Réf. : Loi n° 2009-974 du 10 août 2009, réaffirmant le principe du repos dominical et visant à adapter les dérogations à ce principe dans les communes et zones touristiques et thermales ainsi que dans certaines grandes agglomérations (N° Lexbase : L6524IED)
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par Sébastien Tournaux, Maître de conférences à l'Université Montesquieu - Bordeaux IV
le 07 Octobre 2010
L'article 2-I de la loi du 10 août 2009 modifie le premier alinéa de l'article L. 3132-3 du Code du travail (N° Lexbase : L6342IEM). Enrichissant la phrase originelle de ce texte qui prévoyait que le repos hebdomadaire soit, par principe, pris le dimanche, le législateur ajoute une incise aux termes de laquelle cette règle est fixée "dans l'intérêt des salariés".
A la première lecture, ces quelques mots sont bien difficiles à analyser. Il paraît, en effet, évident que la fixation du repos hebdomadaire le dimanche n'est pas une règle prise dans l'intérêt de l'employeur, voire de l'intérêt général. Au contraire, il s'agit bien de permettre l'épanouissement de la vie personnelle du salarié ce qui, malgré les interconnexions entre vie privée et vie professionnelle, ne peut guère se produire que durant ses temps de repos. Le dimanche, journée de repos du plus grand nombre, sera toujours celui des réunions familiales, des repas entre amis, de l'investissement associatif.
Au-delà de ces considérations finalement superficielles, se pose rapidement la question de l'intérêt juridique d'un tel rajout.
Le rapport rendu au Parlement par M. Mallié, au nom de la Commission des affaires culturelles familiales et sociales, nous apprend qu'il aurait été procédé à cet ajout pour prendre en compte la jurisprudence constante de la Cour de cassation (1). Pour autant, une recherche minutieuse des arrêts rendus par la Haute juridiction relatifs au repos dominical n'apporte pas la preuve de son attachement particulier à lier repos dominical et intérêt des salariés. Au contraire, il semblerait que l'argument ait toujours été farouchement rejeté. Certains employeurs, dirigeants de grosses structures commerciales bravant l'interdiction du travail du dimanche, ont, en effet, tenté de faire valoir cet argument pour éviter une condamnation pour concurrence déloyale dans des affaires engagées par des unions de petits commerçants concurrents. Ces actions en concurrence déloyale sont accueillies par la Cour depuis un arrêt de l'Assemblée plénière rendu en 1993 (2). Les contrevenants ont pourtant continué d'invoquer l'exclusif intérêt des salariés attaché à la règle pour tenter de démontrer l'absence de préjudice subi par les concurrents du fait de sa violation (3).
Bien malin qui pourra dire s'il y avait, dans l'esprit du législateur, une volonté d'infléchir cette jurisprudence. Toujours est-il que cette modification de l'article L. 3132-3 ne devrait pas aboutir à un tel résultat. En effet, la Chambre sociale de la Cour de cassation ne s'est pas contentée de rejeter cet argument dans les affaires qui lui étaient présentées, elle l'a tout bonnement ignoré en ne répondant pas sur le fondement de "l'intérêt des salariés" mais seulement sur celui de la rupture d'égalité avec les commerçants respectant les dispositions légales (4). En outre, on se souviendra que la Cour de cassation a toujours accepté que le principe de la fixation du repos hebdomadaire le dimanche constitue, au moins implicitement, une mesure prise dans l'intérêt des salariés. En effet, elle estimait déjà, dans les années 1980, que les syndicats, dans leur rôle de défense des intérêts de la profession, puissent obtenir l'indemnisation du préjudice subi du fait de la violation des règles relatives au repos hebdomadaire qu'elle considérait alors comme relevant de "l'intérêt de l'ensemble des travailleurs" (5).
L'incise ajoutée nous paraît finalement n'avoir qu'une portée bien limitée. Il en va autrement de la modification des règles d'indemnisation des salariés exceptionnellement privés du repos dominical.
