour d’appel de Colmar, dans un arrêt du 21 octobre 2016, a infirmé la décision du greffier en chef, et déclaré la demande de la Commission européenne irrecevable, en tant qu’elle était formée selon la procédure prévue par le Règlement du 22 décembre 2000.

Par la suite, la Commission européenne a saisi le tribunal de grande instance de Strasbourg (TGI Strasbourg, 11 décembre 2018) d'une demande tendant à ce que le jugement du tribunal croate soit déclaré exécutoire en France. Cette action en exequatur était cette fois fondée sur le droit commun.

Prétentions. Le demandeur au pourvoi prétendait que la Commission européenne ne pouvait pas intenter une seconde action relative à la force exécutoire du jugement croate en France, car l’arrêt de la cour d’appel de Colmar du 21 octobre 2016, en tant qu’il était revêtu de l’autorité de la chose jugée, empêchait qu’une action réunissant les mêmes parties, sur les mêmes faits, et étant identiques dans leur objet, bien que le fondement juridique soit différent, puisse aboutir.

Par ailleurs, la Commission européenne aurait dû selon lui présenter lors de la première action une demande subsidiaire d’exequatur fondée sur le droit commun.

Rejet. La Cour de cassation rejette le pourvoi.

Elle explique qu’en vertu de l’article 41 du Règlement du 22 décembre 2000 précité, une décision rendue dans un État membre est d’abord déclarée exécutoire, dès l’achèvement des formalités prévues à l'article 53, sans examen des critères prévus aux articles 34 et 35.

L’article 53 prévoit ainsi que la partie sollicitant la délivrance d’une déclaration constatant la force exécutoire doit produire une expédition du jugement, ainsi qu’un certificat.

L'article 43 prévoit que l'une ou l'autre partie peut former un recours contre la décision relative à la demande de déclaration constatant la force exécutoire.

Selon l'article 45, la juridiction saisie de ce recours ne peut refuser ou révoquer une déclaration constatant la force exécutoire que pour l'un des motifs prévus aux articles 34 et 35.

Par arrêt du 13 octobre 2011 (CJUE, 13 octobre 2011, aff. C-139/10 N° Lexbase : A7353HYY), la Cour de justice de l'Union européenne a énoncé que ce texte doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à ce que le juge saisi d'un recours prévu aux articles 43 ou 44 de ce Règlement refuse ou révoque une déclaration constatant la force exécutoire d'une décision pour un motif autre que ceux indiqués aux articles 34 et 35 de celui-ci, telle que l'exécution de celle-ci dans l'État membre d'origine.

Par ailleurs, en droit interne, l’article 509-2 du Code de procédure civile N° Lexbase : L0368IR3 dans sa version issue du décret n° 2011-1043, du 1er septembre 2011 N° Lexbase : L0321IRC, donne compétence au greffier en chef du tribunal de grande instance pour déclarer exécutoires les décisions rendues dans les États membres de l'Union européenne. En vertu de l'annexe III du Règlement, le recours prévu à l'article 43 est porté, en France, devant les cours d'appel.

Ainsi, il résulte de l'article 45 de ce Règlement, tel qu'interprété par la Cour de justice de l'Union européenne, que la cour d'appel, saisie d'un recours formé en application de l'article 43, ne peut que soit le rejeter, soit refuser de déclarer exécutoire la décision, soit révoquer la déclaration délivrée par le greffier, son office étant limité à la vérification de l'applicabilité au litige du Règlement et à l'examen des critères définis aux articles 34 et 35 de celui-ci.

Aucun autre moyen ne pouvait donc être soulevé devant la cour d’appel de Colmar, à l’occasion de son premier arrêt du 21 octobre 2016. La Commission européenne ne pouvait donc pas, dans ce cadre, invoquer le droit commun de l’exequatur.

Ainsi, l'introduction par la Commission européenne d'une nouvelle action en exequatur fondée sur le droit commun ne se heurtait pas à l'autorité de la chose jugée.

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