Lexbase Fiscal n°881 du 14 octobre 2021 : Fiscalité internationale

[Brèves] Prix de transfert et justification d’écart de certains ratios financiers pertinents

Réf. : CE 8° et 3° ch.-r., 4 octobre 2021, n° 443130, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A210548H)

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[Brèves] Prix de transfert et justification d’écart de certains ratios financiers pertinents. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/73124452-brevesprixdetransfertetjustificationdecartdecertainsiratiosifinancierspertinents
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par Marie-Claire Sgarra

le 09 Novembre 2021

Le Conseil d’État est revenu, en matière de prix de transfert sur le cas d’une différence constatée par l’administration entre les prix pratiqués, qui peuvent ne pas constituer, pour l’entreprise française un avantage dépourvu de contrepartie si cet écart est justifié par les risques que l’entreprise a vocation à assumer et qui affectent sa rentabilité.

Les faits :

  • une société, dont l'activité consiste en la fabrication de roulements sur mesure de très grandes dimensions à destination de l'industrie civile et militaire, est contrôlée par un groupe suédois à travers une holding, qui est son unique associé ;
  • la société a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au terme de laquelle l'administration, par propositions de rectification, a remis en cause les prix auxquels elle avait facturé ses produits aux sociétés distributrices du groupe à l'étranger et a soumis à la retenue à la source les sommes correspondant au transfert indirect de bénéfices correspondant ;
  • le tribunal administratif de Montreuil a fait droit à la demande de décharge ; la cour administrative d'appel de Versailles a annulé ce jugement et remis à sa charge les impositions contestées (CAA Versailles, 22 juin 2020, n° 18VE02848 N° Lexbase : A61093QC).

🔎 Principes :

  • il résulte de l’article 57 du CGI (N° Lexbase : L9738I33) que, lorsqu'elle constate que les prix facturés par une entreprise établie en France à une entreprise étrangère qui lui est liée - ou ceux qui lui sont facturés par cette entreprise étrangère -, sont inférieurs - ou supérieurs - à ceux pratiqués par des entreprises similaires exploitées normalement, c'est-à-dire dépourvues de liens de dépendance, l'administration doit être regardée comme établissant l'existence d'un avantage qu'elle est en droit de réintégrer dans les résultats de l'entreprise française, sauf pour celle-ci à justifier que cet avantage a eu pour elle des contreparties au moins équivalentes ;
  • à défaut d'avoir procédé à une telle comparaison, le service n'est, en revanche, pas fondé à invoquer la présomption de transferts de bénéfices ainsi instituée mais doit, pour démontrer qu'une entreprise a consenti une libéralité en facturant des prestations à un prix insuffisant - ou en les payant à un prix excessif -, établir l'existence d'un écart injustifié entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé ou du service rendu.

⚖️ Solution du Conseil d’État

👉 L'administration peut, pour établir l'existence d'une majoration des prix d'achat ou d'une minoration des prix de vente facturés entre une entreprise établie en France et une entreprise étrangère qui lui est liée, ainsi d'ailleurs que le préconisent les Principes de l'OCDE applicables aux prix de transfert à l'intention des entreprises multinationales et des administrations publiques, se fonder sur la comparaison d'un ratio financier pertinent de l'une ou l'autre entreprise, tel que le taux de marge sur ces transactions, avec celui d'entreprises similaires exploitées normalement, c'est-à-dire dépourvues de lien de dépendance.

👉 Une différence ainsi constatée par l'administration entre les prix pratiqués par une entreprise française avec les entreprises qui lui sont liées et les prix pratiqués entre des entreprises similaires exploitées normalement peut être regardée comme ne constituant pas un avantage dépourvu de contrepartie susceptible d'être réintégré dans les résultats de cette entreprise si elle est justifiée par les risques que celle-ci a vocation à assumer et qui affectent sa rentabilité. Dans ce dernier cas, il lui incombe de justifier à la fois qu'elle avait, du fait des fonctions qu'elle exerçait au sein du groupe, vocation à assumer ces risques, et que l'écart entre les ratios financiers constatés et ceux d'entreprises similaires exploitées normalement s'explique par la réalisation de ces risques.

💡 Sur l’invocabilité de la présomption de transfert de bénéfices, le CE a jugé qu’il n’existait pas de présomption de transfert indirect de bénéfices sans preuve par l’administration d’un avantage. L’administration fiscale doit démontrer l’irrégularité des prix de vente pratiqués en examinant les prix pratiqués auprès de clients se trouvant dans une situation comparable (CE 9° et 10° ssr., 16 mars 2016, n° 372372, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A2167Q8R).

Lire en ce sens, F. Laffaille, À propos de l'article 57 du CGI et des transferts indirects de bénéfices, Lexbase Fiscal, avril 2016, n° 651 (N° Lexbase : N2268BWW).

 

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