Le Quotidien du 18 février 2020 : Contrats et obligations

[Brèves] Validité d’une promesse synallagmatique de vente d’un bien emportant nullité de la donation consentie sur ce même bien en méconnaissance de cet avant-contrat

Réf. : Cass. civ. 3, 30 janvier 2020, n° 18-25.381, FS-P+B+I (N° Lexbase : A84833C8)

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[Brèves] Validité d’une promesse synallagmatique de vente d’un bien emportant nullité de la donation consentie sur ce même bien en méconnaissance de cet avant-contrat. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/56478047-breves-validite-dune-promesse-synallagmatique-de-vente-dun-bien-emportant-nullite-de-la-donation-con
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par Manon Rouanne

le 11 Mars 2020

► Est nulle la donation d’une parcelle de terrain passée en méconnaissance d’une promesse synallagmatique de vente portant sur ce même bien et conclue sept ans plus tôt, promesse qui demeure pleinement valable dans la mesure où elle n’était pas assortie d’une condition lui faisant encourir la caducité et aucun délai n’avait été convenu pour sa réitération par acte authentique à laquelle il était fait obstacle par la clause d’inaliénabilité insérée dans l’acte de donation par lequel le vendeur avait acquis le bien ; obstacle juridique de l’interdiction de vendre qui a disparu du fait du décès des donateurs initiaux.

Telle est la force juridique redonnée par la troisième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt en date du 30 janvier 2020 (Cass. civ. 3, 30 janvier 2020, n° 18-25.381, FS-P+B+I N° Lexbase : A84833C8) à la promesse synallagmatique de vente en sanctionnant par la nullité une donation passée en ignorance de l’avant-contrat et, dès lors, en fraude des droits de l’acquéreur.

En l’espèce, le propriétaire d’une parcelle de terrain, acquise de ses parents au moyen de la conclusion d’une donation comportant une clause d’inaliénabilité du bien, a consenti, à des donataires, une donation de ce bien donné à bail. Se prévalant de la conclusion, sept ans auparavant, avec le propriétaire, d’une promesse synallagmatique de vente portant sur ce même bien, le preneur du bail a, alors, engagé, à l’encontre des donataires, une action en annulation de la donation conclue en fraude de ses droits.

Après avoir relevé, d’une part, qu’une promesse synallagmatique de vente avait bien été conclue entre le vendeur et l’acquéreur qui n’étaient pas restés au stade des pourparlers puisqu’ils avaient bien convenu d’une vente sans l’assortir de condition suspensive mais que la réitération par acte authentique de cet avant-contrat n’avait pas pu aboutir du fait du jeu de la clause d’inaliénabilité du bien insérée dans l’acte par lequel le promettant a acquis la propriété de ce bien et, d’autre part, qu’il ressort de la donation, conclue sept ans après la promesse, que l’interdiction de vendre était devenue sans objet par suite du décès des donateurs initiaux, la cour d’appel a déclaré nulle la donation conclue en méconnaissance de la promesse de vente à laquelle les parties demeuraient engagées et qui pouvait être régularisée par la conclusion de l’acte authentique dès la disparition de l’obstacle juridique constitué par la clause d’inaliénabilité.

Pour faire échec à la vente, les donataires et le donateur ont formé un pourvoi en cassation en alléguant, dans un premier temps, le jeu de la clause d’inaliénabilité qui ne pouvait être levée, ce qui n’était pas le cas en l’occurrence, que si le donataire avait été judiciairement autorisé à disposer du bien parce que l’intérêt qui avait justifié la clause avait disparu ou qu’un intérêt plus important l’exigeait ; jeu de la clause ayant, ainsi, pour conséquence de priver d’effet la promesse de vente. Dans un second temps, les demandeurs au pourvoi ont contesté la disparition de l’obstacle juridique à la réitération de la vente par acte authentique du fait de l’absence d’accord des parties sur ce point.

Rejoignant la position adoptée par la cour d’appel, la Cour de cassation rejette le pourvoi. La Haute juridiction affirme, à l’instar des juges du fond, que dans la mesure où, d’une part, la promesse de vente n’était pas assortie d’une ou plusieurs conditions, aucune des parties n’a entendu la dénoncer et aucun délai n’avait été convenu pour sa réitération par acte authentique et, d’autre part, au jour de la conclusion de la donation, l’obstacle juridique à la régularisation de l’avant-contrat par la signature de l’acte authentique que constituait l’interdiction de vendre le bien avait disparu du fait du décès des donateurs initiaux, les parties demeuraient engagées par la promesse au jour de la donation, de sorte que la donation consentie en méconnaissance de cette promesse et, donc, en fraude des droits de l’acquéreur, est entachée de nullité.

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