Lexbase Fiscal n°456 du 6 octobre 2011 : Fiscalité financière

[Jurisprudence] Validation de l'arrêté portant création du fichier "EVAFISC" par le Conseil d'Etat : fin du combat pour les banques

Réf. : CE 10° et 9° s-s-r., 24 août 2011, n° 336382, mentionné au recueil Lebon (N° Lexbase : A3517HXK)

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N7966BST

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par Simon Ginesty, Avocat au barreau des Hauts-de-Seine

le 27 Février 2013

Amis fraudeurs : la fête est finie ! Telle est en substance le message adressé par tous les Gouvernements, qui ont fait de la lutte contre l'évasion fiscale internationale une de leur préoccupation majeure. Nombreux étaient ceux qui, face à leur "honorable obligation" (1) de contribuable, usaient des circuits financiers internationaux -de préférence opaque- afin de placer leurs capitaux sous des cieux plus cléments.

Pour lutter plus efficacement contre cette fraude, le ministère des Finances et du Budget s'est doté d'une arme nouvelle : le fichier "EVAFISC". Officialisé le 5 décembre 2009 par la publication au Journal officiel d'un arrêté du ministère (2), le traitement a pour finalité, selon l'article 2 de l'arrêté, de recenser des informations laissant présumer de la détention de comptes bancaires hors de France par des personnes physiques ou morales et, sur cette base :
- de mener des actions de prévention, de recherche, de constatation ou de poursuite d'infractions pénales ;
- d'analyser et de vérifier la situation des personnes concernées en vue de procéder le cas échéant à des régularisations de situations fiscales ;
- de programmer et de mener des opérations de recherche, de constatation et de poursuite de manquements fiscaux ;
- d'inciter les usagers à déclarer spontanément la détention de comptes bancaires hors de France. L'idée peut paraître dérisoire, voire simpliste ; pour autant, elle semble effrayer les principaux intéressés ainsi que leurs conseils, à commencer par les établissements financiers. Première à réagir (et pour cause), la banque suisse auteure du pouvrvoi, qui a contesté la création de ce fichier, soutenant deux moyens jusqu'alors méconnus en droit fiscal : l'un relatif aux données à caractère personnel (loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés N° Lexbase : L8794AGS), et l'autre relatif au transfert international des données ainsi collectées (loi n° 68-678 du 26 juillet 1968, relative à la communication de documents et renseignements d'ordre économique, commercial, industriel, financier ou technique à des personnes physiques ou morales étrangères N° Lexbase : L0265ATY).

Plus encore, la banque a saisi la juridiction suprême en référé, estimant que la création d'un tel fichier lui causait un préjudice imminent. Las, le Conseil d'Etat a rejeté cette requête dans un arrêt en date du 19 avril 2010 (3), la requérante n'ayant démontré ni urgence, ni doutes sérieux quant à la légalité de l'arrêté litigieux.

Réglant cette affaire sur le fond, la décision du Haut Conseil en date du 24 août 2011 livre un verdict implacable : le fichier "EVAFISC" est validé, tant sur le plan de la légalité externe qu'interne. La création de cette base de données n'est donc pas contraire aux dispositions légales en vigueur, permettant ainsi à l'administration fiscale de continuer son combat contre l'évasion fiscale, dont l'engagement s'intensifie. Mais cette décision marque également un tournant dans les problématiques que les Gouvernements pourraient être amenés à rencontrer fréquemment à l'avenir, à savoir la protection des données individuelles (4).

I - "EVAFISC" : la nouvelle arme du Fisc contre l'évasion fiscale

La création du fichier "EVAFISC" par les autorités fiscales françaises s'inscrit dans la droite ligne de la lutte contre l'évasion fiscale internationale. Plus précisément, on observera une nette accélération de cette lutte au cours de ces dernières années, dont "EVAFISC" constitue seulement l'une des étapes.

A - Un contexte répressif

Si la lutte contre l'évasion fiscale n'est pas nouvelle, l'avènement de la crise de 2008 constitue, sans nul doute, le point de départ d'une forte accélération dans le domaine. Deux considérations, notamment, sont à l'origine de ce mouvement, à la fois politique et économique.

