Réf. : CEDH, 14 mai 2020, Req. 24720/13 (N° Lexbase : A44963L4)
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N3470BY8
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par Yann Le Foll
le 27 Mai 2020
► L’insuffisante prise en compte des conséquences de l’expulsion d’un campement de roms en raison du bref délai entre l’arrêté préfectoral et sa mise en œuvre et de la situation particulière des requérants appartenant à une communauté défavorisée justifie que la France soit condamnée pour violation du droit au respect de la vie privée et familiale.
Ainsi statue la CEDH dans un arrêt rendu le 14 mai 2020 (CEDH, 14 mai 2020, Req. 24720/13 N° Lexbase : A44963L4).
La Cour distingue la décision d’expulsion elle-même de ses modalités. Sur le premier point, elle considère que les autorités avaient en principe le droit d’expulser les requérants qui occupaient un terrain communal illégalement et qui ne pouvaient prétendre avoir une espérance légitime d’y rester. S’agissant des modalités de l’expulsion, la Cour relève que cette mesure n’a pas été prise en exécution d’une décision de justice, mais selon la procédure de la mise en demeure prévue par l’article 9 de la loi du 5 juillet 2000 (loi n° 2000-614, relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage N° Lexbase : L0716AID). Le choix de cette procédure a entraîné plusieurs conséquences.
En premier lieu, vu le bref délai entre l’adoption de l’arrêté préfectoral, sa notification et l’évacuation elle-même, aucune des mesures préconisées par la circulaire de 2012 n’a été mise en place.
En second lieu, en raison de la procédure de mise en demeure appliquée, le recours prévu par le droit interne est intervenu après la prise de décision par l’administration, alors que dans d’autres cas, le juge judiciaire examine la proportionnalité de la mesure avant de prendre sa décision. Or, aucun des recours que les requérants ont introduits ne leur ont permis ultérieurement de faire valoir leurs arguments devant une juridiction.
Enfin, au titre des garanties procédurales de l’article 8 de la CESDH (N° Lexbase : L4798AQR) (droit au respect de la vie privée et familiale et du domicile), toute personne victime d’une ingérence dans les droits que lui reconnaît cette disposition doit pouvoir faire examiner la proportionnalité de cette mesure par un tribunal indépendant à la lumière des principes pertinents qui en découlent. Tel n’ayant pas été le cas en l’espèce, la Cour conclut que les modalités de l’expulsion des requérants ont entraîné violation de l’article 8 de la Convention.
Enfin, la Cour constate qu’aucun examen juridictionnel des arguments des requérants sous l’angle des articles 3 et 8 de la Convention n’a eu lieu en première instance, ni au fond, ni en référé, contrairement aux exigences de l’article 13 de la Convention (N° Lexbase : L4746AQT) (droit à un recours effectif).
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