Une loi étrangère désignée par la règle de conflit qui ignore la réserve héréditaire n'est pas en soi contraire à l'ordre public international français et ne peut être écartée que si son application concrète, au cas d'espèce, conduit à une situation incompatible avec les principes du droit français considérés comme essentiels. Tel est l'enseignement délivré par la première chambre civile de la Cour de cassation, aux termes de deux arrêts rendus le 27 septembre 2017 (Cass. civ. 1, 27 septembre 2017, n° 16-13.151
N° Lexbase : A1718WTS, et n° 16-17.198
N° Lexbase : A1719WTT, FS-P+B+R+I).
La Cour suprême approuve ainsi la cour d'appel de Paris qui, après avoir énoncé que la loi normalement applicable à la succession était celle de l'Etat de Californie, qui ne connaît pas la réserve héréditaire, avait relevé, dans la première espèce (CA Paris, 16 décembre 2015, Pôle 3, 1ère ch., 16 décembre 2015, n° 13/17078
N° Lexbase : A3901NZI), qu'il n'était pas soutenu que l'application de cette loi laisserait l'un ou l'autre des consorts X, tous majeurs au jour du décès de leur père, dans une situation de précarité économique ou de besoin, que le défunt résidait depuis presque trente ans en Californie, où étaient nés ses trois derniers enfants, et que tout son patrimoine immobilier et une grande partie de son patrimoine mobilier étaient situés aux Etats-Unis ; aussi, selon la Cour suprême, la cour d'appel en avait exactement déduit que la loi californienne ayant permis au défunt de disposer de tous ses biens en faveur d'un
trust bénéficiant à son épouse, mère de leurs deux filles alors mineures, sans en réserver une part à ses autres enfants, ne heurtait pas l'ordre public international français.
De la même manière, dans la deuxième espèce (CA Paris, Pôle 3, 1ère ch., 11 mai 2016, n° 14/26247
N° Lexbase : A8687RN3), elle approuve les juges d'appel parisiens qui, après avoir relevé que le dernier domicile du défunt était situé dans l'Etat de Californie, que ses unions, à compter de 1965, avaient été contractées aux Etats-Unis, où son installation était ancienne et durable et, que les parties ne soutenaient pas se trouver dans une situation de précarité économique ou de besoin, en avaient exactement déduit qu'il n'y avait pas lieu d'écarter la loi californienne au profit de la loi française.
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