Sans qu'il faille y voir une quelconque portée symbolique, l'article premier de la loi modifie sensiblement le premier alinéa de l'article L. 3132-27 du Code du travail (N° Lexbase : L6323IEW) et, par là-même, la manière dont sera indemnisé le travail du dimanche. Il convient, dès à présent, de préciser que cette modification ne concerne qu'une seule exception au principe du repos dominical, celle permettant au maire d'une commune d'accorder à chaque commerce de détail cinq dimanches au cours desquels le repos est supprimé.
Jusqu'à présent, les salariés concernés bénéficiaient d'une majoration de salaire égale à 1/30ième de leur salaire mensuel, majoration à laquelle s'ajoutait un repos compensateur dont la durée n'était pas précisée par le texte. Désormais, les salariés percevront un salaire double pour le dimanche travaillé et un repos compensateur d'une durée équivalente au temps travaillé le dimanche.
S'il est évident qu'une telle modification est favorable aux salariés, on ne peut qu'être interpellé par la différence de traitement mise en oeuvre entre les différents types de dérogations.
Une première inégalité concerne les salariés placés dans une situation de dérogation permanente au principe du repos dominical par application des articles L. 3132-12 (N° Lexbase : L0466H97) et L. 3132-13 du Code du travail (N° Lexbase : L6343IEN) qui ne perçoivent aucune compensation de droit pour leur travail dominical, même s'il faut relever que de nombreuses conventions collectives de branche des secteurs concernés aménagent quelques compensations.
Notons, ensuite, une deuxième situation d'inégalité s'agissant des autres dérogations temporaires qui ne sont pas placées sous le même régime que celui de l'exception accordée aux maires.
La dérogation, issue de l'article L. 3132-20 (N° Lexbase : L0473H9E), accordée par le préfet en cas de préjudice au public ou de compromission du fonctionnement normal de l'établissement et la dérogation, issue du nouvel article L. 3132-25-1 (N° Lexbase : L6345IEQ), accordée par l'autorité administrative aux commerces de détail placés dans des périmètres urbains de consommation exceptionnelle (PUCE) (6) sont placés dans une situation différente. Les salariés privés de repos dominical en raison de ces dérogations bénéficieront de compensations déterminées soit par accord collectif d'entreprise, soit par décision unilatérale de l'employeur approuvée par référendum. Dans cette dernière hypothèse, la décision unilatérale ne peut descendre en-deçà d'un plancher constitué du doublement du salaire pour la journée travaillée et d'un repos compensateur dont, cette fois, la durée n'est pas précisée.
Aucun plancher n'a, en revanche, été fixé par le législateur dans l'hypothèse de la négociation d'un accord collectif. La seule certitude est que l'accord doit comporter des contreparties. Le nouvel article L. 3132-25-3 (N° Lexbase : L6301IE4) prévoit également l'hypothèse d'une substitution d'un accord collectif conclu postérieurement à une mise en place de la dérogation par décision unilatérale de l'employeur. Conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation en ce domaine, le texte prévoit que l'accord collectif se substitue à la décision unilatérale (7). Aucune garantie n'étant offerte par le texte quant au maintien du niveau des contreparties issues de la décision unilatérale, il y a tout lieu de penser que, là encore, les contreparties du nouvel accord collectif pourront figurer en-deçà du doublement du salaire journalier.
Enfin, une troisième inégalité, certainement la plus criante de ce nouveau régime des dérogations au principe du repos dominical, consiste dans l'absence d'indemnisation pour les salariés privés de repos dominical sur le fondement de l'article L. 3132-25 (N° Lexbase : L6302IE7), c'est-à-dire des salariés travaillant dans des communes touristiques ou thermales (8). Sous réserve, comme pour les dérogations permanentes, de négociation collective de branche étendue introduisant quelque compensation, les salariés de ces commerces travailleront le dimanche sans aucune contrepartie.
Il y a, pour tout dire, un certain cynisme à intituler une loi "loi réaffirmant le principe du repos dominical" et à maintenir, dans le même temps, de telles inégalités entre salariés selon la dérogation au principe dont ils relèvent. Qu'un principe comporte des exceptions, cela n'est pas critiquable et peut d'ailleurs même être sain pour la cohérence des hypothèses composant le principe (9). En revanche, que les exceptions au principe n'apportent pas aux salariés des garanties similaires est difficilement tolérable, en particulier à l'heure de l'extension du principe d'égalité de traitement ou du principe "à travail égal, salaire égal" (10). En réalité, faute de contrepartie à certaines dérogations, le principe du repos dominical n'existe pas. Espérons, comme certains auteurs, qu'une harmonisation par le haut des contreparties au travail dominical pourra voir le jour (11).
