Réf. : TA Montreuil, 14 janvier 2021, n° 1812789 (N° Lexbase : A35274R3)
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par Denis Fontaine-Besset et Arnauld Spiner, Avocats, GFD-Avocats,
le 21 Juin 2021
Force est de constater, que l’universalité des principes de l’OCDE en matière de prix de transfert, telle que reconnue par l’administration fiscale française, laisse peu de place au juridisme. Leur application appelle donc le plus grand pragmatisme. Dans une décision récente, le tribunal administratif de Montreuil semble laisser présager de la manière dont les juges de l’impôt vont s’approprier cette question.
Acteur majeur de la fourniture de gaz en France, mais aussi à l’étranger, la société française Engie est, dans le cadre de la gestion des approvisionnements du groupe, conduite à contracter des achats spot de gaz sur le marché pour le compte des diverses entités du groupe. Le tribunal à confirmer l’approche adoptée par l’administration, consistant a considérer que cette activité relevait de la co-entreprise et non d’une prestation de services identifiable pour substituer la méthode du partage de profits à une méthode de prix de transfert unilatérale (méthode de la marge sur coût).
Quand bien même l’appréciation de la portée exacte de certains faits semble prêter à discussion. L’approche adoptée par le juge est riche d’enseignements tant sur la méthode d’analyse que sur les critères retenus pour apprécier la pertinence du choix d’une méthode de prix de transfert.
📌 Sur la méthode, tout d’abord, le raisonnement suivi démontre la primauté accordée à l’analyse fonctionnelle en tant que pivot de la détermination du partage de la valeur ajoutée. Le tribunal a, en effet, confirmé l’importance de l’analyse fonctionnelle et de ses trois piliers que sont les risques, les actifs et le caractère autonome ou accessoire de l’activité. A cet égard, le tribunal prend bien soin de souligner, comme le font les principes de l’OCDE, que ces appréciations doivent porter sur les activités telles qu’elles sont effectivement réalisées et non telles qu’elles peuvent être prévues dans les termes des conventions qui ont pu être mises en place, intégrant ainsi cette approche anglosaxonne « substance over form » qu’on voit prospérer dans diverses décisions jurisprudentielles récentes.
📌 Sur le choix de la méthode de prix de transfert appropriée, la décision confirme l’attention particulière donnée par la dernière version des principes de l’OCDE à la méthode du partage de profits. Elle rappelle en effet sa pertinence non seulement en cas de contribution conjointe de plusieurs entreprises liées à des actifs incorporels de valeur mais aussi pour les groupes dans lesquelles plusieurs entités agissent de manière très intégrée. A propos de la reconnaissance d’actifs incorporels, on relève la distance prise avec une approche limitée aux seuls actifs dont l’existence est juridiquement reconnue, au profit de la reconnaissance d’incorporels induits par des simples relations commerciales, résultant de contrats cadres.
💡 Ainsi la méthode du partage de profits longtemps délaissée en raison de la complexité de sa mise en œuvre et de la grande subjectivité des critères retenus pour son application va certainement connaître un fort développement. Espérons que celui-ci s’accompagnera de la formulation recommandations plus précises s’agissant des modalités de son application.
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