Réf. : Cass. civ. 3, 19 janvier 2022, n° 20-22.205, FS-B (N° Lexbase : A77177IN)
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N0190BZ3
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par Vincent Téchené
le 26 Janvier 2022
► L'associé, débiteur subsidiaire du passif social, est en droit d'opposer au créancier la prescription de la créance détenue contre la société et la poursuite préalable et vaine de la société ne constitue pas le point de départ de la prescription de l'action du créancier contre l'associé, qui est le même que celui de la prescription de l'action contre la société.
Faits et procédure. Les 11 et 12 mai 2007, une banque a consenti à une SCI un prêt immobilier. La SCI n'ayant pas respecté les échéances du remboursement du prêt, la banque a engagé des poursuites de saisie immobilière à son encontre.
Après avoir autorisé la vente amiable du bien saisi, puis constaté la réalisation de la vente, le juge de l'exécution a, par ordonnance du 3 janvier 2012, homologué le projet de distribution. La distribution n'ayant pas permis de remplir la banque de l'intégralité de ses droits, celle-ci a fait délivrer à la SCI, le 27 février 2017, un commandement de payer aux fins de saisie-vente. Après établissement d'un procès-verbal de carence le 6 mars 2017, la banque l'a assignée le 14 juin suivant en paiement des sommes restant dues.
L’associée de la SCI a formé un pourvoi en cassation reprochant à l’arrêt d’appel (CA Caen, 25 juin 2020, n° 19/01139 N° Lexbase : A48583PM) d’avoir déclaré recevable l'action engagée par la banque et de l’avoir condamnée au paiement.
Décision. La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel au visa des articles 1857 N° Lexbase : L2054ABP, 1858 N° Lexbase : L2055ABQ, 2231 N° Lexbase : L7216IAI, 2241 N° Lexbase : L7181IA9 et 2242 N° Lexbase : L7180IA8 du Code civil.
Elle rappelle qu’en vertu du premier de ces textes (C. civ., art. 1857), à l'égard des tiers, les associés répondent indéfiniment des dettes sociales à proportion de leur part dans le capital social à la date de l'exigibilité ou au jour de la cessation des paiements.
En outre, aux termes du deuxième (C. civ., art. 1858), les créanciers ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé qu'après avoir préalablement et vainement poursuivi la personne morale.
Ainsi selon la Haute juridiction, il résulte de la combinaison de ces textes que l'associé, débiteur subsidiaire du passif social, est en droit d'opposer au créancier la prescription de la créance détenue contre la société et que la poursuite préalable et vaine de la société ne constitue pas le point de départ de la prescription de l'action du créancier contre l'associé, qui est le même que celui de la prescription de l'action contre la société.
Par ailleurs, selon le troisième texte (C. civ. 2231), l'interruption de la prescription efface le délai de prescription acquis et fait courir un nouveau délai de même durée que l'ancien.
Enfin, en application des quatrième et cinquième textes (C. civ., art. 2241 et 2241), la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription et l'interruption résultant de cette demande produit ses effets jusqu'à l'extinction de l'instance.
Or, la Cour relève que pour dire recevable l'action engagée contre l’associée, l'arrêt retient que la distribution, à l'issue de la procédure de saisie immobilière, ne suffit pas à caractériser les vaines poursuites au sens des dispositions de l'article 1858 du Code civil et que le caractère infructueux des diligences du créancier est caractérisé par l'échec de la procédure de saisie-vente diligentée à l'encontre de la SCI le 27 février 2017, qui a conduit à l'établissement d'un procès-verbal de carence le 6 mars 2017, date qui constitue le point de départ du délai de prescription de l'action du créancier contre l'associé.
Ainsi, pour la Haute juridiction, en statuant ainsi, alors que, l'effet interruptif de prescription résultant de la saisine du juge de l'exécution ayant pris fin le 3 janvier 2012, date de l'ordonnance d'homologation du projet de distribution du prix de vente, et un nouveau délai de cinq ans ayant couru à compter de cette date, la créance de la banque était prescrite le 27 février 2017, date du commandement aux fins de saisie-vente, de sorte que l'action engagée par l'assignation délivrée le 14 juin 2017 à l’associée était irrecevable, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les associés de la société civile, Le paiement de la dette par les associés, in Droit des sociétés, (dir. B. Saintourens), Lexbase N° Lexbase : E7810D3N. |
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