L'inégalité est d'autant plus criante qu'elle n'apparaît pas seulement au sujet des contreparties au travail du dimanche, mais qu'elle concerne également la recherche du consentement du salarié au travail dominical
Signalons-le immédiatement, les exigences nouvelles relatives au consentement du salarié au travail du dimanche sont limitées aux seules dérogations temporaires issues des articles L. 3132-20 et L. 3132-25-1 du Code du travail. Les dérogations permanentes, les dérogations pour les zones touristiques et les dérogations accordées par le maire cinq fois l'année ne sont pas concernées (12). La seule disposition protectrice du salarié qui semble être accordée dans tous les cas de figure est celle introduite au nouvel article L. 3132-3-1 du Code du travail (N° Lexbase : L6306IEB) qui dispose que "le refus d'un demandeur d'emploi d'accepter une offre d'emploi impliquant de travailler le dimanche ne constitue pas un motif de radiation de la liste des demandeurs d'emploi".
La protection du consentement du salarié est, en revanche, préservée pour les dérogations préfectorales de l'article L. 3132-20 et les dérogations dans les PUCE de l'article L. 3132-25-1. Plusieurs dispositifs sont mis en oeuvre pour assurer cette protection par le nouvel article L. 3132-25-4 du Code du travail (N° Lexbase : L6308IED).
D'abord, "seuls les salariés volontaires ayant donné leur accord par écrit à leur employeur" pourront travailler le dimanche. Il s'agit d'une véritable renonciation au principe du repos dominical, renonciation qui n'était jusqu'ici pas permise par la Cour de cassation (13). Sa formalisation par écrit est la bienvenue tant on estime le plus souvent que toute renonciation doit être entourée tant de garanties de fond que de garanties de forme (14).
Outre cette garantie de forme, des garanties de fond sont également mises en place, de manière, il faut bien le reconnaître, bien désordonnée. L'article L. 3132-25-4 prévoit en effet qu'une entreprise "ne peut prendre en considération le refus d'une personne de travailler le dimanche pour refuser de l'embaucher", que le salarié "qui refuse de travailler le dimanche ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail" et, enfin, que ce refus "ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement ".
N'aurait-il pas été plus simple d'ajouter à la liste de l'article L. 1132-1 du Code du travail (N° Lexbase : L6053IAG) un nouveau motif illicite constitué du refus de travailler le dimanche ? La réponse est bien entendu affirmative, mais elle aurait alors impliqué que l'ensemble des actes prohibés pour un motif discriminatoire soient concernés. La rédaction du texte ne paraît prohiber pour motif illicite que le refus d'embauche et les mesures prises dans le cadre de l'exécution du contrat de travail : rémunération, accès aux formations, mutations, etc.. Elle semble, en revanche, exclure les sanctions disciplinaires et le licenciement. Il est probable que le législateur n'ait pas souhaité instaurer une nouvelle hypothèse de nullité de licenciement et, subséquemment, de réintégration du salarié.
Cette manière de procéder dans la loi du 10 août 2009 nous paraît particulièrement contestable en ce qu'elle créée une sorte de gradation dans les motifs discriminatoires. Certains motifs comme l'âge, le sexe ou l'état de santé auraient des effets absolus en prohibant tout acte figurant dans la liste de l'article L. 1132-1. En revanche, d'autres motifs n'auraient que des effets relatifs, limités à certains actes. Il y aurait donc des motifs moins discriminatoires que d'autres...
