Réf. : Cass. civ. 1, 26 février 2020, n° 18-25.671, F-D (N° Lexbase : A79263GN)
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N2527BYA
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par Manon Rouanne
le 07 Mai 2020
► N’engage pas sa responsabilité pour faute, le notaire qui, dans le cadre de la rédaction d’un acte authentique de prêt, n’a pas décelé la contrefaçon des paraphes et signatures de plusieurs associés apposés sur le procès-verbal de l’assemblée générale d’une société ayant autorisé celle-ci à se porter caution solidaire et hypothécaire de l’emprunteur, dans la mesure où seule une mesure d’expertise permettait de révéler les signatures contrefaites et qu’aucun élément ne permettait au notaire d’envisager une irrégularité du procès-verbal dépourvu d’anomalie apparente, de sorte que ce dernier n’était pas tenu de demander une certification des signatures et n’a, donc, pas commis de faute.
Telle est l'exclusion de la responsabilité civile du notaire affirmée par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt en date du 26 février 2020 (Cass. civ. 1, 26 février 2020, n° 18-25.671, F-D N° Lexbase : A79263GN ; sur les devoirs d'information et de conseil du notaire rédacteur d'un acte authentique de prêt, voir aussi, Cass. civ. 1, 8 janvier 2020, n° 18-23.948, F-D N° Lexbase : A48023A4).
En l’espèce, par la conclusion, devant un notaire, d’un acte authentique de prêt, un prêteur a prêté à une société une somme d’argent remboursable en une seule mensualité au plus tard un an après la date de conclusion du contrat. Cet acte authentique prévoyait la caution solidaire et hypothécaire de l’emprunteur apportée par une société ayant été autorisée à se porter caution par délibération de l’assemblée générale dont une copie certifiée conforme du procès-verbal avait été annexée à l’acte de prêt.
Le prêt n’ayant pas été remboursé à son terme et un expert judiciaire ayant révélé que les paraphes et signatures apposées sur le procès-verbal de l’assemblée générale ayant autorisé le cautionnement étaient contrefaits, la demande du prêteur tendant à la vente forcée du bien immobilier a été rejetée et le cautionnement annulé. Aussi, ce dernier a engagé, à l’encontre du notaire, une action en responsabilité délictuelle pour faute commise à l’occasion de la rédaction de l’acte authentique de prêt.
La cour d’appel (CA Versailles, 12 octobre 2018, n° 17/02233 N° Lexbase : A2353YGA) a rejeté l’engagement de la responsabilité civile du notaire en l'absence de caractérisation d’une faute commise par ce professionnel. Après avoir affirmé que le notaire est tenu, en tant que rédacteur d’un acte, de procéder, préalablement, à la vérification, d’une part, des faits et conditions nécessaires pour en assurer l’utilité et l’efficacité et, d’autre part, de la sincérité, au moins apparente, des signatures portées sur les documents produits par les parties, les juges du fond ont considéré, qu’en l’occurrence, le notaire n’avait pas manqué à ses obligations. En effet, dans la mesure où la délibération de l’assemblée était, en apparence, valable, seule une mesure d’expertise ayant permis de déceler la contrefaçon des signatures des associés, qu’aucun élément ne permettait au notaire d’envisager une irrégularité du procès-verbal et que celui-ci était dépourvu de toute anomalie apparente, ce dernier n’était, donc, pas tenu de demander une certification des signatures y figurant et n’avait, dès lors, pas commis de faute susceptible d’engager sa responsabilité à l’égard du prêteur.
Contestant la position adoptée par la cour d’appel, le prêteur a, alors, formé un pourvoi en cassation alléguant comme moyen que le notaire rédacteur d’un acte, ayant l’obligation de s’assurer de l’efficacité des actes qu’il rédige impliquant, lorsqu’une partie est représentée par un mandataire, l’obligation de vérifier la sincérité des signatures apposées sur les documents fournis et de prendre toute précaution afin de conférer à l’acte sa pleine efficacité, a commis une faute de nature à engager sa responsabilité délictuelle en s’étant abstenu de vérifier la sincérité des signatures portées sur le procès-verbal autorisant le cautionnement.
Ne suivant pas l’argumentaire développé par le demandeur au pourvoi, la Cour de cassation confirme l’arrêt rendu par la cour d’appel en refusant de caractériser une faute commise par le notaire ayant pour conséquence le rejet de l’engagement de sa responsabilité en retenant, à l’instar des juges du fond, que le procès-verbal ayant autorisé la société à se porter caution, dépourvu de toute anomalie apparente, était, a priori, valable, seule une expertise ayant permis de déceler l’irrégularité des signatures, de sorte que le notaire n’était pas tenu de demander une certification des signatures.
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