Le Quotidien du 10 janvier 2019 : Protection sociale

[Brèves] Prise en compte du comportement du demandeur d’emploi dans l’accomplissement de ses obligations pour qualifier la carence fautive de Pôle emploi

Réf. : CE, 1° et 4° ch.-r., 28 décembre 2018, n° 411846, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A8472YR9)

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[Brèves] Prise en compte du comportement du demandeur d’emploi dans l’accomplissement de ses obligations pour qualifier la carence fautive de Pôle emploi. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/49295150-0
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par Charlotte Moronval

le 09 Janvier 2019

► L'issue du litige opposant un salarié qui avait travaillé en dernier lieu à Gennevilliers et adhéré au syndicat, à Pôle emploi, mettant en cause les défaillances du service public de l'emploi, est de nature à léser de façon suffisamment directe les intérêts du syndicat local CGT des chômeurs et précaires de Gennevilliers-Villeneuve-Asnières au vu de son objet social ;

 

Si tout traité ou accord en vigueur lie les parties et doit être exécuté par elles de bonne foi, ses stipulations ne peuvent toutefois être utilement invoquées à l'appui d'une demande tendant à la mise en cause de la responsabilité de l'administration que si ce traité ou cet accord remplit les conditions posées à son application dans l'ordre juridique interne par l'article 55 de la Constitution (N° Lexbase : L1320A9R) et crée des droits dont les particuliers peuvent directement se prévaloir, ce qui n’est pas le cas des stipulations de l'article 6, paragraphe 1, du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et de l'article 1er de la Charte sociale européenne, qui sont dépourvues d'effet direct ; dès lors, le tribunal n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que M. A. ne pouvait utilement les invoquer à l'appui d’une demande d'indemnisation fondée sur leur méconnaissance par Pôle emploi ; d’autre part, un salarié ne peut se prévaloir de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 24 juin 1793, qui n'est pas en vigueur, non plus que de la circulaire du délégué général à l'emploi et à la formation professionnelle n° 2008/18 du 5 novembre 2008, relative à la mise en œuvre du projet personnalisé d'accès à l'emploi et à l'offre raisonnable d'emploi (N° Lexbase : L8528IBH) qui ne saurait par elle-même créer aucune obligation à l'égard de Pôle emploi, ne procédant pas des lois et règlements ;

 

Il incombe à Pôle emploi, au titre de ses missions de placement et d'accompagnement des demandeurs d'emploi par lesquelles il contribue au service public de l'emploi, de mettre en œuvre un accompagnement personnalisé de chaque demandeur d'emploi pour l'aider à retrouver un emploi, précisé au moyen du projet personnalisé d'accès à l'emploi, en tenant compte de ses besoins, déterminés notamment en fonction de sa formation et de son expérience professionnelle, de l'autonomie dont il dispose dans sa recherche et de la durée qui s'est écoulée depuis son dernier emploi, ainsi que des demandes qu'il exprime ; dès lors, les carences de Pôle emploi, dans l'exercice de ces missions, sont susceptibles de constituer des fautes de nature à engager sa responsabilité mais il appartient toutefois au juge saisi d'une demande d'indemnisation du préjudice qu'un demandeur d'emploi soutient avoir subi du fait de ces défaillances de tenir compte, le cas échéant, du comportement de l'intéressé et, en particulier, de la manière dont il a lui-même satisfait aux obligations qui lui incombent.

 

Telle est la solution retenue par le Conseil d’Etat dans un arrêt rendu le 28 décembre 2018 (CE, 1° et 4° ch.-r., 28 décembre 2018, n° 411846, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A8472YR9).

 

Dans cette affaire, M. A., inscrit sur la liste des demandeurs d'emploi, a demandé à Pôle emploi de l'indemniser à hauteur de 100 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait des défaillances de Pôle emploi dans sa mission d'accompagnement. Par un jugement du 19 mai 2015, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de Pôle emploi à lui verser cette somme. M. A. et le syndicat local CGT des chômeurs et précaires de Gennevilliers-Villeneuve-Asnières se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 13 février 2017 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé contre ce jugement.

 

Enonçant la solution précitée, le Conseil d’Etat décide d’annuler l’arrêt de la cour d’appel seulement en ce qui concerne la recevabilité de l'intervention du syndicat local CGT des chômeurs et précaires de Gennevilliers-Villeneuve-Asnières. Par contre, en ce qui concerne la responsabilité pour faute de Pôle emploi, il relève que l’absence de suivi entre les mois de septembre 2009 et septembre 2010 constitue, dans les circonstances de l'espèce, un manquement fautif de Pôle emploi à sa mission d'accompagnement des demandeurs d'emploi et, en particulier, à l'obligation d'actualisation trimestrielle du projet personnalisé d'accès à l'emploi qu'imposait l'article R. 5411-14 du Code du travail (N° Lexbase : L6236IBL), dans sa rédaction alors en vigueur, de nature à engager sa responsabilité, sans qu'il puisse faire valoir pour s'en exonérer que cet article a ultérieurement été modifié pour tenir compte de l'augmentation de plus de 58 % du nombre de personnes inscrites sur les listes de demandeurs d'emploi entre 2009 et 2015. Toutefois, l'intéressé s'est abstenu, au cours de la période litigieuse, de procéder à l'actualisation mensuelle de son inscription, qui lui incombait en application de l'article L. 5411-2 du Code du travail (N° Lexbase : L2688H9G), et n'a pas sollicité son conseiller au cours de cette période, ni effectué de démarches aux fins de mise à jour de son projet personnalisé d'accès à l'emploi. Compte tenu tant de l'accompagnement dont M. A. a bénéficié au cours de ses premiers mois de recherche d'emploi, que de son comportement au cours de la période considérée ainsi que de l'autonomie dont il était en mesure de faire preuve au vu de ses qualifications et de son parcours professionnel passé, le tribunal n'a pas donné aux faits de l'espèce une qualification juridique erronée en jugeant que les préjudices invoqués par M. A., du fait d'une perte de chance de retrouver un emploi, n'étaient pas la conséquence directe du manquement fautif de Pôle emploi.

D'autre part, M. A., après avoir informé Pôle emploi en septembre 2010 de son projet de créer une entreprise, a bénéficié, en dépit de difficultés rencontrées pour obtenir les entretiens qu'il sollicitait avec son conseiller et d'une insuffisante actualisation de son projet personnalisé d'accès à l'emploi, de diverses prestations d'accompagnement. Eu égard aux compétences et à l'expérience de M. A, ainsi qu'au projet qu'il avait formé, le tribunal administratif de Paris n'a pas non plus inexactement qualifié les faits de l'espèce en jugeant que Pôle emploi ne pouvait se voir reprocher, sur cette période, une carence fautive.

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