Le texte prévoit, enfin, qu'un accord collectif "fixe les conditions dans lesquelles l'employeur prend en compte l'évolution de la situation personnelle des salariés privés de repos dominical". Si le contenu plus précis de l'accord sur ce point n'est pas détaillé, quelques indices sur la forme qu'il pourrait revêtir figurent quelques lignes plus loin, puisque le texte impose des obligations particulières à l'employeur qui aurait mis en place la dérogation par décision unilatérale. Ces obligations tiennent à s'enquérir annuellement auprès du salarié s'il souhaite arrêter de travailler le dimanche, s'il souhaite bénéficier d'une priorité pour retrouver un emploi identique ou équivalent sans activité dominicale dans le même établissement ou, à défaut, dans la même entreprise. Toujours en l'absence d'accord collectif, le salarié conserve la faculté de refuser de travailler trois dimanches par an à condition de respecter un délai de prévenance d'un mois. Malgré ces indices, comme pour l'accord collectif destiné à déterminer les contreparties dont bénéficient les salariés privés de repos dominical, la loi ne fixe aucune obligation minimale aux partenaires sociaux.
C'est dans ces trois points que tient le volet de réaffirmation du principe du repos dominical issu de la loi éponyme. Outre les contrastes qui en émanent et les arrières pensées que l'on devine, ce titre comporte une forte dose d'hypocrisie qui n'est qu'à peine atténuée par la suite du titre de la loi : l'adaptation des dérogations au principe du repos dominical.
II - L'extension sensible des exceptions au repos dominical
L'article 2-V de la loi du 10 août abroge l'article L. 3132-25 du Code du travail et le remplace par une suite de sept articles relatifs à la dérogation dans les zones touristiques et thermales, à la nouvelle dérogation dans les PUCE. Les autres dérogations permanentes ou provisoires sont maintenues, quoique parfois aménagées.
L'article L. 3132-25 du Code du travail, relatif aux dérogations temporaires dans les communes touristiques et thermales et dans les zones touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente, est, en partie, refondu par la loi.
La dérogation est sensiblement étendue. L'ancien texte limitait cette dérogation aux "établissements de vente au détail qui mettent à disposition du public des biens et des services destinés à faciliter son accueil ou ses activités de détente ou de loisirs d'ordre sportif, récréatif ou culturel", rédaction qui faisait encore difficulté il y a quelques mois (15). La condition a été sérieusement allégée, puisque peuvent désormais bénéficier de la dérogation, sans autre précision, les "établissements de vente au détail" ! Si le nouveau critère a le mérite de la simplicité, il devrait surtout accroître le nombre de commerces ouverts le dimanche dans ces zones touristiques sans malheureusement que les produits vendus n'aient de rapport avec l'activité touristique du lieu. La seule véritable limite, qui constitue d'ailleurs plus une incompatibilité qu'une limite, découle du nouvel article L. 3132-25-5 (N° Lexbase : L6293IES) qui exclut la possibilité de bénéficier de cette dérogation aux "commerces de détail alimentaire qui bénéficient des dispositions de l'article L. 3132-13" du Code du travail (16).
L'assouplissement ne s'arrête pas là puisque l'article dispose désormais que l'employeur peut donner le repos hebdomadaire par roulement "de droit". L'article R. 3132-17 (N° Lexbase : L9520H9H) imposait jusqu'alors aux commerçants d'obtenir une autorisation préfectorale, cela ne sera désormais plus le cas. A partir du moment où la zone dans laquelle se trouve le commerce sera située dans une commune classée comme touristique ou thermale ou dans une zone touristique d'affluence exceptionnelle (17), les employeurs pourront, sans procédure particulière, ni accord du salarié, supprimer le repos hebdomadaire.
Il est possible d'accepter l'idée que d'autres commerces de vente au détail puissent ouvrir le dimanche et non seuls ceux destinés à faciliter les activités de détente et de loisirs. Un quincaillier ou un magasin de jouets peuvent être utiles aux touristes d'une station balnéaire le dimanche. En revanche, la suppression ipso jure de l'autorisation préfectorale au profit d'une simple faculté de faire travailler ses salariés le dimanche de plein droit est hautement contestable, et ce pour au moins deux raisons. La première tient à ce qu'il n'existe désormais plus de garde-fous à l'ouverture du dimanche de ces commerces en zones touristiques, ni la limitation tenant aux produits vendus, ni la limitation tenant à l'autorisation au cas par cas. Tous les salariés du secteur du commerce de ces zones peuvent travailler le dimanche. La seconde tient à ce que, comme nous l'avons déjà souligné, ces salariés ne bénéficieront d'aucune contrepartie obligatoire pour travailler le dimanche et ne pourront refuser de travailler le dimanche sous peine de commettre une faute disciplinaire. Si l'on ajoute à cela que de nombreux salariés des zones touristiques sont des saisonniers dont la précarité de l'emploi et la piètre qualité des conditions de travail n'est plus à décrire, on comprendra notre réserve face à l'extension de cette dérogation.
