Le Quotidien du 10 décembre 2018 : Responsabilité

[Brèves] Responsabilité du fait des produits défectueux : fait du tiers et caractère sérieusement contestable de l’obligation des fabricants

Réf. : Cass. civ. 1, 28 novembre 2018, n° 17-14.356, FS-P+B (N° Lexbase : A9319YNH)

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N6660BXX

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[Brèves] Responsabilité du fait des produits défectueux : fait du tiers et caractère sérieusement contestable de l’obligation des fabricants. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/48927401-breves-responsabilite-du-fait-des-produits-defectueux-fait-du-tiers-et-caractere-serieusement-contes
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par June Perot

le 05 Décembre 2018

► Le producteur est responsable de plein droit du dommage causé par un défaut de son produit et cette responsabilité du producteur envers la victime n’est pas réduite par le fait d’un tiers ayant concouru à la réalisation du dommage.

 

Telle est la solution d’un arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation rendu le 28 novembre 2018 (Cass. civ. 1, 28 novembre 2018, n° 17-14.356, FS-P+B N° Lexbase : A9319YNH ; sur le fait du tiers, v. également : Cass. civ. 1, 21 juin 2005, n° 02-18.815, F-P+B N° Lexbase : A8029DI9).

 

Dans cette affaire, un aéronef de type Airbus 320, construit en 2008 et transportant, pour le compte d’une compagnie aérienne, cent-cinquante-cinq passagers et sept membres d'équipage, s'est abîmé en mer, provoquant la mort de l'ensemble des personnes présentes à son bord. Les proches des victimes ont assigné en référé, sur le fondement de l'article 809, alinéa 2, du Code de procédure civile (N° Lexbase : L0696H4K), le fabricant de l'aéronef et le fabricant du module électronique RTLU équipant l'aéronef accidenté, en paiement d'indemnités provisionnelles.

 

En cause d’appel, pour dire que l’obligation des fabricants à indemniser les demandeurs est sérieusement contestable, après avoir relevé que la simple implication d'un composant dans la réalisation du dommage est insuffisante, dès lors que doivent être également appréciées la rigueur et la qualité des opérations de maintenance de l'appareil, lesquelles incombent aux compagnies aériennes et non aux fabricants, l'arrêt retient qu'il résulte du rapport d'enquête que le module électronique RTLU présentait des fêlures sur les soudures à la surface des deux canaux et qu'il est établi que ce sont des dégradations qui ont pu générer des pertes de continuité électrique menant à la panne de cet élément. Les juges ont ajouté qu’il est également acquis que le dysfonctionnement du module RTLU est le premier facteur dans le temps ayant pu contribuer à l'accident et que, lors du vol, ce même défaut a été signalé à quatre reprises à l'équipage. L’arrêt considère par ailleurs que l'action de l'équipage ayant suivi le quatrième message signalant ce dysfonctionnement s'était révélée inadaptée et non conforme à la procédure prescrite en pareil cas, provoquant le désengagement du pilote automatique, puis un enchaînement de faits à l'origine du décrochage de l'appareil et de l'accident. Il constate que l'appareil avait connu à vingt-trois reprises, au cours de l'année 2014, des dysfonctionnements de modules du même type que les quatre survenus lors du vol, sans que la maintenance observe la procédure à suivre en cas de pannes réitérées.

 

Le rapport technique relève que, dans cette hypothèse, le module RTLU doit être remplacé, ce qui n'a pas été le cas pour l'avion litigieux. Enfin, l’arrêt constate que le simple fait que le fabricant ait amélioré le module RTLU depuis 1993 et à deux reprises avant la construction de l'avion, lequel était équipé du module ainsi modifié, ne permet pas de considérer que cette société avait connaissance d'une absence de fiabilité de cet élément.

 

A tort selon la Haute juridiction qui énonce qu’en statuant ainsi, par des motifs fondés sur le fait du tiers ayant concouru à la réalisation d'un dommage et sur le défaut de connaissance, par les producteurs de l'avion et du module litigieux, de l'absence de fiabilité de ce dernier, comme tels impropres à caractériser l'absence d'une obligation non sérieusement contestable à la charge de ces producteurs, alors qu'elle avait constaté un défaut du module, la cour d'appel a violé les articles 1386-1 (N° Lexbase : L1494ABX) et 1386-14 (N° Lexbase : L1507ABG), devenus 1245 (N° Lexbase : L0945KZZ) et 1245-13 (N° Lexbase : L0633KZH) du Code civil, ensemble l'article 809, alinéa 2, du Code de procédure civile (cf. l’Ouvrage «Responsabilité civile», La mise en oeuvre de la responsabilité du fait des produits défectueux N° Lexbase : E3532EUD).

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