Le Quotidien du 24 mars 2020 : Entreprises en difficulté

[Brèves] Suites de la forclusion du créancier qui n’a pas saisi le juge compétent pour trancher une contestation sérieuse

Réf. : Cass. com., 11 mars 2020, n° 18-23.586, FS-P+B+I (N° Lexbase : A12583IG)

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par Vincent Téchené

le 18 Mars 2020

► Le juge-commissaire qui, en application de l’article R. 624-5 du Code de commerce (N° Lexbase : L7228LEG), dans sa rédaction issue du décret du 30 juin 2014 (N° Lexbase : L5913I3E), constate l'existence d'une contestation sérieuse, renvoie les parties à mieux se pourvoir et invite l'une d'elles à saisir le juge compétent pour trancher cette contestation, reste compétent, une fois la contestation tranchée ou la forclusion acquise, pour statuer sur la créance déclarée, en l'admettant ou en la rejetant.

Tel est l’enseignement d’un arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 11 mars 2020 (Cass. com., 11 mars 2020, n° 18-23.586, FS-P+B+I N° Lexbase : A12583IG).

L’affaire. Une société a été mise en redressement judiciaire le 7 mai 2015. Un créancier a déclaré une créance au titre d'une indemnité pour malfaçons dans l'exécution d'un chantier, qui a été contestée par la débitrice. Par une ordonnance du 16 juin 2016, notifiée le 30 juin suivant, le juge-commissaire a constaté l'existence d'une contestation sérieuse, renvoyé les parties à saisir la juridiction compétente dans le délai d'un mois à compter de la notification de sa décision, et sursis à statuer. Une seconde ordonnance, modifiant la première, a invité le créancier à saisir la juridiction compétente dans le délai d'un mois à compter de la signification de cette ordonnance.

C’est dans ces conditions que le créancier a formé un pourvoi en cassation formulant plusieurs reproches à l’égard de l’arrêt d’appel (CA Orléans, 13 septembre 2018, n° 18/00407 N° Lexbase : A5041X4H).

La décision. Le créancier reprochait, en premier lieu, à l’arrêt d’appel d’avoir retenu qu’il n’y avait pas lieu à rectification de la première ordonnance

Sur de point, la Cour de cassation approuve l’arrêt d’appel : elle énonce que si l'article R. 624-5 du Code de commerce impose au juge-commissaire de désigner la partie qui devra saisir le juge compétent pour trancher la contestation qui a été déclarée sérieuse, une ordonnance qui, en désignant toutes les parties, ne respecte pas cette règle, est entachée d'une erreur de droit qui ne peut être réparée en application de l'article 462 du Code de procédure civile et, faute d'avoir fait l'objet d'une voie de recours, est irrévocable.

En second lieu, le créancier reprochait à l’arrêt d’appel de constater la forclusion et l'impossibilité qui en résulte pour elle de solliciter la fixation de sa créance au passif.

Sur ce point, la Cour de cassation, énonçant la solution précitée, censure l’arrêt d’appel. En effet, pour constater l'impossibilité pour le créancier, par suite de la forclusion, de demander la fixation de sa créance, l'arrêt retient que le juge-commissaire ne pouvait, dans son ordonnance du 16 juin 2016, surseoir à statuer et que la juridiction compétente pour trancher la contestation dont la créance était l'objet avait seule compétence pour fixer celle-ci au passif. En statuant ainsi, la cour d'appel a donc violé l’article R. 624-5 du Code de commerce (cf. l’Ouvrage « Entreprises en difficulté » N° Lexbase : E3556E4H).

Précisions. La Cour de cassation a déjà énoncé, dans le cadre du dépassement de l’office juridictionnel du juge-commissaire que « le juge-commissaire a une compétence exclusive pour décider de l’admission ou du rejet des créances déclarées et, après une décision d’incompétence du juge-commissaire pour trancher une contestation, les pouvoirs du juge compétent régulièrement saisi se limitent à l’examen de cette contestation» (Cass com., 19 décembre 2018, n° 17-15.883 et n° 17-26.501, F-P+B N° Lexbase : A6695YRE), cette solution devant d’ailleurs être strictement limitée à l’hypothèse du dépassement d’office juridictionnel et ne peut être étendue au cas de l’incompétence stricto sensu du juge-commissaire (v. les obs. de P.-M Le Corre, Lexbase éd. affaires, 2018, n° 579 N° Lexbase : N7170BXT). Ainsi, c’est le juge-commissaire qui aura le dernier mot pour admettre ou rejeter la créance. Le tribunal saisi pour trancher la discussion sérieuse sur la créance déclarée se contentera de cela. Une fois la discussion tranchée et donc la contestation sur le fond de la créance reconnue bien ou mal fondée, il y aura place à révocation du sursis à statuer. Le juge-commissaire, tenu par la décision du juge du fond, admettra ou rejettera alors la créance.

La Cour a également retenu qu’une cour d'appel, statuant en matière de vérification des créances, qui a prononcé un sursis à statuer et invité les parties à saisir le juge compétent en raison d’un dépassement de son office juridictionnel, et qui, par la suite a rejeté la créance, n'a fait que tirer les conséquences légales du défaut de diligence du créancier qu'elle avait désigné pour saisir le juge compétent dans le délai prévu à l’article R. 624-5 du Code de commerce (Cass. com., 27 septembre 2016, n° 14-18.998, FS-P+B N° Lexbase : A7070R4M ; v. Lexbase, éd. affaires, 2016, n° 487, obs. P.-M Le Corre in Chron. N° Lexbase : N5187BWZ).

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