Le Quotidien du 16 avril 2019 : Entreprises en difficulté

[Brèves] Procédure de revendication : absence d’atteinte disproportionnée au droit de propriété

Réf. : Cass. com., 3 avril 2019, n° 18-11.247, FS-P+B+R (N° Lexbase : A3144Y8X)

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N8496BXX

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[Brèves] Procédure de revendication : absence d’atteinte disproportionnée au droit de propriété. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/50849447-0
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par Vincent Téchené

le 19 Juin 2019

► La sanction de l’absence de revendication par le propriétaire d'un bien dans le délai prévu par l'article L. 624-9 du Code de commerce (N° Lexbase : L3492ICC) ne consiste pas à transférer ce bien non revendiqué dans le patrimoine du débiteur mais à rendre le droit de propriété sur ce bien inopposable à la procédure collective, ce qui a pour effet d’affecter le bien au gage commun des créanciers, permettant ainsi, en tant que de besoin, sa réalisation au profit de leur collectivité ou son utilisation en vue du redressement de l’entreprise, afin d’assurer la poursuite de l’activité, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif ;

► S’il en résulte une restriction aux conditions d’exercice du droit de propriété de celui qui s’est abstenu de revendiquer son bien, cette atteinte est prévue par la loi et se justifie par un motif d’intérêt général, dès lors que l'encadrement de la revendication a pour but de déterminer rapidement et avec certitude les actifs susceptibles d’être appréhendés par la procédure collective afin qu’il soit statué, dans un délai raisonnable, sur l’issue de celle-ci dans l'intérêt de tous ;

► Par conséquent, ne constitue pas une charge excessive pour le propriétaire l'obligation de se plier à la discipline collective générale inhérente à toute procédure de sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaires, en faisant connaître sa position quant au sort de son bien, dans les conditions prévues par la loi et en jouissant des garanties procédurales qu'elle lui assure quant à la possibilité d'agir en revendication dans un délai de forclusion de courte durée mais qui ne court pas contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir.

Tel est le principe énoncé par la Chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt du 3 avril 2019 (Cass. com., 3 avril 2019, n° 18-11.247, FS-P+B+R N° Lexbase : A3144Y8X).

 

En l’espèce, une société a donné à bail une pelle hydraulique, pour une durée de 32 moi. Par un jugement du 25 février 2014, publié au BODACC le 25 mars 2014, un tribunal a mis en redressement judiciaire la locataire. Le 10 avril 2014, cette dernière a informé son assureur que la pelle hydraulique avait subi un sinistre à la suite de son immersion dans un étang. Par un jugement du 7 octobre 2014, le tribunal a prononcé la liquidation judiciaire de la locataire. Le 21 novembre 2014, la bailleresse a fait procéder à l'enlèvement de la pelle hydraulique dans l'étang et en a repris possession sans avoir exercé au préalable une action en revendication. Ayant vainement mis en demeure celle-ci de restituer la pelle au commissaire-priseur en vue de son adjudication, le liquidateur l’a assignée aux mêmes fins.

 

C’est dans ces circonstance que la cour d’appel a retenu que l'application des dispositions de l'article L. 624-9 du Code de commerce au contrat de location litigieux constitue une ingérence disproportionnée dans le droit de propriété de la bailleresse, a écarté l'application de ces dispositions au litige et rejeté la demande de restitution de la pelle hydraulique présentée par le liquidateur.

 

Elle retient qu’au cas d’espèce, l’inopposabilité du droit de propriété aux organes de la procédure collective porte une atteinte au droit de propriété de la bailleresse puisque celle-ci se retrouve définitivement privé du droit de jouir et de disposer de sa chose par la réalisation des actifs au stade de la liquidation. Or, il est établi qu’en avril 2014, la grue louée s’est retrouvée immergée dans un étang, ce qui a dégradé le moteur, et que le mandataire judiciaire ne justifie d’aucune démarche faite pour extraire le bien loué de l’étang et pour le réparer. En outre, pour les juges d’appel, les objectifs de permettre la sauvegarde de l’entreprise et le maintien de l’activité et de l’emploi ne sauraient justifier l’atteinte au droit de propriété du bailleur, et le seul objectif de permettre l’apurement du passif ne saurait constituer une cause d’utilité publique cependant qu’il est constant que le bien litigieux n’a pas été mentionné par le débiteur à l’inventaire prévu aux articles L. 622-6 (N° Lexbase : L2849IXS) et R. 622-4 (N° Lexbase : L6112I3R) du Code commerce. Enfin, ils retiennent que l’application des dispositions de l’article L. 624-9 du même code constituant une ingérence disproportionnée dans le droit de propriété de la bailleresse, celle-ci a pu valablement reprendre possession de son bien et que la demande de restitution formulée par le liquidateur, fondée exclusivement sur ces dispositions, doit être rejetée.

 

Saisie d’un pourvoi, la Cour de cassation, énonçant la solution précitée, censure l’arrêt d’appel au visa des articles 1er du premier protocole additionnel à la CESDH et L. 624-9 du Code de commerce (cf. l’Ouvrage «Entreprises en difficulté» N° Lexbase : E4309EYA).

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