Le Quotidien du 24 février 2022 : Construction

[Brèves] Référé 145 : la potentialité d’un différend suffit à caractériser un intérêt légitime

Réf. : Cass. civ. 3, 16 février 2022, n° 21-11.926, FS-B N° Lexbase : A33387NX

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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J Avocats, Chargée d’enseignements à l’UPEC et Paris Saclay, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats

le 23 Février 2022

► La demande d’expertise judiciaire peut être fondée sur les dispositions de l’article 145 du Code de procédure civile ; la démonstration d’un intérêt légitime est, en ce cas, requise ; la caractérisation d’un intérêt légitime relève du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond.

Le principe mérite d’être rappelé tellement le traitement des demandes d’expertise judiciaire paraît « automatique ». Il y a finalement assez peu de débats sur l’existence d’un intérêt légitime tant les juges se montrent enclins à prononcer des mesures d’expertise, surtout dans les domaines techniques tels que la construction.

En l’espèce, un maître d’ouvrage qui souhaitait réaliser une opération de démolition et de construction sur des parcelles lui appartenant, a saisi le président du tribunal judiciaire, statuant en la forme des référés, sur le fondement de l’article 145 du Code de procédure civile N° Lexbase : L1497H49, aux fins d’obtenir la désignation d’un expert chargé d’établir un état descriptif et qualitatif des propriétés riveraines du chantier et de déterminer, le cas échéant, des désordres qui pourraient être imputables aux travaux. La société GRDF, qui exploitait une canalisation de gaz à proximité des travaux envisagés, s’est opposée à cette demande et a sollicité sa mise hors de cause.

La cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 10 décembre 2020 (CA Paris, 10 décembre 2020, n° 20/07971 N° Lexbase : A483739Z), ordonne la mesure d’instruction. Elle rappelle que le demandeur à l’expertise n’a pas à démontrer la réalité de ses suppositions à cet égard, cette mesure in futurum étant précisément destinée à l’établir, mais qu’il doit justifier d’éléments les rendant crédibles et de ce que le procès en germe en vue duquel il sollicite la mesure n’est pas dénué de toutes chances de succès. La société GRDF forme un pourvoi en cassation, contestant, notamment, l’existence d’un intérêt légitime.

Le pourvoi est rejeté. La société GRDF, qui exploite des canalisations de gaz situées dans, ou à proximité de, l’emprise des travaux projetés par le maître d’ouvrage pouvait solliciter des dommages et intérêts en cas de dommages causés aux ouvrages qu’elle exploitait.

La solution est confirmative d’une jurisprudence éculée. Si le juge, statuant en la forme des référés, doit constater l’existence d’un motif légitime, requis par la lettre de l’article 145 du Code de procédure civile, il ne lui appartient pas de le caractériser (Cass. civ. 2, 8 juin 2000, n° 97-13.962 N° Lexbase : A6234CGY). De même, l’existence d’un litige potentiel suffit, la preuve de l’existence d’un différend actuel n’est pas requise (Cass. civ. 2, 16 novembre 2017, n° 16-24.368, F-D N° Lexbase : A7055WZC).

La preuve du motif légitime s’en trouve facilitée. Si elle ne se confond pas avec l’utilité, critère requis par le juge administratif (Cass. civ. 2, 22 avril 1992, n° 90-19.727 N° Lexbase : A3250ACD), le juge peut, dans le cadre de son pouvoir souverain d’appréciation, décider que la mesure d’instruction avant tout procès étant inutile, le demandeur ne rapportait pas la preuve de l’existence d’un motif légitime (Cass. civ. 2, 20 mars 2014, n° 13-14.985, F-P+B N° Lexbase : A7469MH4).

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