La lettre juridique n°502 du 18 octobre 2012 : Fiscalité immobilière

[Questions à...] Projet de réduction d'impôt en faveur de l'investissement locatif : analyse du dispositif "Duflot" - Questions à Jean-Dominique Delannoy, avocat associé, Fidal

Réf. : Projet de loi de finances pour 2013, art. 57

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[Questions à...] Projet de réduction d'impôt en faveur de l'investissement locatif : analyse du dispositif "Duflot" - Questions à Jean-Dominique Delannoy, avocat associé, Fidal. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/6994363-questions-a-projet-de-reduction-dimpot-en-faveur-de-linvestissement-locatif-analyse-du-dispositif-du
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par Sophie Cazaillet, Rédactrice en chef de Lexbase Hebdo - édition fiscale

le 19 Octobre 2012

Le projet de loi de finances pour 2013 est riche en réformes fiscales, dans tous les domaines de la matière. Concernant l'immobilier, l'article 57 du projet de loi, dit "dispositif Duflot", du nom de son instigatrice, Cécile Duflot, ministre du Logement, fait déjà couler beaucoup d'encre. Cette nouvelle réduction d'impôt, destinée à remplacer le dispositif "Scellier" (CGI, art. 199 septvicies N° Lexbase : L8519ISC), qui s'éteindra le 31 décembre 2012, vise à inciter les contribuables particuliers à investir dans l'immobilier neuf, afin de pallier à la crise du logement. Digne héritier du dispositif en fin de vie précité, le "Duflot" repose sur le même principe : les contribuables résidents de France qui acquièrent ou font construire des logements neufs dans certaines zones du territoire (se caractérisant par un déséquilibre entre l'offre et la demande de logements) et les donnent en location nue à usage d'habitation bénéficient d'une réduction de leur impôt sur le revenu. Afin de se familiariser avec le dispositif "Duflot", qui sera adopté, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013, avant la fin de l'année, Lexbase Hebdo - édition fiscale a interrogé Jean-Dominique Delannoy, avocat associé, Fidal.

Lexbase : Pouvez-vous nous présenter le dispositif "Duflot" tel qu'il est inscrit dans le projet de loi de finances pour 2013 ?

Jean-Dominique Delannoy : Ce dispositif concerne les logements acquis neufs entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2016 (en réalité, ce dispositif est un peu plus large mais nécessiterait des développements beaucoup plus étoffés). Cette réduction d'impôt s'appliquerait pour le contribuable justifiant du respect d'un niveau de performance énergétique globale fixé par décret en fonction du type de logement concerné.

Les immeubles devraient être situés en France dans des communes classées par arrêté dans certaines zones géographiques caractérisées par un déséquilibre important entre l'offre et la demande de logements. Toutefois, dans les zones où ces besoins sont localisés, la réduction d'impôt s'appliquerait aux logements situés dans les communes qui ont fait l'objet, dans des conditions définies par décret, d'un agrément du représentant de l'Etat dans la région.

De plus, la loi prévoit que, dans un même immeuble neuf comportant au moins cinq logements, un pourcentage de ces logements devrait être acquis sans pouvoir ouvrir droit à la réduction d'impôt. Ce pourcentage, qui ne pourrait être inférieur à 20 %, serait fixé par décret.

Le propriétaire du logement devra prendre l'engagement de le donner en location nue à titre d'habitation principale pendant une durée minimale de 9 ans.

L'engagement de location devrait prévoir que le loyer et les ressources du locataire, appréciés à la date de la conclusion du bail ne doivent pas excéder les plafonds fixés par décret en fonction de la localisation et de son type.

Lexbase : Quels sont les écueils, rencontrés par le dispositif "Scellier", auxquels le "Duflot" tente d'échapper ? Pensez-vous que la tentative réussisse ?

Jean-Dominique Delannoy : Le dispositif "Scellier" (il en existe plusieurs) aurait eu, selon ses détracteurs, l'inconvénient de construire des logements neufs dans des communes où la pénurie de logements n'était pas évidente. Il en serait résulté que certains investisseurs n'auraient pas trouvé de locataire pour ces logements.

