Réf. : Cass. com., 15 mai 2019, n° 18-10.491, FS-P+B (N° Lexbase : A8419ZBG)
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par Jérôme Lasserre Capdeville
le 05 Juin 2019
► La communication d’informations figurant au verso de chèques peut être indispensable à l’exercice du droit à la preuve des tireurs de ces derniers pour rechercher l’éventuelle responsabilité de la banque lors de l’encaissement des chèques en question, et proportionnée aux intérêts antinomiques en présence ;
► les juges du fond ne sauraient alors retenir, d’une façon générale, qu’en produisant les pièces demandées, la banque porterait atteinte au secret bancaire.
Tel est l’enseignement d’un arrêt de la Cour de cassation du 15 mai 2019 (Cass. com., 15 mai 2019, n° 18-10.491, FS-P+B N° Lexbase : A8419ZBG ; lire les obs. de A. Maymont N° Lexbase : N9194BXS).
Le couple X avait émis quatre chèques à l’ordre de la société Y pour un montant total de 14 194 euros. Ayant fait valoir que la banque leur avait refusé la communication de l’endossement des chèques ainsi que les informations concernant le bénéficiaire effectif du compte crédit, les époux X avait saisi le juge des référés, sur le fondement de l’article 145 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1497H49), afin qu’il ordonne à la banque de produire les versos des chèques litigieux. Celle-ci leur avait cependant opposé le secret bancaire.
La cour d’appel de Bordeaux (CA Bordeaux, 7 septembre 2017, n° 16/03721 N° Lexbase : A1561WRA) avait, par une décision du 7 septembre 2017, donné raison à l’établissement de crédit, au motif qu’en produisant les pièces demandées, la banque divulguerait les informations figurant au verso des chèques et porterait ainsi atteinte au secret bancaire dont sont titulaires les bénéficiaires des chèques en question.
Cette solution était conforme à la jurisprudence traditionnellement admise en la matière (v. par ex., Cass. com., 13 juin 1995, n° 93-16.317, publié N° Lexbase : A1214ABL ; Cass. com., 8 juillet 2003, n° 00-11.993, FS-P+B+I N° Lexbase : A0799C9H ; Cass. com., 21 septembre 2010, n° 09-68.994, F-D N° Lexbase : A2410GAI).
Pourtant la Cour de cassation ne l’entend pas ainsi, puisqu’elle casse la décision précitée. Selon elle, les juges du fond auraient dû rechercher si la communication au couple des informations figurant au verso des chèques qu’ils avaient émis n’était pas indispensable à l’exercice de leur droit à la preuve, pour rechercher l’éventuelle responsabilité de la banque lors de l’encaissement des chèques en question, et proportionnée aux intérêts antinomiques en présence, incluant la protection du secret dû aux bénéficiaires de ces chèques.
Cet arrêt témoigne alors du fait que «le droit à la preuve» des clients de banque est désormais de nature à prendre le pas sur le principe du secret bancaire. C’était déjà le cas lorsqu’une action en responsabilité était directement exercée à l’encontre de l’établissement de crédit tiré (Cass. com., 29 novembre 2017, n° 16-22.060, F-P+B+I N° Lexbase : A8559W3E ; Cass. com., 24 mai 2018, n° 17-27.969, F-D N° Lexbase : A5366XPG) ; l’arrêt étudié démontre qu’il doit en aller de même lorsqu’est simplement demandée en justice la production d’une photocopie d’un verso de chèque du moment, bien entendu, que la communication dérogatoire au secret bancaire est «indispensable à l’exercice» de ce droit à la preuve (cf. l’Ouvrage «Droit bancaire» N° Lexbase : E9824AIP).
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