La lettre juridique n°345 du 9 avril 2009 : Éditorial

Arbitrage et efficacité des clauses compromissoires : "on juge l'arbre à ses fruits" !

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Arbitrage et efficacité des clauses compromissoires : "on juge l'arbre à ses fruits" !. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/3211630-arbitrageetefficacitedesclausescompromissoiresionjugelarbreasesfruitsi
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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la publication

le 27 Mars 2014


"Ne jugez point, afin de n'être point jugés, car on vous jugera comme vous avez jugé, et l'on se servira pour vous de la mesure dont vous mesurez les autres".

A lire Saint Matthieu, il faudrait être inconscient pour accepter d'être juge, risquant par là-même le salut de son âme. Heureusement, "la mesure dont vous mesurez les autres" permet d'imposer la Justice, avec toute la sacralisation des principes d'impartialité, d'autonomie et, parfois même, d'équité nécessaire à son administration

Chacun se souvient de Saint Louis rendant la Justice sous un chêne ; l'image d'Epinal est lourde de sens : la Justice est l'apanage de l'Etat, elle doit être la plus accessible possible, et elle doit être marquée du sceau de la stabilité. Pour autant, qui se souvient que ce même Louis IX fut interpellé à plusieurs reprises afin d'arbitrer des conflits internationaux ? Il arbitra, ainsi, la succession du comté de Hainaut, par le Dit de Péronne du 24 septembre 1256, comme il arbitra le différend opposant le roi Henri III d'Angleterre à ses barons révoltés, par le Dit d'Amiens du 23 janvier 1264. Ainsi, au plus haut niveau de la liturgie juridique, il serait permis de faire appel à un tiers dont les qualités sont éminemment reconnues pour régler un différend juridique ? C'est tout le sens de l'arbitrage, de choisir un collège de juges aux fins de régler, tantôt en toute confidentialité, tantôt en toute autonomie, tantôt en toute équité, les différends de nature juridique.

Et, les quelques affaires décriées, comme dernièrement l'affaire "Tapie", ne doivent pas laisser penser à une justice privée de fondement juridique. Même l'amiable composition pour la recherche de l'équité requiert, le plus souvent, une motivation toute juridique. Les articles 1442 et suivants du Code de procédure civile, siège de la matière, marquent, d'ailleurs, l'intégration de l'arbitrage aux différents modes de règlement des litiges. Alternative juridictionnelle, et non judiciaire, l'arbitrage s'inscrit pleinement dans la Justice de chaque Etat, avec cette particularité de revêtir, peu ou prou, les mêmes traits quels que soient les Etats. "Le droit international est, pour le Etats, non seulement, un ensemble normatif, mais aussi un langage commun" écrivait Boutros Boutros-Ghali dans son Introduction du Livre de l'année - 1994. Une langue commune, ou communément choisie, des principes communs voire universels, tels sont les avantages majeurs d'un arbitrage, de naissance internationale, qui tend à se développer à titre de règlement interne des litiges, via une consécration progressive par les Cours suprêmes.

Et, Emmanuel Gaillard, Professeur de droit à l'Université Paris XII et Avocat responsable du département d'arbitrage international du cabinet Shearman & Sterling de revenir, cette semaine, sur l'ensemble de ces caractères majeurs de la procédure d'arbitrage.

"Qui juge lentement juge sûrement" écrivait Sophocle dans son Oedipe Roi. Malheureusement, le monde des affaires, puisque c'est celui qui est concerné au premier chef par l'arbitrage, exige un mode de règlement des différends rapide -les parties pouvant s'interdire d'interjeter appel en réformation-, autonome, et à forte compétence technique. Et cette rapidité est loin d'être incompatible avec le discernement "[...] principale fonction du juge, et [...] qualité nécessaire du jugement" comme nous l'enseigne Bossuet dans son Sermon sur la providence.

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