De plus, il était considéré que malgré les coups de rabots successifs subis par ce dispositif, il coûtait trop cher aux finances publiques. Le même reproche avait d'ailleurs été fait dans le passé pour d'autres dispositifs, comme le "Robien" (1) ou le "Périssol" (2).

En fait, les dispositifs fiscaux qui rencontrent du succès auprès des investisseurs engendrent, en général, un coût prohibitif pour les finances publiques.

Lexbase : Les dispositifs concernant les niches fiscales (coup de rabot et plafonnement global) sont-ils applicables au "Duflot" ?

Jean-Dominique Delannoy : La réduction d'impôt prévue par ce dispositif serait basée sur le prix de revient du logement retenu dans la limite d'un plafond par m² de surface habitable fixé par décret et sans pouvoir dépasser la limite de 300 000 euros par contribuable et pour une même année d'imposition.

Le taux de la réduction d'impôt serait fixé à 18 % et réparti sur 9 années. Elle serait accordée au titre de l'année d'achèvement du logement ou de son acquisition si elle est postérieure à l'achèvement.

Cette réduction d'impôt, en application au 1er janvier 2013, rentrerait dans le plafonnement des niches fiscales (3), dont le taux est fixé à 10 000 euros pour cette même année 2013. A titre indicatif, pour un investissement de 300 000 euros, le contribuable pourrait réduire son impôt sur le revenu de 6 000 euros par an et ce sur 9 ans.

Lexbase : Le "Duflot" pourrait-il, selon vous, constituer une réponse efficace à la crise du logement ?

Jean-Dominique Delannoy : Les commentateurs avertis du secteur de la construction neuve en France estiment, de façon quasi unanime, que ce dispositif aura peu d'impact sur la crise du logement, compte tenu de toutes les contraintes que ce texte impose (zonage, prix maximum au m², ressources plafonnées du locataire et plafonnement du loyer).

De plus, le contribuable devra arbitrer ce dispositif avec d'autres dispositifs qui rentrent également à partir de 2013 dans le plafonnement des niches fiscales à 10 000 euros, et l'on cite notamment comme autre avantage fiscal visé par le plafonnement l'emploi des salariés à domicile.

Mes interlocuteurs dans le domaine de la construction promotion sont très dubitatifs et réservés sur ce dispositif, dans la mesure où de nombreux décrets devraient paraître début 2013 afin de délimiter les modalités d'application de ce dispositif. La seule bonne nouvelle pour eux, c'est l'existence d'un texte, car ils redoutaient que le Gouvernement ne prévoie rien en ce domaine.

Lexbase : A quel(s) type(s) de contribuable(s) pourriez-vous conseiller le recours au dispositif "Duflot" ?

Jean-Dominique Delannoy : A ce stade, le texte n'est pas voté et pourrait subir des modifications au cours des débats parlementaires et en matière d'investissements immobiliers à connotation fiscale, il est impératif de faire un bilan de l'opération, à savoir de procéder à des calculs de rentabilités financières, c'est-à-dire, par exemple, est-ce que la réduction de loyer imposée par le texte sur une durée de 9 ans minimum est compensée par la réduction d'impôt.

En fait, pour un contribuable qui utiliserait au maximum ce nouveau dispositif, c'est-à-dire réduire de 10 000 euros son impôt par an (donc investir sur deux ans un montant de 500 000 euros, ce qui correspondrait à une réduction d'impôt de 100 000 euros environ sur 10 ans).

La réduction d'impôt, a priori, compenserait largement la baisse du loyer car, faut-il le rappeler, le loyer est lui-même imposable, au contraire de la réduction d'impôt (hors plafonnement ISF).


(1) CGI, art. 31, I, 1, h (N° Lexbase : L1189HPQ) ; dispositif disparu depuis le 1er janvier 2010.
(2) CGI, art. 31, I, 1, f (N° Lexbase : L1093HL3) ; dispositif disparu depuis le 31 décembre 1998 avec prorogation temporaire jusqu'au 31 août 1999.
(3) CGI, art. 200-0 A (N° Lexbase : L5282IR3).

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