Si elle est entourée de meilleures garanties, la création d'une nouvelle dérogation pour les périmètres urbains de consommation exceptionnelle n'est pas, elle non plus, exempte de toute critique.
L'article L. 3132-25-1 du Code du travail introduit une nouvelle dérogation au principe du repos dominical. Cette dérogation trouvera à s'appliquer dans les périmètres urbains de consommation exceptionnelle, définis comme des unités urbaines de plus d'un million d'habitants. L'unité urbaine était déjà utilisée par quelques articles du Code général des impôts et, surtout, du Code général des collectivités territoriales dont l'article R. 2334-7 (N° Lexbase : L1966G9P) renvoie à la définition établie par l'INSEE (18). Concrètement, ces zones devraient concerner Paris, Lyon, Marseille-Aix et Lille-Roubaix. Le choix du million d'habitants est assez arbitraire. Comment les commerçants des agglomérations toulousaine, bordelaise, nantaise ou strasbourgeoise pourraient ne pas ressentir un sentiment d'inégalité et revendiquer, rapidement, une extension de la dérogation à d'autres zones moins peuplées (19) ?
La liste exacte de ces unités urbaines sera déterminée par le préfet de région en application de l'article L. 3132-25-2 du Code du travail (N° Lexbase : L6321IET), après consultation de l'organe délibérant de la communauté de communes, de la communauté d'agglomération ou de la communauté urbaine, lorsqu'elles existent, sur le territoire desquelles est situé ce périmètre.
Dans ces zones, seuls certains commerces pourront bénéficier de la dérogation. La loi énonce que la dérogation sera applicable, sur autorisation administrative, aux "établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et des services dans un périmètre d'usage de consommation exceptionnel caractérisé par des habitudes de consommation dominicale, l'importance de la clientèle concernée et l'éloignement de celle-ci de ce périmètre". Si l'on pouvait se plaindre de la faible lisibilité de la définition désormais abandonnée des commerces pouvant ouvrir dans les zones touristiques avant la réforme (20), le moins que l'on puisse dire est que cette nouvelle délimitation pour les commerces placés dans des PUCE n'est pas plus explicite (21). Un regard jeté aux travaux parlementaires permet tout de même d'avoir une explication plus concrète de la signification de cette délimitation : la dérogation s'appliquerait, "autrement dit, dans les lieux où l'on a l'habitude de consommer le samedi et le dimanche, sur les sites où il existe des flux de clientèle importants ces jours-là". Dans quels lieux, jusqu'à présent, pouvait-on avoir des habitudes de consommation le dimanche, à l'exception bien entendu des zones touristiques de l'article L. 3132-25 ? Le nouveau texte donne, en réalité, la désagréable sensation de légitimer des pratiques illégales d'ouverture dominicale dans des centres commerciaux depuis suffisamment longtemps pour avoir généré des habitudes (22). Toujours est-il que la définition donnée ne concernera pas les commerces de détail alimentaire qui bénéficient des dispositions de l'article L. 3132-13, les deux dérogations étant incompatibles au titre de l'article L. 3132-25-5 du Code du travail.
Quant à l'autorisation administrative nécessaire à chaque établissement, elle ne pourra être délivrée qu'à la suite de la conclusion d'un accord collectif ou d'une décision unilatérale de l'employeur, approuvée par référendum d'entreprise (23). En outre, elle ne sera accordée que pour une durée limitée, après avis du conseil municipal, de la chambre de commerce et d'industrie, de la chambre des métiers et des syndicats d'employeurs et de salariés intéressés de la commune. La multiplication des avis, consultations et formalités préalables devrait être source de nombreuses erreurs si bien qu'il fait peu de doute que bien des autorisations préfectorales seront contestées devant les juridictions administratives.
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