Politique d'une part, puisque la lutte contre la financiarisation excessive de notre société, considérée, à tort ou à raison, comme l'une des causes principales de la crise, est apparue de plus en plus insupportable aux yeux d'une majorité de citoyens. Cela fut l'occasion pour beaucoup de (re)découvrir l'existence de circuits financiers opaques, de paradis fiscaux mais aussi d'apprendre l'existence de certaines "injustices fiscales", comme par exemple celle du taux effectif global d'imposition de quelques privilégiés (particuliers ou entreprises). Par voie de conséquence, cela a naturellement conduit les Gouvernements d'une majorité de pays à légiférer sur ce sujet (5).

Economique d'autre part, puisque dans un contexte budgétaire tendu, la recherche de recettes fiscales s'est trouvée être au coeur des aspirations étatiques. Il est vrai que le coût de l'évasion fiscale, régulièrement dénoncé (6), incite les autorités à s'y intéresser de manière plus attentive, y voyant là une source de revenu plus aisément appréhendable.

L'actualité n'est pas étrangère non plus à ce mouvement. Que l'on songe à l'affaire Bettencourt ou encore à l'existence de succursales de banques françaises dans de multiples paradis fiscaux, ces faits participent également à l'idée qu'une lutte plus globale doit être menée contre l'incivisme fiscal (7). Toutes ces affaires, qui ont tant défrayé la chronique ces derniers mois, sont parfois même à l'origine d'une réponse administrative.

Tel est sans doute le cas avec la création du fichier "EVAFISC", qui doit beaucoup à un des salariés de la banque requérante. C'est en effet ce dernier qui, à l'automne 2009, avait dérobé une base de données à son ancien employeur et l'avait déposée, au terme d'une procédure quelque peu rocambolesque, sur le bureau du ministre du Budget de l'époque : la "liste des 3000" était née (8). Encore fallait-il créer un cadre légal pour l'exploitation de cette liste, bien qu'il semble que l'administration n'ait pas attendu (9).

Le Gouvernement, plus précisément par l'intermédiaire du ministère du Budget, a donc décidé de créer une base ayant pour objet de recenser les informations laissant présumer de la détention de comptes bancaires hors de France par des personnes physiques ou morales.

B - Une arme nouvelle contre l'évasion fiscale

Ainsi qu'il a été rappelé précédemment, le fichier "EVAFISC" doit permettre de recenser et de traiter les informations laissant présumer de la détention de comptes bancaires hors de France par des personnes physiques ou morales, et, sur cette base, de mener des actions de prévention, de recherche, de constatation ou de poursuite de manquements fiscaux et d'infractions pénales.

La constitution de ce fichier fait donc écho à une autre mesure, plus ancienne celle-ci, relative à la déclaration de comptes bancaires à l'étranger. En effet, il convient de rappeler ici que depuis 1990, "les personnes physiques, les associations, les sociétés n'ayant pas la forme commerciale, domiciliées ou établies en France, sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des comptes ouverts, utilisés ou clos à l'étranger" (CGI, art. 1649 A, alinéa 2 N° Lexbase : L1746HMM). Cette déclaration doit comporter des indications précises quant aux caractéristiques du compte (numéro, nature, usage et type...), du titulaire (éléments d'identification, adresse du ou des bénéficiaires d'une procuration...) et de l'établissement gestionnaire.

En cas de non respect de l'obligation de déclaration, la sanction fiscale est lourde : outre une amende de 1 500 euros par compte ou avance non déclaré (10), le troisième alinéa de l'article 1649 A du CGI prévoit que les sommes, titres ou valeurs transférés à l'étranger ou en provenance de l'étranger par l'intermédiaire de comptes non déclarés constituent, sauf preuve contraire, des revenus imposables et sont donc soumis, selon le cas, à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés (ainsi qu'aux contributions sociales sur les revenus du patrimoine, le cas échéant) au nom de la personne physique, de l'association ou de la société à forme non commerciale n'ayant pas effectué la déclaration.

