Réf. : CA Paris, Pôle 1, 8ème ch., 13 juillet 2018, n° 17/20787 (N° Lexbase : A8980XXU)
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N5181BX8
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par Vincent Téchené
le 25 Juillet 2018
Une société justifiant de la licéité de son réseau de distribution sélective de produits de luxe, la violation de ce réseau par une marketplace non agréée est constitutive d’un trouble manifestement illicite dont la société peut exiger la cessation. Tel est en substance le sens d’un arrêt rendu par la cour d’appel de Paris le 13 juillet 2018 (CA Paris, Pôle 1, 8ème ch., 13 juillet 2018, n° 17/20787 N° Lexbase : A8980XXU) sur renvoi après cassation (Cass. com., 13 septembre 2017, n° 16-15.067, F-D N° Lexbase : A0706WSX ; lire N° Lexbase : N0575BXL).
En l’espèce, une société titulaire d’une marque haut de gamme de cosmétiques française, commercialise ses produits au travers d’un réseau de distribution sélective de pharmacies agrées, en France et en Europe. Pour la distribution sur internet des produits, il est prévu que «seul un distributeur agréé disposant d’un point de vente physique en respectant l’ensemble des critères de sélectivité sera en droit de vendre en ligne les produits [X] sur son site internet». Cette société, ayant constaté la violation de son réseau de distribution sélective par une plateforme, a saisi le juge des référés pour lui voir ordonner la cessation de la vente de ses produits.
La cour d’appel de Paris rappelle tout d’abord qu’il résulte de la jurisprudence de la CJUE (CJUE, 6 décembre 2017, aff. C-230/16 N° Lexbase : A5558W4M) qu'un système de distribution sélective de produits de luxe visant, à titre principal, à préserver l'image de luxe de ces produits est conforme à cette disposition, pour autant que le choix des revendeurs s'opère en fonction de critères objectifs de caractère qualitatif, fixés d'une manière uniforme à l'égard de tous les revendeurs potentiels et appliqués de façon non discriminatoire, et que les critères définis n'aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire.
Après avoir constaté que les produits en cause correspondent à des produits de luxe, la cour d’appel vérifie si l'interdiction faite par le fournisseur aux pharmaciens de son réseau de recourir de façon visible à des plateformes tierces pour la vente sur internet de ses produits concernés est proportionnée au regard de l'objectif poursuivi, c'est-à-dire si une telle interdiction est appropriée pour préserver l'image de luxe de ces produits et si elle ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif. Elle relève que les contrats de vente par internet souscrits entre le fournisseur et les pharmaciens du réseau prévoient que le premier fournit à ces derniers un «webpack» comprenant des photographies et textes des produits qui permettent une valorisation de ceux-ci. Or, certains de ses produits ont été mis en vente par le truchement de la plateforme litigieuse alors qu'ils étaient supposés être retirés de la vente. En outre, propose la vente de ses produits est présentée aux côtés de produits qui n'ont aucun rapport avec ceux-ci, tels que des alarmes-incendie ou des caméras de vidéo-surveillance. De telles conditions de présentation sont de nature à porter atteinte à l'image de luxe que le fournisseur peut légitimement vouloir protéger. Il est dès lors établi que le refus de voir ses produits être commercialisés par la marketplace est proportionné avec son objectif de préserver son image de marque.
En conséquence, les contrats passés entre le fournisseur et les pharmaciens de son réseau ne restreignent pas la concurrence au sens de l'article 101, § 1, du TFUE (N° Lexbase : L2398IPI).
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