Le Quotidien du 21 septembre 2022 : Fiscalité des entreprises

[Brèves] Lupa, suite et fin

Réf. : CAA Paris, 8 juillet 2022, n° 16PA02400 N° Lexbase : A26298AM

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par Denis Fontaine-Besset et Arnauld Spiner, Avocats, GFD-Avocats

le 20 Septembre 2022

Dans une décision du 8 juillet 2022, la cour administrative d’appel de Paris a mis fin à la saga des arrêts Lupa en donnant finalement raison au contribuable.

Les sociétés de personnes françaises présentent la particularité d’être semi-transparentes, c’est-à-dire que les associés sont imposés sur les profits de la société, indépendamment de toute distribution et, symétriquement, peuvent en principe déduire les pertes constatées de la société, même sans effectivement contribuer à combler ces pertes. En cas de cession des droits sociaux, le juge de l’impôt a confirmé, dans l’arrêt de principe Quemener [1], la prise en compte de ce régime particulier dans le calcul de la plus-value imposable. Pour le calcul de la plus ou moins-value, le prix de revient des parts doit être majoré des bénéfices précédemment imposés ainsi que des pertes antérieures comblées par l'associé, et minoré des déficits déduits ainsi que des bénéfices distribués. Ce mécanisme est aussi appliqué aux opérations de restructurations, notamment aux transmissions universelles de patrimoine (TUP) [2].

Dans une décision de 2016 [3], le Conseil d’État avait restreint la portée du mécanisme Quemener en considérant que celui-ci ne peut s’appliquer qu’en cas de double imposition. Cette restriction permettait de s’opposer à une pratique qui consistait à :

  • acquérir les parts d’une SCI, inscrites dans les comptes pour une valeur d’acquisition prenant en compte les plus-values latentes sur l’immeuble sous-jacent ;
  • faire procéder par la SCI à une réévaluation de l’immeuble, générant une plus-value imposable entre les mains de l’associé et ;
  • procéder à une TUP.

Pour le calcul de la plus-value d’annulation des parts, le prix d’acquisition est augmenté du montant de la réévaluation déjà imposée. L’associé constate lors de la TUP une moins-value qui compense le profit imposable dégagé par la réévaluation de l’immeuble.

Dans cet arrêt, le Conseil d’État avait considéré que dès lors que les réévaluations n’avaient été imposées ni en France ni au Luxembourg, en raison des termes de la convention fiscale alors applicable, l’application de la jurisprudence Quemener n’était pas justifiée en l’absence de double imposition en France. Pour nombre de professionnels, cette décision d’espèce devait beaucoup à la volonté de l’administration fiscale de s’opposer à la situation d’exonération des plus-values immobilières que permettait l’interposition de SCI au regard de l’application de la convention faite avec le Luxembourg.

Dans une décision FRA SCI de 2019, le Conseil d’État est toutefois revenu sur cette position, en jugeant que l’application de la règle Quemener est mécanique et ne peut être subordonnée à la nécessité de corriger une double imposition [4].

Lire en ce sens les conclusions du rapporteur public K. Ciavaldini, sur cet arrêt, Lexbase Fiscal, juin 2019, n° 785 N° Lexbase : N9172BXY.

Dans le cadre du renvoi de l’affaire Lupa devant la cour administrative d’appel de Paris, l'administration fiscale a limité sa contestation des opérations de restructuration réalisées par la société Lupa à l’application de l’abus de droit. La remise en cause du mécanisme de correction Quemener n’est plus invoquée et l’administration fiscale semble prendre acte de l’évolution apportée par la jurisprudence FRA SCI.

La cour confirme que le correctif Quemener peut être contesté sur le terrain de l’abus de droit lorsque les conditions en sont remplies. Elle reconnaît l’existence d’un montage artificiel dénué de toute substance, sans motivation économique (en raison de l’absence de toute activité, de la complexité et de la rapidité des opérations successives, de l’absence de modification de l’identité du « propriétaire réel » et du gestionnaire des immeubles). Elle juge néanmoins que l’abus de droit n’est pas constitué au cas particulier, dès lors que l’administration fiscale ne démontre pas que la société aurait obtenu un avantage fiscal à l’encontre de l’objectif de neutralité recherché dans le correctif Quemener. La cour n’a pas non plus retenu d’abus des stipulations conventionnelles ; la réévaluation Quemener relève des règles d’assiette et non de l’attribution du droit d’imposition qui est le seul effet utile des conventions.

 

[1] CE, 3°-8° ssr., 16 février 2000 n° 133296 N° Lexbase : A0346AUD.

[2] CE, 9°-10° ssr., 27 juillet 2015 n° 362025, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A0733NNH.

[3] CE, 3°-8° ch.-r., 6 juillet 2016, n° 377904, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6113RWC.                       

[4] CE, 3/8/9/10 ch. réunies, 24 avril 2019, n° 412503, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A7394Y9Q.

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