L'administration souhaitait donc, par la création d'"EVAFISC", recenser et regrouper toutes les informations dont elle dispose sur les contribuables qui n'auraient pas souscrit une telle déclaration.

Ces informations pourront être récoltées à l'occasion de la mise en oeuvre de l'assistance administrative internationale ou grâce aux procédures fiscales de contrôle (vérification de comptabilité, examen de situation fiscale personnelle, droit d'enquête ou droit de visite et de saisie, ou bien encore droit de communication auprès des établissements bancaires directement).

Ce fichier vise à regrouper les données à caractère personnel tant pour les personnes physiques que morales, à savoir :
- l'identité de la personne, c'est-à-dire ses nom et prénoms, la date et le lieu de sa naissance, son numéro fiscal (SPI) pour une personne physique et raison sociale, sa catégorie juridique, son SIREN/SIRET, son activité pour une personne morale ;
- son adresse ;
- son établissement de crédit ;
- son numéro du ou des comptes ;
- la date d'ouverture de ceux-ci ;
- le montant des soldes et virements.

Selon l'arrêté, toutes les informations ainsi obtenues ne "constituent que des présomptions" avant vérification par les services fiscaux. Ce garde-fou est heureux, les praticiens étant malheureusement coutumiers de demandes de renseignements et autres ESFP au cours desquels l'administration fiscale fait simplement état d'"informations", selon lesquelles un contribuable aurait perçu des revenus étrangers, sans plus de précisions.

Les données ainsi recueillies seront conservées pendant un délai de dix ans, sauf prolongation en raison d'un recours contentieux, tandis que les informations inexactes seront effacées à l'issue du processus de vérification par le Fisc.

Ainsi donc, après la mise en place d'une liste des Etats et territoires non coopératifs (avec toutes les conséquences fiscales pénalisantes attachées) (CGI, art. 238-0 A N° Lexbase : L3333IGK), de la cellule de "dégrisement", de la brigade d'enquête fiscale et de la multiplication des conventions fiscales internationales établie sur le modèle de la convention OCDE, laquelle prévoit la totale transparence des échanges de renseignements (11), s'ajoute désormais le fichier "EVAFISC". Nul doute que cette tendance devrait continuer dans les prochaines années et même s'accélérer encore, notamment aux niveaux européen et international (12). Est-ce pour autant la victoire de l'administration toute puissante face au contribuable ? Pas nécessairement, ces derniers ayant trouvé un nouvel axe de défense.

II - "EVAFISC" ou la protection des données personnelles en question

La création de ce nouvel outil fiscal s'apparente donc à une marche supplémentaire dans la "lutte" ainsi menée. Toutefois, face à ces nouvelles dispositions, et sans réel moyen de se soustraire à ces nouvelles obligations, les contribuables passent à la contre-offensive sur un terrain inédit en droit fiscal : la protection des libertés individuelles.

A - "EVAFISC" et le respect des libertés individuelles

Si la création d'un tel fichier participe à la mise en oeuvre d'un dispositif plus global de lutte contre l'évasion fiscale et s'inscrit ainsi dans un objectif louable, il n'en demeure pas moins qu'il se doit de respecter les règles essentielles propres à assurer la protection de tous les citoyens. Il convient ici de rappeler que, depuis la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, toute constitution d'une base de données est soumise à l'obligation d'en faire la déclaration auprès de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL).

Cette Commission a donc naturellement été amenée à se prononcer sur la légalité d'une telle base (13). S'agissant de la question de la conformité de ce traitement avec la loi du 6 janvier 1978, la CNIL a délivré un satisfecit général à cette mesure, estimant que "les finalités poursuivies par l'administration fiscale en créant ce traitement découlent des missions qui lui sont dévolues et sont par conséquent légitimes" (14).

