Dans un arrêt du 7 juillet 2009, la Chambre commerciale de la Cour de cassation s'est prononcée sur les pratiques anticoncurrentielles de deux cimentiers (Cass. com., 7 juillet 2009, n° 08-15.609, FS-P+B
N° Lexbase : A7342EIR). Ces derniers se seraient entendus avec leurs principaux distributeurs en Corse, dans le but de se réserver l'approvisionnement de l'île et d'entraver les importations de ciment, en provenance de Grèce et d'Italie, notamment. En effet, il n'existe pas de cimenteries en Corse : la majeure partie du ciment qui y est distribuée est produite dans les régions de Marseille et de Nice et doit être acheminé par voie maritime. Par une décision n° 07-D-08 du 12 mars 2007 (
N° Lexbase : X8268ADL), le Conseil de la concurrence avait sanctionné deux accords qui organisaient l'approvisionnement exclusif de l'île en ciments L. et V., empêchant les concurrents, notamment grecs et italiens, de se développer sur le marché. Il avait également sanctionné une pratique de remises récompensant les négociants qui n'achetaient pas de ciments d'importation ainsi qu'une entente particulière entre deux négociants. Dans un arrêt du 6 mai 2008, la cour d'appel de Paris avait, quant à elle, confirmé l'abus de position dominante collective (CA Paris, 1ère ch., sect. H, 6 mai 2008, n° 2007/06172
N° Lexbase : A4499D87). Elle avait retenu qu'en raison des liens qui unissaient les deux cimentiers, ces deux sociétés se présentaient sur le marché de gros de l'approvisionnement de la Corse en ciment comme une entité collective pratiquant une stratégie commune. Cependant, cette solution retenue par les juges du fond n'a pas été totalement suivie. La Cour de cassation a bien confirmé qu'est illicite la clause par laquelle des cimentiers disposant d'une exclusivité d'exploitation de silos, imposaient à leurs acheteurs négociants une exclusivité d'approvisionnement pour toutes les gammes des catégories de ciment identiques à ceux transitant ou ayant transité par les silos du port de Bastia : une telle clause "
induit une restriction de la liberté d'approvisionnement des négociants, majeure tant par son champ que par sa durée, a un objet anticoncurrentiel [...]
en imposant aux négociants de Haute-Corse de s'approvisionner exclusivement auprès des cimentiers Lafarge et Vicat, cette clause a notamment eu pour effet de réduire les débouchés des cimentiers grecs et italiens malgré les prix nettement inférieurs du ciment étranger". En revanche, la Haute juridiction a rejeté la qualification d'abus de position dominante collective. Selon elle, la cour d'appel de Paris aurait dû rechercher si, "
en l'absence d'ententes conclues avec leurs clients, les sociétés Lafarge et Vicat auraient disposé en commun de la possibilité de se comporter sur le marché en cause, dans une mesure appréciable, de façon indépendante vis-à-vis de leurs concurrents, de leurs clients et des consommateurs".
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable