La lettre juridique n°877 du 16 septembre 2021 : Droit des étrangers

[Brèves] Demande ultérieure de protection internationale : le droit de l’Union s’oppose à ce qu’elle soit rejetée au seul motif qu’elle est fondée sur des faits qui existaient déjà lors de la première demande

Réf. : CJUE, 9 septembre 2021, aff. C-18/20, XY C-18-20 (N° Lexbase : A895143W)

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[Brèves] Demande ultérieure de protection internationale : le droit de l’Union s’oppose à ce qu’elle soit rejetée au seul motif qu’elle est fondée sur des faits qui existaient déjà lors de la première demande. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/72273579-brevesdemandeulterieuredeprotectioninternationaleledroitdelunionsopposeacequellesoitr
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par Marie Le Guerroué

le 15 Septembre 2021

► Le droit de l’Union s’oppose à ce qu’une demande ultérieure de protection internationale soit rejetée comme irrecevable au seul motif qu’elle est fondée sur des faits qui existaient déjà lors de la procédure relative à la première demande ; en outre, la réouverture de la première procédure en vue de l’examen au fond de la demande ultérieure ne peut pas être soumise à la condition que cette demande ait été introduite dans un certain délai.

Faits et procédure. Un ressortissant irakien, dont la première demande de protection internationale avait été rejetée de manière définitive par l’office fédéral pour le droit des étrangers et le droit d’asile autrichien, avait introduit quelques mois plus tard devant cette même autorité une demande ultérieure de protection internationale.

Alors qu’il avait fondé sa première demande sur le fait qu’il craignait pour sa vie en cas de retour en Irak, au motif qu’il avait refusé de combattre pour des milices chiites (lui-même étant de confession musulmane chiite) et que ce pays était toujours en guerre, il faisait maintenant valoir que le motif réel de ses demandes tenait à son homosexualité, laquelle serait interdite par son pays et par sa religion. Il expliquait que, au moment de la première demande, il ne savait pas encore qu’il n’aurait rien risqué en Autriche en révélant être homosexuel. L’office fédéral avait rejeté cette demande ultérieure comme irrecevable, au motif qu’elle tendait à remettre en cause une décision antérieure de refus qui avait acquis l’autorité de chose jugée.

En effet, selon le droit autrichien, toute demande ultérieure fondée sur des éléments ou faits existant déjà avant l’adoption de la décision définitive clôturant la procédure antérieure ne peut entraîner que la réouverture de cette procédure et cela seulement si le demandeur n’a pas commis de faute en omettant de les invoquer lors de la procédure antérieure. Seuls des éléments ou faits qui se sont nouvellement produits après l’adoption de la première décision définitive peuvent justifier l’ouverture d’une nouvelle procédure. Estimant que sa demande ultérieure aurait dû conduire à l’ouverture d’une nouvelle procédure, le demandeur concerné s’est adressé aux juridictions autrichiennes. La cour administrative autrichienne a demandé à la Cour de justice d’interpréter la Directive relative à des procédures communes pour l’octroi de la protection internationale (Directive (UE) 2013/32 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale N° Lexbase : L9263IXD).

Réponse de la Cour. La Cour précise que l’examen au fond d’une demande ultérieure de protection internationale, fondée sur des éléments ou faits existant déjà avant la clôture définitive de la première procédure, peut, en principe, et sous réserve du respect des principes et garanties fondamentales prévus par la Directive, être conduit dans le cadre de la réouverture de la procédure ayant eu pour objet la première demande.

Une telle réouverture peut, comme en Autriche, être soumise à la condition que i) ces éléments ou faits nouveaux augmentent de manière significative la probabilité que le demandeur remplisse les conditions pour prétendre au statut de bénéficiaire d’une protection internationale et ii) le demandeur ait été, sans faute de sa part, dans l’incapacité de les faire valoir au cours de la précédente procédure. En revanche, une telle réouverture ne doit pas être soumise à la condition que, comme le prévoit le droit autrichien, la demande ultérieure ait été introduite dans un certain délai.

Pour le cas où les dispositions de droit autrichien applicables à la réouverture de la procédure n’assurent pas le respect des conditions de recevabilité de la demande ultérieure ou ne sont pas conformes aux principes et aux garanties fondamentales prévus par la Directive, la Cour ajoute encore que la demande ultérieure du demandeur en question devrait, en l’espèce, être examinée dans le cadre d’une nouvelle procédure administrative.

En l’absence de transposition par l’Autriche, pour de telles nouvelles procédures, de la disposition facultative de la Directive permettant aux États membres de prévoir de ne poursuivre l’examen de la demande ultérieure que si le demandeur concerné a été, sans faute de sa part, dans l’incapacité de faire valoir, au cours de la précédente procédure, les nouveaux éléments ou faits alors qu’ils existaient déjà, l’ouverture de la nouvelle procédure ne peut pas être refusée au motif qu’une telle faute peut être imputée au demandeur.

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