Pourtant, sur cette problématique du respect des libertés individuelles, cet avis omet une disposition importante du dispositif telle que prévue à l'article 6 de l'arrêté du 25 novembre 2009 : "le droit d'information prévu au I de l'article 32 de la loi du 6 janvier 1978 modifiée et le droit d'opposition prévu à l'article 38 de la même loi ne s'appliquent pas au présent traitement".

Selon cet article, dès lors qu'une collecte d'informations personnelles est effectuée, le principe est d'informer la personne concernée. Mais, ce principe souffre une exception, lorsque les traitements de données ont pour objet la prévention, la recherche, la constatation ou la poursuite d'infractions pénales. Se posait donc la question de savoir si la création de ce fichier avait bien un tel objet.

Le Conseil d'Etat, dans sa décision ici commentée, répond positivement. En effet, il relève tout d'abord que l'article 2 de l'arrêté attaqué dispose que les autres finalités de ce traitement, également mentionnées à l'article 2 de l'arrêté attaqué, sont accessoires par rapport à sa finalité principale, "qui nécessite une dispense de l'obligation d'information ayant pour principale finalité la prévention, la recherche, la constatation ou la poursuite d'infractions pénales en matière fiscale". Partant, "l'arrêté attaqué pouvait légalement écarter l'application de l'obligation d'information pour l'ensemble du traitement qu'il crée".

S'il faisait peu de doute quant à la décision énoncée par le Conseil d'Etat sur cette question, celle-ci ne nous apparaît pas pour autant pleinement satisfaisante. En effet, nul ne saurait contester que la lutte contre l'évasion fiscale ne constitue pas un objectif légitime. Toutefois, la construction intellectuelle selon laquelle la poursuite de manquements fiscaux serait l'accessoire de la poursuite d'infractions pénales en matière fiscale équivaut, selon nous, à dénier la présomption de bonne foi qui devrait prévaloir pour tout contribuable. Tous les contribuables faisant l'objet d'un contrôle, voire d'un redressement, ne sont pas des délinquants en puissance. Il conviendrait plutôt, toujours selon nous, de différencier chaque infraction, afin de déterminer si le contribuable a bien commis une infraction pénale et non simplement fiscale, avant de lui dénier tous ses droits relatifs à ses données personnelles.

B - Echange d'informations entre administrations fiscales

Le véritable débat de la création de ce fichier résidait autour de la question de la légalité de l'article 5 de l'arrêté de création du fichier "EVAFISC". Ce dernier prévoit, outre la mise en place du fichier lui-même, la possibilité, pour les autorités fiscales françaises, de transmettre les informations ainsi obtenues aux autorités étrangères. Or, une telle communication des informations était susceptible de contrevenir aux dispositions régissant la protection des données personnelles, puisque ce type de garde-fou n'est pas envisagé dans les différents traités internationaux signés par la France.

C'est pourquoi la CNIL a rappelé les conditions dans lesquelles un tel transfert devait s'effectuer (15) : "la Commission relève que, si le principe de ces transferts est prévu par différents traités bilatéraux conclus et ratifiés par la France avec les pays concernés, aucune disposition spécifique relative à la protection des données à caractère personnel n'est prévue dans ces conventions". Il y a lieu, dès lors, de s'assurer que les transferts de données s'effectueront conformément aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 68 de la loi du 6 janvier 1978 modifiée, qui dispose que "le caractère suffisant du niveau de protection assuré par un Etat s'apprécie en fonction notamment des dispositions en vigueur dans cet Etat, des mesures de sécurité qui y sont appliquées, des caractéristiques propres du traitement, telles que ses fins et sa durée, ainsi que de la nature, de l'origine et de la destination des données traitées".

Le Conseil d'Etat, dans sa décision commentée, confirme cette approche, estimant que cet article 5 "n'a pas pour effet ni ne peut légalement avoir pour objet de conférer à ces destinataires un droit d'accès au traitement en cause, ni de dispenser le responsable du traitement de vérifier, au moment où il envisage de communiquer ces données, que les conditions fixées notamment par les articles 68 et 69 de la loi du 6 janvier 1978 sont respectées". L'administration fiscale sera donc tenue de vérifier, dans l'hypothèse où elle souhaiterait transmettre de telles données, que l'Etat étranger remplisse toutes les conditions propres à assurer une protection suffisante du contribuable.

