Le Quotidien du 18 mars 2020 : Responsabilité

[Brèves] Préjudice résultant du dysfonctionnement d’un bien objet d’une chaîne de contrats de vente successifs : réparation limitée au seul dommage prévisible excluant la condamnation du responsable à garantir les vendeurs successifs des condamnations prononcées contre eux à l’égard de leurs cocontractants respectifs

Réf. : Cass. com., 11 mars 2020, n° 18-22.472, F-P+B (N° Lexbase : A75993IB)

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[Brèves] Préjudice résultant du dysfonctionnement d’un bien objet d’une chaîne de contrats de vente successifs : réparation limitée au seul dommage prévisible excluant la condamnation du responsable à garantir les vendeurs successifs des condamnations prononcées contre eux à l’égard de leurs cocontractants respectifs. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/57240087-breves-prejudice-resultant-du-dysfonctionnement-dun-bien-objet-dune-chaine-de-contrats-de-vente-succ
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par Manon Rouanne

le 18 Mars 2020

► Méconnaît le principe, en matière de responsabilité contractuelle, de la limitation de l’indemnisation au seul dommage prévisible, la condamnation, dans le cadre de ventes successives de deux groupes électrogènes défectueux destinés à la refonte complète de la salle des machines d’un navire, de l’un des vendeurs déclaré responsable des désordres affectant le bien objet de la vente, à, en plus des dommages et intérêts dus en réparation du préjudice subi par propre cocontractant, garantir ce dernier, vendeur final, de sa condamnation à l’égard de l’acquéreur final à réparer le préjudice lié à l’immobilisation de son navire.

Sur le fondement de l’article 1150 ancien du Code civil (N° Lexbase : L1251ABX), tel est l’enseignement dispensé par la Chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt en date du 11 mars 2020 (Cass. com., 11 mars 2020, n° 18-22.472, F-P+B N° Lexbase : A75993IB).

En l’espèce, le propriétaire d’un navire a confié à une société la refonte complète de la salle des machines de ce bâtiment, ce qui comprenait la fourniture et l’installation de deux groupes électrogènes. Avant d’être effectivement installés sur le navire en exécution du contrat conclu, ces deux groupes électrogènes ont fait l’objet de plusieurs ventes successives allant de la vente entre le fabricant et un premier acheteur à la vente entre le dernier vendeur et l’acquéreur final, la société en charge de la refonte de la salle des machines, en passant par deux ventes intermédiaires.

A la suite de divers désordres affectant le bon fonctionnement des groupes électrogènes, la société en charge de l’installation du matériel sur le bateau a engagé une action en responsabilité à l’encontre de son propre vendeur en réparation du préjudice résultant de son obligation de procéder à de multiples interventions pour pallier les dysfonctionnements. En outre, alléguant un préjudice lié à l’immobilisation de son navire, le propriétaire de celui-ci a assigné son cocontractant afin de voir sa responsabilité engagée.

Sur le fondement du rapport d’expertise rendu, la cour d’appel (CA Aix-en-Provence, 19 avril 2018, n° 15/07947 N° Lexbase : A3961XLB) a déclaré l’un des vendeurs intermédiaires responsable des dommages consistant dans des avaries ayant entraîné le dysfonctionnement allégué pour avoir manqué à son obligation contractuelle en fournissant du matériel impropre à sa destination et, dès lors, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, a, en premier lieu, condamné celui-ci à réparer le préjudice subi par son cocontractant, la société en charge de l’installation des groupes électrogènes sur le navire. Du fait de l’existence d’une chaîne de contrats ayant pour objet la vente de ce même matériel, les juges du fond, ont, en second lieu, également condamné ce vendeur intermédiaire à garantir son cocontractant des condamnations prononcées contre lui en réparation du préjudice subi par le cocontractant de celui-ci, le propriétaire du navire.

Ne remettant pas en cause les dommages et intérêts dus en réparation du préjudice subi par son propre cocontractant par l’engagement de sa responsabilité contractuelle, le vendeur intermédiaire a contesté, en revanche, en formant un pourvoi en cassation, sa condamnation à garantir son cocontractant des condamnations prononcées contre lui résultant de l’engagement de sa responsabilité à l’égard de son propre cocontractant.

En effet, arguant, sur le fondement de l’article 1150 du Code civil, que le débiteur n'est tenu que des dommages-intérêts qui ont été prévus ou qu'on a pu prévoir lors du contrat, lorsque ce n'est point par son dol que l'obligation n'est point exécutée, le vendeur a soutenu, comme moyen au pourvoi, qu’en affirmant, pour le condamner à garantir son acheteur de la condamnation de celui-ci à indemniser son propre cocontractant, que les dommages-intérêts font partie du préjudice indemnisable et sont réglementés par un certain nombre de dispositions présentes dans le dit chapitre et que c'est par un raccourci surprenant qu’il entend limiter le préjudice contractuel à ces seuls dommages-intérêts en ignorant les principes du droit français qui dictent que tout préjudice est réparable pourvu qu'il soit direct et certain, la cour d’appel a violé le principe, en matière de responsabilité contractuelle, de la limitation de la réparation au seul dommage prévisible consacré par le texte susmentionné.

Affirmant, qu'en matière de responsabilité contractuelle, le dommage n'est indemnisable que s'il était prévisible lors de la conclusion du contrat et a constitué une suite immédiate et directe de l'inexécution de ce contrat, la Cour de cassation casse l’arrêt rendu par la juridiction de second degré en faisant sien l’argumentaire juridique développé par le demandeur au pourvoi. Aussi, sans remettre en cause la condamnation du vendeur intermédiaire à indemniser son cocontractant du préjudice subi par l’engagement de sa responsabilité contractuelle, le juge du droit relève, néanmoins, que la cour d’appel, en condamnant le vendeur intermédiaire à garantir l’acheteur avec qui il a contracté des condamnations prononcées contre lui du fait de l’engagement de sa responsabilité par son propre cocontractant, a violé l’article 1150 ancien du Code civil en vertu duquel seuls les dommages prévisibles lors de la conclusion du contrat sont indemnisables.

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