Réf. : Loi n° 2020-1672, du 24 décembre 2020, relative au Parquet européen, à la justice environnementale et à la justice pénale spécialisée (N° Lexbase : L2698LZX)
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par Adélaïde Léon
le 20 Janvier 2021
► Après de longs mois d’attente, la loi n° 2020-1672 du 24 décembre 2020 relative au Parquet européen, à la justice environnementale et à la justice pénale spécialisée a finalement été publiée au journal officiel du 26 décembre 2020 ; elle adapte notamment en droit interne le Règlement (UE) n° 2017/1939 du Conseil du 12 octobre 2017 mettant en œuvre une coopération renforcée concernant la création du Parquet européen (N° Lexbase : L2117LHU).
Introduction du Parquet européen dans la législation nationale. La loi introduit tout d’abord le Parquet européen dans la législation nationale en spécifiant les compétences et attributions de ses membres au niveau national : les procureurs européens délégués. Pour rappel, le Parquet européen est composé au niveau centralisé d’un collège européen qui opère un suivi général des activités du parquet et définit sa politique pénale. Des chambres permanentes composées de trois procureurs européens sont quant à elles chargées de superviser le déroulement des enquêtes et poursuites menées au sein des États membres. Elles sont par ailleurs compétentes pour donner des instructions individuelles aux procureurs européens délégués, relais déconcentré du Parquet européen. Conformément à la loi du 24 décembre 2020, ces procureurs sont compétents sur l’ensemble du territoire national pour rechercher, poursuivre et renvoyer en jugement les auteurs et complices des infractions pénales portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union européenne. Ce même texte décrit le cadre procédural dans lequel s’inscrit l’action des procureurs européens délégués et répartit les compétences entre les magistrats français, les procureurs européens délégués et le procureur européen. La loi prévoit par ailleurs les circonstances dans lesquelles le Parquet européen peut exercer sa compétence pour les infractions prévues par le Code des douanes.
Compétence des juridictions parisiennes. S’agissant des juridictions compétentes pour connaître des affaires concernées, la loi désigne le tribunal judiciaire de Paris et la cour d’appel de Paris pour connaitre des infractions pénales portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union européenne et relevant de la compétence du procureur européen.
Compétence préférentielle des juridictions spécialisées à compétence étendue. La loi n° 2020-1672 aborde la question des compétences concurrentes susceptibles de se présenter entre les différentes juridictions spécialisées. Il est créé une priorité d’exercice de l'action publique au profit des juridictions spécialisées dont le ressort s’étend aux ressorts d’autres tribunaux, que ces derniers disposent ou non d’une compétence spécialisée. Ainsi, en présence de deux juridictions spécialisées, la priorité du nouvel article 43-1 du Code de procédure pénale « s’applique si le ressort de l’une est étendu à celui de l’autre ». Par ailleurs, l’article 7 de la loi précise que la plainte ou la dénonciation exigées par l’article 113-8 du Code de procédure pénale ne sont pas nécessaires lorsque la poursuite est exercée devant une juridiction pénale disposant d’une « compétence territoriale concurrente et spécialisée s'étendant sur le ressort de plusieurs tribunaux judiciaires ou sur l'ensemble du territoire ».
Renforcement des compétences du Parquet national antiterroriste (PNAT) et du Parquet national financier (PNF). Le PNAT est notamment désigné compétent pour exécuter les demandes d’entraide judiciaire émanant de la Cour pénale internationale. Le PNF voit quant à lui son champ d’action élargi en matière de lutte contre les pratiques anticoncurrentielles.
Lutte contre les atteintes à l’environnement. Le texte prévoit la possibilité pour le procureur de la République, tant que l’action publique n’a pas été mise en mouvement, de proposer à une personne mise en cause pour certains délits prévus par le Code de l’environnement, de conclure une convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) imposant une ou plusieurs obligations en tant qu’alternative aux poursuites. La loi du 24 décembre 2020 crée par ailleurs, dans le ressort de chaque cour d’appel, un tribunal judiciaire chargé de l’enquête, la poursuite, l’instruction et le jugement des délits complexes du Code de l’environnement ainsi que des actions en responsabilité civile en matière environnementale et des actions civiles relatives à la réparation du préjudice écologique.
Modifications diverses en matière de procédure pénale. La loi apporte également des modifications aux dispositions du Code de procédure pénale conformément à des décisions du Conseil constitutionnel et de la Cour de cassation. Ces modifications, opérées aux articles 26 et 27 de la loi, concernent notamment les sujets suivants : information du procureur de la République lors du transport des officiers de police judiciaire (OPJ), conditions dans lesquelles les OPJ ou APJ peuvent faire procéder à des examens médicaux ou psychologiques, à des comparaisons d’empreintes ou requérir la communication d’informations issues d’un système de vidéoprotection, allongement de la liste des personnes dont la déposition ne peut être reçue sous la foi du serment en raison des liens qu’elles ont avec l’accusé, rétablissement de l’honneur de personnes condamnées à mort, modification de délais applicables en droit de la presse…
Modification des conditions de recours aux CJIP. L’article 14 de la loi n° 2020-1672 supprime l’exigence de reconnaissance des faits et d’acceptation de la qualification pénale retenue par la personne morale mise en examen. Cette réforme aura sans doute comme effet de favoriser le recours aux CJIP dont cette exigence pouvait auparavant freiner les personnes concernées.
Ratification de l’ordonnance n° 2019-963 du 18 septembre 2019 relative à la lutte contre la fraude portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union européenne au moyen du droit pénal. Par ratification de l’ordonnance du 18 septembre 2019 et modification du Code pénal, l’article 30 de la loi n° 2020-1672 porte à cinq ans la peine encourue en matière d’abus de confiance. Par ailleurs, la répression de la tentative est étendue à tous les abus de confiance. En revanche, les aggravations prévues par l’ordonnance n° 2019-963 concernant les infractions relevant du budget de l’Union européenne sont supprimées par la loi.
La loi renferme enfin des dispositions relatives aux missions de la chambre nationale des commissaires de justice et au conseil supérieur du notariat.
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