Le Quotidien du 21 juin 2022 : Baux commerciaux

[Brèves] Transfert au locataire de la charge des travaux de réparations intéressant la structure et la solidité de l'immeuble : exigence d’une clause claire et précise

Réf. : Cass. civ. 3, 1er juin 2022, n° 21-14.598, F-D N° Lexbase : A810574X

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N1836BZZ

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[Brèves] Transfert au locataire de la charge des travaux de réparations intéressant la structure et la solidité de l'immeuble : exigence d’une clause claire et précise. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/85614696-breves-transfert-au-locataire-de-la-charge-des-travaux-de-reparations-interessant-la-structure-et-la
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par Vincent Téchené

le 15 Juin 2022

► Le bailleur, à qui incombe la charge des travaux de réparations, autres que celles locatives, qui intéressent la structure et la solidité de l'immeuble loué, peut, par une clause claire et précise dont la portée doit être interprétée restrictivement, en transférer la charge au preneur.

Faits et procédure. Dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'encontre d'une société, la cession du bail commercial qui lui avait été concédé est intervenue le 21 septembre 2016 au profit d’une autre société (la locataire).

La locataire a assigné la bailleresse en exécution de travaux de réfection de la toiture de l'ensemble des ateliers, en diminution du montant des loyers et en remboursement d'une partie des loyers versés jusqu'en janvier 2017.

Toutefois, la cour d’appel de Nancy, par un arrêt du 13 janvier 2021 (CA Nancy, 13 janvier 2021, n° 20/00257 N° Lexbase : A33044CD), a condamné la locataire à effectuer les travaux de réfection des couvertures, zingueries, et étanchéité des bâtiments affectés par des infiltrations, et de réfection de la charpente du bâtiment à usage administratif, dans un délai de six mois à compter de la signification. Elle a, en effet, estimé qu’une clause du bail transférait à la locataire de tels travaux.

Cette dernière a alors formé un pourvoi en cassation.

Décision. La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel au visa des articles 1134 N° Lexbase : L1234ABC, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, 1720 N° Lexbase : L1842ABT et 1754 N° Lexbase : L1887ABI du Code civil.

Selon la Cour, il résulte de ces textes que le bailleur, à qui incombe la charge des travaux de réparations, autres que celles locatives, qui intéressent la structure et la solidité de l'immeuble loué, peut, par une clause claire et précise dont la portée doit être interprétée restrictivement, en transférer la charge au preneur.

Or, elle relève que, pour condamner la locataire à la réfection des couvertures, zingueries, et étanchéité des bâtiments affectés par des infiltrations, et à la réfection de la charpente d'un autre bâtiment, l'arrêt d’appel a retenu qu'aucun manquement à l'obligation de délivrance ne peut être reproché au bailleur lors de la prise d'effet du bail du 22 décembre 2010, qui limite les travaux mis à la charge du bailleur en prévoyant :

  • à l'article « Entretien-Réparations » que le preneur « devra également effectuer ou faire effectuer à ses frais et sous sa seule responsabilité, les réparations de toute nature, y compris celles visées à l'article 606 du Code civil N° Lexbase : L3193ABU, et y compris également tous travaux de ravalement de façades » ; et
  • à l'article « travaux d'aménagements », que le preneur « s'oblige à supporter la charge des travaux rendus nécessaires, par l'application de la réglementation actuelle et future, concernant les normes et obligations de sécurité, salubrité et conformité des lieux ».

Ainsi, pour la cour d’appel, il en résulte que les parties ont entendu mettre à la charge du locataire les grosses réparations.

Or, pour la Haute juridiction, en statuant ainsi, en l'absence d'une stipulation claire et précise du bail commercial mettant à la charge du preneur la réfection de la couverture et la charpente des bâtiments loués, la cour d'appel a violé les textes visés.

Observations. La Cour de cassation opère ici un rappel qui en matière d’aménagement conventionnel de l'obligation d'entretien exige des stipulations expresses qui s’interprètent strictement. Ainsi, par exemple, la Cour a déjà précisé que la clause mettant à la charge du preneur les grosses réparations n'exonère pas le bailleur de la réfection totale de la chose louée si les travaux nécessaires touchent au gros œuvre et impliquent une modification de la structure de la chose louée (Cass. civ. 3, 28 mai 2008, n° 06-20.403, FS‑P+B N° Lexbase : A7807D8N). Elle a également retenu que le coût des travaux de ravalement, de toiture et de chauffage collectif incombe au propriétaire sauf stipulation expresse, la clause mettant à la charge du preneur les réparations de l'article 606 du Code civil ne suffisant pas à transférer ces charges (Cass. civ. 3, 6 mars 2013, n° 11-27.331, FS-P+B N° Lexbase : A3099I9N, J. Prigent, Lexbase Affaires, mars 2013, n° 332 N° Lexbase : N6436BTK). L'arrêt rapporté se situe bien dans le sillage de ces précédents jurisprudentiels.

Pour aller plus loin : ÉTUDE : Les obligations du bailleur du bail commercial, La possibilité d'aménager conventionnellement l'obligation d'entretien dans un contrat de bail commercial, in Baux commerciaux, (dir. J. Prigent), Lexbase N° Lexbase : E6189AEX.

 

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