Qu'advient-il, dès lors, des échanges d'informations actuels ? Pour mémoire, l'échange d'information -auquel est souvent associée la notion d'assistance administrative (16)- peut trouver application soit dans le cadre des conventions fiscales internationales, soit dans le cadre européen (17). Selon le Conseil d'Etat, l'introduction de ce nouvel outil d'échange d'informations ne modifie pas, en lui-même, le droit de l'assistance administrative internationale, puisque "le transfert ponctuel de données issues du traitement en cause à des Etats tiers devra en tout état de cause respecter ces stipulations et dispositions, lesquelles garantissent notamment aux personnes concernées que la communication de renseignements par l'administration fiscale française est subordonnée à un engagement de l'Etat étranger de respecter, dans l'utilisation de ces renseignements, des règles de secret similaires à celles prévues par la législation française".

Cette précision n'est pas neutre : la mise en place du fichier "EVAFISC" ne viendra donc pas, à défaut de l'augmenter, réduire les droits que les contribuables tiennent des modes actuels de communication, notamment au plan européen.

La question ainsi posée de la place de la liberté individuelle dans les échanges fiscaux internationaux devrait donc apparaître plus fréquemment à l'avenir. Certes, le fichier "EVAFISC" est déclaré conforme par le Haut Conseil, mais nul doute que cette question reviendra rapidement sur la table, d'où peut-être ce voeu (pieux ?) de la CNIL "à pouvoir être associée à la préparation et à la définition de la position française dans les négociations internationales relatives aux échanges de données en matière fiscale [...] et à être consultée sur les éventuels projets de loi de ratification des traités conclus à la suite desdites négociations".


