Le Quotidien du 3 décembre 2019 : Avocats/Honoraires

[Brèves] Extinction de la convention d’honoraires en cas de succession d’avocat : encore faut-il que le client ait été bien informé...

Réf. : CA Amiens, 5 novembre 2019, n° 19/02465 (N° Lexbase : A9672ZTE)

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par Marie Le Guerroué

le 21 Novembre 2019

► L’extinction de la convention d’honoraires prévue en cas de succession d’avocat n’est pas applicable si le client n'a pas été tenu informé du départ de l’avocat de la structure, ni des conséquences financières pour lui s'il continuait à confier sa défense à cette dernière.

 

Tel est l’enseignement de l’arrêt rendu par la cour d’appel d’Amiens dans un arrêt du 5 novembre 2019 (CA Amiens, 5 novembre 2019, n° 19/02465 N° Lexbase : A9672ZTE).

Faits. Le demandeur au recours avait été assisté par un avocat membre d’une SELARL. dans le cadre d'une instance l'opposant à son employeur devant le conseil de prud'hommes. avocat Le 19 janvier 2017, une convention d'honoraires avait été signée entre le client et la SELARL. Celle-ci soutient que la convention d'honoraires ne s'applique plus en ce que le client a décidé de continuer de confier la défense de ses intérêts à un autre avocat après le départ de celle-ci de la SELARL.
Textes. La cour d’appel énonce que conformément à l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971, "sauf en cas d'urgence ou de force majeure ou lorsqu'il intervient au titre de l'aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi, n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'avocat conclut par écrit avec son client une convention d'honoraires, qui précise, notamment, le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés" et plus généralement, l'article 1103 du Code civil (N° Lexbase : L0822KZH) rappelle que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Convention d’honoraires. La SELARL invoque les termes de l'article VII de la convention d'honoraires intitulé "extinction de la convention", selon lesquels "les effets de la convention s'éteignent par l'achèvement de la mission de l'avocat et le règlement des sommes dues par le client […]. Dans l'hypothèse où le client souhaiterait dessaisir le cabinet et confier sa défense à un autre conseil, les diligences déjà effectuées seront rémunérées par référence au taux usuel de l'avocat soit 190 euros HT pour un associé et 140 euros HT pour un collaborateur avocat ou juriste, et non sur la base des honoraires de diligences figurant à l'article II [...] ".
Information (non). La cour note qu’il ressort des éléments du dossier que le client a envoyé un courriel à l’avocat dans lequel il demande le transfert de son dossier à la SELARL au profit de cette dernière. Un nouvel avocat membre de la SELARL a informé par mail, le client qu'il avait repris le suivi de son dossier et lui a demandé de bien vouloir correspondre exclusivement sur l'adresse mail mentionnée dans le corps du mail. Le mail adressé par l’avocat mentionne uniquement un changement d'avocat gestionnaire du dossier au sein de la SELARL et n'informe aucunement le client du départ du premier avocat de la structure. Ce courriel ne précise pas davantage les incidences financières qui résulteraient pour le client du choix qui serait le sien de continuer à recourir aux services de l’avocat. Ce dernier n'étant de surcroît pas un professionnel du droit, ne peut dans ces conditions être regardé comme ayant été dûment informé par la SELARL tant du départ de l’avocat de cette structure que des conséquences financières susceptibles de résulter pour lui du maintien des relations personnelles qui étaient les siennes avec l’avocat, jusqu'à présent seul et unique interlocuteur de la SELARL auprès de lui. Elle souligne aussi que le courriel ne pouvait pas laisser penser au client que l’avocat avait définitivement quitté la SELARL, ce message, par ailleurs dépourvu de tout caractère solennel au regard de sa forme (simple courriel), n'évoquant aucun "dessaisissement" mais un unique transfert de dossier, terme du reste utilisé par l’avocat dans une autre lettre.

Décision. Le client doit dès lors être regardé comme ayant été placé en situation de continuer à considérer l’avocat comme représentant la SELARL. Par conséquent, la SELARL, qui n'a pas tenu informé le client du départ de l’avocat ni des conséquences financières pour lui s'il continuait à confier sa défense à cette dernière, ne peut donc pas aujourd'hui se prévaloir de l'application de l'article VII de la convention d'honoraires (cf. l’Ouvrage «La profession d’avocat» N° Lexbase : E7377ETE). .
 

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