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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la publication
le 27 Mars 2014
C'est un peu Noël avant Noël ; un cadeau de la part des Hauts magistrats : voilà donc notre chère "Equipe de France" à l'abri des intérêts particuliers puisqu'elle est la propriété de tous -via une fédération sportive quelconque s'entend-. C'est un peu une part de souveraineté populaire, certes déléguée à une association dont les membres ne sont absolument pas élus par les Français, mais une part de souveraineté populaire retrouvée tout de même. Bon d'accord, s'il y a autant d'entraîneurs en France que de supporters au café du commerce, ceux en charge de "promouvoir" le beau nom d''Equipe de France' sont loin d'être populaires, sont élus par leurs pairs et chargés, essentiellement, de remplir les caisses de leurs associations "loi 1901" respectives. Ah ! L'on trouve toujours quelques fidèles pour contester un pape élu sous la voûte de Michel-Ange par une équipe cardinalice, alors pourquoi cela différerait-il pour le Sport, autre religion mêmes moeurs ?
Parce que l'"Equipe de France", tombée dans le domaine public, appartient au patrimoine collectif et qu'elle est, finalement, le dernier ou trop rare témoignage de l'esprit d'équipe de la France. Une équipe, c'est un groupe de personnes travaillant à une tâche commune, nous dit Littré ; c'est un groupe de joueurs, de sportifs formant un ensemble. Et, avoir l'esprit d'équipe, c'est être solidaire... "C'est des mecs qui sont une équipe, ils ont un esprit ! Alors, ils partagent !" disait Coluche. Et bien soit ! Une seule équipe, un même et seul esprit, un seul état d'esprit. Et, c'est de cela qu'il s'agit, lorsque la loi confie aux fédérations sportives le soin d'utiliser l'appellation "Equipe de France" dans leurs statuts, contrats, documents ou publicités. L'article L. 131-17 du Code des sports se moque éperdument de la couleur du maillot des joueurs, de celle de l'emblème gallinacé ; il délègue, par l'exercice de la souveraineté nationale, une parcelle de cet esprit d'équipe de la France à ses équipes sportives afin qu'elles véhiculent et promeuvent les valeurs constitutives de la Nation.
"Je ne joue pas contre une équipe en particulier. Je joue pour me battre contre l'idée de perdre" disait, hier, le "dieu de Manchester", Eric Cantona : de l'esprit de se battre contre ses démons et ses faiblesses, plus que contre les autres... Aujourd'hui, le joueur n'est plus, mais "l'artiste" lui a succédé pour demander, à tous, de retirer leur "magot" des banques ; pour que le système bancaire s'effondre, lui qui est à l'origine de tous les maux... et de l'esprit d'entreprise du reste... Alors, avec lui, s'effondrerait l'économie réelle : est-ce cela l'esprit de solidarité, l'esprit de lutte contre la théorie du bouc émissaire, l'esprit d'équipe ? Nous revoilà en 1908, lorsqu'il y avait autant d'équipes de France de football que de fédérations et intérêts particuliers -Equipe de France USFSA, Equipe de France CFI, Equipe de France FSAPF, Equipe de France indépendants-. Qui jouera, demain, le rôle de ce Comité français interfédéral qui mit tout le monde d'accord pour afficher une unité sans faille, pour promouvoir la nec plus ultra des équipes : l'Equipe nationale ? -"France" ou "Nationale", le débat ne date pas d'hier !-.
Non, l'Equipe de France n'est décidément pas une marque ; elle est un sacerdoce et, à ce titre, requiert unité, discipline, abnégation et solidarité... Et ceux qui ne veulent pas s'y résoudre doivent en être pour leurs frais, pour se contenter d'un autre maillot bleu outre-mer. C'est pourquoi les joueurs de l'Equipe de France n'ont pas besoin d'être les meilleurs pour faire vibrer les coeurs ; les Français se contenteront de l'excellence de valeurs autres que marchandes, à l'image des Kopa ou autres "verts" stéphanois... et quels que soient les remaniements. Mais encore fallait-il, au préalable, rendre à César ce qui appartient à César : l'Equipe de France aux Français. Merci Mesdames, Messieurs de la Haute juridiction.
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