(1) Article 101 de la Constitution du 24 juin 1793 : "Nul citoyen n'est dispensé de l'honorable obligation de contribuer aux charges publiques".
(2) Arrêté du 25 novembre 2009, portant création par la direction générale des finances publiques d'un fichier de comptes bancaires détenus hors de France par des personnes physiques ou morales dénommé "EVAFISC", NOR : BCFL0928184A (N° Lexbase : L0274IRL).
(3) CE référé, 19 avril 2010, n° 337458, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A1219EXG).
(4) Comment ne pas faire ici le parallèle avec une autre guerre, celle menée contre le terrorisme. En effet, face à un objectif jugé légitime, quelle part de sacrifice chaque contribuable est-il prêt à faire sur sa liberté individuelle ?
(5) On pourrait notamment citer ici les Etats-Unis qui, depuis l'élection de Barack Obama en 2009, démontrent une activité soutenue dans ce domaine.
(6) Selon un rapport publié en 2007 par le Conseil des prélèvements obligatoires, le manque à gagner de la fraude fiscale et sociale s'évalue entre 29 et 40 milliards d'euros. La Commission européenne évalue la fraude fiscale entre 2 et 2,5 % du produit intérieur brut (soit 40 à 50 milliards d'euros sur la base d'un PIB à 2 000 milliards d'euros en 2009). Le Syndicat national unifié des impôts (SNUI) l'évalue pour sa part entre 42 et 51 milliards d'euros (communiqué de presse du lundi 4 mai 2009).
(7) Sur ce sujet, lire notamment Michel Bouvier, Nouveau civisme fiscal et légitimité du recouvrement de l'impôt, Revue française de finances publiques, 1er novembre 2010, n° 112, p. 25.
(8) Parmi les 120 000 personnes recensées sur cette liste, seuls 6 000 résidents fiscaux français ont été identifiés (les comptes clos, au montant anecdotique ou appartenant à des frontaliers ayant été éliminés) ; 3 000 dossiers s'avérant "intéressants" ont été confiés à la direction nationale d'enquêtes fiscales (DNEF), qui "feront toutes l'objet d'un contrôle fiscal approfondi mené par la direction nationale de vérification des situations personnelles (DNVSF), en trois vagues annuelles de mille contrôles, en commençant par les dossiers qui semblent les plus importants du point de vue des sommes en jeu et de la possibilité de fraude" (rapport d'information de Monsieur Gilles Carrez en date du 6 juillet 2011).
(9) Il semblerait en effet que l'administration fiscale n'ait pas attendu l'entrée en vigueur du fichier "EVAFISC" pour commencer à exploiter ce listing, comme l'a indiqué le rapport d'enquête n° 2010-M-062-01 établi par l'Inspection générale des finances (IGF), à la demande du ministre du Budget et rendu public le 11 juillet 2010 : "la DNEF a transmis le 28 mai 2009 à l'administration centrale une liste de contribuables disposant d'un compte en Suisse, dite liste des 3000. Ce qui a été communiqué au ministre, a donné lieu à des actions de l'administration fiscale" (page 7 du rapport). Voir également, CA Paris, 8ème ch., 8 février 2011, n° 10/14508 (N° Lexbase : A5043G9N) et lire (N° Lexbase : N7689BR9).
(10) CGI, art. 1736, IV (N° Lexbase : L9526IQU). Ce montant est porté à 10 000 euros par compte non déclaré, lorsque l'obligation déclarative concerne un Etat ou un territoire qui n'a pas conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscale permettant l'accès aux renseignements bancaires.
(11) Depuis que la France a placé la lutte contre les paradis fiscaux au coeur de l'agenda du G 20 de Washington, il y a trois ans, dix fois plus d'accords d'échanges d'informations fiscales ont été signés que durant les dix années précédentes (rapport d'information de Monsieur Gilles Carrez en date du 6 juillet 2011, précité).
(12) En ce sens, l'adoption, le 15 février 2011, de la Directive 2011/16/UE du Conseil du 15 février 2011, relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal (N° Lexbase : L5101IPM), après celle, le 16 mars 2010, de la Directive 2010/24/CE du Conseil du 16 mars 2010, concernant l'assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts, droits et autres mesures (N° Lexbase : L8286IGY), témoigne d'une volonté des Etats membres de progresser dans la lutte contre la fraude fiscale. Voir également, pour une étude comparée internationale, le compte rendu de la table ronde organisée le 15 juin 2010 par l'Ecole de droit de la Sorbonne (La nouvelle coopération fiscale internationale, Droit fiscal, n° 42, 21 octobre 2010, 531).
(13) Délibération n° 2009-588 du 12 novembre 2009, portant avis sur un projet d'arrêté du ministère du Budget, des Comptes publics, de la Fonction publique et de la Réforme de l'Etat portant création par la direction générale des finances publiques d'un fichier de comptes bancaires détenus hors de France par des personnes physiques ou morales (avis n° 1391302).
(14) On relèvera simplement sur cette question que la CNIL "observe toutefois qu'aucune purge automatique n'est prévue à l'issue du délai de conservation de dix ans et demande qu'un tel dispositif soit mis en place par la DGFiP. De même, la commission considère que des vérifications régulières sur la base du nom, du lieu et de la date de naissance, ainsi que du numéro fiscal (SI), devraient être opérées systématiquement pour éviter notamment des erreurs d'homonymie".
(15) Avis n° 2009-588 du 12 novembre 2009, précité.
(16) L'assistance administrative peut être définie comme "l'ensemble des opérations traduisant une coopération entre les administrations fiscales de deux ou plusieurs Etats en vue de permettre une application correcte des dispositions régissant l'assiette, le contrôle et le recouvrement des impôts de chacun des Etats intéressés. En d'autres termes, les Etats qui prêtent assistance acceptent de mettre en oeuvre les divers moyens juridiques et pratiques que leur confère leur législation nationale pour aider une administration étrangère à remplir ses attributions fiscales sans se heurter aux limites de souveraineté que constituent les frontières nationales" (Bulletin officiel de la Direction générale des impôts du 17 décembre 1981, n° 13 K 81).
(17) Directive 2011/16/UE du 15 février 2011 précitée.

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